Guide sur les Syndromes associés aux ITS : Rectite
Ce guide fournit un aperçu de la prise en charge et du traitement empirique de la rectite associée aux infections transmissibles sexuellement (ITS). La rectite est l’inflammation de la muqueuse rectale qui ne s’étend pas à plus de 10 à 12 cm de la marge anale.
Sur cette page :
- Importance en santé publique
- Étiologie courante associée aux ITS
- Manifestations cliniques
- Tests diagnostiques
- Traitement empirique et prise en charge
- Suivi
- Déclaration et notification aux partenaires
- Références
Importance en santé publique
Les infections de l'anus et du rectum peuvent être transmises sexuellement par contact digito-anale et oro-anale, par des relations sexuelles anales réceptives et, chez les femmes, par la transmission trans-muqueuse de fluides génitauxNote de bas de page 1.
La rectite causée par les infections transmises sexuellement (ITS), y compris les infections entériques transmises sexuellement (IETS), affecte de manière disproportionnée les hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (gbHARSAH). Les ITS et IETS rectales peuvent augmenter le risque d’acquisition du VIHNote de bas de page 2.
Depuis les années 1970, une augmentation de la transmission et des éclosions de Shigella sonnei et de Shigella flexneri a été documentée parmi les réseaux sexuels de gbHARSAH, et les bactéries Shigella résistantes aux antibiotiques ont été incluses dans la liste de 2017 de l'Organisation mondiale de la santé des « agents pathogènes prioritaires » résistants aux antibiotiques qui constituent une menace grave pour la santé publiqueNote de bas de page 3Note de bas de page 4Note de bas de page 5Note de bas de page 6Note de bas de page 7.
Étiologie courante associée aux ITS
La rectite peut être causée par des agents infectieux. Les ITS associées à la rectite comprennent : Chlamydia trachomatis (CT) [génotypes lymphogranulomatose vénérienne (LGV) et non-LGV], Neisseria gonorrhoeae (GC), Treponema pallidum, le virus Herpes simplex type 1 ou type 2 (VHS-1 ou VHS-2) et le virus de la mpoxNote de bas de page 8Note de bas de page 9Note de bas de page 10.
Dans une étude menée auprès des hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (gbHARSAH) atteints de rectite, les agents étiologiques suivants ont été détectésNote de bas de page 11 :
- GC (20 %);
- VHS-1 et VHS-2 (13 %);
- CT (11 %);
- Infections mixtes (10 %, dont 3 % avec le VHS-1 et VHS-2);
- T. pallidum (syphilis) (1 %).
Les taux de syphilis infectieuse ont augmenté au Canada au cours des dernières années et des éclosions ont été déclarées dans la plupart des provinces et territoires depuis 2017. Envisagez un diagnostic de syphilis chez les personnes présentant une rectite.
La mpox devrait également être considérée comme une cause possible de la rectiteNote de bas de page 9Note de bas de page 10. Entre le 28 avril 2022 et le 29 septembre 2023, 1 515 cas de mpox ont été signalés au Canada, affectant de manière disproportionnée les hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommesNote de bas de page 16Note de bas de page 17Note de bas de page 18.
Des infections entériques peuvent également être contractées lors d'activités sexuelles oro-anales et, dans certains cas, digito-anales, et entraîner une rectocolite et une entériteNote de bas de page 8Note de bas de page 19. La rectocolite peut être associée à Entamoeba histolytica, à Campylobacter spp., à Salmonella spp. et à Shigella sppNote de bas de page 1Note de bas de page 8Note de bas de page 19. L'entérite peut être associée à une infection à Giardia lambliaNote de bas de page 8Note de bas de page 19. Au cours des dernières années, des éclosions d'espèces de Shigella ultrarésistante aux antibiotiques (Shigella UR) sont observées au sein des réseaux sexuels des gbHARSAH dans les pays à revenu élevéNote de bas de page 1Note de bas de page 2Note de bas de page 3Note de bas de page 4Note de bas de page 8Note de bas de page 19. Consultez un collègue expérimenté puisque le traitement et la prise en charge de la rectocolite et de l'entérite ne sont pas abordés dans ce guide.
Chez les personnes atteinte d’une infection à virus de l’immunodéficience humaine (VIH) avancée, envisagez le cryptosporidium, le microsporidium, le cytomégalovirus et d'autres agents infectieux opportunistes dans le diagnostic différentielNote de bas de page 1Note de bas de page 8.
Manifestations cliniques
Les symptômes et les signes de la rectite comprennent :
- Douleur anorectale;
- Ulcérations anorectales;
- Envie continue ou récurrente d'aller à la selle;
- Constipation;
- Selles sanguinolentes;
- Écoulement rectal mucopurulent.
Envisagez une anoscopie pour l'évaluation des personnes symptomatiques. Suspectez une LGV en cas de lymphadénopathie inguinale ou fémorale. Les écoulements sanguins, purulents ou muqueux de l'anus et la constipation sont fréquents en présence de la LGVNote de bas de page 12Note de bas de page 13Note de bas de page 14Note de bas de page 15.
L'infection par des pathogènes entériques, notamment les espèces Campylobacter, Salmonella et Shigella, peut s’accompagner de douleurs abdominales, de diarrhée, des crampes, des ballonnements, des nausées ou des fièvresNote de bas de page 1Note de bas de page 2Note de bas de page 3Note de bas de page 4Note de bas de page 19.
Chez les personnes ayant le VIH, il existe d'autres causes possibles de rectite et les infections sont souvent plus graves. La rectite aiguë peut se manifester par des écoulements sanguinolents, des ulcérations périanales douloureuses ou des ulcérations des muqueusesNote de bas de page 1Note de bas de page 19.
Tests diagnostiques
Les investigations dans les cas de proctite infectieuse suspects peuvent inclure des tests de chlamydia (y compris la LGV), de gonorrhée, de syphilis, de mpox et d'infections entériques. Si des ulcérations sont observées, les lésions peuvent faire l’objet d’un prélèvement pour la détection du LGV, du VHS-1 et HVS-2, T. pallidum, et du virus de la mpox. Consultez les Guides sur les infections transmissibles sexuellement et par le sang propres à l'étiologie pour de l'information sur les tests diagnostiques et l'interprétation des résultats.
Chlamydia (y compris le lymphogranulome vénérien) et gonorrhée
- Effectuez un écouvillonnage rectal en vue d'un test d'amplification des acides nucléiques (TAAN) pour détecter CT et GC (si possible) et d'une mise en culture pour détecter GC (si disponible).
- Demandez que les échantillons rectaux positifs à CT provenant de personnes qui présentent des symptômes évoquant une LGV et de partenaires sexuels de personnes atteintes de LGV soient acheminés au laboratoire provincial ou territorial (si possible) ou au Laboratoire national de microbiologie (LNM) pour un test de génotypage de LGV.
- Prélevez des échantillons de lésions ou de bubons en vue d'un TAAN pour détecter la présence de CT et de LGV.
Syphilis
- Si possible, prélevez des échantillons des lésions rectales suspectées de syphilis primaire pour le TAAN ou la fluorescence directe pour T. pallidum.
- Effectuez une sérologie de la syphilis.
VHS-1 et VHS-2
- Si possible, effectuez un écouvillonnage des ulcérations ou des vésicules pour détecter le VHS-1 et VHS-2 par TAAN ou par culture virale.
Mpox
- En cas de suspicion de mpox, le liquide des lésions et/ou les croûtes, les galles et les écouvillons cutanés peuvent être soumis aux tests de réaction en chaîne de la polymérase (PCR). Consultez votre laboratoire de santé publique provincial ou territorial ou le LNM pour obtenir des instructions concernant la manipulation et le transport des échantillons avant de les soumettreNote de bas de page 18. Si la mpox est suspectée, il est recommandé de prendre des précautions contre la transmission par voie aérienne, par gouttelettes et par contactNote de bas de page 18.
Les infections entériques transmises sexuellement
- Si le tableau clinique ou les antécédents le justifient, recueillez des échantillons de selles pour une mise en culture des entéropathogènes et un examen parasitologique. Consultez le laboratoire local pour déterminer s'il est possible de réaliser un TAAN pour la recherche de protozoaires.
Autres tests
- Envisagez le dépistage de Haemophilus ducreyi (chancre) et de Klebsiella granulomatis (granulome inguinal) chez les personnes susceptibles d'être exposées.
Lorsque d'autres étiologies sont suspectées, que la présentation est sévère ou que les symptômes sont persistants ou récurrents, il convient de consulter un collègue expérimenté, un gastro-entérologue ou un spécialiste des maladies infectieuses pour mener des investigations plus approfondies.
Traitement empirique et prise en charge
La décision de traiter de façon empirique les pathogènes courants CT et GC ou d'attendre les résultats des tests doit être fondée sur :
- La gravité de l'état clinique;
- La probabilité qu'une infection soit présente;
- Les facteurs de risque d'infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) décelés chez la personne;
- La disposition de la personne à s'abstenir de toute activité sexuelle et à revenir pour obtenir les résultats des tests ou faire l'objet d'un suivi.
Dans le cadre d'un traitement empirique, la présence d'écoulement ano-rectal est une indication pour le traitement des infections à GC et à CTNote de bas de page 1Note de bas de page 21. Pour les recommandations actuelles concernant le traitement de la GC, consultez le Guide sur la gonorrhée. Pour les recommandations actuellesconcernant le traitement de la CT, consultez le Guide sur la Chlamydia et LGV.
Traitez les partenaires sexuels actuels avec le même traitement empirique que le cas index.
Chez les personnes présentant des facteurs de risque de syphilis et des présentations compatibles, envisagez un traitement empirique si le suivi est incertain. Consultez le Guide sur la Syphilis pour les recommandations de traitement, le cas échéant.
Les soins de soutien sont un élément central de la prise en charge de la mpox, car les données sur l'efficacité clinique de traitements précis pour les cas de mpox chez l'humain sont limitéesNote de bas de page 16. Consultez un médecin spécialisé en maladies infectieuses pour tout cas suspect ou confirmé afin de discuter des options thérapeutiquesNote de bas de page 16.
Certains traitements existants de la variole, comme TPOXX (capsules de técovirimat monohydraté), pourraient jouer un rôle dans certains casNote de bas de page 16. Le médicament TPOXX est un antiviral administré par voie orale qui est indiqué pour le traitement de la variole humaine chez les adultes et les enfants pesant au moins 13 kg. À l'heure actuelle, son utilisation n'est pas approuvée par Santé Canada pour le traitement de la mpox ou d'autres infections à orthopoxvirusNote de bas de page 16. Toutefois, les recommandations concernant son utilisation hors indication se trouvent à l'adresse suivante : CADTH Health Technology Review on Tecovirimat (Tpoxx): Update (PDF) (en anglais seulement).
Suivi
Évaluez la réponse au traitement chez toutes les personnes traitées pour une rectite. Lorsqu'une étiologie autre qu'une infection transmissible sexuellement est suspectée, que la présentation est sévère ou que les symptômes sont persistants ou récurrents, envisagez de consulter un collègue expérimenté, un gastro-entérologue ou un infectiologue aux fins d'investigations plus approfondies.
Le test de contrôle dépend de l'agent pathogène confirmé par les analyses de laboratoire. Consultez le guide propre à l'étiologie.
Les cas suspects ou confirmés de mpox devraient suivre les recommandations d'isolement de votre autorité de santé publique provinciale, territoriale ou locale.
Déclaration et notification aux partenaires
Si un traitement pour une ITS est indiqué, informez, évaluez, dépistez et traitez (le cas échéant) les partenaires sexuels. Consultez les guides propres à l'étiologie pour connaître les recommandations sur la déclaration obligatoire et la notification aux partenaires.
Pour les cas suspects ou confirmés de mpox, consultez les exigences de déclaration et les recommandations des autorités de santé publique provinciales, territoriales ou locales pour les contacts. Pour des directives actualisées sur la vaccination préexposition et postexposition contre la mpox, consultez le Guide canadien d'immunisation ou les calendriers et directives de vaccination provinciaux et territoriaux.
Références
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