Mulette feuille d’érable (Quadrula quadrula) et villeuse irisée (Villosa iris) : plan de gestion

Titre officiel : Plan de gestion de la mulette feuille d’érable (Quadrula quadrula), population des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent, et de la villeuse irisée (Villosa iris) au Canada

Mulette feuille-d’érable
Mulette feuille-d’érable
Villeuse irisée
Villeuse irisée
Information sur le document

Référence recommandée :

Pêches et Océans Canada. 2023. Plan de gestion de la mulette feuille d’érable (Quadrula quadrula), population des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent, et de la villeuse irisée (Villosa iris) au Canada. Série de Plans de gestion de la Loi sur les espèces en péril. Pêches et Océans Canada, Ottawa. v + 60 p.

Pour télécharger le présent plan de gestion ou pour obtenir un complément d’information sur les espèces en péril, y compris les rapports de situation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) et d’autres documents connexes portant sur le rétablissement, veuillez consulter le Registre public des espèces en péril.

Illustrations de la couverture : La photo de la mulette feuille d’érable a été fournie par Shawn Staton, de Pêches et Océans Canada. Todd Morris, de Pêches et Océans Canada, a fourni la photo de la villeuse irisée.

Also available in English under the title:
Management Plan for the Mapleleaf (Quadrula quadrula) Great Lakes – Upper St. Lawrence Population, and Rainbow (Villosa iris) in Canada.

© Sa Majesté la Roi du chef du Canada, représentée par la ministre des Pêches et des Océans, 2023. Tous droits réservés.
ISBN 978-0-660-68028-6
No de catalogue En3-5/137-2023F-PDF

Le contenu du présent document (à l’exception des illustrations) peut être utilisé sans autorisation, sous réserve de la mention de la source.

Préface

En vertu de l’Accord pour la protection des espèces en péril (1996), les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires ont convenu d’adopter une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection des espèces en péril partout au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (L.C. 2002, ch. 29) [LEP], les ministres fédéraux compétents sont responsables de l’élaboration des plans de gestion pour les espèces inscrites comme étant préoccupantes et sont tenus de rendre compte des progrès réalisés dans les 5 ans suivant la publication de leur version définitive dans le Registre public des espèces en péril, et tous les 5 ans par la suite, jusqu’à ce que les objectifs aient été atteints.

La ministre de Pêches et Océans Canada est la ministre compétente en vertu de la LEP à l’égard de la mulette feuille d’érable (Quadrula quadrula) et de la villeuse irisée (Villosa iris) et a élaboré ce plan de gestion conformément à l’article 65 de la LEP. Pour l’élaboration du présent plan de gestion, la ministre compétente a tenu compte, conformément à l’article 38 de la LEP, de l’engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de conserver la diversité biologique et de respecter le principe selon lequel, s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à une espèce sauvage inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou son déclin. Dans la mesure du possible, le plan de gestion a été préparé en collaboration avec le gouvernement de l’Ontario, Environnement et Changement climatique Canada, l’Université Central Michigan, l’Université de Guelph, le Bishop Mills Natural History Centre, l’Office de protection de la nature de la région de St. Clair, l’Office de protection de la nature d’Ausable-Bayfield, l’Office de protection de la nature de la rivière Thames supérieure, l’Office de protection de la nature de la vallée de la Thames inférieure et l’Office de protection de la nature de la rivière Grand, conformément au paragraphe 66(1) de la LEP.

Comme l’indique le préambule de la LEP, la réussite de la conservation de l’espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des directives et des mesures de conservation de l’espèce formulées dans ce plan de gestion. Cette réussite ne pourra reposer seulement sur Pêches et Océans Canada (MPO), ou sur toute autre autorité responsable. Les coûts associés à la conservation des espèces en péril sont partagés entre les différentes autorités responsables. Tous les Canadiens et les Canadiennes sont invités à appuyer le plan de gestion de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée et à contribuer à sa mise en œuvre pour le bien de l’espèce et de l’ensemble de la société canadienne.

Un plan de gestion de la LEP comprend des mesures de conservation d’une espèce préoccupante qui visent à empêcher qu’elle ne devienne menacée ou en voie de disparition. La ministre compétente doit préparer un plan de gestion comprenant des mesures de conservation de l’espèce qu’elle juge appropriées. Ces mesures visent à atteindre les objectifs de gestion définis dans le plan de gestion. La mise en œuvre du présent plan de gestion est assujettie aux crédits, aux priorités et aux contraintes budgétaires des autorités responsables et organisations participantes.

Remerciements

Le plan de gestion de la mulette feuille d’érable (population des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent) et de la villeuse irisée s’appuie sur les programmes de rétablissement et les plans d’action pour les 2 espèces. Pêches et Océans Canada (MPO) reconnaît les contributions des personnes suivantes aux documents originaux et au plan de gestion combiné actuel : Daelyn Woolnough, Ph. D. (entrepreneure du MPO), Pat Dimond (entrepreneur du MPO), Amy Boyko (MPO), Shawn Staton (MPO), Jessica Epp-Martindale (MPO), Dave Andrews (MPO) et Peter L. Jarvis (entrepreneur du MPO). Le MPO tient aussi à remercier les organisations suivantes pour leur appui à l’élaboration du plan de gestion de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée : équipe de rétablissement des moules d’eau douce de l’Ontario, Environnement et Changement climatique Canada, ministère des Richesses naturelles et des Forêts de l’Ontario, Université de Guelph, Université Central Michigan, Office de protection de la nature d’Ausable-Bayfield, Office de protection de la nature de la rivière Grand, Office de protection de la nature de la région de St. Clair, Office de protection de la nature de la rivière Thames supérieure, Office de protection de la nature de la vallée de la Thames inférieure, Office de protection de la nature de la péninsule du Niagara et le Bishop Mills Natural History Centre. La cartographie a été réalisée par Shady Abbas (entrepreneur du MPO) et Dave Andrews (MPO).

Sommaire

La mulette feuille d’érable (Quadrula quadrula) et la villeuse irisée (Villosa iris) sont des moules d’eau douce de la famille des unionidés qui ont des besoins semblables et occupent des aires de répartition géographiques similaires au Canada. Comme ces espèces occupent fréquemment le même espace et qu’elles sont soumises à beaucoup de menaces et de facteurs limitatifs communs, elles sont prises en compte dans un plan de gestion combiné. La mulette feuille d’érable et la villeuse irisée, ainsi que d’autres moules d’eau douce (unionidés), fournissent d’importants services écosystémiques comme la biofiltration, le recyclage des nutriments et le stockage.

Il existe 2 unités désignables (UD) de mulette feuille d’érable au Canada : l’UD des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent, en Ontario, et l’UD de la rivière Saskatchewan et du fleuve Nelson, au Manitoba. L’UD des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent a été inscrite en tant qu’espèce préoccupante à la Loi sur les espèces en péril (LEP) en 2019. À l’origine, cette UD avait été inscrite en tant qu’espèce menacée à la LEP, mais elle a par la suite été rétrogradée à la liste des espèces préoccupantes à la suite de sa réévaluation en 2016 par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), principalement en raison des populations nouvellement découvertes. Un programme de rétablissement et un plan d’action combinés sont en cours d’élaboration pour l’UD de la rivière Saskatchewan et du fleuve Nelson, car le COSEPAC a évalué ces populations et les a inscrites en tant qu’espèces menacées à la LEP. À l’origine, la villeuse irisée avait été inscrite en tant qu’espèce en voie de disparition à la LEP, mais elle a par la suite été rétrogradée au niveau de risque inférieur d’espèce préoccupante en 2019 après sa réévaluation en 2015 par le COSEPAC, principalement en raison de la découverte d’un grand nombre d’individus dans des emplacements où la présence de l’espèce était auparavant inconnue (et en raison de la preuve d’un recrutement récent dans 6 des 7 sous-populations examinées).

Le présent plan de gestion fait partie d’une série de documents consacrés à ces espèces qui devraient être pris en considération ensemble; notamment les rapports de situation du COSEPAC (2015 et 2016). De plus, la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée ont été incluses dans l’évaluation du potentiel de rétablissement (2011) de la ligumie pointue, de la troncille pied-de-faon, de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée, et les programmes de rétablissement proposés ont été publiés en 2016 avant que les espèces ne soient rétrogradées à la liste des espèces préoccupantes.

La mulette feuille d’érable est une moule d’eau douce de taille moyenne à grande (jusqu’à 13,5 cm). La coquille est relativement épaisse, à profil à peu près carré, et présente des variations de couleur allant du vert jaunâtre au brun clair chez les juvéniles, et du brun verdâtre au brun foncé chez les individus plus âgés. L’aire de répartition mondiale de la mulette feuille d’érable s’étend sur l’ensemble des réseaux hydrographiques de l’Ohio et du Mississippi, ainsi que dans le bassin de la rivière Rouge, au Manitoba, dans le Dakota du Nord et au Minnesota. En Ontario, les populations semblent se limiter à quelques zones côtières et rivières qui se déversent dans les lacs Sainte-Claire, Huron, Érié et Ontario. La villeuse irisée est plus petite que la mulette feuille d’érable (longueur moyenne de 5,5 cm); elle a une forme elliptique étroite et une coquille généralement vert jaunâtre avec de nombreux rayons vert foncé. L’aire de répartition mondiale de la villeuse irisée englobe les bassins des rivières Tennessee, Cumberland et Ohio et le cours supérieur du Mississippi. Au Canada, elle se limite aux affluents des lacs Ontario, Érié, Sainte-Claire et Huron, avec une très petite présence dans le delta de la rivière Sainte-Claire.

Les principales menaces pesant sur la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée, décrites à la section 5, sont les suivantes : les espèces envahissantes, la turbidité et la charge en sédiments, les contaminants et les substances toxiques, la charge en éléments nutritifs, la modification des régimes d’écoulement, le retrait et les modifications de l’habitat, le manque d’accès aux poissons-hôtes et les activités récréatives. Ces menaces incluent les activités qui dégradent la qualité de l’eau et l’habitat, surtout les eaux de ruissellement et les rejets des activités agricoles, municipales et industrielles, qui contiennent souvent des métaux et des éléments nutritifs et entraînent une augmentation des taux d’envasement. L’introduction des moules dreissénidées au milieu des années 1980 a provoqué de profonds changements dans la structure des communautés des unionidés; ces moules demeurent une menace importante pour les populations existantes, car elles font concurrence aux unionidés pour l’habitat et les ressources alimentaires.

Les objectifs de gestion (section 6) pour la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée sont :

Les stratégies générales et les mesures de conservation des espèces qui offrent les meilleures chances d’atteindre les objectifs de gestion sont décrites à la section 7. Les 4 stratégies suivantes générales ont été définies pour lutter contre les menaces qui pèsent sur les espèces et atteindre les objectifs de gestion :

  1. inventaire et surveillance;
  2. recherche;
  3. gestion et coordination; et
  4. intendance et vulgarisation.

La meilleure façon de réaliser ces efforts de conservation est d’élaborer conjointement les programmes de rétablissement axés sur une seule espèce et sur l’écosystème pour les espèces de poissons et de moules en péril. Les mesures prises pour conserver l'espèce profiteront à toutes les espèces aquatiques en péril et élimineront le dédoublement des efforts.

1 Introduction

Le présent plan de gestion vise 2 espèces de moules d’eau douce en péril au Canada, à savoir la mulette feuille d’érable (Quadrula quadrula), population des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent, [ci-après appelée « mulette feuille d’érable »] et la villeuse irisée (Villosa irisNote de bas de page 1). La mulette feuille d’érable a d’abord été inscrite en tant qu’espèce menacée à la Loi sur les espèces en péril (LEP) à la suite d’une évaluation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC); toutefois, en 2019, le COSEPAC a réévalué sa situation et l’a inscrite en tant qu’espèce préoccupante à la LEP (COSEPAC 2016). Selon le COSEPAC, la principale justification de ce changement de statut est la découverte de nouveaux emplacements et des preuves d’un flux génétique récent dans le lac Érié. La villeuse irisée a d’abord été inscrite en tant qu’espèce en voie de disparition à la LEP à la suite de l’évaluation du COSEPAC (COSEPAC 2006b); elle a été rétrogradée à la liste des espèces préoccupantes de la LEP après la mise à jour de l’évaluation du COSEPAC (COSEPAC 2015). Selon le COSEPAC, la principale justification de ce changement de statut est la découverte d’un grand nombre d’individus dans des emplacements où la présence de l’espèce était jusque-là inconnue, surtout dans les eaux d’amont de grands cours d’eau, ainsi que des preuves solides d’un recrutement récent dans 6 des 7 sous-populations examinées.

Le présent plan de gestion fait partie d’une série de documents consacrés à ces espèces qui devraient être pris en considération ensemble, notamment les rapports de situation du COSEPAC (COSEPAC 2015, 2016), une évaluation du potentiel de rétablissement qui incluait les 2 espèces (Bouvier et Morris 2011; Pêches et Océans Canada [MPO] 2011), et le programme de rétablissement et le plan d'action combinés proposés pour les deux espèces qui ont été publiés en 2016 (MPO 2016, MPO 2016) [avant que les espèces soient rétrogradées au statut d’espèces préoccupantes]. Un plan de gestion comprend des mesures de conservation d’une espèce préoccupante qui visent à empêcher qu’elle ne devienne menacée ou en voie de disparition. Il établit des objectifs et définit des mesures de conservation de l’espèce qui appuient la réalisation des objectifs de gestion.

2 Évaluation de l’espèce par le COSEPAC

Date de l’évaluation :
Novembre 2016

Nom commun (population) :
Mulette feuille d’érable (population des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent)

Nom scientifique :
Quadrula quadrula

Statut :
Préoccupante

Justification de la désignation :
Cette moule à coquille lourde, qui a la forme d’une feuille d’érable, a une répartition limitée dans le sud de l’Ontario. Il y a des indications d’un déclin continu, mais léger, au sein de l’aire de répartition depuis les 3 dernières générations. Des menaces à faible effet, y compris la moule zébrée et la moule quagga, l’altération de l’habitat et la pollution, demeurent. Malgré ces menaces, la taille estimée de cette population est grande (des millions d’individus) et apparemment stable dans un certain nombre d’emplacements des bassins hydrographiques du lac Sainte-Claire, du lac Érié et de l’ouest du lac Ontario. Le changement de statut effectué depuis le rapport initial découle des efforts d’échantillonnage accrus dans l’ensemble de la région, des emplacements nouvellement découverts ainsi que des indications de flux génétique récent dans le lac Érié, ce qui semble indiquer un potentiel d’immigration.

Présence au Canada :
Ontario

Historique du statut selon le COSEPAC :
Espèce désignée « menacée » en avril 2006. Réexamen du statut et désignation en tant qu’espèce préoccupante en novembre 2016.

Date de l’évaluation :
Novembre 2015

Nom commun :
Villeuse irisée

Nom scientifique :
Villosa iris

Statut :
Préoccupante

Justification de la désignation :
Cette petite moule est largement répartie dans le sud de l’Ontario. Les relevés effectués depuis la dernière évaluation en 2006 ont permis de trouver un grand nombre d’individus dans des régions inconnues jusqu’alors, particulièrement dans le cours supérieur de grandes rivières. Il existe de fortes indications d’un recrutement récent dans 6 des 7 sous-populations examinées. Bien que l’espèce ait disparu du lac Érié et des rivières Détroit et Niagara, elle n’a apparemment jamais été courante dans ces eaux. Une faible abondance et des signes de déclin continu sont évidents dans 2 sous-populations (rivière Ausable et lac Sainte-Claire). Les menaces persistantes qui pèsent sur certaines sous-populations incluent les espèces envahissantes (les moules dreissénidées et le gobie à taches noires) et la pollution (eaux usées domestiques et urbaines et effluents d’origine agricole). L’espèce pourrait devenir « menacée » si les menaces ne sont pas gérées ou atténuées de façon efficace.

Présence au Canada :
Ontario

Historique du statut selon le COSEPAC :
Espèce désignée « en voie de disparition » en avril 2006. Réexamen du statut et désignation en tant qu’espèce préoccupante en novembre 2015.

3 Information sur la situation de l’espèce

Tableau 1. Résumé de la protection actuelle et des autres désignations attribuées à la mulette feuille d’érable (populations des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent).
Autorité responsable Administration/organisation Année(s) d’évaluation/ d’inscription Désignation/statut Niveau de désignation
Ontario Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition 2018 Préoccupante Espèce
Ontario NatureServe 2013 Échelle régionale (Ontario) : S2 – En péril Population
Ontario Comité de détermination du statut des espèces en péril en Ontario 2017 Préoccupante Population
Canada Loi sur les espèces en péril 2019 Préoccupante Population
Canada Comité sur la situation des espèces en péril au Canada 2016 Préoccupante Population
Échelle internationale NatureServe 2009 Échelle internationale : G5 – Non en péril Espèce
Tableau 2. Résumé de la protection actuelle et des autres désignations attribuées à la villeuse irisée.
Autorité responsable Administration/ organisation Année(s) d’évaluation/ d’inscription Désignation/statut Niveau de désignation
Ontario Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition 2017 Préoccupante Population
Ontario Comité de détermination du statut des espèces en péril en Ontario 2016 Préoccupante Population
Canada Loi sur les espèces en péril 2019 Préoccupante Population
Canada Comité sur la situation des espèces en péril au Canada 2015 Préoccupante Population
Canada NatureServe 2013 N1 – Gravement en péril Population
Échelle internationale NatureServe 2009 Échelle internationale : G5 – Non en péril Espèce

4 Information sur l’espèce

4.1 Description de l’espèce

Mulette feuille d’érable

La mulette feuille d’érable est une moule d’eau douce de taille moyenne à grande (jusqu’à 13,5 cm) qui fait partie de la famille des unionidés. La coquille est relativement épaisse, à profil à peu près carré, et présente des variations de couleur allant du vert jaunâtre au brun clair chez les juvéniles, et du brun verdâtre au brun foncé chez les individus plus âgés. De façon typique, 2 rangées de nodules surélevés s’étendent en forme de V depuis le point d’union de la coquille (umbo) jusqu’au bord de la coquille (marge ventrale), ce qui distingue la surface extérieure de la coquille de cette espèce de bivalves, tandis que sa surface intérieure (nacre) est blanche. La mulette feuille d’érable n’est pas sexuellement dimorphique d’après un examen externe (Bouvier et Morris 2011). Au Canada, aucune autre espèce d’unionidés ne peut être confondue avec la mulette feuille d’érable. Davantage de précisions sont données dans COSEPAC (2016).

Villeuse irisée

La villeuse irisée est une petite moule d’eau douce (longueur moyenne d’environ 5,5 cm pour les spécimens canadiens) de la famille des unionidés. Le genre Villosa compte 18 espèces nord-américaines, mais seules la villeuse irisée et la villeuse haricot (V. fabalis) ont des aires de répartition s’étendant au Canada. La villeuse irisée a une forme elliptique étroite, et les sommets sont bas et comprimés; sa sculpture comprend de 4 à 6 bourrelets distincts. La coquille est jaunâtre, vert jaunâtre ou brune (chez les spécimens âgés) et compte de nombreux rayons vert foncé interrompus et larges, ou étroits et larges, qui couvrent la surface entière de la coquille ou sont absents de sa partie antérieure. Les rayons peuvent se noircir chez les vieux spécimens. La villeuse irisée se distingue de toutes les autres espèces canadiennes d’unionidés par sa petite taille, sa forme elliptique étroite et ses rayons verts interrompus. Davantage de précisions sont données dans COSEPAC (2015).

Rôle écologique des unionidés : Il est difficile de prévoir les effets de la perte d’unionidés dans les ruisseaux et les rivières, mais ces animaux peuvent être des éléments importants de la dynamique du réseau trophique, car ils relient et influencent de multiples niveaux trophiques (Vaughn et al. 2004, Vaughn et Spooner 2006). Vaughn et al. (2008) ont catalogué certaines des influences sur la chaîne alimentaire et sur le réseau trophique des communautés d’unionidés sur d’autres composantes de l’écosystème. Les moules peuvent offrir un habitat à d’autres organismes en créant une structure physique, et les moulières denses peuvent stabiliser les substrats du lit des cours d’eau durant les périodes de fort débit. Les unionidés influencent directement et indirectement la disponibilité des aliments par la biodéposition des matières organiques et l’excrétion de nutriments. Par exemple, les déchets métaboliques des unionidés peuvent être assimilés par les algues, tandis que leurs pseudofèces (matière qui a été retirée de la colonne d’eau, mais non métabolisée; Nalepa et al. 1991) sont décomposées par les micro-organismes benthiques et consommées par des parties de la faune benthique.

Les unionidés constituent des indicateurs sensibles de la santé des écosystèmes d’eau douce, notamment de la qualité de l’eau et de l’habitat, et principalement de la communauté de poissons, dont dépend le succès de leur reproduction. La villeuse irisée peut être un indicateur particulièrement bon de la santé de l’écosystème, parce qu’elle est plus sensible aux contaminants environnementaux que la plupart des autres unionidés testés à ce jour (Mummert et al. 2003). Les unionidés peuvent également constituer des proies importantes pour plusieurs espèces, dont le rat musqué (Ondatra zibethicus) [Neves et Odom 1989], ce qui entraîne un transfert d’énergie du milieu aquatique vers le milieu terrestre.

4.2 Population et répartition de l’espèce

Mulette feuille d’érable

Aire de répartition mondiale : L’aire de répartition mondiale de la mulette feuille d’érable comprend l’ensemble des bassins versants de la rivière Ohio et du fleuve Mississippi, et s’étend de la Louisiane au Texas au sud et vers le nord jusqu’au bassin de la rivière Rouge, au Manitoba, et au bassin des Grands Lacs, en Ontario (figure 1). Aux États-Unis, son aire de répartition va du Texas au sud-ouest jusqu’à l’Alabama au sud-est; au nord, elle couvre le bassin versant des Grands Lacs au Minnesota et au Wisconsin jusqu’à New York et le bassin versant de la rivière Rouge au Minnesota et au Dakota du Nord (NatureServe 2020; figure 1). L’espèce a également été introduite dans la rivière Tongue, au Montana (NatureServe 2020).

carte, voir le description longue
Figure 1. Aire de répartition indigène mondiale de la mulette feuille d’érable (modifiée d’après le Musée royal de l’Ontario). 
Description longue

La figure 1 est intitulée « Aire de répartition indigène mondiale de la mulette feuille-d’érable (modifié du Musée royal de l’Ontario) ». Il s’agit d’une carte de l’Amérique du Nord, avec une zone ombragée qui met en évidence la répartition de la mulette feuille-d’érable qui s’étend sur les bassins versants des rivières Ohio et Mississippi, de la Louisiane au Texas, jusqu’au bassin de la rivière Rouge au Manitoba et au bassin versant des Grands Lacs en Ontario. La carte montre qu’aux États-Unis, l’aire de répartition s’étend du Texas, dans le sud-ouest, à l’Alabama, dans le sud-est, tandis que l’aire de répartition septentrionale s’étend du bassin versant des Grands Lacs, au Minnesota et au Wisconsin, jusqu’à New York, et se prolonge dans le bassin versant de la rivière Rouge, au Minnesota et au Dakota du Nord.

Aire de répartition au Canada : L’aire de répartition au Canada de la mulette feuille d’érable a été divisée en 2 unités désignables (UD). COSEPAC peut désigner des UD en dessous du niveau de l’espèce qui méritent d’être différenciées en fonction de leur caractère distinctif et de leur importance évolutive. Les populations des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent (Ontario) [figure 2] et de la rivière Saskatchewan et du fleuve Nelson (Manitoba) sont les 2 UD désignées par le COSEPAC au Canada. Au Manitoba, les populations sont présentes dans la rivière Rouge (et ses affluents), la rivière Assiniboine et le lac Winnipeg (et leurs affluents), tandis que les populations de l’Ontario semblent se limiter à quelques zones côtières et rivières qui se déversent dans les lacs Huron, Sainte-Claire, Érié et Ontario. Dans les 2 provinces, une analyse des enregistrements historiques indique une réduction apparente de l’aire de répartition de l’espèce (COSEPAC 2016).

carte, voir le description longue
Figure 2. Aire de répartition actuelle (1996 à 2022) et aire de répartition historique (1885 à 1995) de la mulette feuille d’érable, population des Grands Lacs et du haut Saint-Laurent.
Description longue

La figure 2 s’agit d’une carte du sud-ouest de l’Ontario et de la région des Grands Lacs inférieurs, y compris la frontière avec les États-Unis. La carte illustre l’aire de répartition canadienne des zones d’occurrence actuelles et historiques de la moule, de la région des Grands Lacs inférieurs de l’Ontario, où elle était autrefois présente dans les bassins versants des lacs Sainte-Claire, Érié et Ontario. L’échelle est de 40 km par 2,5 cm.

La carte contient une légende qui montre ce qui suit :

  • Occurrence d’individus vivants de 1996 à 2022
  • Occurrence de coquilles fraîches de 1996 à 2022
  • Occurrence historique (de 1860 à 1995) et récente de coquilles altérées
  • Terres des Premières Nations
  • Parcs
  • Zones bâties

La carte montre également une vue de haut niveau d’une zone partielle du sud-ouest de l’Ontario, recouvrant la zone inférieure des Grands Lacs où la présence actuelle et historique de moules a été identifiée.

Taille de la population de l’Ontario : La taille globale de la population de mulette feuille d’érable en Ontario semble stable (COSEPAC 2016). Les estimations de la population canadienne ont été élaborées dans Bouvier et Morris (2011) et COSEPAC (2016); voir les renseignements détaillés le tableau 3. Les descriptions suivantes de l’aire de répartition connue de la mulette feuille d’érable au Canada ont été adaptées de Bouvier et Morris (2011) et de COSEPAC (2016).

Grands Lacs et voies interlacustres

Des enregistrements de la mulette feuille d’érable existent dans les rivières Érié, Sainte-Claire, Détroit et Niagara. Jusqu’à récemment, il s’agissait en majorité d’enregistrements historiques, comme les 2 seuls connus pour les eaux canadiennes de la rivière Niagara, à partir de 1934. De même, il n’y a eu aucune observation récente de mulette feuille d’érable vivante dans les eaux canadiennes du lac Sainte-Claire, à l’exception d’un individu vivant trouvé en 2005. Cependant, des spécimens vivants ont récemment été enregistrés dans la rivière Canard et à l’île Pelée. Dans la rivière Canard, 196 moules vivantes ont été observées dans 6 sites, dont 1 site au confluent des rivières Détroit et Canard en 2019 (MPO, données inédites). De plus, une étude récente menée dans les eaux américaines du lac Érié, du lac Sainte-Claire et des rivières Niagara et Détroit a permis d’identifier 780 individus vivants à 27 % des sites (n = 141) dans lesquels des relevés ont eu lieu (Zanatta et al. 2015), dont 6 sites dans l’ouest du lac Érié en 2011 et 2012 où l’on a trouvé des preuves de recrutement récent. Selon Zanatta et al. (2015), il s’agit d’une preuve d’une expansion géographique récente dans le lac Érié.

Bassin versant du lac Sainte-Claire

Delta de la rivière Sainte-Claire : Le delta de la rivière Sainte-Claire a fait l’objet de nombreux relevés au cours des 20 dernières années, mais aucune mulette feuille d’érable n’a été enregistrée jusqu’en 2005, lorsqu’un seul animal vivant a été recensé dans la baie Chematogan au cours d’un relevé en plongée avec tuba (McGoldrick et al. 2009). Aucun individu vivant n’a été détecté par la suite.

Rivière Thames : La rivière Thames a fait l’objet d’un vaste échantillonnage depuis le milieu des années 1990 et, malgré quelques enregistrements de mulettes feuille-d’érable dans le cours supérieur de la rivière, l’espèce est surtout présente dans les parties centrale et inférieure de la rivière (y compris 2 affluents, les ruisseaux McGregor et Baptiste). Un grand nombre de mulettes feuille-d’érable vivantes (par exemple, 225 provenant d’une seule excavation) a été détecté pendant les excavations en quadrat (1 m2) en 2010 (MPO, données inédites). Il n’y a pas de données disponibles pour déterminer si la taille de la population a changé au fil du temps dans la rivière Thames, bien que les données récentes sur le cours inférieur de la Thames indiquent une population en santé, avec 238 individus vivants enregistrés à 1 quadrat en 2016 (MPO, données inédites).

Rivière Puce : Un spécimen vivant a été enregistré en 2016 (MPO, données inédites) dans la rivière Puce, un affluent sur la rive sud du lac Sainte-Claire.

Drain du ruisseau Jacks (drain Rivard) : En 2017, 34 individus vivants ont été enregistrés dans le drain du ruisseau Jacks, situé au nord-est de la réserve nationale de faune du lac Sainte-Claire (MPO, données inédites).

Rivière Ruscom : En 1999, un relevé des unionidés a été effectué dans la rivière Ruscom (un affluent sur la rive sud du lac Sainte-Claire), et a produit 9 mulettes feuille-d’érable vivantes. Des relevés supplémentaires menés en 2010 ont révélé 26 mulettes feuille-d’érable (présentes à 2 des 6 sites; McNichols-O’Rourke et al. 2012); plusieurs classes de taille ont été enregistrées, prouvant un recrutement.

Rivière Sydenham (y compris les ruisseaux Black et Little Bear) : La mulette feuille d’érable a été enregistrée pour la première fois dans la rivière Sydenham en 1963 et y a été trouvée régulièrement dans des relevés postérieurs. Une évaluation de la mulette feuille d’érable dans la rivière Sydenham a permis de constater qu’elle avait été observée plus fréquemment et dans un plus grand nombre de sites pendant les relevés de 1999 à 2004 que dans les relevés antérieurs à 1991 (Metcalfe-Smith et al. 2003). L’aire de répartition de l’espèce dans ce réseau hydrographique s’étend de Wallaceburg jusqu’en amont d’Alvinston, dans la rivière East Sydenham. Dans la rivière North Sydenham, on trouve des mulettes feuille-d’érable dans le ruisseau Bear en aval de Petrolia et dans le ruisseau Black jusqu’au chemin Plowing Match, au nord. Des relevés dans les ruisseaux Bear et Black ont récemment permis d’identifier des centaines d’individus. Dans le ruisseau Bear, 229 moules vivantes ont été enregistrées en 2016, 148 en 2017 et 1 116 en 2018. Dans le ruisseau Black, 529 spécimens vivants ont été identifiés en 2017, et 106 en 2018. De nombreux emplacements de mulettes feuille-d’érable ont été échantillonnés dans l’ensemble de la rivière East Sydenham de 1997 à 2019, et on continue d’y trouver des individus vivants (Metcalfe-Smith et Zanatta 2003, Bouvier et Morris 2011; T. Morris, MPO, données inédites) . Les distributions de fréquences de taille sont indicatives du recrutement récent de la mulette feuille d’érable dans le réseau hydrographique de la rivière Sydenham.

Ruisseau Little Bear : Un individu vivant a été enregistré à l’embouchure du ruisseau Little Bear en 2017 (MPO, données inédites).

Bassin versant du lac Huron

Rivière Ausable : Le premier enregistrement de mulettes feuille-d’érable dans la rivière Ausable remonte à 2002, avec la capture de 9 spécimens vivants. L’échantillonnage subséquent à d’autres sites en 2004 a produit 9 autres individus à 3 autres sites. En 2006, un nouveau relevé a été mené au site de 2002 et a permis d’observer 19 mulettes feuille-d’érable vivantes (Office de protection de la nature d’Ausable-Bayfield [ABCA], données inédites). Un échantillonnage supplémentaire de 2008 à 2013 a confirmé que la mulette feuille d’érable est présente en faible nombre dans ce réseau hydrographique (ABCA, données inédites). Un échantillonnage plus récent en quadrats, effectué par l’ABCA en 2019, a permis d’identifier 31 individus à 2 sites (ABCA, données inédites). Les données sont insuffisantes pour déterminer si la taille de la population a changé au fil du temps dans la rivière Ausable, mais les distributions des fréquences de taille dénotent un recrutement récent.

Rivière Bayfield : L’espèce a été détectée pour la première fois en 2007, lorsqu’une seule mulette feuille d’érable a été identifiée (Morris et al. 2012a). Un échantillonnage limité des unionidés a été effectué dans la rivière Bayfield et, par conséquent, on ne sait pas pour le moment si elle abrite une population reproductrice de mulette feuille d’érable.

Affluents du sud du lac Huron : En 2014, l’Office de protection de la nature de la région de St. Clair a capturé 24 spécimens vivants dans 2 affluents qui se déversent dans le lac Huron (ruisseau Cow et ruisseau Perch/canal de dérivation Telfer) [SCRCA; E. Carroll, SCRCA, données inédites].

Bassin versant du lac Érié

Échancrures côtières du lac Érié : En 2015, le ministère des Richesses naturelles et des Forêts de l’Ontario a collecté 2 animaux vivants dans le lac Henry, sur l’île Pelée (OMNRF; COSEPAC 2016). Ce sont les premiers enregistrements connus d’individus vivants de l’espèce à cet endroit. Une enquête plus poussée en 2016 a permis de découvrir 74 individus vivants dans le lac Henry (MPO, données inédites). Des coquilles fraîches ont récemment été trouvées (2014 à 2015) dans la baie Rondeau (Reid et al. 2016), ce qui laisse supposer l’existence d’une population restante.

Rivière Grand : Les enregistrements de mulettes feuille-d’érable dans la rivière Grand remontent à 1885, et tous les enregistrements historiques ont eu lieu dans les 65 derniers kilomètres de la rivière, entre Onondaga et Port Maitland. La mulette feuille d’érable était l’espèce la plus abondante trouvée dans un relevé de 2011 (représentant 55 % des unionidés vivants trouvés); d’après la relation taille-fréquence, la population se reproduit avec succès, plusieurs animaux de presque toutes les tailles ayant été observés (Minke-Martin et al. 2015). L’échantillonnage intensif au nord de Caledonia n’a permis de trouver aucun individu avant 2019, lorsque 3 moules vivantes ont été repérées à 3 emplacements.

Bassin versant du lac Ontario

Rivière Welland : Il existe 2 enregistrements historiques de la mulette feuille d’érable dans la rivière Welland, mais aucun ne représente un individu vivant. Des relevés des unionidés ont été effectués en 2008 et 25 spécimens vivants ont été enregistrés à un site près de Warner (à environ 50 km en amont de l’emplacement historique); aucun n’a été trouvé à l’emplacement historique (Morris et al. 2012b). Le même site a été réexaminé en 2014 et 58 mulettes feuille‑d’érable y ont été trouvées (J.R Hoffman, Université Central Michigan, données inédites). D’autres relevés effectués en 2015 ont produit 69 spécimens vivants à 7 sites dans la rivière Welland, ainsi que 101 spécimens vivants à 2 sites dans le ruisseau Oswego et le ruisseau Coyle, 2 affluents de la rivière Welland (MPO, données inédites). Plus récemment, 203 spécimens vivants ont été échantillonnés en 2016, et 216 en 2017 (MPO, données inédites), dans la rivière Welland. Les distributions de fréquences de taille sont indicatives du recrutement récent de la mulette feuille d’érable dans le réseau hydrographique de la rivière Welland.

Échancrures côtières du lac Ontario : La mulette feuille d’érable a été observée dans le port de Jordan/ruisseau Twenty Mile, ainsi que dans les ruisseaux Sixteen Mile, Fifteen Mile/Pond et Cootes Paradise/Spencer (port de Hamilton) [Reid et al. 2014; MPO, données inédites; MRNF, données inédites].

Ruisseau Twenty Mile/port de Jordan : La première population de mulette feuille d’érable enregistrée dans le bassin versant du lac Ontario a été découverte dans le port de Jordan, où le ruisseau Twenty Mile pénètre dans le lac Ontario. En 2010, 3 valves fraîches et plus de 100 coquilles altérées ont été observées sur la rive nord-est du port de Jordan (Theysmeyer, comm. pers. 2010); toutefois, aucun spécimen vivant n’a été trouvé. D’autres relevés (2011 à 2015) ont constamment détecté l’espèce à plusieurs sites dans le réseau hydrographique du ruisseau Twenty Mile et du port de Jordan (Reid et al. 2014; MPO, données inédites, Reid et al. 2018). Les distributions de fréquences de taille donnent peu d’indications d’un recrutement récent, mais cela pourrait refléter la technique d’échantillonnage.

Ruisseau Sixteen Mile : La première population de mulette feuille d’érable enregistrée dans le cours inférieur du ruisseau Sixteen Mile a été signalée en 2013, lorsque 6 moules vivantes ont été trouvées à 2 endroits (Reid, comm. pers. 2014). Des moules vivantes ont été découvertes en amont des zones humides côtières, où aucune moule dreissénidée (moule zébrée [Dreissena polymorpha] et moule quagga [D. bugensis]) n’a été observée dans les eaux turbides.

Port de Hamilton : En 2015, 2 mulettes feuille-d’érable vivantes ont été recueillies à Cootes Paradise, dans le port de Hamilton (MPO, données inédites). Ces 2 spécimens étaient les 2 premiers enregistrements de l’espèce à cet emplacement. En 2018, 2 individus vivants ont été enregistrés dans la baie Carroll (MPO, données inédites).

Situation de la population

Bouvier et Morris (2011) ont produit des estimations de la population des rivières Ausable, Grand, Sydenham et Thames (tableau 3); l’estimation de la rivière Sydenham a été mise à jour conformément à COSEPAC (2016). Les populations présentées dans le tableau 3 ont toutes montré des signes de recrutement, tout comme la mulette feuille d’érable dans les rivières Welland et Ruscom. Les estimations de la taille des populations se limitaient à ces réseaux hydrographiques, car ce sont les seuls emplacements où des relevés quantitatifs avaient été effectués. Étant donné que bon nombre des estimations sont fondées sur un échantillonnage limité, elles ne doivent être utilisées que dans un sens relatif; les détails sur la méthodologie se trouvent dans Bouvier et Morris (2011) et COSEPAC (2016).

Tableau 3. Estimations de l’abondance de la mulette feuille d’érable (Bouvier et Morris 2011, COSEPAC 2016).
Plan d’eau Densité moyenne (individus/m2 ± ET) Zone d’occupation (km2) Taille de la population
Rivière Ausable 0,135 (± 0,121) 0,71 9 977 to 183 005
Rivière Grand 0,030a 10,83 324 831
Rivière Sydenhamb 0,370 (± 0,092) 5,80 1 612 579 to 2 679 898
Rivière Thames 0,508 (± 0,187) 11,73 3 765 144 to 8 144 262

a. L’estimation de la densitie n’est disponible que pour un seul site et l’ecart-type (ET) n’est donc pas disponible

b. T. Morris, MPO, données inédites

Villeuse irisée

Aire de répartition mondiale : La villeuse irisée était autrefois largement répandue dans l’est de l’Amérique du Nord, depuis l’État de New York et l’Ontario vers l’ouest jusqu’au Wisconsin, et vers le sud jusqu’à l’Oklahoma, l’Arkansas et l’Alabama. Aux États-Unis, elle a été enregistrée en Alabama, en Arkansas, dans l’Illinois, dans l’Indiana, au Kentucky, au Michigan, dans le Missouri, dans l’État de New York, en Caroline du Nord, dans le Dakota du Nord, en Ohio, dans l’Oklahoma, en Pennsylvanie, dans le Tennessee, en Virginie, en Virginie-Occidentale et dans le Wisconsin (NatureServe 2020; figure 3). L’aire de répartition actuelle de la villeuse irisée est semblable à son aire de répartition historique, mais elle a diminué à de nombreux endroits, en particulier dans les Grands Lacs (NatureServe 2020). Au Canada, la villeuse irisée n’est présente qu’en Ontario (figures 3 and 4; COSEPAC 2015).

carte, voir le description longue
Figure 3. Aire de répartition mondiale de la villeuse irisée (tirée de COSEPAC 2015).
Description longue

La figure 3 s’agit d’une carte de l’Amérique du Nord et de l’Amérique centrale, avec une zone ombragée qui met en évidence la répartition actuelle de la villeuse irisée, qui est similaire à sa répartition historique (dans tout l’est de l’Amérique du Nord, de New York et de l’Ontario vers l’ouest jusqu’au Wisconsin et vers le sud jusqu’en Oklahoma, en Arkansas et en Alabama). Aux États-Unis, il existe des mentions pour l’Alabama, l’Arkansas, l’Illinois, l’Indiana, le Kentucky, le Michigan, le Missouri, l’État de New York, la Caroline du Nord, le Dakota du Nord, l’Ohio, l’Oklahoma, la Pennsylvanie, le Tennessee, la Virginie, la Virginie-Occidentale et le Wisconsin. La carte montre qu’au Canada, la villeuse irisée n’est présente qu’en Ontario. L’échelle est de 40 km par 2 cm.

Aire de répartition au Canada : Au Canada, la villeuse irisée n’a été trouvée que dans le sud de l’Ontario. L’aire de répartition actuelle de l’espèce, collectée entre 1996 et 2022, est illustrée sur la figure 4. Des spécimens vivants ont été trouvés dans le delta de la rivière Sainte-Claire et dans les rivières Saugeen, Maitland, Bayfield, Ausable, Sydenham, Thames (North et Middle), Grand, Lower Trent, Moira et Salmon. La villeuse irisée semble avoir disparu de la rivière Détroit, du lac Érié, du cours inférieur de la rivière Grand, de la rivière Niagara et du lac Ontario, des régions qui ne semblent jamais avoir abrité de grandes populations (COSEPAC 2015).

carte, voir le description longue ci-dessous
Figure 4. Aire de répartition actuelle (1996 à 2022) et aire de répartition historique (1890 à 1995) de la villeuse irisée au Canada.
Description longue

La figure 4 s’agit d’une carte qui montre le sud-ouest de l’Ontario et la région des Grands Lacs inférieurs, une partie de l’est de l’Ontario ainsi que la frontière avec les États-Unis. La carte illustre la répartition actuelle et historique de la villeuse irisée au Canada, de la région des Grands Lacs inférieurs de l’Ontario, où elle était autrefois présente dans les bassins versants des lacs Sainte-Claire, Érié et Ontario. L’échelle est de 40 km par 2,5 cm.

La carte contient une légende qui montre ce qui suit :

  • Occurrence d’individus vivants de 1996 à 2022
  • Occurrence de coquilles fraîches de 1996 à 2022
  • Occurrence historique et récente (de 1860 à 1995) de coquilles altérées
  • Parcs
  • Zones bâties

Un encadré montre une vue d’ensemble d’une partie des Grands Lacs inférieurs dans le sud et l’est de l’Ontario ainsi que la frontière des États-Unis. Un encadré couvre une zone partielle du sud-ouest de l’Ontario et de la région des Grands Lacs inférieurs où l’occurrence actuelle et passée de la villeuse irisée a été établie.

Taille de la population canadienne : À ce jour, il semble qu’il reste 11 réseaux hydrographiques contenant des villeuses irisées en Ontario. Les estimations de la population canadienne ont été élaborées dans Bouvier et Morris (2011) et COSEPAC (2015); voir les renseignements détaillés dans le tableau 4. Les descriptions suivantes de l’aire de répartition connue de la villeuse irisée au Canada ont été adaptées de Bouvier et Morris (2011) et de COSEPAC (2015).

Grands Lacs et voies interlacustres

Des enregistrements historiques de la villeuse irisée existent pour la zone littorale du lac Érié (baie Long Point, baie Rondeau), du lac Ontario et du lac Sainte-Claire (rive sud), ainsi que pour les rivières Niagara et Détroit et un seul emplacement dans la rivière Sainte-Claire. Le dernier enregistrement de villeuse irisée dans ces plans d’eau remonte à 1994, lorsque 2 individus ont été trouvés dans la rivière Détroit. Des relevés ont été effectués après l’invasion par les moules dreissénidées dans tous les emplacements historiques de la villeuse irisée, et aucun individu vivant n’a été trouvé. Comme pour la plupart des autres unionidés, on croit que cette espèce est maintenant disparue des Grands Lacs et de ses principales voies interlacustres, principalement en raison des effets des moules dreissénidées.

Bassin versant du lac Sainte-Claire

Delta de la rivière Sainte-Claire : Il est possible que de petites populations isolées de villeuse irisée occupent le delta de la rivière Sainte-Claire, car des animaux vivants ont été observés sporadiquement en faible nombre depuis 1999. Zanatta et al. (2002) ont trouvé des villeuses irisées à 14 des 53 sites au large du delta de la rivière Sainte-Claire et le long de la rive est du lac Sainte-Claire. D’après l’échantillonnage effectué par Metcalfe-Smith (2004), il semble que l’espèce soit beaucoup plus commune dans les eaux littorales des États-Unis qu’au Canada. Les relevés de 2004 à 2006 et de 2011 ont permis de détecter la villeuse irisée à 3 des 17 sites. Des relevés effectués en 2016 dans la région de l’île Squirrel et de la baie Bass ont permis de recueillir 3 individus vivants à 1 site. De plus, les relevés de 2016 ont permis de trouver 3 individus vivants à 2 sites dans la région de la baie Pocket et de l’île Bassett, et 1 site a produit 3 individus vivants dans cette région en 2017 (MPO, données inédites).

Rivière Sydenham : C’est en 1963 que la villeuse irisée a été observée pour la première fois dans la rivière Sydenham et, les années suivantes, les observations ont été peu fréquentes, même si la rivière Sydenham est l’un des réseaux hydrographiques les plus étudiés en Ontario. On trouve l’espèce à la fois dans les rivières North Sydenham (ruisseau Bear) et East Sydenham, mais en faible nombre. Les études quantitatives menées à 15 sites de surveillance entre 1999 et 2003 par Metcalfe-Smith et al. (2007b) ont permis de capturer seulement 5 spécimens vivants. Sur ces 15 sites, 10 ont été rééchantillonnés en 2012 et 2013; 4 contenaient des villeuses irisées, mais encore une fois, en faible nombre (l’espèce est plus courante dans la rivière East Sydenham). On croit que la villeuse irisée est une espèce rare dans toute la rivière Sydenham et qu’elle n’y a probablement jamais été présente en grand nombre.

Rivière Thames (y compris les ruisseaux Otter, Fish, Medway, Stoney, Black, Dingman, North Branch et Oxbow) : La villeuse irisée est actuellement limitée à la rivière North Thames et à plusieurs de ses affluents, à un petit tronçon de la rivière Middle Thames et à 2 sites de la rivière South Thames, près d’Innerkip et de Dorchester (Mackie 2011; MPO, données inédites). En 2004-2005, on a effectué des relevés selon un temps déterminé à 37 sites dans les tronçons supérieur et inférieur du bassin versant. Des individus vivants n’ont été trouvés que dans les affluents du bassin versant supérieur, avec plus de 90 spécimens vivants trouvés (Morris et Edwards 2007). Les sites abritant le plus grand nombre de villeuses irisées se trouvaient dans les ruisseaux Otter, Fish et North Branch. Cependant, en 2018, on a découvert un site avec 73 individus vivants dans la rivière Middle Thames, près de Thamesford. Il semble que la villeuse irisée se trouve rarement dans la rivière Thames, mais qu’elle soit occasionnellement abondante dans les tronçons du cours central et de l’amont.

Bassin versant du lac Huron

Rivière Ausable : Peu d’enregistrements de villeuse irisée étaient connus avant 2002, lorsque les échantillonnages selon un temps déterminé et par quadrat ont produit 54 individus vivants. Les détections récentes (depuis 2006) sont toutes eu lieu dans les tronçons supérieurs qui s’étendent juste au nord de Brinsley jusqu’à Nairn, ainsi que dans 2 affluents : le ruisseau Nairn et la rivière Little Ausable (MPO, données inédites). Au total, la villeuse irisée réside dans 5 sites à l’heure actuelle, et il existe des enregistrements de coquilles altérées et de coquilles fraîches dans 8 sites supplémentaires. Plus récemment, on a trouvé 43 individus vivants dans 3 sites en 2018 et 11 individus vivants à 1 site en 2019 (MPO, données inédites).

Rivière Saugeen (y compris la rivière Teeswater) : La villeuse irisée a été observée pour la première fois dans la rivière Saugeen en 1993, avec la capture d’un seul spécimen vivant. Depuis 1998, d’autres échantillonnages ont été effectués à 22 nouveaux sites et ont détecté l’espèce dans les rivières Teeswater, North Saugeen, South Saugeen et Beatty Saugeen; la plus forte concentration se trouvait dans la rivière Teeswater. Morris (2007) a constaté que la villeuse irisée est largement répartie dans le bassin versant de la rivière Saugeen, mais qu’elle est numériquement rare. Des individus vivants ont été trouvés dans la moitié des sites ayant fait l’objet d’un relevé en 2011 (6 sur 12); la distribution de leur taille mesurée indique une reproduction et un recrutement continus (McNichols-O'Rourke et al. 2012).

Rivière Maitland : La villeuse irisée a été enregistrée pour la première fois dans la rivière Maitland dans les années 1930 et ne l’a été de nouveau qu’en 1998. L’échantillonnage récent (à 33 sites entre 1998 et 2012) dans le bassin hydrographique de la rivière Maitland a permis de détecter la présence de la villeuse irisée en densité élevée à plus de la moitié des sites, dont 10 dans des affluents représentant tous les bras de la rivière (rivières Middle Maitland, South Maitland et Little Maitland). On pense que la rivière Maitland abrite la plus grande population restante de villeuse irisée au Canada.

Rivière Bayfield : Une seule coquille fraîche recueillie en 2005 représente le premier enregistrement de la villeuse irisée dans la rivière Bayfield. En 2007 et en 2011, on a réalisé des relevés intensifs dans la rivière Bayfield et l’espèce a été détectée dans 9 des 18 sites suivants : 2 dans la rivière Bannockburn, 3 dans les tronçons amont du chenal principal (de Clinton à Vanastra), ainsi que 4 sites dans les eaux d’amont avec des coquilles seulement (Morris et al. 2012a). Aucun individu et aucune coquille n’a été trouvé dans les tronçons inférieurs de la rivière. En tout, 19 individus vivants ont été identifiés à 1 site dans la ville de Clinton en 2019 (MPO, données inédites).

Bassin versant du lac Érié

Rivière Grand (rivières Mallet et Conestogo) : L’abondance totale de la villeuse irisée dans la rivière Grand est faible, malgré de nombreux enregistrements historiques de l’espèce. Il n’y a qu’un seul enregistrement dans le cours inférieur de la rivière Grand depuis les années 1970, jusqu’à ce qu’on découvre 95 individus vivants dans 3 sites du ruisseau Boston en 2017 (MPO, données inédites). Quelques spécimens ont été détectés en 2012 et en 2014 dans le cours central de la rivière Grand (Gillis et al. 2017a). Plus récemment, des relevés dans la partie centrale de la rivière ont permis d’identifier plusieurs spécimens vivants à un site du parc Kiwanis en 2019, ainsi qu’à West Montrose en 2019 (MPO, données inédites). On a trouvé 40 villeuses irisées vivantes dans les eaux d’amont et les affluents de la rivière Grand depuis les années 1970. Sur les 34 spécimens découverts au cours de la dernière décennie, 3 provenaient de la rivière Mallet, 14 de la rivière Conestogo, et 17 des parties supérieures du bras principal de la rivière Grand. De nombreux enregistrements de coquilles altérées et de coquilles fraîches existent pour les rivières Mallet, Conestogo et Nith, ce qui donne à penser que cette zone héberge des populations répandues de villeuse irisée. Comme il n’y a pas eu de relevé sur la villeuse irisée dans les réseaux des eaux d’amont, l’aire de répartition de l’espèce pourrait s’étendre plus en amont dans le bassin versant.

Bassin versant du lac Ontario

Rivière Moira : Au total, 32 individus vivants ont été recueillis à 3 des 6 sites en 1996. Un relevé mené en 2014 a révélé que la villeuse irisée était largement répandue (à 14 des 17 sites des relevés), avec une aire de répartition de Tweed jusqu’à l’embouchure de la rivière, juste en amont, dans les zones les plus développées de Belleville (Reid et Morris 2017). De plus, on l’a trouvée en plus petit nombre dans 1 site pendant un relevé dans la rivière Skootamatta, un affluent de la rivière Moira (Reid et Morris 2017). En 2017, on a découvert 56 individus vivants à un site du ruisseau Parks et 10 moules vivantes à 2 sites dans le bras principal de la rivière Moira (MPO, données inédites).

Rivière Salmon : Dans la rivière Salmon, des relevés de la zone littorale ont produit plus de 100 coquilles altérées et quelques coquilles fraîches entre 2005 et 2010 (Schueler 2012), mais ce n’est qu’en 2011 que 4 individus vivants ont été signalés à 2 sites (S. Reid, MRNFO, données inédites). Des relevés ciblés menés en 2014 ont permis de détecter l’espèce à 5 des 7 sites (de Kingsford à un site entre Lonsdale et Milltown); aucune villeuse irisée n’a été trouvée aux 2 sites en amont (juste au sud de Tamworth) [Reid 2016]. En 2017, 11 individus vivants ont été identifiés à 2 sites (MPO, données inédites).

Rivière Trent : Les relevés effectués en 2013 dans le réseau hydrographique de la rivière Trent ont permis de dénombrer 195 individus vivants (sur un total de 9 sites), mais la plupart des sites se trouvaient dans de petits affluents (ruisseaux Rawdon, Cold, Burnley et Percy). Peu d’animaux vivants ont été trouvés dans les 2 sites situés dans le cours principal de la rivière Trent, à Meyer’s Reach et Glen Ross, où la moule zébrée était très abondante (Epp-Martindale, comm. pers. 2020). Des coquilles altérées ont été collectées dans le ruisseau Salt, ce qui indique que des populations pourraient avoir résidé à un moment donné dans cet affluent.

Situation de la population

Il est possible que la villeuse irisée soit en déclin dans le lac Sainte-Claire et les rivières Sydenham et Ausable, mais il existe des preuves de recrutement pour les populations détectées dans les rivières Thames, Saugeen, Bayfield, Moira, Salmon et Trent (COSEPAC 2015). On présente dans COSEPAC (2015) des estimations de l’abondance de la population villeuse irisée et de la zone d’occupation pour la plupart des emplacements au Canada (tableau 4). Les emplacements à l’est (par exemple, les rivières Moira, Salmon et Trent) ont été exclus en raison de l’absence de relevés quantitatifs, tout comme la rivière Détroit, le lac Érié, la rivière Niagara et le lac Ontario, d’où l’espèce semble disparue. Ces estimations remplacent les précédentes figurant dans Bouvier et Morris (2011), car elles contiennent des renseignements tirés des relevés quantitatifs récents. Étant donné que bon nombre des estimations sont fondées sur un échantillonnage quantitatif limité, elles ne doivent être utilisées que dans un sens relatif; davantage de détails sur la méthodologie et la justification se trouvent dans COSEPAC (2015).

Tableau 4. Estimations de l’abondance des populations de villeuse irisée au Canada (COSEPAC 2015).
Plan d’eau Densité moyenne (individus/m2 ± ET) Zone d’occupation (km2) Taille de la population
Rivière Ausable 0,07 ± 0,03 0,18 5 900 à 18 000
Rivière Bayfield 0,281 0,26 74 000
Rivière Grand 0,01 ± 0,01 3,89 4 700 à 45 000
Lac Sainte-Claire 0,0002a 6,82 1 500
Rivière Maitland 0,74 ± 0,40 5,69 2 000 000 à 6 500 000
Rivière Saugeen 0,31 ± 0,08 2,28 520 000 à 880 000
Rivière Sydenham 0,01 ± 0,00 1,24 17 000 à 18 000
Rivière Thames 0,06 ± 0,02 1,27 48 000 à 94 000

a. L’écart-type (ET) n’est pas disponible

4.3 Besoins des espèces

Besoins biologiques et en matière d’habitat

Mulette feuille d’érable

De la fraie au stade de glochidie enkystée : La biologie de la reproduction de la mulette feuille d’érable est semblable à celle de la plupart des unionidés (adaptation de Clarke 1981, Kat 1984). Lors de la fraie, les mâles libèrent leur sperme dans l’eau et les femelles se trouvant en aval le captent par filtration avec leurs branchies. Une fois les ovules fécondés, ils sont conservés jusqu’à ce qu’ils atteignent un stade larvaire appelé glochidie. La durée de la saison de couvaison chez la mulette feuille d’érable varie selon l’endroit, s’étalant de la fin du printemps au début de l’été au Canada (Clarke 1981). Dans la rivière Sydenham, des mulettes feuille-d’érable gravides ont été observées de la mi-juillet à la mi-août (T. Morris, MPO, données inédites). La mulette feuille d’érable est considérée comme ayant une gravidité de courte durée (tachytictique), couvant et libérant ses glochidies la même année (COSEPAC 2016). Les glochidies libérées sont des parasites obligatoires qui doivent s’attacher à un hôte approprié. De nombreuses espèces de moules d’eau douce ont élaboré des stratégies complexes d’attraction de l’hôte afin d’accroître la probabilité de rencontrer un hôte convenable (Zanatta et Murphy 2006).

Les unionidés ne peuvent pas réaliser leur cycle biologique s’ils ne disposent pas d’hôtes appropriés pour les glochidies. Si les populations d’hôtes disparaissent ou diminuent en deçà du seuil de viabilité d’une population de moule, le recrutement ne sera plus assuré et l’espèce de moule pourrait disparaître sur le plan fonctionnel (Bogan 1993). La plupart des hôtes communs semblent être des espèces de poissons, mais il existe peu de renseignements sur la spécificité des exigences relatives aux hôtes pour la mulette feuille d’érable. La barbue de rivière (Ictalurus punctatus) a servi de poisson-hôte (Schwebach et al. 2002) pour les populations canadiennes, et son aire de répartition chevauche celle des populations de mulette feuille d’érable (Bouvier et Morris 2011). La barbotte brune (Ameiurus nebulosus) est un autre poisson-hôte potentiel de la mulette feuille d’érable au Canada (COSEPAC 2016). Les glochidies demeureront enkystées jusqu’à leur métamorphose en juvéniles. On a noté des durées de fixation de 51 à 68 jours pour la mulette feuille d’érable, la température étant un facteur clé du temps de développement (Schwebach et al. 2002).

Juvéniles : Après la métamorphose des glochidies, les juvéniles se détachent eux-mêmes de l’hôte et tombent sur le substrat où ils commencent leur vie de moules autonomes. Les stades juvéniles des unionidés restent généralement enfouis dans les sédiments pendant un certain nombre d’années, un comportement qui s’applique probablement à la mulette feuille d’érable. Une étude des unionidés juvéniles en Virginie a révélé qu’ils étaient enfouis dans un substrat jusqu’à une profondeur de 8 cm, la majorité des individus se trouvant dans la couche de surface (Neves and Widlak 1987). Les juvéniles qui résident dans les sédiments consomment probablement des matières organiques interstitielles, comme des bactéries et des algues (for example, Yeager et al. 1994). Ils demeurent enfouis jusqu’à la maturité sexuelle, et émergent alors pour la dispersion et l’absorption des gamètes (Watters et al. 2001). On ignore les effets du type de substrat sur la survie des mulettes feuille-d’érable juvéniles.

Adultes : Au Canada, la mulette feuille d’érable est le plus souvent présente dans les lacs peu profonds, les retenues profondes des rivières, ainsi que dans les rivières et les échancrures de taille moyenne à grande au débit est lent à modéré (Clarke 1981, Parmalee et Bogan 1988, Watson 2000, Baitz et al. 2008). Le débit ne semble pas être une caractéristique limitative, car on a trouvé des mulettes feuille-d’érable dans des courants lents et rapides (Bouvier et Morris 2011). Les relevés effectués dans la rivière Grand ont révélé la présence de mulettes feuille-d’érable à des endroits où il y avait des rochers, des galets, du gravier, et tous les sites présentaient un degré de vase (Mackie 2012). Le substrat dominant utilisé par la mulette feuille d’érable est variable, mais des études récentes ont découvert l’espèce dans des sites dominés par la boue, la vase, le limon, les détritus, le gravier, l’argile et les gravats (Wright et al. 2017, Reid et al. 2018, Morris et al. 2020, Wright et al. 2020). Dans la rivière Ausable, la mulette feuille d’érable a été trouvée exclusivement à la station de relevé présentant les caractéristiques de débit les plus faibles (Baitz et al. 2008). On ignore sa tolérance thermique, mais les plages de température enregistrées dans les rivières canadiennes occupées vont de près du point de congélation à environ 27 °C.

La capacité de dispersion des unionidés adultes est très limitée. Bien que les adultes puissent se déplacer vers l’amont ou l’aval, un déplacement net en aval au fil du temps a été enregistré(Balfour et Smock 1995). On connaît mal les besoins nutritionnels des unionidés et il n’existe pas d’études propres à la mulette feuille d’érable. En extrapolant à partir d’études sur l’alimentation d’autres unionidés, on peut penser que la mulette feuille d’érable ingère probablement des matières organiques particulaires à la fois en suspension (Nichols et Garling 2000) et déposées (Raikow et Hamilton 2001), avec une sélection possible de phytoplanctons et de bactéries.

Facteurs limitatifs : Les facteurs de la reproduction et de la dispersion pourraient constituer les facteurs limitatifs les plus importants pour la mulette feuille d’érable. La disponibilité de poissons-hôtes auxquels les glochidies peuvent se fixer peut inhiber la croissance et la dispersion des populations d’unionidés, et la période de fixation des glochidies au poisson-hôte peut être très limitée. Le principal moyen de dispersion à grande échelle, de déplacement en amont et d’invasion d’un nouvel habitat ou de survie dans un habitat qui se détériore se limite au stade de la glochidie enkystée sur le poisson-hôte. Si les populations de poissons-hôtes disparaissent ou diminuent en deçà du seuil de viabilité d’une population de moule, le recrutement ne sera plus assuré et l’espèce de moule pourrait disparaître sur le plan fonctionnel (Bogan 1993). La disponibilité et la santé de l’espèce hôte peuvent donc constituer une limite pour l’espèce. On sait que diverses espèces de mammifères et de poissons se nourrissent d’unionidés (Fuller 1974). La prédation par des animaux terrestres, comme le rat musqué, s’est révélée être un facteur limitatif important pour certaines populations (Neves et Odom 1989). On sait que le rat musqué se nourrit de mulettes feuille-d’érable (Nakato et al. 2007), mais on n’a pas signalé qu’il consomme des villeuses irisées. En Ontario, on a constaté que les ratons laveurs (Procyon lotor) s’attaquent aux unionidés (COSEPAC 2015), mais on ne sait pas s’ils ciblent la mulette feuille d’érable ou la villeuse irisée. Il y a peu d’information sur les effets directs de la prédation sur les unionidés au Canada, mais on le croit assez faible (Bouvier et Morris 2011).

Villeuse irisée

De la fraie au stade de glochidie enkystée : La biologie de la reproduction de la villeuse irisée suit la biologie générale de la reproduction de la plupart des unionidés – voir l’information présentée ci-dessus pour la mulette feuille d’érable. Contrairement à la mulette feuille d’érable, qui a une gravidité de courte durée, la villeuse irisée est bradytictique (gravidité de longue durée); elle se reproduit à la fin de l’été, couve les glochidies pendant l’hiver et les libère au début du printemps (Watters et al. 2009). Au moment de la libération, les glochidies doivent s’attacher à un hôte approprié, qui semble confiné aux espèces de poissons pour la villeuse irisée. La femelle utilise un leurre visuel pour attirer les poissons-hôtes; la clarté de l’eau pourrait donc être importante pour le succès de la reproduction. Elle a un manteau modifié qui imite la forme et le mouvement d’une écrevisse; lorsqu’un poisson approche ou attaque ce leurre, la moule femelle expulse ses glochidies, ce qui facilite leur fixation aux branchies du poisson. Les glochidies s’enkystent sur l’hôte et se développent de 21 à 69 jours (selon la température) jusqu’à leur métamorphose en juvéniles (Woolnough et al. 2007). Les poissons‑hôtes connus, déterminés lors des transformations en laboratoire pour la villeuse irisée, comprennent : le crapet vert (Lepomis cyanellus), le dard vert (Etheostoma blennioides), le chabot tacheté (Cottus bairdii), le dard arc-en-ciel (E. caeruleum), l’achigan à petite bouche (Micropterus dolomieu), le méné rayé (Luxilus chrysocephalus) et la perchaude (Perca flavescens). Bon nombre de ces espèces sont courantes dans l’ensemble de l’aire de répartition de la moule au Canada (Watters et O’Dee 1997, Scott et Crossman 1998, Watters et al. 2005); le crapet vert, le dard vert et le méné rayé ne sont pas présents dans les parties plus à l’est de l’aire de répartition de la villeuse irisée. À ce jour, 4 hôtes de la villeuse irisée ont été identifiés en Ontario dans le cadre d’études en laboratoire : l’achigan à grande bouche (M. salmoides), le chabot tacheté, la perchaude et le crapet de roche (Ambloplites rupestris) [Woolnough et al. 2007, McNichols et al. 2008]. Les glochidies demeureront enkystées jusqu’à leur métamorphose en juvéniles.

Juvéniles : Pour l’habitat des juvéniles et leurs besoins biologiques, voir les renseignements présentés ci-dessus pour la mulette feuille d’érable. Certains ont avancé que la survie des villeuses irisées juvéniles peut être considérablement influencée par le type de substrat (Hua et al. 2013). Une étude des unionidés juvéniles en Virginie a permis de découvrir des individus de plusieurs espèces enfouis dans le substrat jusqu’à une profondeur de 8 cm (Neves et Widlak 1987). Cependant, en laboratoire, on a découvert que les villeuses irisées juvéniles s’enfouissaient dans moins de 1 cm dans les sédiments (Yeager et al. 1994).

Adultes : Comme tous les unionidés, la villeuse irisée est un animal sédentaire qui s’enfouit partiellement ou complètement dans le substrat des rivières ou des lacs. Elle est plus abondante dans les petits et moyens cours d’eau (Van der Schalie 1938, Strayer 1983, Parmalee et Bogan 1988), mais elle vit aussi dans les lacs intérieurs et s’est déjà trouvée dans toutes les zones peu profondes proches des rives des Grands Lacs inférieurs et des voies interlacustres, dans des substrats fermes de sable et de gravier (Clarke 1981, Strayer et Jirka 1997, Zanatta et al. 2002). Dans les rivières, la villeuse irisée se trouve ordinairement dans les radiers ou dans leur voisinage et à la lisière de la végétation émergente, dans des courants modérés à forts (Metcalfe-Smith et al. 2005, COSEPAC 2015), où elle occupe des mélanges de substrat composés de galets, de gravier, de sable et, parfois, de vase ou de rochers (COSEPAC 2015). L’espèce est la plus abondante dans les tronçons propres et bien oxygénés, à des profondeurs inférieures à 1 m (Van der Schalie 1938, Parmalee et Bogan 1988, Gordon et Layzer 1989).

Les capacités de dispersion de l’adulte sont très limitées, comme pour les unionidés en général. On ignore ses besoins nutritionnels précis.

Facteurs limitatifs : Comme ci-dessus pour la mulette feuille d’érable.

5 Menaces

5.1 Évaluation des menaces

Les rapports de situation du COSEPAC (COSEPAC 2015, 2016), l’évaluation du potentiel de rétablissement qui incluait les 2 espèces (Bouvier et Morris 2011, MPO 2011) et les programmes de rétablissement proposés qui ont été publiés en 2016 (MPO 2016a, MPO 2016b) ont servi à évaluer et à établir l’ordre de priorité des menaces pesant sur la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée. L’évaluation et l’ordre de priorité des menaces reposent avant tout sur l’évaluation du potentiel de rétablissement (Bouvier et Morris 2011, MPO 2011). Pour en savoir plus sur le processus d’évaluation des menaces, veuillez consulter les Lignes directrices sur l’évaluation des menaces, des risques écologiques et des répercussions écologiques pour les espèces en péril (MPO 2014). Les catégories d’évaluation précises ainsi que les classements associés utilisés pour l’évaluation des menaces sont décrits aux tableaux 5 et 6. Le niveau de la menace représente une combinaison des effets actuels de la menace (et non les effets potentiels) et de la probabilité de la menace à un emplacement. Il ne reflète pas les effets potentiels qu’une menace peut avoir sur une population d’unionidés au cas où ces effets auraient lieu plus tard (voir davantage de précisions dans Bouvier et Morris 2011).

Tableau 5. Évaluation de la menace à l’échelle de la population pesant sur le mulette feuille d’érable en Ontario. Le chiffre entre parenthèses fait référence au niveau de certitude associé aux effets de la menace et est classifié comme suit : 1= études causales; 2 = études corrélatives; et 3 = opinions d’experts. Tableau modifié d’après Bouvier et Morris (2011).
Menace Rivière Détroit/ rivière Canard Rivière Ruscom / rivière Puce Drain du ruisseau Jacks (drain Rivard) Delta de la rivière Sainte-Claire Ruisseau Little Bear Rivière Sydenham Cours inférieur de la rivière Thames
Espèces envahissantes Élevée Élevée (2) Moyenne Élevée (2) Moyenne Moyenne (2) Élevée (2)
Turbidité et charge en sédiments Moyenne Moyenne (3) Moyenne Faible (3) Moyenne Moyenne (3) Moyenne (3)
Contaminants et substances toxiques Élevée Élevée (3) Élevée Élevée (3) Élevée Élevée (3) Élevée (3)
Charge en éléments nutritifs Moyenne Moyenne (3) Moyenne Faible (3) Moyenne Moyenne (3) Moyenne (3)
Modification des régimes d’écoulement  s.o.a Moyenne (3) Faible s.o.a Faible Moyenne (3) Moyenne (3)
Destruction et altérations de l’habitat Élevée Élevée (3) Élevée Moyenne (3) Élevée Élevée (3) Élevée (3)
Manque d’accès aux poissons‑hôtes Moyenne Moyenne (3) Moyenne Moyenne (3) Moyenne Moyenne (3) Moyenne (3)
Activités récréatives Faible Inconnue (3) Faible Faible (3) Faible Faible (3) Faible (3)

a. s.o. = sans objet

Menace Rivière Ausable Rivière Bayfield Affluents du sud du lac Huron Île Pelée Rivière Grand Port de Hamilton Port de Jordan Rivière Welland Ruisseau Sixteen Mile
Espèces envahissantes Moyenne (2) Moyenne (2) Moyenne Élevée Élevée (2) Élevée Élevée (2) Moyenne (2) Élevée
Turbidité et charge en sédiments Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne Moyenne Moyenne (2) Moyenne Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne
Contaminants et substances toxiques Élevée (3) Élevée (3) Élevée Inconnu Élevée (2) Élevée Élevée (3) Élevée (3) Élevée
Charge en éléments nutritifs Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne Faible Moyenne (2) Élevée Moyenne (3) Moyenne (3) Élevée
Modification des régimes d’écoulement Moyenne (3) Élevée (3) Faible s.o.a Moyenne (2) s.o.a s.o.a Faible (3) Élevée
Destruction et altérations de l’habitat Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne Faible Élevée (2) Moyenne Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne
Manque d’accès aux poissons-hôtes Moyenne (2) Moyenne (3) Moyenne Moyenne Élevée (3) Moyenne Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne
Activités récréatives Faible (3) Faible (3) Faible Faible Faible (3) Faible Faible (3) Faible (3) Faible

a. s.o. = sans objet

Tableau 6. Résumé des menaces pesant sur la villeuse irisée au Canada. Le chiffre entre parenthèses fait référence au niveau de certitude associé aux effets de la menace et est classifié comme suit : 1= études causales; 2 = études corrélatives; et 3 = opinions d’experts. Tableau modifié d’après Bouvier et Morris (2011)
Menace Delta de la rivière Sainte-Claire Rivière Saugeen Rivière Maitland Rivière Ausable Rivière Bayfield
Espèces envahissantes Élevée (2) Moyenne (2) Moyenne (2) Moyenne (2) Moyenne (2)
Turbidité et charge en sédiments Moyenne (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3)
Contaminants et substances toxiques Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3)
Charge en éléments nutritifs Moyenne (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3)
Modification des régimes d’écoulement s.o.a Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne (3) Élevée (3)
Destruction et altérations de l’habitat Moyenne (3) Élevée (3) Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne (3)
Manque d’accès aux poissons-hôtes Élevée (3) Élevée (3) Moyenne (3) Moyenne (2) Moyenne (3)
Activités récréatives Faible (3) Faible (3) Faible (3) Faible (3) Faible (3)

a. s.o. = sans objet

Menace Rivière Sydenham Cours supérieur de la rivière Thames Rivière Grand Rivière Trent Rivière Moira Rivière Salmon
Espèces envahissantes Moyenne (2) Élevée (2) Élevée (2) Élevée (2) Élevée (2) Élevée (2)
Turbidité et charge en sédiments Élevée (3) Élevée (3) Élevée (2) Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne (3)
Contaminants et substances toxiques Élevée (3) Élevée (3) Élevée (2) Élevée (3) Élevée (3) Moyenne (3)
Charge en éléments nutritifs Élevée (3) Élevée (3) Élevée (2) Moyenne (3) Moyenne (3) Moyenne (3)
Modification des régimes d’écoulement Moyenne (3) Élevée (3) Moyenne (2) Élevée (3) Moyenne (3) Moyenne (3)
Destruction et altérations de l’habitat Élevée (3) Élevée (3) Élevée (2) Élevée (3) Moyenne (3) Moyenne (3)
Manque d’accès aux poissons-hôtes Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3) Élevée (3) Moyenne (3) Moyenne (3)
Activités récréatives Faible (3) Faible (3) Faible (3) Faible (3) Faible (3) Faible (3)

5.2 Description des menaces

Mulette feuille d’érable et villeuse irisée

Les brèves descriptions qui suivent mettent l’accent sur les principales menaces qui pèsent actuellement sur les populations de mulette feuille d’érable et de villeuse irisée au Canada. Une grande partie de l’information a été résumée à partir de Bouvier et Morris 2011 et de COSEPAC 2015, 2016.

Espèces envahissantes : Les moules dreissénidées envahissantes ont eu de profondes répercussions sur les communautés d’unionidés au Canada (Ricciardi et al. 1998) Les moules dreissénidées qui s’attachent directement sur les unionidés peuvent interférer avec l’alimentation, la locomotion, la respiration et l’excrétion (Haag et al. 1993, Schloesser et al. 1996). Les dreissénidées dépendent de la dispersion passive de leurs larves et sont donc généralement incapables de se déplacer en amont, contrairement aux unionidés qui utilisent des poissons-hôtes pour faciliter leur dispersion en amont (Mackie 1991). De ce fait, les dreissénidées constituent une menace importante pour l’habitat lacustre des unionidés. La perte apparente de mulettes feuille-d’érable et de villeuses irisées des Grands Lacs inférieurs et des voies interlacustres serait directement liée à l’invasion des dreissénidées dans ces réseaux, depuis le milieu à la fin des années 1980 (Schloesser et Nalepa 1994, Nalepa et al. 1996). Les dreissénidées menacent et limitent également la répartition des unionidés dans le delta de la rivière Sainte-Claire (Metcalfe-Smith et al. 2007a, Metcalfe-Smith et al. 2007b)

Les dreissénidées pourraient également constituer une menace pour les populations riveraines d’unionidés si elles s’établissaient dans des réservoirs (Bouvier et Morris 2011). Des dreissénidées ont été signalées dans 2 réservoirs de la rivière Thames (UTRCA 2003) et dans tout le cours inférieur de la rivière Thames, du réservoir Fanshawe à l’embouchure de la rivière (Morris et Edwards 2007). Les unionidés de la rivière Grand sont très vulnérables aux dreissénidées, car la rivière est fortement endiguée. L’infestation par les dreissénidées des réservoirs Luther, Belwood, Guelph ou Conestogo pourrait avoir des répercussions importantes sur les populations d’unionidés (Metcalfe-Smith et al. 2000). Heureusement, dans certains cas, la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée ont la capacité de coexister avec les dreissénidées dans les régions où les densités de ces dernières sont relativement faibles. Par exemple, la mulette feuille d’érable, dans le cours inférieur de la rivière Grand (près de Port Maitland), semble survivre à une infestation de dreissénidées, comme le démontre la présence d’individus vivants recouverts de byssus (signe qu’ils avaient été infestés; Staton, comm. pers. 2016); et en aval des réservoirs du cours supérieur de la rivière Thames, des villeuses irisées coexistent avec les dreissénidées depuis plus de 15 ans. Si elles s’introduisent dans les réservoirs Wildwood ou Pittock, dans les tronçons supérieurs du bassin versant de la rivière Thames, les dreissénidées constitueront une grave menace pour la population de villeuse irisée de la rivière. Les dreissénidées sont abondantes dans toute la rivière Trent, y compris aux sites où on a trouvé des villeuses irisées en 2013 et à de nombreux sites dans la rivière Moira, et sont également présentes dans le bassin versant de la rivière Salmon (par exemple, lac Beaver) [Reid et Hogg, comm. pers. 2014].

D’autres espèces envahissantes peuvent avoir des effets indirects sur la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée parce qu’elles perturbent les relations avec le poisson-hôte. Par exemple, on constate un échec du recrutement et une forte diminution de l’abondance du chabot tacheté dans le bassin des Grands Lacs depuis l’introduction du gobie à taches noires (Neogobius melanostomus) [Dubs et Corkum 1996, Janssen et Jude 2001]. Poos et al. (2010) ont documenté l’invasion vers l’amont du gobie à taches noires dans les cours inférieurs de plusieurs rivières, y compris les rivières Ausable, Sydenham, Thames et Grand. Le gobie à taches noires est abondant et répandu dans la rivière Trent et à des sites où on a trouvé des villeuses irisées en 2013 (Reid et Hogg, comm. pers. 2014). Le gobie à taches noires pourrait être un puits de reproduction, car on l’a observé infesté par les glochidies de la villeuse irisée, mais un faible nombre de ces glochidies réussissent leur métamorphose (Tremblay et al. 2016)

Turbidité et charge en sédiments : Les apports élevés de limon peuvent toucher les unionidés en perturbant les fonctions de reproduction (diminuent la probabilité d’attirer un poisson-hôte approprié par leur leurre visuel), obstruent les structures des branchies et inhibent l’absorption de l’oxygène ou encore bloquent les siphons (Tuttle-Raycraft et al. 2017); la vulnérabilité à l’envasement varie d’une espèce à l’autre. L’érosion due à de mauvaises pratiques agricoles peut entraîner l’envasement et le déplacement des substrats, risquant d’étouffer les unionidés. Différentes pratiques agricoles peuvent accroître les taux d’envasement : l’accès du bétail aux cours d’eau, qui peut rendre les berges instables; l’installation de systèmes de drainage par canalisations enterrées; et l’élimination de la végétation riveraine.

La principale utilisation des terres dans les bassins des rivières Ausable et Sydenham est l’agriculture. Le bassin versant de la rivière Ausable a été considérablement modifié (Bouvier et Morris 2011); on estime qu’en 1983, 85 % des terres de ce bassin avaient été converties de forêt et de zones humides en terres agricoles et que des systèmes de drainage par canalisations enterrées sont maintenant installés dans 70 % des terres (Nelson et al. 2003). Le bassin versant de la rivière Sydenham est constitué à plus de 85 % de terres agricoles, et de vastes zones en bordure de la rivière ont peu ou pas de végétation riveraine (Dextrase et al. 2003). On a signalé que les matières en suspension pouvaient atteindre 900 mg/L (Dextrase et al. 2003), un niveau qui aurait une incidence négative sur les populations d’unionidés (Bouvier et Morris 2011). Dans la rivière Grand, l’intensification de la pression agricole a eu une incidence sur la qualité de l’eau, entraînant une augmentation de la turbidité et des charges en sédiments; cependant, ce sont les espèces présentes dans le cours inférieur de la rivière Grand (par exemple, la mulette feuille d’érable) qui sont principalement touchées (Bouvier et Morris 2011, COSEPAC 2016). On estime que plus de 75 % des terres du cours supérieur de la rivière Thames, où la villeuse irisée est présente, sont utilisées à des fins agricoles (UTRCA 2012). Le cours supérieur de la rivière Thames est considéré comme étant moyennement turbide (COSEPAC 2015), et de vastes zones en bordure de la rivière ont peu ou pas de végétation riveraine (Taylor et al. 2004). On sait également que la présence d’un barrage de basse chute près de l’embouchure de la rivière à Dunnville contribue à la dégradation (par exemple, des niveaux élevés d’éléments nutritifs et une faible teneur en oxygène), à des conditions très turbides dans le tronçon des 30 derniers kilomètres de la rivière Grand où se trouve la mulette feuille d’érable (MacDougall et Ryan 2012). Le delta de la rivière Sainte-Claire est considéré comme étant moins touché par cette menace, car il jouit de protections en tant que territoire de la Première Nation de Walpole Island (Bouvier et Morris 2011).

Contaminants et substances toxiques : Les contaminants peuvent pénétrer dans l’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée de diverses façons, comme l’agriculture et le ruissellement des routes, ainsi que les égouts industriels et pluviaux. Les contaminants potentiels sont les pesticides, les sels de voirie, les hydrocarbures et les métaux lourds. D’après des études récentes des effets des pesticides sur les premiers stades biologiques, les unionidés sont relativement sensibles aux pesticides (Bringolf et al. 2007), aux métaux lourds (Keller et Zam 1990, Jacobson et al. 1997), à l’acidité (Huebner et Pynnonen 1992) et à la salinité (Gillis 2011). En tant que filtreurs benthiques, ils peuvent être exposés à des contaminants en phase dissoute (c’est-à-dire dans la colonne d’eau) et dans les sédiments (en suspension et déposés). Les unionidés juvéniles demeurent enfouis dans les sédiments pendant les premières années de leur vie, durant lesquelles ils se nourrissent alors exclusivement de particules tirées de l’eau interstitielle. Un tel comportement peut accroître leur exposition aux contaminants liés aux sédiments au cours de ce stade biologique précoce sensible (Yeager et al. 1994), ce qui pourrait avoir des répercussions sur la survie des espèces particulièrement sensibles aux produits chimiques toxiques. On n’a pas encore testé la sensibilité de la majorité des unionidés à la plupart des contaminants; par conséquent, il est souvent nécessaire d’extrapoler la sensibilité aux produits chimiques lorsqu’on connaît celle d’espèces étroitement apparentées (Raimondo et al. 2016).

La toxicité du sel de voirie pour les glochidies des unionidés a été démontrée (Gillis 2011, Pandolfo et al. 2012). Prosser et ses collaborateurs (2017) ont mené une évaluation probabiliste des risques posés par le chlorure pour les glochidies des unionidés, qui a révélé que l’exposition chronique à des concentrations élevées de chlorure pouvait présenter un risque pour les unionidés. Selon Todd et Kaltenecker (2012), l’utilisation à long terme de sels de voirie contribue à l’augmentation des concentrations de chlorure de référence dans les habitats des unionidés en péril dans le sud de l’Ontario, ce qui pourrait avoir une incidence sur le recrutement de populations d’unionidés en péril; la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée sont présentes dans bon nombre de ces habitats. Bien que les recommandations fédérales actuelles sur la qualité de l’eau qui visent à assurer la protection de la vie aquatique aient été fixées à 120 mg/L pour les expositions chroniques au chlorure, ce niveau ne sera peut-être pas suffisant pour protéger les glochidies de certaines espèces d’unionidés en péril dans le sud de l’Ontario (CCME 2011).

De nombreuses formes de pollution résultant de l’empiétement humain, comme le développement résidentiel et urbain, peuvent être présentes dans l’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée (par exemple, le ruissellement d’engrais et de pesticides pour pelouses, de sels de voirie et de métaux lourds provenant de sources industrielles). L’exposition aux effluents d’eaux usées municipales peut nuire à la santé des unionidés (Gagné et al. 2004, Gagnon et al. 2006). Les produits pharmaceutiques pénètrent dans les cours d’eau, les rivières et les lacs, en grande partie dans les effluents des usines de traitement des eaux usées. Les effets possibles de ces produits chimiques sur le système endocrinien et la reproduction sont de plus en plus préoccupants pour le biote aquatique; le travail connexe sur les unionidés en est à ses débuts(de Solla et al. 2016, Gilroy et al. 2017), mais il y a lieu de s’inquiéter puisque des effets importants sur les communautés de poissons d’eau douce ont été démontrés (Kidd et al. 2007). Dans la rivière Grand, des travaux récents de Tetreault et ses collaborateurs (2011) ont documenté la féminisation de certains poissons, y compris d’espèces de poissons présumées hôtes. Bien que de tels effets n’aient pas été décrits pour les unionidés dans les rivières du sud de l’Ontario, au Québec, Gagné et ses collaborateurs (2011) ont déterminé que chez l’elliptio de l’Est (Elliptio complanata), la proportion de femelles augmentait de façon spectaculaire et les mâles présentaient une protéine propre aux femelles en aval d’un point de rejet d’effluent municipal. Cela indique que la pollution perturbe la physiologie des gonades et la reproduction de cette espèce.

Mackie (1991) a signalé que les agents de stress anthropiques (par exemple, la pollution des eaux usées) présents en aval des centres urbains étaient responsables d’une grande partie des dommages causés aux assemblages d’unionidés dans la rivière Grand. Une étude récente qui évaluait les effets cumulatifs du ruissellement urbain et des effluents d’eaux usées municipales sur les unionidés de la rivière Grand a permis de conclure que l’exposition chronique à plusieurs contaminants (par exemple, l’ammoniac, le chlorure et les métaux, comme le cuivre, le plomb et le zinc) contribuait au déclin des populations d’unionidés dans ce bassin versant (Gillis 2012); l’auteur a également confirmé cet effet négatif par une étude de suivi qui a révélé l’existence d’une « zone morte » immédiatement en aval de l’émissaire d’une usine de traitement des eaux usées près de Kitchener, où aucun unionidé vivant n’a été détecté sur plusieurs kilomètres. On a signalé que des modifications de la structure des populations et des communautés d’unionidés étaient liées à l’urbanisation des rivières Grand et Speed (Gillis et al. 2017a, Gillis et al. 2017b).

Dans le bassin versant de la rivière Grand, les niveaux de cuivre ont dépassé les lignes directrices fédérales dans plusieurs sous-bassins (Office de protection de la nature de la rivière Grand 2006). Ils sont supérieurs aux lignes directrices fédérales dans la rivière Middle Maitland (Kenny, comm. pers. 2009) et dans plusieurs sous-bassins du bassin versant de la rivière Thames (Morris et al. 2008). Dans le bassin versant de la rivière Welland, des recherches récentes ont indiqué la présence de concentrations très élevées de composés perfluorés et polyfluorés (par exemple, l’acide perfluorooctanesulfonique) dans le biote du lac Niapenco, dans le bassin versant supérieur, et la source de la contamination a été attribuée à l’aéroport de Hamilton, en amont (de Solla et al. 2012). La contamination par les composés fluorés est préoccupante pour la mulette feuille d’érable (ainsi que d’autres unionidés) présente plus en aval dans la rivière Welland, car des résultats de laboratoire récents ont indiqué que les glochidies en couvaison de certaines espèces de moules sont très sensibles à ces contaminants et comptent parmi les organismes les plus sensibles testés à ce jour (Hazelton et al. 2012).

L’utilisation de lampricides chimiques est l’une des nombreuses tactiques utilisées pour lutter contre la lamproie marine (Petromyzon marinus) dans les cours d’eau natals du bassin des Grands Lacs (MPO 2021). L’un de ces lampricides, le Bayluscide granulaire, est une composante importante des efforts binationaux de lutte contre la lamproie marine dans les Grands Lacs, mais aussi un molluscicide connu (Andrews et al. 2021). Jusqu’à récemment, très peu de données avaient été publiées sur les effets du Bayluscide granulaire sur les espèces aquatiques en péril dans les Grands Lacs. Andrews et ses collaborateurs (2021) ont constaté que le risque lié à l’application de Bayluscide granulaire pour la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée était faible par rapport aux autres espèces de moules en péril. De plus, la mortalité médiane estimée résultant d’une application de Bayluscide granulaire dans la rivière Sydenham était de zéro pour les 2 espèces, et elle était proche de zéro pour la mulette feuille d’érable dans la rivière Thames (Smyth et Drake 2021). Bien que le risque soit faible, il est possible que l’application de ce lampricide tue des dizaines ou des centaines d’individus de ces espèces d’après l’exercice de modélisation publié par Smyth et Drake (2021). Par exemple, environ 5 % du temps, un cycle d’application de Bayluscide granulaire devrait tuer des dizaines de mulettes feuille-d’érable et de villeuses irisées dans la rivière Sydenham, de même que des dizaines de mulettes feuille-d’érable et des centaines de villeuses irisées dans la rivière Thames (Smyth et Drake 2021).

Charge en éléments nutritifs : La principale préoccupation entourant les charges en éléments nutritifs dans l’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée concerne les effets de l’eutrophisation, c’est-à-dire les proliférations d’algues qui peuvent entraîner un appauvrissement en oxygène et l’apparition de toxines algales. Par exemple, on a observé une réduction de la croissance chez les unionidés lorsque les niveaux de cyanobactéries sont élevés (Bartsch et al. 2017). Une corrélation négative a été trouvée entre les concentrations de phosphore et d’azote et l’abondance de la lampsile fasciolée (Lampsilis fasciola) dans divers cours d’eau du sud-ouest de l’Ontario (Morris et al. 2008). De plus, les moules juvéniles peuvent être particulièrement sensibles à l’ammoniac (Goudreau et al. 1993, Mummert et al. 2003), qui a été mesuré à des concentrations dépassant les lignes directrices fédérales dans l’aire de répartition de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée (Morris et al. 2008). Mummert et ses collaborateurs (2003) ont constaté que les villeuses irisées juvéniles étaient parmi les organismes aquatiques les plus sensibles à l’ammoniac non ionisé et que ce contaminant pouvait limiter la répartition de l’espèce dans certains réseaux hydrographiques. La sensibilité de la mulette feuille d’érable à l’ammoniac n’a pas encore été testée.

Le potentiel de ruissellement des engrais doit être pris en compte dans le cas de l’agriculture. Les déversements accidentels qui peuvent réduire la quantité d’oxygène dissous peuvent avoir une influence négative sur les populations d’unionidés (Tetzloff 2001). Certaines des charges de phosphore et d’azote les plus élevées du bassin des Grands Lacs ont été relevées dans la rivière Thames (WQB 1989). En particulier, le cours inférieur de la rivière est fortement touché par les activités agricoles. Les concentrations de phosphore dans la rivière Sydenham dépassent souvent les objectifs provinciaux de qualité de l’eau (Dextrase et al. 2003), et la qualité de l’eau de la rivière Ausable est généralement considérée comme mauvaise, en raison du ruissellement agricole et de l’infiltration du fumier (Nelson et al. 2003). Les concentrations de phosphore total dans la rivière Ausable sont souvent supérieures à l’objectif provincial de qualité de l’eau et les concentrations de nitrate dépassent également les recommandations (Nelson et al. 2003, Brock et Veliz 2013). La population de villeuse irisée de la rivière Maitland est menacée par le ruissellement agricole : 75 % des échantillons de nitrate prélevés dans la rivière Middle Maitland dépassent les lignes directrices fédérales sur les effets négatifs sur la santé aquatique et 56 % des concentrations de phosphore total dépassent celles qui indiquent une forte probabilité de prolifération d’algues (Kenny, comm. pers. 2003).

Modification des régimes d’écoulement : Les réservoirs modifient les régimes d’écoulement en aval et perturbent les profils thermiques naturels du cours d’eau, tandis que les retenues agissent comme des obstacles physiques, séparant potentiellement les unionidés de leur poisson-hôte. Des preuves ont établi un lien entre la disparition des unionidés et la construction et l’exploitation de barrages dans plusieurs rivières (Theler 1987, Layzer et al. 1993). Les bassins de retenue augmentent également les temps de rétention de l’eau, ce qui rend les réseaux fluviaux plus vulnérables à la colonisation par des espèces envahissantes, comme les dreissénidées, et aux changements dans la composition des espèces, en fonction des changements de l’habitat. Un débit rapide peut déloger les adultes et perturber les formes larvaires et un débit lent peut entraîner une faible teneur en oxygène dissous, une accumulation de limon, des températures élevées et, à l’extrême, la dessiccation. Les unionidés sont particulièrement vulnérables à la réduction de la profondeur de l’eau, car ils se trouvent fréquemment dans des eaux très peu profondes (10 à 20 cm; Metcalfe-Smith et al. 2007a). Une corrélation négative importante entre le débit annuel moyen des cours d’eau et la croissance de diverses espèces de moules a été démontrée (Rypel et al. 2008), dénotant le rôle majeur que les bassins de retenue et la manipulation artificielle du débit peuvent avoir sur les assemblages d’unionidés.

Il y a de nombreux barrages et autres ouvrages de régulation de l’eau sur les rivières Trent, Saugeen, Ausable, Moira, Salmon, Bayfield, Grand et Thames, mais moins sur les rivières Maitland et Sydenham. Par exemple, dans le bassin versant de la rivière Thames, on estime qu’il y a maintenant 177 structures dans le bassin versant supérieur et 65 dans le bassin versant inférieur (COSEPAC 2016). Dans le cours inférieur de la rivière Grand, le barrage de basse chute près de l’embouchure de la rivière à Dunnville a un effet très important sur les conditions de l’écoulement et de l’habitat, y compris le transport des sédiments et la connectivité au lac Érié (MacDougall et Ryan 2012).

Destruction et altérations de l’habitat : La destruction de l’habitat par le dragage, les fossés et d’autres formes de canalisation, y compris les mesures qui réduisent le débit, peut avoir des répercussions sur la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée. Les modifications du chenal, comme le dragage, peuvent entraîner la destruction directe de l’habitat des unionidés et mener à l’envasement et à l’accumulation de sable dans les moulières locales et en aval. La construction de bassins de retenue peut se traduire par la fragmentation de l’habitat, la modification des niveaux d’eau, la conversion de l’habitat et le défrichage des zones riveraines, causant la perte de la couverture, la hausse des taux d’envasement et des décalages thermiques. De plus, les pratiques qui détournent de l’eau fraîche ou froide dans un habitat d’unionidés peuvent avoir une incidence sur la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée (par exemple, en interférant avec la période de la reproduction). Tous ces facteurs peuvent avoir des effets négatifs sur la survie des unionidés dans les régions en développement.

Manque d’accès aux poissons-hôtes : Les unionidés ne peuvent pas réaliser leur cycle biologique s’ils ne disposent pas d’hôtes appropriés pour les glochidies. Si les populations de poissons-hôtes disparaissent ou diminuent en deçà du seuil de viabilité d’une population de moule, le recrutement ne sera plus assuré et l’espèce de moule pourrait disparaître sur le plan fonctionnel (Bogan 1993). Il faut donc connaître la répartition et la situation des poissons-hôtes pour déterminer si l’accès aux hôtes des glochidies constitue une menace pour les populations de mulette feuille d’érable et de villeuse irisée. Au Canada, le poisson-hôte probable de la mulette feuille d’érable est la barbue de rivière, qui est considérée comme une espèce courante en Ontario. Ainsi, on ne pense pas que l’interaction d’hôte poisson-moule limite la présence de la mulette feuille d’érable dans l’ensemble de son aire de répartition en Ontario (Bouvier et Morris 2011). À l’heure actuelle, on ne pense pas que la disponibilité des poissons-hôtes limite les populations de villeuse irisée, car plusieurs espèces connues de poissons-hôtes sont répandues dans l’ensemble de l’aire de répartition de l’espèce au Canada.

Récolte : On soupçonne que le braconnage d’unionidés existe, mais on en ignore l’intensité ou sa fréquence. La récolte d’unionidés pour la consommation humaine pourrait être une préoccupation; cependant, à ce jour, il n’y a pas de rapports de récolte de mulettes feuille‑d’érable ou de villeuses irisées à cette fin (Bouvier et Morris 2011). C’est pourquoi la récolte a été omise dans les tableaux des menaces.

Activités récréatives : La popularité croissante des activités récréatives comme le canotage pourrait accroître le stress sur les populations instables. Mehlhop et Vaughn (1994) ont constaté que les « activités récréatives » contribuaient au déclin de nombreuses espèces d’unionidés. Les activités récréatives susceptibles d’avoir des effets sur les moulières sont les suivantes (Bouvier et Morris 2011) :

6 Objectifs de gestion

Les objectifs de gestion visent à déterminer, dans la mesure du possible, le nombre d’individus ou de populations, ainsi que leur répartition géographique, nécessaire pour empêcher la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée de devenir des espèces en voie de disparition ou menacées.

Les objectifs de gestion de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée sont les suivants :

Tableau 7. Emplacements avec des populations autosuffisantes de feuille d’érable et de ville irisée, ou où des populations autosuffisantes pourraient être atteintes.
Mulette feuille d’érable Villeuse irisée
Rivière Ausable Delta de la rivière Sainte-Clairea
Rivière Sydenham (y compris la rivière North Sydenham, le ruisseau Bear et le ruisseau Black) Rivière Saugeen (y compris la rivière Teeswater)
Rivière Thames (y compris les ruisseaux McGregor et Baptiste) Rivière Maitland
Rivière Grand Rivière Bayfield
Rivière Welland (y compris la rivière Oswego et le ruisseau Coyle) Rivière Ausable
Ruisseau Twenty Mile/port de Jordan Rivière East Sydenham
Ruisseau Sixteen Mile Rivière Thames (y compris les affluents de la rivière North Thames et la rivière Middle Thames)
Ruisseau/étang Fifteen Milea Rivière Grand (y compris les rivières Mallet et Conestogo)
Cootes Paradise/ruisseau Spencera Rivière Moira
Rivière Bayfielda Rivière Salmon
Affluents du sud du lac Huron (ruisseau Cow et ruisseau Perch/chenal de dérivation Telfer)a Rivière Trent
Lac Henry (île Pelée)a -
Rivière Détroit (y compris la rivière Canard) -
Ruisseau Little Bear -
Affluents sud du lac Sainte-Claire (y compris la rivière Puce, la rivière Ruscom et le drain du ruisseau Jacks) -

a. D’autres recherches sont nécessaires pour déterminer la situation actuelle des populations, car il n’est pas certain que le recrutement ait lieu

7 Stratégies générales et mesures de conservation des espèces

Le présent plan de gestion prévoit 4 stratégies générales et les mesures connexes pour assurer la conservation des espèces et empêcher la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée de devenir des espèces en voie de disparition ou menacées.

La section 7.1 donne un aperçu des mesures de conservation des espèces déjà achevées ou en cours. La section 7.2 présente les stratégies générales de conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée. Les mesures de conservation de ces espèces à mettre en œuvre sont résumées dans un calendrier de mise en œuvre (tableaux 8, 9 et 10) à la section 7.3, qui établit la priorité des mesures et nomme les responsables, les partenaires et les échéanciers, dans la mesure du possible. La section 7.4 donne des renseignements supplémentaires sur les mesures de conservation des espèces indiquées dans le calendrier de mise en œuvre.

7.1 Mesures déjà achevées ou en cours

Bon nombre des mesures de rétablissement prescrites dans les programmes de rétablissement originaux pour les espèces (MPO 2016a, MPO 2016b) sont en cours. Les mesures terminées ou en cours comprennent des relevés (pour estimer l’abondance et l’aire de répartition) et la modélisation du potentiel de rétablissement (Young et Koops 2011). Des études visant à vérifier l’efficacité des méthodes de relevé sur les unionidés dans différents environnements (Reid et al. 2014, Minke-Martin et al. 2015, Reid 2016; Reid et LeBaron 2019), ainsi que des études génétiques sur la mulette feuille d’érable (Paterson et al. 2015, Hoffman et al. 2018, Mathias et al. 2018, VanTassel et al. 2020), ont également été réalisées.

Les offices de protection de la nature (par exemple, de la vallée de la rivière Thames inférieure, de la rivière Thames supérieure, de la rivière Saugeen, de la région de Sainte-Claire, de la vallée de Maitland, d’Ausable-Bayfield, de la Trent inférieure, de la région de Quinte, de la péninsule du Niagara, de la région d’Essex, d’Hamilton et de la rivière Grand) continuent de jouer un rôle essentiel dans les programmes d’intendance et d’éducation du public, ce qui a permis d’accroître la sensibilisation aux espèces en péril et d’améliorer l’habitat et la qualité de l’eau dans toute l’aire de répartition de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée en Ontario.

Des programmes de rétablissement monospécifiques ou plurispécifiques ont déjà été élaborés pour plusieurs unionidés dont l’aire de répartition chevauche en partie celles de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée. Les équipes de rétablissement qui s’occupent de ces espèces participent à la mise en œuvre des mesures de rétablissement dans ces bassins versants; ces mesures bénéficieront à la mulette feuille d’érable et à la villeuse irisée et qui comprennent notamment :

Certains programmes de rétablissement axés sur l’écosystème recoupent l’aire de répartition de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée, par exemple :

Autres activités

7.2 Stratégies générales

Pour faire face aux menaces qui pèsent sur l'espèce et atteindre les objectifs de gestion, 4 grandes stratégies ont été identifiées :

  1. inventaire et surveillance;
  2. recherche;
  3. gestion et coordination; et
  4. intendance et vulgarisation.

Des approches ont été déterminées pour chacune de ces stratégies générales. Ces approches ou activités sont subdivisées en mesures de conservation numérotées auxquelles on a associé une priorité (élevée, moyenne ou faible), la détermination des menaces visées et les calendriers connexes (tableaux 8 à 10). On trouvera une description plus détaillée de ces mesures de conservation après les tableaux (section 7.4).

La mise en œuvre de ces mesures sera réalisée en coordination avec les équipes de rétablissement de l’écosystème concernées et d’autres organisations pertinentes. Parmi les stratégies générales, la priorité sera normalement accordée aux mesures de recherche et de surveillance, car les données produites serviront à étayer les 2 autres stratégies (la gestion et la coordination, l’intendance et la sensibilisation).

7.3 Mesures de conservation des espèces

La réussite de la conservation de l’espèce dépend des mesures prises par de nombreuses autorités responsables, industries et organisations non gouvernementales, de nombreux groupes autochtones ainsi que par la population canadienne. Elle nécessite l’engagement et la coopération d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des mesures formulées dans le plan de gestion.

Les mesures formulées dans le plan de gestion offrent les meilleures chances possibles d’atteindre les objectifs de gestion de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée afin d’orienter non seulement les activités que devra entreprendre MPO, mais aussi celles pour lesquelles d’autres autorités responsables, organisations et particuliers ont un rôle à jouer. À mesure que de la nouvelle information devient accessible, ces mesures et leur ordre de priorité peuvent changer. Le MPO encourage fortement l’ensemble des Canadiens et Canadiennes à participer à la conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée en appliquant les mesures de conservation des espèces qui sont décrites dans le plan de gestion. Le MPO reconnaît l’importance du rôle de l’équipe de rétablissement de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée ainsi que de ses organisations et agences membres dans la mise en œuvre des mesures de conservation de ces espèces.

Le tableau 8 présente les mesures de conservation des espèces que doit entreprendre le MPO. Le tableau 9 présente les mesures de conservation des espèces que le MPO doit prendre en collaboration avec ses partenaires et d’autres agences, organisations ou personnes. La mise en œuvre de ces mesures dépendra de cette approche collaborative, dans laquelle le MPO prend part aux efforts de conservation, mais ne peut à lui seul mettre en œuvre les mesures de conservation de l’espèce. Comme le MPO encourage l’ensemble des Canadiens et Canadiennes à participer au soutien et à la mise en œuvre du plan de gestion, le tableau 10 présente les autres mesures de conservation de l’espèce qui représentent des occasions pour d’autres instances, organisations ou personnes de participer à la conservation de l’espèce ou d’en être responsable. Si votre organisation souhaite participer à l’une de ces mesures, veuillez communiquer avec le bureau du Programme des espèces en péril de la région de l’Ontario et des Prairies à l’adresse :

Pêches et Océans Canada
DFO.CASARAConsultations-CALEPConsultations.MPO@dfo-mpo.gc.ca

Les programmes de financement fédéraux pour les espèces en péril qui peuvent offrir des occasions d’obtenir des fonds pour réaliser certaines des activités décrites sont les suivants : le Programme d’intendance de l’habitat pour les espèces en péril, le Fonds autochtone pour les espèces en péril et le Fonds de la nature du Canada pour les espèces aquatiques en péril.

Bien que le MPO s’efforce déjà de mettre en œuvre le plan de gestion, les mesures de conservation de l’espèce figurant dans le présent document qui n’ont pas encore été mises en œuvre dépendront de la disponibilité des fonds et autres ressources nécessaires. Comme il est indiqué dans les tableaux ci‑dessous, l’établissement de partenariats avec certaines organisations permettra d’obtenir l’expertise et la capacité requises pour mener à bien certaines des mesures indiquées. Toutefois, les partenaires ne sont désignés qu’à titre indicatif pour les autres autorités responsables et organisations, et l’exécution des mesures en question dépendra des priorités et des contraintes budgétaires de chaque groupe.

Tableau 8. Mesures de conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée que Pêches et Océans Canada doit prendre.
No Mesure de conservation Stratégie générale Prioritéa Menaces ou préoccupations visées État d’avancement/ échéancierb
1 Évaluation de la population : Établir des relevés quantitatifs réguliers pour surveiller les changements dans la répartition et l’abondance des populations actuelles de mulette feuille d’érable et de villeuse irisée (ainsi que des espèces envahissantes dans la région). Inventaire et surveillance Élevée Toutes 3 à 5 ans
2 Évaluation de la population : Mettre en place des stations pour surveiller les changements dans l’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée. Cette surveillance complétera les relevés réguliers sur la population et y sera intégrée. Inventaire et surveillance Élevée Toutes 3 à 5 ans
3 Inventaire : Effectuer des relevés pour quantifier la répartition et l’abondance des populations nouvellement découvertes. Inventaire et surveillance Moyenne Toutes 3 à 5 ans
4 Inventaire : Effectuer des relevés des cours d’eau où la persistance de la mulette feuille d’érable et de de la villeuse irisée est incertaine. Inventaire et surveillance Faible Toutes 3 à 5 ans
5 Évaluation des menaces : Évaluer les menaces pesant sur l’habitat pour tous les emplacements existants afin d’orienter les programmes d’intendance locaux et d’améliorer les conditions dans les habitats occupés. Recherche Élevée Toutes 3 à 5 ans
6 Besoins en matière d’habitat : Déterminer les besoins en matière d’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée pour tous les stades biologiques. Recherche Moyenne Toutes 3 à 5 ans
7 Populations de poissons-hôtes : Déterminer la répartition et l’abondance des poissons-hôtes identifiés. Recherche Faible Poisson-hôte 2 ans
8 Coordination des activités : Promouvoir et améliorer l’expertise en matière d’identification, de biologie, d’écologie et de conservation des unionidés (par exemple, ateliers sur l’identification des moules). Gestion et coordination Moyenne Toutes En cours
9 Sensibilisation : Organiser des ateliers annuels sur l’identification, la biologie, l’écologie, les menaces et la conservation des espèces d’unionidés en Ontario. Intendance et vulgarisation Élevée Toutes En cours
10 Sensibilisation : Stimuler le soutien et la participation du public en élaborant des programmes et du matériel de sensibilisation. Encouragera la participation aux programmes locaux d’intendance afin d’améliorer et de protéger l’habitat. Intendance et vulgarisation Moyenne Toutes En cours

a. « Priorité » reflète l’ampleur dans laquelle la mesure contribue directement à la conservation des espèces ou est un précurseur essentiel à une mesure qui contribue à la conservation de l’espèce

b. L’échéancier reflète le temps requis pour que la mesure soit réalisée à partir du moment où le plan de gestion définitif est publié dans le Registre public des espèces en péril

Tableau 9. Mesures de conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée que Pêches et Océans Canada et ses partenaires doivent prendre.
No Mesure de conservation Stratégie générale Prioritéa Menaces ou préoccupations visées Échéancierb Partenariats possibles
11 Coordination des activités : Élaborer un plan de mise en œuvre pour répondre à la menace directe posée par les dreissénidées pour la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée dans le delta de la rivière Sainte-Claire. Gestion et coordination Moyenne Toutes Moyen terme Première Nation de Walpole Island
12 Coordination des activités : Travailler avec les autorités municipales de planification pour assurer la protection de l’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée dans le cadre des plans officiels. Gestion et coordination Moyenne Toutes Moyen et long termes Services d’urbanisme municipaux
13 Coordination des activités : Appuyer l’élaboration et la mise en œuvre, à tous les niveaux de gouvernement, de lois et de politiques qui aideront à protéger les populations existantes et à renforcer la conservation de ces populations. Gestion et coordination Moyenne Toutes Long terme Tous les niveaux de gouvernement
14 Sensibilisation : Davantage sensibiliser la communauté des pêcheurs à la ligne au rôle des poissons-hôtes pour la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée. Intendance et vulgarisation Moyenne Espèces envahissantes, poissons-hôtes Moyen terme Offices de protection de la nature, groupes de pêcheurs à la ligne
15 Sensibilisation : Davantage sensibiliser le public aux effets potentiels du transport et de la remise à l’eau des espèces envahissantes (y compris les poissons-appâts). Intendance et vulgarisation Faible Espèces envahissantes, poissons-hôtes Moyen terme Ministère du Développement du Nord, des Mines, des Richesses naturelles et des Forêts de l’Ontario, Ontario Federation of Anglers and Hunters

a. « Priorité » reflète l’ampleur dans laquelle la mesure contribue directement à la conservation des espèces ou est un précurseur essentiel à une mesure qui contribue à la conservation de l’espèce

b. « L’échéancier » divise les mesures en 3 catégories en fonction du temps prévu pour les réaliser :

Tableau 10. Mesures de conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée qui représentent des occasions pour d’autres instances, organisations ou personnes de participer à la conservation de l’espèce ou d’en être responsable.
# Mesure de conservation Stratégie générale Prioritéa Menaces ou préoccupations visées Administrations ou organisations proposées
16 Poissons-hôtes : Identifier/confirmer les espèces de poissons-hôtes fonctionnelles pour la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée. Recherche Moyenne Poisson-hôte Milieu universitaire
17 Évaluation de la menace : Déterminer la sensibilité des glochidies, des juvéniles et des adultes de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée aux contaminants environnementaux pertinents. Recherche Moyenne Contaminants et substances toxiques Milieu universitaire
18 Coordination des activités : Mettre en œuvre des programmes d’intendance pour améliorer les conditions de l’habitat et réduire les menaces. Les priorités et les mesures d’atténuation doivent être définies à partir des recherches permettant d’évaluer les menaces. Gestion et coordination Élevée Toutes Offices de protection de la nature

a.« Priorité » reflète l’ampleur dans laquelle la mesure contribue directement à la conservation des espèces ou est un précurseur essentiel à une mesure qui contribue à la conservation de l’espèce

7.4 Commentaires à l’appui des mesures de conservation des espèces

Inventaire et surveillance

Population et évaluation (mesures 1 et 2) : Un réseau de stations de surveillance devrait être établi dans toute l’aire de répartition actuelle de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée, semblable à celui créé pour les unionidés dans la rivière Sydenham (Metcalfe-Smith et al. 2007b). Ce réseau s’appuierait sur les stations de surveillance déjà établies pour plusieurs bassins versants (par exemple, les rivières Ausable, Thames et Grand). Les résultats du programme de surveillance permettront d’évaluer les progrès réalisés en vue d’atteindre les objectifs de gestion et de mieux comprendre le cycle biologique et les exigences en matière d’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée. Les sites de surveillance devraient être établis de manière à permettre :

Si des pratiques de surveillance régulière détectent des espèces envahissantes, un plan coordonné devrait assurer une intervention rapide. Il n’est pas possible d’éliminer les moules dreissénidées dans le lac Sainte-Claire; toutefois, on peut surveiller leur présence dans le delta pour déterminer si leur nombre augmente ou diminue. À l’heure actuelle, les moules dreissénidées menacent plusieurs populations de moules en péril dans le delta de la rivière Sainte-Claire, qui est une zone très préoccupante. Il faut élaborer des méthodes de surveillance des moules qui peuvent être adaptées aux habitats de lacs et de zones humides où se trouve la mulette feuille d’érable (par exemple, le port de Jordan, le cours inférieur de la rivière Grand dans les tronçons endigués). Un effort d’échantillonnage supplémentaire est nécessaire pour déterminer si les populations restantes peuvent persister dans les embouchures des cours d’eau et dans les zones humides côtières des lacs Érié et Sainte-Claire (en effet, des populations ont été détectées en 2012 dans les eaux américaines).

Inventaire (mesures 3 et 4) : D’autres relevés sont nécessaires pour confirmer l’aire de répartition actuelle de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée au Canada; ces renseignements clés sont nécessaires pour étayer des mesures de conservation efficaces.

Recherche

Populations de poissons-hôtes (mesures 7 et 16) : Pour déterminer si la mulette feuille d’érable et la villeuse irisée sont limitées par leurs hôtes, il est nécessaire de confirmer les poissons-hôtes. La détermination de la spécificité des hôtes de certaines espèces de moules exige d’identifier les hôtes pour les populations locales dans la mesure du possible. Une fois que les hôtes canadiens fonctionnels auront été confirmés, il sera possible de déterminer l’aire de répartition, l’abondance et la santé des espèces hôtes.

Exigences en matière d’habitat (mesure 6) : L’analyse détaillée des données sur l’habitat recueillies dans le cadre du programme de surveillance aidera à orienter l’utilisation de l’habitat, ainsi qu’à suivre les changements dans l’utilisation ou la disponibilité de l’habitat.

Évaluation des menaces (mesures 5 et 17) : Bien que des travaux préliminaires aient été effectués sur l’évaluation des menaces pour certaines populations (voir la section 5), on sait peu de choses sur les menaces pour d’autres populations (par exemple, la mulette feuille d’érable : populations récemment découvertes dans la rivière Welland et le ruisseau Twenty Mile/port de Jordan; villeuse irisée : rivières Saugeen, Maitland et Bayfield). Des évaluations plus approfondies des menaces qui pèsent sur toutes les populations actuelles aideront à orienter les programmes d’intendance pour optimiser l’utilisation des ressources limitées, tout en favorisant l’adoption d’une approche écosystémique autant que possible.

Certaines recherches initiales ont été effectuées sur certains contaminants, y compris le chlorure, l’ammoniac et le cuivre, pour les premiers stades biologiques des unionidés. Cependant, d’autres travaux propres à la mulette feuille d’érable et à la villeuse irisée sont nécessaires. La contamination par l’acide perfluorooctanesulfonique est connue dans le cours supérieur de la rivière Welland et pourrait avoir des répercussions sur les populations de mulette feuille d’érable en aval.

Gestion et coordination

Coordination des activités (mesures 8,11 à 13 et 18) : La mise en œuvre de nombreuses mesures de conservation peut être réalisée grâce à des partenariats avec des groupes qui participent activement à l’intendance ou en menant des activités de recherche et de surveillance dans les bassins versants où des populations de mulette feuille d’érable et de villeuse irisée sont présentes. Il s’agirait en particulier des offices de protection de la nature (c’est-à-dire de la vallée de la rivière Thames inférieure, de la rivière Thames supérieure, de la rivière Saugeen, de la région de Sainte-Claire, de la vallée de Maitland, d’Ausable-Bayfield, de la Trent inférieure, de la région de Quinte, de la péninsule du Niagara, de la région d’Essex, d’Hamilton et de la rivière Grand), ainsi que des initiatives de conservation axées sur l’écosystème, notamment dans les rivières Ausable, Sydenham, Thames et Grand.

L’expertise en identification, aire de répartition, cycle biologique et génétique des unionidés se limite à un petit nombre de biologistes en Ontario. Cette capacité pourrait être accrue en formant du personnel (tant au gouvernement que dans les organisations non gouvernementales et les groupes autochtones s’occupant de conservation) et en encourageant la recherche de deuxième et de troisième cycles axée sur la conservation des moules d’eau douce. De tels efforts renforceraient les possibilités de partenariat pour mettre en œuvre des mesures de conservation pour les unionidés.

Bon nombre des menaces qui touchent les populations de mulette feuille d’érable et de villeuse irisée sont semblables à celles qui touchent d’autres espèces de poissons et de moules en péril. Par conséquent, les efforts visant à éliminer ces menaces (en cas de chevauchement spatial) devraient être déployés en étroite collaboration avec les autres équipes de rétablissement et les groupes pertinents afin d’éliminer le dédoublement (voir les initiatives de conservation écosystémiques pertinentes à la section 7.1). Pour les rivières qui ne sont pas actuellement couvertes par les actuels programmes de rétablissement de bassins versants, les évaluations des menaces guideront les programmes d’intendance locaux pour déterminer la priorité des mesures d’atténuation. Comme pour les autres moules, les mesures visant à améliorer l’habitat de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée peuvent comprendre des mesures d’intendance comportant des pratiques de gestion exemplaires pour les propriétés agricoles et résidentielles dans les zones de captage ayant une incidence sur les habitats occupés.

Intendance et sensibilisation

Sensibilisation (mesures 9,10,14,15,19) : L’élaboration de matériel de sensibilisation, comme le Photo Field Guide to the Freshwater Mussels of Ontario (Metcalfe-Smith et al. 2005) et l’application appelée Clam Counter, téléchargeable gratuitement à partir de l’App Store et de Google Play Store, peut faciliter l’amélioration des connaissances et de l’identification des unionidés. De plus, le MPO offre chaque année un atelier pratique d’identification des moules aux employés du gouvernement, des organismes, aux organisations non gouvernementales, aux peuples autochtones et au public.

L’amélioration de la connaissance et de la compréhension, par le public, de l’importance de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée, ainsi que des moules en général, jouera un rôle important dans la conservation des unionidés. Un plan de communication visant à accroître la sensibilisation et le soutien à la protection et à la conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée fournira l’orientation générale de toutes les activités de sensibilisation. Ces activités devraient inclure une sensibilisation accrue aux effets potentiels du transport ou du rejet d’espèces envahissantes (y compris les poissons-appâts) dans de nouvelles eaux.

8 Mesure des progrès

La réussite d’un plan de gestion permettra d’atteindre le but global de protéger les populations autosuffisantes afin de prévenir leur déclin et de rétablir les populations dégradées à des niveaux sains et autosuffisants en améliorant l’étendue et la qualité de l’habitat (dans la mesure du possible). Les progrès accomplis vers l’atteinte de ces objectifs seront consignés dans le rapport sur les progrès de la mise en œuvre du plan de gestion. Les indicateurs de rendement présentés ci-dessous proposent un moyen de définir et de mesurer les progrès vers l’atteinte des objectifs de gestion :

  1. Les relevés indiquent l’aire de répartition actuelle et l’abondance de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée d’ici 2030.
  2. Des évaluations exhaustives des menaces, en particulier pour les nouvelles populations, ont été menées et des mesures ont été prises pour atténuer ces menaces d’ici 2030.
  3. Des mesures ont été prises pour promouvoir la sensibilisation et l’intendance afin de conserver la mulette feuille d’érable, la villeuse irisée et leurs habitats d’ici 2025.
  4. Des mesures ont été prises pour promouvoir la sensibilisation et la conformité continues aux règlements existants afin de maintenir la qualité et la quantité des habitats de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée d’ici 2025.

Des rapports détaillés sur la mise en œuvre du plan de gestion, aux termes de l’article 72 de la LEP, seront produits en évaluant les progrès vers la réalisation des stratégies générales et des mesures de conservation. La mise en œuvre de ce plan de gestion sera contrôlée tous les 5 ans après sa publication dans le Registre de la LEP.

9 Références

Annexe A : Effets sur l’environnement et les espèces non ciblées

Une évaluation environnementale stratégique (EES) est effectuée pour tous les documents de planification du rétablissement en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP), conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes (2010). L’objet de l’EES est d’incorporer les considérations environnementales à l’élaboration des projets de politiques, de plans et de programmes publics pour appuyer une prise de décisions éclairée du point de vue de l’environnement, et d’évaluer si les résultats d’un document de planification du rétablissement peuvent affecter un élément de l’environnement ou tout objectif ou cible de la Stratégie fédérale de développement durable.

La planification de la conservation vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est cependant reconnu que les plans de gestion peuvent, par inadvertance, produire des effets environnementaux qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient directement compte de tous les effets environnementaux, notamment des incidences possibles sur des espèces ou des habitats non ciblés. Les résultats de l’EES sont directement inclus dans le plan de gestion lui‑même, mais également résumés dans le présent énoncé.

Le présent plan de gestion favorisera clairement l’environnement en encourageant la conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée. Il encouragera en particulier la protection et l’amélioration des habitats riverains et côtiers des zones humides dans les Grands Lacs inférieurs. Ces habitats soutiennent de nombreuses autres espèces aquatiques en péril (des poissons, des oiseaux, des reptiles et des plantes). En conséquence, la mise en œuvre des mesures de conservation de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée contribuera à la préservation de la biodiversité en général. La possibilité que ces mesures de conservation aient des répercussions négatives non voulues sur d’autres espèces a été prise en considération. L’évaluation environnementale stratégique a permis de conclure que la mise en œuvre du présent document permettra très certainement de protéger l’environnement et n’aura pas d’effets environnementaux notables.

Annexe B : Registre des collaborations et des consultations

Les plans de gestion doivent être préparés en collaboration et en consultation avec d’autres autorités responsables, organisations, parties ou personnes touchées, comme il est prévu à l’article 66 de la Loi sur les espèces en péril. Pêches et des Océans Canada (MPO) a eu recours au processus de l’examen de l’équipe de rétablissement pour solliciter la participation à l’élaboration du présent plan de gestion. De l’information sur la participation est fournie dans le tableau 11.

Tableau 11. Liste des partenaires et des intervenants que Pêches et Océans Canada a consultés au sujet de l’élaboration du plan de gestion de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée.
Membre/participant Appartenance
Dave Balint MPO – Programme des espèces en péril
Amy Boyko MPO – Programme des espèces en péril
Kelly McNichols MPO – Secteur des sciences
Todd Morris, Ph. D. (coprésident) MPO – Secteur des sciences
Shawn Staton (coprésident) MPO – Programme des espèces en péril
Alan Dextrase, Ph. D. Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario – retraité
Scott Gibson Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario
Scott Reid, Ph. D. Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario
Patricia Gillis, Ph. D. Environnement et Changement climatique Canada
Daryl McGoldrick Environnement et Changement climatique Canada
Josef Ackerman, Ph. D. Université de Guelph
Gerry Mackie, Ph. D. Université de Guelph
Daelyn Woolnough, Ph. D. Université Central Michigan
Dave Zanatta, Ph. D. Université Central Michigan
Astrid Schwalb, Ph. D. Université de Waterloo
Crystal Allan Office de protection de la nature de la rivière Grand
Muriel Andreae Office de protection de la nature de la région de St. Clair
Mike Nelson Office de protection de la nature de la région d’Essex
Frederick Schueler, Ph. D. Bishop Mills Natural History Centre
Lee-Ann Hamilton Office de protection de la nature de la péninsule du Niagara
Kari Jean Office de protection de la nature d’Ausable Bayfield
John Schwindt Office de protection de la nature de la rivière Thames supérieure
Valerie Towsley Office de protection de la nature de la vallée de la rivière Thames inférieure
Mari Veliz Office de protection de la nature d’Ausable Bayfield

De plus, tous les groupes autochtones dont le territoire traditionnel chevauche l’aire de répartition actuelle et historique de la mulette feuille d’érable et de la villeuse irisée ont été consultés par correspondance sur l’ébauche du plan de gestion. Les commentaires sur l’élaboration de ce plan de gestion conjoint ont été sollicités auprès d’un total de 18 groupes autochtones (Première Nation Aamjiwnaang, Première Nation Alderville, Anishnabek/Ontario Fisheries Resource Centre, Association of Iroquois and Allied Indians, Première Nation de Caldwell, Première Nation des Chippewas de Kettle et Stony Point, Première Nation des Chippewas de la Thames, Première Nation de Curve Lake, Première Nation Hiawatha, Nation Delaware [Moraviens de la Thames], Nation métisse de l’Ontario, Mohawks de la baie de Quinte, Première Nation des Mississaugas de New Credit, Nation Munsee-Delaware, Nation Oneida de la Thames, Première Nation Saugeen, Six Nations du Grand, et Première Nation Walpole Island [Première Nation de Bkejwanong).

La participation d’autres intervenants, peuples autochtones et membres du public a été sollicitée par la publication de la version proposée du plan de gestion dans le Registre public des espèces en péril, pendant une période de commentaires de 60 jours. Les commentaires reçus ont aidé à étayer la version définitive du document.

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