Examen externe sur l’inconduite sexuelle et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes - Processus et procédures
Marie Deschamps, C.C., Ad. E.
Responsable de l’examen externe
Le 27 mars 2015 (version française : 20 avril 2015)
7. Processus et procédures
Sauf dans les cas où le harcèlement sexuel constitue un acte criminel, les politiques des FAC traitent ce comportement de façon distincte de l’agression sexuelle et sans rapport avec celle-ci. De l’avis de la REE, cette stricte dichotomie n’a pas sa place et est susceptible de se traduire par l’impunité de comportements sexuels inappropriés, surtout s’il s’agit d’agressions sexuelles mineures. De plus, de nombreux participants aux consultations ont manifesté de sérieuses préoccupations concernant la pertinence et l’efficacité des procédures en vigueur.
7.1 Harcèlement sexuel
7.1.1 Pratiques actuelles
Pour déterminer ce que sont, pour les FAC, les pratiques et procédures relatives à la réception des plaintes de harcèlement sexuel, aux enquêtes sur celles-ci et à leur règlement, il faut consulter plusieurs documents. Comme la REE l’a déjà été mentionné, la DOAD 5012-0 régit quatre types de harcèlement : le harcèlement personnel, l’abus de pouvoir, le harcèlement sexuel et le racisme. Bien que la DOAD fixe les grands paramètres de la politique — notamment la délégation à certaines personnes des pouvoirs de réception, d’enquête et de règlement —, des instructions plus complètes sont fournies dans les Lignes directrices sur la prévention et la résolution du harcèlement (les Lignes directrices). Ces Lignes directrices constituent un guide de procédure visant à appuyer la Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement213. Elles sont publiées sous l’autorité du CEMD et elles ont la même force obligatoire que la DOAD 5012-0214. Tant la DOAD 5012-0 que les Lignes directrices « découlent directement de la Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement en milieu de travail du Secrétariat du Conseil du Trésor et elles y sont conformes215 ».
Comme l’indiquent la DOAD 5012-0 et les Lignes directrices216, les cmdt et certains officiers de grade plus élevé peuvent se voir confier la responsabilité d’adjuger les plaintes de harcèlement et, dans ces circonstances, ils sont désignés agents responsables (AR). Les AR détiennent un pouvoir décisionnel en vertu de la DOAD et des Lignes directrices. Ils reçoivent des instructions précises du CEMD pour s’acquitter de leurs responsabilités217. Les conseillers en matière de harcèlement (CH)218, dont le rôle consiste notamment à conseiller les AR sur le traitement des’ plaintes de harcèlement, sont aussi encadrés par des directives. Les CH sont nommés par les cmdt. Ce sont généralement des membres d’une unité qui sont désignés par les cmdt ou qui se sont proposés pour exercer cette fonction.
Le Manuel de référence du conseiller en matière de harcèlement prévoit deux grandes approches pour régler les plaintes de harcèlement : (1) le mode alternatif de règlement des conflits (MARC), que les plaignants sont « encouragés » à utiliser219, et (2) l’enquête administrative. De manière générale, les plaignants sont incités à opter pour un MARC (qu’il s’agisse de techniques propres au MARC, mais appliquées de façon informelle par des représentants de la chaîne de commandement ou de l’aide apportée par un tiers médiateur) avant de déposer une plainte officielle et de demander une enquête administrative. Dans un cas comme dans l’autre, le Manuel de référence du conseiller en matière de harcèlement précise que l’un des principes directeurs que l’AR doit suivre est de s’efforcer de résoudre le problème à l’échelon le plus bas possible au moyen des techniques du MARC :
En cas de harcèlement, ou lorsqu’une plainte est déposée à cet égard, les militaires et les employés sont encouragés à régler le problème à l’échelon le plus bas possible ou le plus approprié en ayant recours aux différentes techniques de règlement des conflits220.
Le Guide de l’agent responsable221 insiste également sur l’importance d’un règlement à l’échelon le plus bas.
Compte tenu de ces exigences d’ordre procédural, la victime de harcèlement pourrait être obligée de passer par trois étapes différentes avant le règlement complet d’une plainte de harcèlement. La première étape (MARC)222 a lieu après que la victime a signalé le comportement inapproprié, mais avant qu’une plainte officielle soit soumise, la deuxième étape (l’enquête administrative)223 est entamée lorsque la plainte est déposée, et la troisième étape (un grief)224 a lieu si l’une des parties conteste la décision de l’AR concernant la plainte.
En ce qui a trait à la première étape, bien qu’elle ne soit pas obligatoire, les FAC encouragent fortement leurs membres à commencer par utiliser ce qu’elles appellent les « initiatives personnelles »; ces initiatives consistent, pour la personne concernée à s’adresser d’abord directement à l’auteur du comportement inapproprié225. Si ce n’est pas possible, la victime peut demander à un superviseur d’intervenir. Si le supérieur immédiat n’est pas en mesure d’intervenir, ou s’il est partie à l’affaire, la victime peut demander à un superviseur d’un échelon supérieur d’intervenir. Cette dernière option fait partie de la politique « de la porte ouverte »226 Si le recours à la chaîne de commandement ne donne pas les résultats souhaités, ou si cette mesure n’est pas appropriée, le militaire peut se voir offrir le soutien technique d’un MARC officiel, soit l’aide d’un tiers médiateur227.
Si aucune de ces techniques n’est efficace ou indiquée, la victime peut déposer une plainte officielle, ce qui l’amène à la deuxième étape : une enquête administrative. Celle-ci est généralement déclenchée à la suite d’une plainte écrite, et elle implique certaines obligations liées à l’équité procédurale, par exemple, le droit des plaignants de recevoir de l’information au sujet de leur plainte228. Par ailleurs, un conseiller en relation de travail (CRT) peut être affecté au cas du plaignant229. Le CRT donne de l’information sur les processus d’enquête, mais ne peut pas fournir de conseil sur le bien-fondé de la plainte. Si les parties ont besoin de soutien moral ou administratif additionnel, elles peuvent recevoir l’aide d’un « assistant230 ». Tout comme les CH et les CRT, les assistants sont des militaires qui se sont ont proposés ou à qui on a demandé d’exercer cette fonction.
La réception d’une plainte écrite déclenche une « évaluation de la situation ». Selon les Lignes directrices, le processus d’enquête est rarement terminé à cette étape, toutefois :
Dans des circonstances exceptionnelles, l’agent responsable [dès après l’évaluation de la situation] peut avoir l’entière satisfaction de détenir tous les faits231.
Dans ces circonstances, l’AR peut décider, en se fondant sur l’évaluation de la situation, si les critères énoncés dans la DAOD 5012-0 sont respectés232. S’il ne s’agit pas de l’un de ces cas exceptionnels, l’enquête sera faite par un enquêteur en matière de harcèlement (EH)233. L’EH est soit un militaire qui a obtenu un certificat d’enquêteur après avoir suivi une formation dans les FAC, soit un civil qui est autorisé à mener des enquêtes. Cependant, avant la poursuite du processus d’enquête, le plaignant ou la plaignante sera invité une nouvelle fois à utiliser un MARC234. S’il s’avère nécessaire de nommer un EH, les conditions du mandat seront circonscrites, puis le dossier sera confié à l’EH.
Après son enquête, l’EH doit produire un rapport préliminaire qui ne contient aucune recommandation. L’AR examine le rapport préliminaire pour s’assurer qu’il est conforme au mandat. Lorsque le rapport l’est, il est transmis au plaignant ou à la plaignante et à la personne mise en cause235. L’AR doit veiller à ce que la procédure soit équitable236. L’AR est alors en mesure de décider s’il faut prendre une mesure administrative et, le cas échéant, de quelle nature. Dans le cas d’une plainte de harcèlement qui s’avère fondée, l’AR peut imposer des mesures correctives, qui vont du counselling à un avis écrit dans le dossier de la personne mise en cause ou, dans les cas les plus graves, à une mise en garde et surveillance ou même à une libération des FAC237.
Les Lignes directrices prévoient que si l’une ou l’autre des parties n’est pas satisfaite de la décision de l’AR, elle peut déposer un grief238. Même si la procédure de règlement des griefs n’est pas utilisée exclusivement pour les plaintes de harcèlement, c’est la troisième et dernière étape qui s’offre aux personnes qui s’estiment victimes de ce type de comportement. Le grief est soumis à une autorité de première instance, qui est habituellement le cmdt du plaignant ou de la plaignante. Lorsqu’il reçoit le grief, le cmdt doit déterminer s’il est en mesure d’accorder un redressement. S’il a ce pouvoir et qu’il n’est pas en conflit d’intérêts, il prendra la décision initiale sur le grief. S’il n’est pas dans une position lui permettant de rendre une décision, le grief sera transmis à un officier qui a la compétence nécessaire. Les règles d’équité procédurales doivent être respectées, notamment en ce qui a trait à la divulgation des informations pertinentes l’information à la personne mise en cause239. Si le plaignant ou la plaignante ou la personne mise en cause demeurent insatisfaits de la décision de l’autorité de première instance, ils peuvent demander à l’autorité de dernière instance — le CEMD — d’examiner la décision sur le grief240. Le CEMD peut demander au Comité externe d’examen des griefs militaires (CEEGM) d’examiner le cas et de faire des recommandations241. Le CEEGM est un organisme indépendant qui n’a pas le pouvoir de rendre une décision définitive et exécutoire; il peut uniquement faire des recommandations au CEMD.
En plus des nombreux documents de politique générale qui s’appliquent à l’échelle des FAC, les cmdt de la Marine, de l’Armée et de l’Aviation peuvent publier des ordonnances plus explicites ou plus précises qui visent leurs membres. Chaque formation ou unité peut adopter d’autres ordonnances qui répètent ou, dans certains cas, développent le contenu de la politique. Par conséquent, tout comme le subordonné qui est tenu d’obéir à un ordre de son supérieur à moins qu’il ne soit manifestement illégal242, les militaires sont obligés, en pratique, de se conformer à la règle édictée au plus bas échelon, soit l’ordre de leur cmdt, qu’ils doivent accepter par écrit lorsqu’ils sont affectés à l’unité. Par exemple, à moins qu’il ne soit illégal, un matelot doit suivre l’ordre établi par le cmdt du navire, sans remettre en question sa conformité avec les énoncés de politique des échelons plus élevés, présentés dans la DOAD ou les Lignes directrices.
La REE constate que cet ordre normatif diffère considérablement de celui qui règne dans le monde civil. Dans les règles de la vie civile, la hiérarchie est claire : elle est verticale et fonctionne de haut en bas. Le texte de loi le plus fondamental, la Constitution, l’emporte sur les lois, qui elles-mêmes l’emportent sur les règlements, qui à leur tour l’emportent sur les politiques. Tous les citoyens peuvent remettre en question l’autorité découlant d’une politique, d’un règlement ou d’une loi du gouvernement qui semblerait contraire à la Constitution. Par contre, dans les forces armées, un certain nombre de politiques différentes ont la même force normative, c’est-à-dire que l’ordre en est horizontal. Cette situation peut donner lieu à une interprétation et à une application non uniformes des politiques des FAC et, concrètement, peut mener à des pratiques qui ne sont pas conformes à celles-ci.
Compte tenu de cette différence dans le fonctionnement des règles, il est d’autant plus important que les dirigeants des FAC soient adéquatement formés et connaissent le contenu et l’importance des politiques sur les comportements sexuels inappropriés, afin d’assurer l’uniformisation de la mise en œuvre des politiques dans l’ensemble de l’organisation.
Étant donné le nombre d’étapes différentes associées à une plainte de harcèlement, et le nombre de sous-étapes, il n’est pas surprenant que les personnes interviewées aient souligné que le processus de traitement des plaintes de harcèlement porte à confusion et qu’il est trop complexe243. De plus, ces personnes ont soulevé certaines préoccupations qui font ressortir des problèmes de fonds touchant les processus en vigueur en ce qui a trait aux enquêtes sur les cas de harcèlement sexuel.
7.1.2 Résolution à l’échelon le plus bas
La REE a entendu de nombreuses critiques sévères à l’égard de la politique des FAC qui vise à régler les plaintes de harcèlement sexuel à l’échelon le plus bas. Il semble que l’objectif de cette politique soit de régler les conflits mineurs pour éviter d’acheminer inutilement les plaintes aux échelons supérieurs, ce qui peut être préjudiciable tant pour la personne mise en cause que pour le plaignant ou la plaignante. Bien que l’objectif soit louable, la REE est d’avis que, en pratique, la politique a un effet dissuasif qui fait que les victimes ne sont pas portées à signaler un incident ou à donner suite à une plainte. Plus précisément, la politique ne tient pas compte de l’anxiété que peuvent éprouver de nombreux plaignants à l’idée de faire face à leur agresseur, et elle ne reconnaît pas que le déséquilibre de pouvoir, possiblement à l’origine du comportement sexuel inapproprié, pourrait subsister dans le contexte de la « résolution à l’échelon le plus bas » ou de la médiation244. Par exemple, alors que plusieurs femmes résolues ont témoigné qu’elles avaient pu dénoncer le comportement de harcèlement sexuel qu’elles subissaient et faire face au harceleur245, un nombre beaucoup plus élevé d’interviewées ont indiqué que les techniques du MARC ne convenaient pas aux cas de harcèlement sexuel puisque les victimes ne se sentent pas à l’aise dans une position de confrontation, surtout lorsque la personne qui harcèle détient un grade plus élevé246.
De plus, la vaste majorité des personnes interviewées qui ont décidé de discuter de leur plainte avec leurs superviseurs affirment que leur plainte n’a pas été prise au sérieux247. Les réactions des superviseurs variaient d’une mise en garde aux victimes contre les conséquences négatives d’une plainte officielle sur leur carrière248 à une claire expression de leur incrédulité249. Peu importe sur quoi se basent les superviseurs pour décourager les plaignants de donner suite à leur plainte, il est évident que la politique de la « résolution à l’échelon le plus bas » constitue un obstacle majeur au règlement des plaintes de harcèlement sexuel et à un changement dans l’ensemble de la culture des FAC.
En outre, la REE a appris que le processus visant à régler les plaintes à l’échelon le plus bas nuit à la confidentialité — une grande préoccupation pour la plupart des plaignants. La résolution à l’échelon le plus bas suppose un échange de renseignements avec le superviseur ou, éventuellement, l’acheminement de la plainte à de nombreuses personnes, jusqu’à l’AR. De plus, il peut s’avérer nécessaire d’interviewer des témoins s’il y a une enquête. Tout cela se traduit par une importante perte de confidentialité puisqu’un certain nombre de militaires sont nécessairement au courant des détails de l’incident et du fait que la victime a présenté une plainte250. Si bien que nombre de personnes interviewées ont mentionné qu’elles préfèrent ne pas signaler un incident par peur des conséquences sur leur réputation et de la stigmatisation qui pourrait s’ensuivre251. De nombreuses victimes craignent également d’être étiquetées comme personnes pouvant se plaindre d’un collègue252, et par voie de conséquence, d’être ostracisées253. Les personnes interviewées affirment aussi que les supérieurs hiérarchiques ignorent les incidents de harcèlement254. Il semble que les superviseurs informés d’une plainte soient portés à répondre tout simplement : « oublie ça255 ».
En définitive, la REE a constaté que, malgré les bonnes intentions qui sous-tendent la politique, la pression exercée pour régler une plainte à l’échelon le plus bas a pour effet d’étouffer la plainte dès le départ et d’intimider les plaignants, si bien qu’ils ne feront pas valoir leurs préoccupations légitimes. Par conséquent, les obstacles, réels ou perçus, empêchent les victimes d’obtenir un règlement satisfaisant dans les cas de harcèlement sexuel et suscitent la méfiance à l’égard du système256.
Par ailleurs, la politique de résolution des plaintes à l’échelon le plus bas n’est pas cohérente avec la politique de tolérance zéro des FAC. Le principe qui sous-tend cette politique est incorporé dans la DOAD 5012-0 :
Le harcèlement, peu importe sa forme, est une conduite inacceptable et ne sera pas toléré.
Comme la politique de résolution à l’échelon le plus bas a pour effet concret de dissuader fortement les plaignants de donner suite à leur plainte et d’étouffer les incidents, la crédibilité de la politique de tolérance zéro des FAC s’en trouve directement affectée. La plupart des participants estiment que politique de tolérance zéro est purement théorique et qu’elle a peu de liens avec la réalité sur le terrain257.
7.1.3 « Politique de la porte ouverte »
Si d’un côté, de nombreuses personnes interviewées ont fait état des difficultés rencontrées pendant le processus de traitement des plaintes à l’échelon le plus bas, d’un autre côté, la REE a constaté que les tentatives visant à acheminer les plaintes à un échelon plus élevé se soldaient aussi fréquemment par un échec. Plusieurs cmdt ont souligné à la REE que les FAC ont une politique de la porte ouverte, mais beaucoup de personnes interviewées ont qualifié cette option d’irréaliste. Trop de s/off sont perçus comme faisant partie d’un club de copains258, et ils se soucient plus de protéger la réputation de leur unité que d’appuyer une victime259. Plusieurs personnes interviewées signalent aussi que les officiers subalternes, formés par les s/off, ferment les yeux sur les problèmes de comportement sexuel inapproprié260. De plus, non seulement est-ce très mal vu de sauter un échelon de la chaîne de commandement261, mais il semble aussi que seulement un très petit nombre de cmdt exceptionnellement ouverts seraient prêts à traiter de façon sérieuse la plainte de harcèlement sexuel d’un plaignant ou d’une plaignante qui oserait sauter un échelon262.
Si bien qu’en réalité, lorsqu’un militaire tente de rencontrer un cmdt pour lui parler d’une plainte de harcèlement sexuel, la « porte ouverte » est en fait gardée par un certain nombre de personnes qui insistent pour connaître le motif de la demande d’entrevue263. Dans ces circonstances, la possibilité de déposer une plainte officielle auprès d’un CH n’est pas une option réaliste, pas plus que le soi-disant droit du plaignant ou de la plaignante de faire part directement de ses préoccupations au cmdt ou à une personne d’un échelon plus élevé264. Encore une fois, cette situation crée de sérieux obstacles au signalement des incidents, à la tenue d’une enquête efficace et à la résolution des plaintes. Il suffit d’une personne dans la chaîne de commandement pour que la plainte soit étouffée. En fait, celui ou celle qui y arrive est généralement perçu comme quelqu’un qui a la capacité de résoudre les problèmes et de protéger adéquatement son supérieur265.
7.1.4 Difficultés associées à l’utilisation du MARC
La fréquence du recours aux techniques du MARC dans le processus de traitement des plaintes suscite également des préoccupations. Le Guide de l’agent responsable propose aux AR d’envisager l’utilisation du MARC à deux moments différents. Premièrement, les AR devraient considérer les techniques du MARC au début du processus de traitement de la plainte, avant l’ouverture officielle de l’enquête administrative. Deuxièmement, si cette première tentative de résolution échoue et que la personne concernée dépose officiellement une plainte, l’AR devrait recourir au MARC à la suite de l’enquête sur la plainte266. Même si le MARC comporte théoriquement des avantages, selon certaines critiques, cette méthode ne convient généralement pas au traitement des incidents de harcèlement sexuel267. Une chercheure a d’ailleurs souligné que « d’imposer à la victime la responsabilité de faire face à la personne qui la harcèle ne donne pas de bons résultats étant donné la rigidité des relations de pouvoirs et de la hiérarchie dans le contexte militaire268. » De plus, comme l’a fait remarquer une personne interviewée, les services du MARC des FAC visent à favoriser le rétablissement de l’harmonie en milieu de travail et non à s’attaquer aux aspects plus larges de la culturel à la base des comportements sexuels inappropriés269. La REE a entendu pendant l’examen de nombreux commentaires de participants qui allaient dans le même sens. Du reste, il est assez révélateur que, près de 15 ans après l’entrée en vigueur de la DOAD 5012-0, personne n’ait pu fournir à la REE d’exemple montrant que les techniques du MARC avaient permis de résoudre des cas de harcèlement sexuel.
Néanmoins, même si les techniques du MARC ne sont généralement pas appropriées pour résoudre les plaintes de harcèlement sexuel, il peut arriver dans certaines circonstances limitées que le plaignant ou la plaignante souhaite faire appel à un tiers médiateur. L’essence du MARC est d’offrir une approche de règlement des conflits axée sur la prise en charge par les victimes de leur propre sort270. Dans le contexte du harcèlement sexuel, ce principe est fondamental en raison de l’importance qu’accordent les victimes à la possibilité de disposer d’une certaine autonomie lors du processus de traitement des plaintes. Pour cette raison, il est nécessaire que les victimes conservent une partie du contrôle sur le processus et qu’on leur offre le MARC simplement comme l’une des démarches possibles, sans exercer de pressions sur elles en vue d’un règlement.
7.1.5 Autres problèmes
Même dans le cas des plaintes de harcèlement sexuel qui s’avèrent fondées et qui donnent lieu à des mesures correctives, les personnes interviewées perçoivent souvent les sanctions imposées comme une « tape sur les doigts »271; elles les jugent insignifiantes (par exemple, devoir suivre une formation en ligne) et incohérentes272. En même temps, comme il en a déjà été question, les plaignants qui donnent suite à leur plainte s’exposent à des conséquences négatives, notamment voir leur avancement professionnel compromis, et être stigmatisés et ostracisés. La différence entre les conséquences subies par la victime et celles auxquelles par le harceleur fait face confirme le point de vue de nombreux militaires (traité plus haut) selon lequel les FAC ne prennent pas au sérieux les plaintes de harcèlement sexuel.
De nombreuses personnes interviewées ont aussi porté à l’attention de la REE l’une des conséquences indésirables du système d’affectation : les plaintes de harcèlement ne sont pas résolues en temps voulu par le cmdt sortant, et c’est le nouveau cmdt qui doit s’en occuper, alors qu’il vient d’arriver dans l’unité et qu’il est le moins apte à régler efficacement l’affaire273. Le fait que l’unité assume le coût de l’enquête sur la plainte de harcèlement semble aussi décourager le recours à une telle mesure274.
Globalement, la REE estime que la complexité des politiques et des procédures relatives au harcèlement sexuel en réduit la valeur relative275. En outre, les politiques sont parfois incohérentes et inefficaces. Le signalement des incidents n’est pas encouragé et l’information concernant ce qui se passe sur le terrain ne se rend pas jusqu’aux dirigeants des échelons supérieurs276. En fait, dans ses directives aux cmdt, le CEMD mentionne qu’il est peu probable que les AR entendent parler d’un incident de harcèlement avant qu’une plainte écrite soit déposée277. Au bout du compte, beaucoup des personnes qui ont eu recours au processus officiel de traitement des plaintes en sont restées marquées. Une des personnes interviewées a qualifié son expérience d’« atroce278 », et certaines ont affirmé que jamais elles ne repasseraient par là279.
7.1.6 Collecte de données
Finalement, la REE a constaté que les données sur les plaintes de harcèlement, les enquêtes et les résultats ne sont pas systématiquement consignées. Même si plusieurs militaires ont expliqué qu’il serait possible d’entrer tout simplement les données sur les plaintes de harcèlement sexuel dans des registres déjà utilisés, cela ne se fait pas actuellement. Le système de suivi des plaintes de harcèlement semble peu fiable pour de nombreuses raisons, dont l’absence d’instructions claires sur la façon et le moment de produire les rapports, la confusion entourant les systèmes de codages et l’absence de sanction lorsque les militaires ne se servent pas du système de suivi280. Le rapport d'incident d'importance (RII) semble plus largement utilisé, mais comme son nom l’indique, ce mécanisme ne permet de suivre que les incidents les plus graves281. En outre, la REE a été mise en garde au sujet du manque de fiabilité du Système d'information sur la santé des Forces canadiennes (SISFC)282.
Par conséquent, il n’existe aucun moyen d’évaluer la fréquence des incidents signalés ou la façon dont ils ont été traités, entre autres, s’il y a eu enquête, combien de temps s’est écoulé entre le dépôt de la plainte et sa résolution éventuelle, ou la nature des sanctions finales, le cas échéant. Il est donc impossible pour les FAC d’évaluer globalement la responsabilisation de la chaîne de commandement dans le traitement des plaintes de harcèlement283. Ce déficit de responsabilisation permet à ceux qui commandent de minimiser les plaintes ou d’en faire fi s’ils le veulent et à ceux qui contreviennent aux politiques sur le harcèlement sexuel de le faire en toute impunité.
7.2 Pistes d’amélioration
Selon la REE, le processus de traitement des plaintes est globalement trop complexe; il privilégie le règlement à l’amiable au détriment des victimes, et il nuit à l’analyse et à la résolution complètes des incidents de harcèlement sexuel dans les FAC. C’est pourquoi la mise en œuvre de trois mesures importantes s’impose pour améliorer le processus de traitement des plaintes.
Premièrement, comme la REE l’a déjà mentionné, les plaignants devraient avoir la possibilité de déposer leur plainte de harcèlement sexuel au CRHaSAS, une autorité indépendante des FAC, et de décider si elles veulent déclencher le processus officiel de traitement des plaintes, incluant une enquête. Si une victime ne veut pas qu’il y ait enquête, elle doit tout de même pouvoir obtenir du soutien et des conseils. Dans l’éventualité où un plaignant ou une plaignante accepte de suivre le processus officiel de traitement des plaintes, il y a lieu à une enquête administrative.
Deuxièmement, le processus devrait être simplifié et rationalisé. Il faudrait que les plaintes officielles débouchent directement sur une procédure de règlement des griefs devant le cmdt agissant comme adjudicateur, plutôt que de reposer sur la pratique qui consiste à privilégier les initiatives personnelles ou à exiger que la plainte passe par de nombreux membres de la chaîne de commandement, puis par un processus d’enquête officiel. De cette façon, les incidents de harcèlement sexuel seraient portés à l’attention du cmdt aussi rapidement que possible. Le plaignant ou la plaignante et la personne mise en cause auraient droit à du soutien et à des conseils concernant la procédure de règlement des griefs. Le cmdt aurait la possibilité de demander à un EH de mener une enquête plus approfondie, comme le permet la pratique actuelle de traitement des plaintes de harcèlement. Les deux parties auraient également le droit de présenter une déclaration écrite au cmdt. La personne mise en cause devrait bénéficier de la protection des règles d’équité procédurale, qui implique notamment la communication des éléments de preuve.
Troisièmement, la politique devrait accorder beaucoup moins d’importance au MARC et à la résolution des plaintes à l’échelon le plus bas. Dans la plupart des cas, il est inapproprié de demander à la victime qu’elle affronte l’auteur du harcèlement, surtout lorsqu’il y a déséquilibre de pouvoirs. Même si les cmdt doivent offrir aux plaignants la possibilité de recourir au mécanisme de MARC le plus adéquat, il devrait aussi leur expliquer clairement qu’il ne s’agit là que d’une option, qu’ils sont entièrement libres de s’en prévaloir ou non.
Le modèle proposé met à la disposition des militaires un processus simplifié, dont le nombre d’étapes passe de trois à une. De plus, grâce à ce modèle, le cmdt peut mieux contrôler son unité et intervenir beaucoup plus tôt dans le processus.
Recommandation n°7
Simplifier le processus de traitement des plaintes de harcèlement, notamment :
- Transmettre les plaintes officielles aux cmdt, qui agissent comme arbitres des griefs.
- Réduire l’importance accordée au MARC.
7.3 Agression sexuelle
Comme point préliminaire, la REE signale qu’on lui a demandé, dans le cadre de son mandat, de passer en revue les points suivants et de formuler des recommandations à leur égard :
- « Le caractère adéquat de la définition d’“inconduite sexuelle” énoncée dans la DOAD 5019-5;
- Le caractère adéquat des politiques, des procédures et des programmes des FAC relatifs à l’inconduite sexuelle;
- La formation reçue par les membres des FAC en matière d’inconduite sexuelle;
- Les ressources affectées à la mise en œuvre des politiques, des procédures et des programmes relatifs à l’inconduite sexuelle;
- La mesure dans laquelle les membres des FAC signalent les incidents d’inconduite sexuelle et, s’il y a lieu, les raisons pour lesquelles ces cas pourraient ne pas être signalés et le rôle de la culture militaire et de la chaîne de commandement à cet égard;
- Toute autre question qui, selon la REE, pourrait s’avérer utile pour aider les FAC à mieux prévenir les cas d’inconduite sexuelle et de harcèlement sexuel.284 »
Comme nous l’avons déjà mentionné, l’agression sexuelle est comprise dans la définition d’inconduite.
Conformément à ce mandat, au cours des six mois qu’a duré le processus de recherche des faits, la REE a réalisé des entrevues auprès de militaires et d’employés civils en relation avec la mise en œuvre des politiques des FAC concernant l’inconduite sexuelle, notamment auprès du personnel du bureau du JAG, du SNEFC de la police militaire, du service ordinaire de police militaire et du service des poursuites militaires. De plus, les FAC ont communiqué à la REE les politiques, les protocoles et autres documents pertinents portant sur l’inconduite sexuelle. Grâce au soutien efficace du DGPM, des représentants du JAG et des coordonnateurs des bases des FAC et du MDN, la REE a pu recueillir le maximum d’information possible pour remplir son mandat.
Ceci dit, le mandat de la REE comporte une restriction expresse qui mérite un commentaire. Selon le mandat, la REE ne peut examiner « toute question relative au juge-avocat général (JAG) en ce qui a trait à sa supervision de l’administration du système de justice militaire dans les Forces canadiennes ». Il faut se demander ce qui est englobé dans la « supervision de l’administration du système de justice militaire » exercée par le JAG et qui est exclu du fait même de l’objet du présent rapport. Deux interprétations peuvent être avancées.
Selon une interprétation large, le simple fait de traiter de l’inconduite sexuelle, laquelle constitue une compétence commune à la justice civile et militaire, se situerait hors mandat. La conséquence d’une telle interprétation serait que la plupart des éléments du mandat touchant à l’« inconduite sexuelle » seraient mentionnés inutilement. Une interprétation aussi large conduirait donc à l’exclusion d’une partie importante et explicite du mandat. Non seulement cette interprétation va-t-elle à l’encontre du sens ordinaire du texte du mandat, mais elle contredit la façon dont les FAC elles-mêmes l’ont interprété pendant l’examen. En fait, la plupart des personnes interviewées qui ont participé à la mise en œuvre des politiques, des procédures et des programmes relatifs à l’inconduite sexuelle n’auraient pas été mises à la disposition de la REE si leur rôle ne se situait pas au cœur du mandat.
Une interprétation plus étroite de la restriction s’accorde davantage avec le texte du mandat, avec les responsabilités respectives du JAG et du grand prévôt et avec la façon dont les FAC ont interprété le mandat au cours de l’examen.
Le JAG est un officier commissionné que nomme le gouverneur en conseil pour superviser l’administration de la justice militaire285. Afin d’assurer l’indépendance du système de justice militaire, le JAG rend compte au ministre de la Défense nationale plutôt qu’aux FAC. Parmi les responsabilités du JAG qui ont un lien avec le présent examen, mentionnons les poursuites en cour martiale et les procès sommaires. Par conséquent, la restriction du mandat de la REE a pour effet d’exclure de son examen la surveillance des poursuites en cour martiale et des procès sommaires assurée par le JAG.
Par contre, la responsabilité de la police militaire incombe au grand prévôt des Forces canadiennes, qui joue le rôle de commandant du Groupe de la Police militaire des Forces canadiennes286. Tandis que le JAG est indépendant des FAC, le grand prévôt relève du vice-chef d’état-major de la défense.
Ceci étant, le mandat de la REE englobe un examen de la conduite de la police militaire, notamment du SNEFC, en ce qui a trait à l’inconduite sexuelle. L’examen porte entre autres sur les politiques et les procédures sur lesquelles se base la police militaire pour recevoir les plaintes d’inconduite sexuelle, communiquer avec les victimes et leur fournir du soutien et exercer son pouvoir discrétionnaire afin de décider quel organisme — la PM, le SNEFC ou la police civile — devrait enquêter ou enquêtera sur les allégations.
Puisque le CEMD a, de fait, ordonné que les politiques, les procédures et les programmes relatifs à l’inconduite sexuelle fassent l’objet d’un examen rigoureux, la REE a retenu l’interprétation la plus étroite de la restriction. Elle ne fera aucun commentaire concernant les poursuites en cour martiale ni les procès sommaires. Toutefois, il est clair que le mandat de la REE englobe un examen des politiques, des procédures et des programmes adoptés par les FAC qui concernent les enquêtes sur l’inconduite sexuelle, et le dépôt d’accusations, par la police militaire.
7.3.1 Pratiques actuelles
Jusqu’à tout récemment, les enquêtes sur les plaintes d’agressions sexuelles visant des membres des FAC survenues au Canada étaient habituellement menées par les services de police civils, et toutes les accusations concernant de telles allégations donnaient lieu à des poursuites judiciaires devant les tribunaux civils. Cependant, cette situation a changé en 1998287 lorsque le Parlement a modifié la Loi sur la défense nationale afin de permettre au système de justice militaire de traiter les accusations d’agressions sexuelles. En vertu du partage de compétence qui en a découlé, environ la moitié des cas288 traités par le SNEFC sont encore transmis au système de justice civil pour de nombreuses raisons, notamment lorsque la plainte concerne des cadets qui ne sont pas visés par le CDM ou des victimes civiles, ou encore s’il s’agit d’un cas de violence familiale289. Par conséquent, même si le système de justice militaire a priorité sur le système civil en vertu de la politique de la PM290, le partage de la compétence est une réalité.
La PM exerce ses fonctions sur la propriété des FAC et à l’extérieur du Canada durant les opérations de contingence et les opérations expéditionnaires291. Lorsque la PM est informée d’un cas d’agression sexuelle292, elle doit aviser le SNEFC293, qui a compétence sur tous les cas de cette nature294. Le SNEFC est formé de membres de la PM et constitue une unité indépendante; il a compétence sur les infractions de nature grave et délicate, y compris les agressions sexuelles295. Lorsqu’il reçoit une plainte d’agression sexuelle, il doit déterminer s’il exerce son mandat d’enquête ou s’il renvoie la plainte à l’unité de la PM qui l’a signalée296. En pratique, le SNEFC renvoie habituellement à la PM les cas d’agressions sexuelles sans pénétration297.
Si le SNEFC établit qu’il renvoie la plainte à la PM locale, celle-ci peut exercer son pouvoir discrétionnaire de déposer ou non la plainte298, en suivant les mêmes procédures que pour les autres types d’accusation. Plus particulièrement, pour déterminer si des accusations devraient être portées, la PM doit consulter la chaîne de commandement299. Au contraire, si le SNEFC est responsable du dossier, il peut déposer des accusations sans consulter la chaîne de commandement300.
Comme l’a déclaré le brigadier-général Pitzul plusieurs années après que les FAC aient commencé à exercer leur compétence à l’égard des plaintes d’agressions sexuelles, la raison pour laquelle le système de justice militaire est autorisé à traiter les cas d’agressions sexuelles est que de telles infractions peuvent nuire à la cohésion au sein d’une unité et doivent donc être traitées comme les autres infractions ayant la même incidence301. Les propos du brigadier-général Pitzul reflètent la raison d’être du système de justice militaire distinct, comme l’avait indiqué le juge Lamer dans l’arrêt R. c. Généreux:
Le but d’un système de tribunaux militaires distinct est de permettre aux Forces armées de s’occuper des questions qui touchent directement à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes. […] [L]es autorités militaires doivent être en mesure de faire respecter la discipline interne de manière efficace. Les manquements à la discipline militaire doivent être réprimés promptement et, dans bien des cas, punis plus durement que si les mêmes actes avaient été accomplis par un civil.302
Malheureusement, les victimes d’agressions sexuelles n’ont pas profité des avantages escomptés en vertu de la nouvelle compétence. Elles critiquent la formation inadéquate de la PM, le faible soutien de la chaîne de commandement et le manque d’uniformité quant aux sanctions infligées dans les cas d’agressions sexuelles303. Bien que l’on ait également critiqué les organismes civils d’application de la loi, les autorités chargées des poursuites et les tribunaux en ce qui a trait au traitement des cas d’agressions sexuelles, les membres des FAC ont la nette impression que le traitement de tels cas par les autorités militaires est source d’un plus grand préjudice pour la victime que si le dossier est traité par les autorités civiles304.
7.3.2 Traitement des victimes
Bon nombre de participants se sont plaints de problèmes liés au processus de signalement et d’enquête. Les critiques formulées par les témoins et les personnes interviewées visaient de nombreux aspects du processus : on n’a pas appelé rapidement la PM lors du signalement de l’agression sexuelle305, on n’a pas offert immédiatement des soins médicaux306, on a fait sentir à la victime qu’elle était à blâmer pour ce qui s’est passé, avant même qu’elle donne sa version307, des cas demeurent en suspens en raison de la confusion liée aux champs de compétence308, on n’a pas fait de suivi auprès des témoins clés309 et la formation des enquêteurs chargés des plaintes d’agression sexuelle laisse à désirer310. Les participants ont également déploré les retards dans le processus d’enquête311 et l’obligation de fournir à répétition leur version des faits, ce qui les oblige à revivre chaque fois les événements312. La REE a entendu de nombreux témoignages de lacunes au niveau des enquêtes en matière d’agressions sexuelles313, y compris des préoccupations concernant la contamination d’éléments de preuve314 et la perception fréquente que la notion juridique de consentement n’était pas bien comprise par les membres de la PM315. En faisant référence aux erreurs de procédure en cours d’enquête qui peuvent compromettre les poursuites et mener à l’acquittement, une personne interviewée a fait la remarque que les avocats de la défense aiment les enquêtes menées par le SNEFC parce qu’il y a toujours des erreurs316. De tels problèmes ont gravement miné la confiance envers la capacité de la PM à traiter adéquatement des cas d’agressions sexuelles.
Ces problèmes sont particulièrement déplorables étant donné que les membres de la PM ont été expressément prévenus des répercussions des agressions sexuelles sur les victimes. Par exemple, les ordres de la PM indiquent ce qui suit :
Les agressions sexuelles font partie des types d’actes criminels les plus traumatisants.317
De plus,
[l]’agression sexuelle est un acte d’agression où le pouvoir et le contrôle sont exercés pour dominer et violer une personne. Elle n’a rien d’un acte d’intimité sexuelle318.
Par conséquent, les politiques pertinentes énoncent clairement que, dans le contexte militaire, on doit porter une attention accrue aux plaintes d’agressions sexuelles, en particulier lorsque l’agresseur est un membre de la « famille » des FAC. Conformément au protocole de la PM en matière d’agression sexuelle :
Dans les cas d’agression sexuelle, la confiance de la victime est souvent violée par ceux-là mêmes qui sont en position, réelle ou perçue, de pouvoir ou d’autorité319.
Si l’esprit de ces énoncés se traduisait en gestes concrets, et si les politiques pertinentes étaient pleinement mises en œuvre, bon nombre des appréhensions des témoins seraient dissipées. En fait, la REE constate que le problème ne relève pas des politiques comme telles, mais plutôt de lacunes au niveau de la formation et de la mise en œuvre ainsi que du manque de confiance des militaires en la capacité ou en l’intérêt du système de justice militaire à traiter les cas d’agressions sexuelles de façon appropriée. Bien que la REE ait rencontré un certain nombre de membres dévoués et compétents de la PM, elle a également constaté que d’autres membres de la PM ne semblaient pas bien comprendre le processus320, que le problème des agressions sexuelles les laissait indifférents321, qu’ils manquaient de formation sur les éléments de base de l’infraction322, et qu’ils ne connaissaient pas les ressources à leur disposition323. Une partie de l’explication des problèmes semble résider dans le fait que malgré la mise en place de politiques et de protocoles, le nombre d’incidents traités par le système militaire est nettement inférieur au nombre d’incidents traités par le système de justice civil324. Par conséquent, un cycle de détérioration s’installe : la façon dont les victimes se sentent traitées par le système de justice militaire accroît le déficit de signalement et le déficit de signalement fait que les membres de la PM n’ont pas l’occasion d’acquérir et de maintenir les compétences nécessaires traiter ces cas importants et délicats.
En outre, la REE est préoccupée du fait que l’on n’accorde pas suffisamment d’attention aux incidents d’agression sexuelle considérés moins graves. Les participants à l’examen ont indiqué que lorsque les victimes signalent des agressions moins graves, notamment des attouchements non sollicités sur les seins et les fesses, les policiers militaires leur répondent que ces incidents ne donneraient pas lieu à des poursuites judiciaires civiles325. Le message manifeste qui est alors transmis est que l’incident n’est pas suffisamment grave pour être traité. Que les commentaires sur la probabilité que des poursuites soient intentées par les autorités civiles à la suite d’agressions moins graves s’avèrent exacts ou non, les membres des FAC méritent une protection complète de la part du système de justice militaire. À moins que l’incident ne soit considéré comme isolé et bénin ou que le principe de proportionnalité n’impose une réserve, les agressions sexuelles, même en l’absence de blessures physiques, doivent être prises au sérieux. S’il n’y a pas lieu d’imposer des sanctions pénales, la chaîne de commandement peut prendre des mesures administratives ou disciplinaires afin d’indiquer clairement que la dignité de tous les militaires doit être préservée. Seules des sanctions sévères, imposées grâce aux moyens dont dispose le système de justice militaire ou par des mesures administratives et disciplinaires, permettront d’éviter d’autres agressions. Tant la dissuasion individuelle que la dissuasion générale sont importantes.
De plus, la REE note que même si les agressions n’ont pas toutes le même degré de gravité, les réactions des victimes d’agression varient en fonction de leurs propres expériences et de leur état psychologique. Bien qu’un incident d’attouchement non sollicité puisse n’avoir aucune répercussion psychologique sur une personne, il peut causer une blessure psychologique importante chez une autre personne. En droit canadien, le principe de la vulnérabilité de la victime326 énonce clairement qu’un agresseur ne choisit pas l’état de sa victime; quelle que soit la gravité de l’agression, le simple fait de la commettre constitue une infraction en vertu du Code criminel. Omettre de tenir compte des incidents d’agression sexuelle où il n’y a eu aucune blessure physique n’est pas conforme au droit canadien qui considère que les blessures psychologiques sont aussi graves que les blessures physiques327.
En règle générale, la REE a constaté que les difficultés que vivent les victimes d’agression sexuelle peuvent avoir un effet dévastateur non seulement sur elles-mêmes parce l’incident grave et traumatisant n’est pas résolu, mais également sur l’ensemble des FAC. Les incidents d’agression sexuelle non résolus ont des répercussions négatives sur les FAC, tant parce que les militaires, individuellement, subissent un préjudice que parce l’absence de résolution perpétue la perception que les FAC ne prennent pas ces incidents au sérieux.
7.3.3 Collecte de données
Comme c’est le cas pour le harcèlement sexuel, très peu de données sont recueillies sur les incidents d’agression sexuelle au sein des FAC. Étant donné le grave déficit de signalement des agressions sexuelles, les seules données disponibles ne reflètent en aucun cas la fréquence réelle de ces incidents. Même lorsque des plaintes sont déposées, l’agression sexuelle sera souvent difficile à repérer dans le dossier de la cour328. Par exemple, si l’accusé plaide coupable à des accusations liées à la consommation d’alcool ou à un comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline, seul un examen exhaustif du jugement sur la détermination de la peine indiquera, dans certains cas, que le comportement ou le problème sous-jacent impliquait des actes de nature sexuelle.
Le suivi de l’occurrence et des conséquences des cas d’agressions sexuelles est essentiel afin de déterminer si les politiques des FAC permettent d’améliorer la conduite des militaires, tant sur le plan individuel que systémique. Pourtant, les données sur les cas d’agression sexuelle dans les FAC sont insuffisantes. Même s’il est vrai qu’il est difficile de recueillir de telles données, les FAC ont besoin de comprendre les répercussions de ces incidents sur les militaires, et les victimes ont le droit de prendre une décision éclairée lorsqu’elles signalent un incident. Quelques participants ont indiqué à la REE qu’il existe un certain nombre de banques de données dans les FAC qui pourraient permettre d’améliorer la collecte de données329. Par exemple, si un système de codage adéquat était en place, le SISFC, actuellement utilisé pour colliger les blessures, pourrait être modifié de façon à indiquer les causes des blessures — y compris les agressions sexuelles. Il ne se fait malheureusement aucune telle collecte, et l’omission de consigner les données sur les plaintes d’agressions sexuelles nuit considérablement à la responsabilisation de la chaîne de commandement et à la capacité des FAC de prendre action pour prévenir les agressions sexuelles.
7.4 Pistes d’amélioration
Dans le système de justice civile canadien [par opposition à la justice militaire canadienne], les agressions sexuelles font partie des infractions les plus graves et sont souvent traitées suivant des procédures spécialisées par les autorités chargées des poursuites et les tribunaux. Bien que la REE n’ait pas mené de recherche pancanadienne sur les procédures locales liées aux agressions sexuelles, elle sait que dans un certain nombre de districts judiciaires, les enquêtes, les poursuites et l’adjudication sont réservées à des équipes spécialisées en matière d’agressions sexuelles, lesquelles disposent de ressources supplémentaires qui permettent de mieux soutenir les victimes. Il est possible de mettre en place une telle infrastructure spécialisée, en partie, en raison du grand nombre de cas traités par les autorités policières et les tribunaux. Il serait difficile pour les FAC d’assurer un soutien semblable aux militaires. En fait, certains militaires croient que le système de justice civile dispose d’une plus grande expertise uniquement en raison du nombre de cas traités330. Il est évident que l’accès à ces ressources spécialisées n’entraîne pas toujours de meilleurs résultats pour les victimes et ne signifie pas que celles-ci jouiront d’une plus grande autonomie ou seront en mesure de mieux contrôler le traitement de leur dossier. Cependant, vu la perception des militaires, il y aurait lieu d’envisager sérieusement la possibilité d’offrir aux victimes l’option de transférer leur dossier au système de justice civile. De plus, comme il a été mentionné ci-dessus, les militaires ont la nette impression que l’évolution d’une enquête peut être influencée par les positions des individus qui sont dans la chaîne de commandement, ce qui peut nuire à l’intégrité et à l’objectivité de l’enquête.
Étant donné que la compétence à l’égard des cas d’agression sexuelle est commune aux systèmes de justice militaire et civil, rien n’empêche les FAC d’adopter une politique ou de convenir des modalités qui régiraient la répartition des dossiers. Cela permettrait un plus grand recours aux ressources civiles auxquelles on fait déjà appel, notamment les centres de crise et les hôpitaux.
Tel que mentionné précédemment, le SNEFC transfère déjà au système de justice civile, après enquête, environ la moitié des cas d’agression sexuelle. Le transfert des cas avant l’enquête ne constituerait pas une modification importante des pratiques. D’ailleurs, d’autres organisations militaires ont déjà recours au système de justice civile pour traiter la grande majorité des cas d’agression sexuelle. Par exemple, en Australie, la plupart des allégations d’infraction sexuelle sont transmises aux autorités policières civiles.331 Un protocole d’entente entre le directeur des poursuites pénales et le directeur des poursuites militaires australiennes prévoit que lorsque la conduite peut être considérée à la fois comme un crime et comme un manquement à la discipline militaire, l’autorisation du directeur des poursuites pénales est nécessaire pour traiter le dossier dans le cadre du système de justice militaire332. Il est intéressant de souligner que le protocole d’entente énonce clairement que pour déterminer si l’autorisation sera accordée, il faut tenir compte du point de vue de la victime. Le protocole d’entente cite l’agression sexuelle à titre d’exemple d’une accusation où l’intérêt public serait davantage préservé si le contrevenant présumé faisait l’objet de poursuites devant un tribunal pénal civil. En France, le processus d’abolition des tribunaux militaires a commencé en 1953 et a pris fin en 2011. Une chambre spécialisée a été créée au sein de l’appareil judiciaire civil afin de traiter les cas d’agressions sexuelles impliquant des militaires. Bref, chaque pays a élaboré ses propres solutions quant au meilleur moyen d’effectuer les enquêtes, d’intenter les poursuites et de rendre les décisions dans les cas d’agression sexuelle. Bien qu’on ait de plus en plus recours aux autorités civiles, l’environnement et les conditions locales façonnent les pratiques adoptées par chaque pays.
La REE reconnaît qu’au Canada, l’un des défis que doivent relever les FAC réside dans la grande diversité des ressources offertes à la société civile. Étant donné que certains membres des FAC demeurent en région éloignée, ils n’ont pas nécessairement accès aux mêmes ressources que dans les grands centres urbains. Par conséquent, la REE ne peut pas simplement recommander que les FAC abandonnent la responsabilité de traiter les cas d’agression sexuelle puisque les autorités civiles ne disposent pas toutes de ressources plus adaptées que celles des CAF pour traiter de tels dossiers. Les FAC gèrent des établissements de formation, offrent des services de soutien aux victimes et ont mis sur pied une gamme complète de services au sein du système de justice militaire, en plus de pouvoir recourir à des mesures administratives et disciplinaires. Les FAC disposent donc de ressources humaines et matérielles qui, utilisées convenablement, peuvent bénéficier aux victimes d’agressions sexuelles.
Malheureusement, comme le présent rapport le précise, ces services ne sont généralement pas utilisés convenablement à l’heure actuelle et ne répondent pas aux besoins des victimes.
La REE estime que sauf en situation de déploiement, une victime d’agression sexuelle devrait avoir la possibilité de demander que sa plainte soit transférée au système de justice civil. Pour prendre une décision éclairée quant à une éventuelle demande de transfert de compétence, la victime devrait recevoir le soutien d’un défenseur faisant partie de l’organisation du CRHaSAS. Le défenseur devrait être en mesure de conseiller la victime sur les différentes options et ressources à sa disposition. Dans le cas où les FAC décident de ne pas accéder à la demande de la victime, elles devraient lui fournir les raisons justifiant la décision.
Le fait d’autoriser les membres des FAC à exprimer leur volonté de voir leur le dossier transféré au système de justice civile donne aux victimes voix au chapitre et représente une première étape dans le rétablissement de la confiance. La consultation de la victime devrait constituer une étape officielle du protocole de transfert. Au fil du temps, plus la relation de confiance entre les FAC et ses membres s’améliorera, plus les victimes devraient être portées à choisir le système de justice militaire. L’élaboration d’un protocole d’entente avec les autorités civiles locales dans le but de faciliter le transfert des dossiers d’agression sexuelle devrait être perçue comme un signe que de tels cas exigent une attention accrue.
Quoi qu’il en soit, même lorsqu’un dossier d’agression sexuelle est transféré aux autorités civiles, les FAC devraient effectuer leur propre évaluation afin de déterminer si des mesures administratives devraient être prises (p. ex. suspension, rétrogradation ou libération des FAC). On a indiqué à la REE que la PM tient un dossier officieux de tous les incidents impliquant des membres des FAC qui sont traités par les autorités civiles333. Par conséquent, les FAC sont en mesure d’imposer des mesures administratives à un agresseur. L’imposition de telles mesures est importante pour montrer aux militaires que les FAC prennent ces questions au sérieux et les dissuader de commettre de telles infractions.
La prise de mesures administratives revêt également une importance particulière dans les cas d’agressions mineures, où la conduite est importune, mais où des accusations criminelles ne seront probablement pas déposées. Même si ces infractions sont moins graves, elles devraient néanmoins donner lieu à des mesures administratives significatives qui indiquent clairement qu’une telle conduite est inacceptable au sein des FAC.
Afin d’assurer l’uniformité des mesures administratives, les FAC devraient établir des lignes directrices pour soutenir les commandants. Dans le choix de la mesure administrative la plus appropriée, il faut non seulement tenir compte de la situation personnelle du contrevenant et de la nature de l’incident, mais également de l’objectif principal de l’organisation qui cherche à mettre en place une culture organisationnelle plus inclusive et moins hostile à l’égard des femmes et des LGBTQ. De plus, les lignes directrices devraient comprendre des exemples concrets pour aider les commandants à déterminer les cas où une sanction est non seulement pertinente, mais requise. Dans ces lignes directrices, il sera aussi important de traiter des cas d’agressions « mineures » qui ne sont pas flagrantes, mais qui contribuent à une culture marquée par la sexualisation et le manque de respect et de professionnalisme.
Recommandation n°8
Permettre aux victimes d’agression sexuelle, avec le soutien du centre de responsabilisation en matière de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle, de demander le transfert de leur plainte aux autorités civiles; le cas échéant, fournir aux victimes les raisons pour lesquelles le transfert est refusé.
213 Lignes directrices sur la prévention et la résolution du harcèlement, p. 1-1
214 LDN, paragraphe 18(2)
215 Lignes directrices sur la prévention et la résolution du harcèlement, p. 1-1
216 Lignes directrices sur la prévention et la résolution du harcèlement, p. 3-1
217 Guide de l’agent responsable – Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement
218 Manuel de référence du conseiller en matière de harcèlement
219 Manuel de référence du conseiller en matière de harcèlement, p. 5
220 Politique du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes sur la prévention et la résolution du harcèlement; voir aussi le Manuel de référence du conseiller en matière de harcèlement, p. 14 et 69
221 Guide de l’agent responsable – Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement, p. 21
222 Lignes directrices, partie 5, Résolution des plaintes – Mode alternatif de règlement des conflits (MARC), p. 5-1
223 Lignes directrices, partie 6, Résolution des plaintes – Enquête administrative, p. 6-1
224 Lignes directrices, sous-section 6.7, Dépôt d’un grief par suite de la décision
225 Lignes directrices, sous-section 5.2, Initiative personnelle
226 Lignes directrices, sous-section 5.3, Intervention du superviseur
227 Lignes directrices, sous-section 5.4, Médiation
228 Lignes directrices, sous-section 3.1.2 h
229 Lignes directrices, sous-section 3.1.2 et 3.8, et Manuel de référence du conseiller en matière de harcèlement, p. 32
230 Lignes directrices, sous-section 3.5
231 Lignes directrices, sous-section 6.1
232 Lignes directrices, sous-section 4.3
233 Lignes directrices, sous-section 6.2
234 Guide de l’agent responsable – Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement, p. 21
235 Lignes directrices, sous-section 6.4.2
236 Lignes directrices, sous-section 4.4
237 Manuel de droit administratif militaire, p. 14-3
238 Lignes directrices, sous-section 6.7; LDN, article 29; Manuel de droit administratif militaire, p. 34-4
239 Pelletier c. Procureur général du Canada, [2005] A.C.F. no 1891 (QL), para 85, confirmé par [2007] A.C.F. no 6 (QL)
240 LDN, article 29.11
241 LDN, article 29.12
242 LDN, article 83 et ORFC, article 19.015, note B : « [le subordonné] obéira au commandement même s’il doute de sa légitimité, sauf si celui-ci est manifestement illégal »
243 Groupe de discussion : femmes et hommes stagiaires; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
244 Groupe de discussion : femmes réservistes officiers subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur
245 Groupes de discussion : femmes subalternes, femmes s/off
246 Groupe de discussion : femmes réservistes subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
247 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
248 Groupe de discussion : femmes subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
249 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
250 Groupe de discussion : femmes subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur
251 Groupe de discussion : femmes subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
252 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
253 Groupe de discussion : femmes s/off; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
254 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
255 Groupe de discussion : femmes s/off; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
256 Entrevues organisées par le coordonnateur
257 Groupes de discussion : femmes subalternes, femmes s/off, hommes officiers subalternes
258 Groupes de discussion : femmes subalternes, hommes subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur
259 Entrevues organisées par le coordonnateur
260 Groupe de discussion : femmes subalternes; entrevues organisées par le coordonnateur
261 Entrevues organisées par le coordonnateur
262 Groupes de discussion : femmes de PAI, femmes réservistes; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
263 Groupe de discussion : hommes stagiaires; témoignages volontaires
264 Lignes directrices, sous-section 4.1.1
265 Entrevues organisées par le coordonnateur
266 Guide de l’agent responsable – Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement, p. 21
267 S. K. Hippensteele, « Revisiting the Promise of Mediation for Employment Discrimination Claims », Pepperdine Dispute Resolution Law Journal, vol. 9, p. 211, 2008-2009; S. K. Hippensteele, « Mediating Ideology: Navigating the Space from Myth to Reality in Sexual Harassment Dispute Resolution », Journal of Gender, Social Policy & the Law, vol. 15, p. 43, 2006; C. A. Bond, « Shattering the Myth: Mediating Sexual Harassment Disputes in the Workplace », Fordham Law Review, vol. 65, p. 2489, 1996-1997; M. Irvine, « Mediation: Is it Appropriate for Sexual Harassment Grievances? », Ohio State Journal on Dispute Resolution, vol. 9, p. 27, 1993-1994
268 L. Gouliquer, Soldiering in the Canadian Forces: How and Why Gender Counts, thèse de doctorat, Université McGill, département de sociologie, 2011
269 Entrevues organisées par le coordonnateur
270 B. Mayer, The Dynamics of Conflict Resolution: A Practitioner Approach, 2000, p. 240
271 Témoignages volontaires
272 Groupes de discussion : femmes subalternes, femmes réservistes; entrevues organisées par le coordonnateur
273 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
274 Entrevues organisées par le coordonnateur
275 Entrevues organisées par le coordonnateur
276 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
277 Directives du CEMD aux commandants, 1211.1
278 Témoignage volontaire
279 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
280 Groupe de discussion : femmes s/off; entrevues organisées par le coordonnateur; témoignage volontaire
281 Entrevues organisées par le coordonnateur
282 Entrevues organisées par le coordonnateur
283 Entrevues organisées par le coordonnateur
284 Une version plus complète du mandat se trouve à la section 2 du présent rapport.
285 Article 9.2(1), LDN.
286 Articles 18.3 et 18.4, LDN.
287 L.C. 1998, chap. 35, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d’autres lois en conséquence, Projet de loi C-25, article 22 qui modifie l’article 70
288 Tableau fourni par les FAC
289 Ordre 2-300 du Gp PM FC, Opérations d’application de la loi – Généralités, sections 12, 13 et 15
290 Ordre 2-363 du Gp PM FC, section 10
291 Ordre 2-300 du Gp PM FC, Opérations d’application de la loi – Généralités, section 5
292 Pour savoir quels sont les éléments déclencheurs d’une enquête, voir la publication suivante : A-SJ-100-004/AS-000, chapitre 7, Consignes et procédures techniques de la Police militaire, section 10
293 Service national des enquêtes des Forces canadiennes, Instructions permanentes d’opérations, chapitre 2, section 10
294 Consignes et procédures techniques de la Police militaire, chapitre 6, appendice A, section 8 e., Ordre 2-381 du Gp PM FC, Normes – Infractions de nature grave et délicate, section 2. g.
295 Ordre 2-381 du Gp PM FC, Compétence du Service national des enquêtes des Forces canadiennes (SNEFC), sections 6 et 7
296 Ordre 2-381 du Gp PM FC, sections 13 et 2-381.3 (6)
297 Entrevue organisée par le coordonnateur
298 Ordre 2-363 du Gp PM FC, section 6
299 ORFC, article 107.02 a); Ordre 2-300 du Gp PM FC, Opérations d’application de la loi – Généralités, section 8
300 ORFC, article 107.02 c)
301 Brig-Gen J. S.T. Pitzul, A Perspective on Canada's Code of Service Discipline, Air Force Law Review, 2002, vol. 52, 15
302 R. c. Généreux, [1992] 1 S.C.R. 259
303 Groupes de discussion : femmes subalternes, femmes réservistes; entrevues organisées par le coordonnateur, témoignages volontaires
304 La REE tire une conclusion d’après les témoignages susmentionnés des participants concernant la nécessité de mettre sur pied un mécanisme externe pour recevoir les plaintes de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle.
305 Témoignages volontaires
306 Témoignages volontaires
307 Groupe de discussion : femmes réservistes; témoignages volontaires
308 Entrevue organisée par le coordonnateur; témoignages volontaires
309 Témoignage volontaire
310 Entrevues organisées par le coordonnateur
311 Entrevue organisée par le coordonnateur
312 Groupe de discussion : femmes subalternes; entrevue organisée par le coordonnateur; témoignages volontaires
313 Entrevues organisées par le coordonnateur; témoignages volontaires
314 Entrevue organisée par le coordonnateur; témoignages volontaires
315 Témoignages volontaires
316 Entrevue organisée par le coordonnateur
317 Ordre 2-295 du Gp PM FC, section 1
318 A-SJ-100-004/AS-000, chapitre 7, Protocole d’agression sexuelle – Énoncé des principes et croyances
319 A-SJ-100-004/AS-000, chapitre 7, Protocole d’agression sexuelle – Énoncé des principes et croyances
320 Entrevue organisée par le coordonnateur; témoignages volontaires
321 Entrevues organisées par le coordonnateur
322 Entrevues organisées par le coordonnateur
323 Entrevues organisées par le coordonnateur
324 Entrevue organisée par le coordonnateur
325 Entrevue organisée par le coordonnateur; témoignages volontaires
326 R. c. Smithers [1978] 1 SCR 506
327 R. c. McCraw [1991] 3 S.C.R. 72, p. 81 : « Il n'y a aucun doute qu'une blessure psychologique peut souvent avoir des effets plus pénétrants et permanents qu'une blessure physique. À mon avis, aucun principe d'interprétation ni aucune raison de principe ne permet d'exclure la blessure psychologique de la portée de l'al. 264.1(1)a) du Code. »
328 Entrevue organisée par le coordonnateur
329 Entrevues organisées par le coordonnateur
330 Entrevues organisées par le coordonnateur
331 PERS 35-4, par. 37
332 Protocole d’entente fourni à la REE
333 Entrevues organisées par le coordonnateur
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