Rapport complet : Mobiliser la santé publique contre les changements climatiques au Canada
Organisation : Agence de la santé publique du Canada
Date publiée : 2022-10-25
Cat. : HP2-10F-PDF
ISBN : 1924-7095
Pub. : 220352
Rapport de l'administratrice en chef de la santé publique du Canada sur l'état de la santé publique au Canada 2022
Sur cette page
- Message de l'administratrice en chef de la santé publique du Canada
- À propos du présent rapport
- Partie 1 : Les changements climatiques : une menace pour la santé, le bien-être et notre planète
- Les changements climatiques, un problème mondial
- La santé dans un climat en changement : le contexte canadien
- Des dangers climatiques aux effets sur la santé : les risques pour la santé découlant des changements climatiques au Canada
- La vulnérabilité et les répercussions inéquitables sur la santé
- Allier la santé publique et l'action climatique pour faire face à la menace
- Mesures actuelles de santé publique dans un climat en changement
- Partie 2 : Occasions de faire avancer la lutte aux changements climatiques en santé publique
- Mettre en œuvre une gamme d'interventions pour relever les défis immédiats en matière de santé et prévenir les risques sanitaires futurs liés aux changements climatiques
- Prioriser l'expertise et la mobilisation communautaires pour une action climatique équitable et efficace
- Enrichir les connaissances afin de comprendre, prévoir et réagir aux répercussions sanitaires des changements climatiques
- Collaborer entre secteurs pour une action transformatrice en matière de santé climatique et des co-bénéfices intersectoriels
- Renforcer le leadership des systèmes de santé publique en matière de lutte contre les changements climatiques ainsi que les éléments de base de la santé publique pour favoriser la résilience climatique
- La voie à suivre
- Annexe A : Fonctions essentielles de santé publique et mesures de santé publique de lutte aux changements climatiques
- Annexe B : Le point sur la COVID-19 au Canada
- Préambule
- L'arrivée d'Omicron a changé la trajectoire de la pandémie
- Conséquences générales et continues de la COVID-19
- L'intervention du Canada en matière de santé publique a contribué à réduire au minimum les méfaits de la COVID-19
- La préparation et la prévention peuvent nous aider à mieux faire face à la COVID-19 à l'avenir
- Annexe C : Méthodologie
- Remerciements
- Références
Message de l'administratrice en chef de la santé publique du Canada
Au cours des deux dernières années et demie, nous avons été confrontés à la pandémie de COVID-19. Grâce à notre réponse collective en tant que société, nous avons fait d'énormes progrès partout au Canada, évitant bon nombre d'infections et sauvant bon nombre de vies. Et même si nous devons continuer à faire évoluer notre gestion de la COVID-19 et de ses répercussions à long terme, nous devons également porter notre attention sur d'autres menaces pour la santé. Cela comprend ce qui est sans doute la plus grande menace à la santé de nos collectivités et de notre planète : la crise climatique.
Les changements climatiques rendent les conditions météorologiques plus imprévisibles et provoquent des phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents et plus intenses, comme des vagues de chaleur, des ouragans, des inondations et des feux incontrôlés. Ils menacent également la disponibilité et la salubrité de notre eau et de nos aliments.
Les changements climatiques ont déjà une incidence mesurable tant sur notre santé physique que notre santé mentale. Par exemple, ils exacerbent la propagation de maladies infectieuses sensibles au climat et aggravent les conditions chroniques dues à l'exposition à la chaleur ou à la mauvaise qualité de l'air. Que ce soit en respirant pendant des semaines la fumée de feux incontrôlés, en subissant des vagues de chaleur record ou en étant incapable d'atteindre les territoires traditionnels de chasse pour se nourrir, personne n'est à l'abri des répercussions des changements climatiques. Cependant, toutes les collectivités ne sont pas touchées de la même manière. Comme pour la COVID-19, certaines d'entre elles sont plus à risque d'exposition, sont moins en mesure de s'adapter et sont plus vulnérables à de graves problèmes de santé.
Il s'agit d'une période charnière pour les systèmes de santé publique afin de tirer parti des leçons apprises de la pandémie, de faire preuve de leadership et de travailler en collaboration avec d'autres secteurs. Nous devons continuer d'intégrer les considérations climatiques dans les travaux de santé publique afin de nous préparer aux répercussions sur la santé qui sont maintenant inévitables et y répondre. Cela signifie qu'il faut aider les collectivités à s'adapter aux risques climatiques auxquels elles seront confrontées.
Or, nous devons aussi placer la santé au centre des mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques et concentrer nos efforts sur les mesures qui entraîneront des avantages importants et presque immédiats pour la santé et l'environnement. En préconisant des milieux sains, comme les quartiers propices à la marche et les milieux favorisant les déplacements à vélo et en transport en commun, nous pouvons réduire les maladies chroniques, les décès prématurés et les hospitalisations, promouvoir un bien-être mental positif et réduire la pollution atmosphérique. En soutenant une plus grande superficie de couvert arboré et davantage de rénovations d'immeubles, nous pouvons promouvoir et protéger la santé tout en atténuant les émissions de gaz à effet de serre.
Il est clair qu'agir contre les changements climatiques est bon pour notre santé et que les systèmes de santé publique ont un rôle essentiel à jouer.
Dans le rapport de l'an dernier intitulé Une vision pour transformer le système de santé publique du Canada, j'ai signalé que, sans une attention immédiate, les systèmes de santé publique du Canada ne seront pas en mesure de répondre aux urgences qui se chevauchent, ni de remplir les fonctions essentielles qui assurent la santé et la sécurité des collectivités. Même aujourd'hui, alors que nous continuons de lutter contre la COVID-19, la variole du singe est devenue une menace à l'échelle mondiale.
Mon rapport annuel de 2022 présente une feuille de route pour l'ensemble du système de santé publique au Canada afin d'organiser des mesures de santé climatique et de se mobiliser. Il fournit des orientations concrètes sur la façon dont nous pouvons utiliser nos connaissances et nos outils existants, tout en les élargissant pour relever les nouveaux défis qui découleront des changements climatiques.
Les changements climatiques mettront vraiment à l'épreuve notre état de préparation sur tous les fronts. Les mesures que nous prenons maintenant détermineront l'ampleur des répercussions futures, la rapidité avec laquelle elles se produiront et la mesure dans laquelle nos collectivités et les générations futures pourront se rétablir et prospérer.
Les Premières Nations, les Inuits et les Métis reconnaissent depuis longtemps la nature interreliée de la santé humaine, animale et environnementale. Ces connaissances ont été essentielles à l'identité, à la résilience et à la survie des Autochtones, et elles sont essentielles à un avenir sain et durable pour nous tous. Il est temps d'adopter les points de vue autochtones relativement à notre place dans le monde naturel. Nous ne sommes pas séparés de notre environnement. Pour être en santé, notre air, notre eau, nos terres et nos écosystèmes doivent aussi être en santé.
Ce qui nous attend n'est pas une mince tâche. Mais, nous savons que les mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques fonctionnent. Nous possédons les outils nécessaires pour comprendre les changements climatiques et trouver comment relever ce défi complexe et croissant pour notre santé collective. Agir ensemble maintenant nous permet de garder espoir.
Dre Theresa Tam
Administratrice en chef de la santé publique du Canada
À propos du présent rapport
Chaque année, l'administratrice en chef de la santé publique du Canada (ACSP) rédige un rapport sur l'état de la santé publique au Canada afin de mieux faire connaître les problèmes de santé publique, de stimuler le dialogue et de catalyser des actions. Le rapport de cette année porte sur les répercussions des changements climatiques au Canada et sur le rôle que les systèmes de santé publique peuvent jouer à l'égard des mesures à prendre pour lutter contre les changements climatiques. Il s'appuie sur le rapport annuel de l'ACSP de 2021 en présentant les possibilités que peut offrir un système de santé publique efficace et résilient pour faire face aux défis complexes et urgents en matière de santé publique.
Ce rapport s'articule autour des grands concepts suivants.
- Adaptation
- Processus par lequel nous modifions nos décisions, nos activités et nos façons de penser pour être proactifs et mieux préparés tout à mieux réagir aux changements climatiques et à leurs répercussions sur la santéNote de bas de page 1Note de bas de page 2.
- Atténuation
- Intervention visant à réduire les causes des changements climatiques, à éliminer de l'atmosphère les gaz à effet de serre qui retiennent la chaleur et à stabiliser leurs niveauxNote de bas de page 1Note de bas de page 2.
- Capacité d'adaptation
- Capacité de s'adapter aux risques climatiques ou de prendre des mesures pour se protéger de leurs effets, et de réagir aux conséquences des risques climatiques sur la santé ou d'y faire face. Les iniquités sociales actuelles font que les collectivités ou les populations ne disposent pas toutes des connaissances, des outils, des stratégies ou des ressources financières nécessaires pour prendre les mesures souhaitées à l'égard des changements climatiques et de l'adaptation des systèmes de santéNote de bas de page 1Note de bas de page 3Note de bas de page 4.
- Co-bénéfices
- Effets positifs qu'une politique ou une mesure visant un objectif peut avoir sur d'autres objectifs. Par exemple, les efforts d'atténuation des changements climatiques déployés dans les secteurs de l'énergie, de l'infrastructure, de l'agriculture et des transports peuvent contribuer à améliorer la santé de la population grâce aux avantages qu'ils procurent sur les plans de la qualité de l'air, des normes de logement, de l'alimentation et de l'activité physiqueNote de bas de page 1Note de bas de page 5Note de bas de page 6Note de bas de page 7.
- Déterminants écologiques de la santé
- Éléments de la nature qui sont essentiels à la vie sur Terre, notamment les sources de nourriture, l'eau douce, l'oxygène, les matériaux de construction des abris et de fabrication des outils, une énergie abondante et un climat mondial raisonnablement stable offrant des températures propices à l'être humain et aux autres formes de vie. Le maintien de l'intégrité, de la stabilité et de la répartition équitable de ces systèmes naturels est une condition essentielle à la santé, à la survie et à la prospéritéNote de bas de page 8Note de bas de page 9.
- Déterminants sociaux de la santé
- Forces et systèmes qui façonnent au quotidien les conditions de vie (p. ex., revenu, éducation, emploi) et qui influent sur la santé et le bien-être des personnes. Ces déterminants comprennent notamment les politiques et les systèmes économiques, sociaux et politiques ainsi que les normes socialesNote de bas de page 10Note de bas de page 11.
- Maladaptation
- Toute modification délibérée des systèmes naturels ou humains qui augmente la vulnérabilité aux effets des changements climatiques. Il en résulte une adaptation qui ne réussit pas à réduire la vulnérabilité, mais qui, au contraire, l'augmenteNote de bas de page 12.
- Résilience des systèmes
- Capacité des systèmes sociaux, économiques et environnementaux à faire face à une tendance, à une perturbation ou à un événement dangereux. Il s'agit pour ces systèmes de réagir aux situations sans devoir modifier leur fonction, leur identité et leur structure essentielles et tout en conservant leur capacité d'adaptation, d'apprentissage et de transformationNote de bas de page 1Note de bas de page 5.
- Travail intersectoriel
- Démarche de collaboration entre divers groupes, y compris les organismes gouvernementaux, les organisations non gouvernementales et les intervenants concernés, qui poursuivent un objectif commun dans la résolution d'un problème particulier. Dans le contexte des changements climatiques, il s'agit des mesures prises en collaboration par de multiples secteurs, dont le secteur de la santé, qui contribuent à améliorer les résultats en matière de santé et de lutte contre les changements climatiquesNote de bas de page 13Note de bas de page 14Note de bas de page 15.
- Une seule santé
- Démarche de collaboration multisectorielle et transdisciplinaire qui vise à optimiser les résultats en matière de santé et tout en prenant en compte l'existence d'une interconnexion entre les personnes, les animaux, les plantes et leur environnement communNote de bas de page 16.
- Vulnérabilité
- Prédisposition de la santé à être atteinte négativement en raison des changements climatiques. Cette prédisposition varie selon le degré d'exposition aux dangers liés aux changements climatiques, la sensibilité aux effets des changements climatiques et la capacité de résister aux effets de ces changements sur la santé. Dans le domaine de la santé publique, le concept de vulnérabilité peut être très stigmatisant. Il est donc important de reconnaître que la vulnérabilité aux effets des changements climatiques ne peut être directement associée à des collectivités ou des populations en particulierNote de bas de page 1Note de bas de page 5Note de bas de page 17.
Aperçu du rapport
La Partie 1 du rapport décrit l'urgence des changements climatiques. On y donne un aperçu des répercussions des changements climatiques sur la santé et le bien-être des personnes vivant au Canada. Comme dans le cas de la COVID-19, ces répercussions sont inégales et cumulatives, certaines collectivités étant plus touchées que d'autres. Ces importantes répercussions sur la santé des populations montrent de façon convaincante pourquoi les systèmes de santé publique doivent prioriser les effets climatiques et se mobiliser autour de cet enjeu.
La Partie 2 du rapport présente une feuille de route pour orienter les mesures de santé publique contre les changements climatiques. On y explore les manières de tirer parti des activités actuelles de santé publique et d'en élargir la portée, tout en renforçant les systèmes de santé publique pour qu'ils soient mieux à même de traiter cet enjeu, mais aussi d'autres problèmes complexes de santé publique.
La partie La voie à suivre décrit les domaines prioritaires transversaux et propose des idées concrètes quant aux mesures possibles à l'échelle des systèmes.
L'annexe sur la COVID-19 fournit une brève mise à jour de l'évolution de la pandémie de COVID-19 au Canada entre août 2021 et août 2022.
Le présent rapport est le fruit du leadership et de l'expertise de nombreux collaborateurs, dont les Centres de collaboration nationale en santé publique, qui ont produit les encadrés, lesquels présentent des exemples concrets de mesures en santé publique.
Le rapport complémentaire « Ce que nous avons entendu » a éclairé l'élaboration du présent rapport. Il s'agit d'un résumé des entrevues et des groupes de discussion menés auprès de chercheurs universitaires, de praticiens de la santé publique, de dirigeants d'organisations non gouvernementales de santé publique, d'employés des systèmes de santé publique de tous les paliers d'administration, de dirigeants communautaires et de médecins praticiens. Le rapport de l'ACSP fait entendre la voix de ces experts.
Les connaissances et les recherches novatrices générées par le rapport contribuent également à la mise en œuvre des mesures qui y sont décrites. Le document intitulé Générer des connaissances pour éclairer les mesures de santé publique contre les changements climatiques fournit une liste des possibilités de recherche liées au rapport, afin de guider les chercheurs, les bailleurs de fonds ou quiconque souhaite mobiliser la recherche et les connaissances.
Reconnaissance des terres
Nous soulignons respectueusement que les terres sur lesquelles nous avons préparé ce rapport sont les terres ancestrales des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Plus précisément, ce rapport a été élaboré dans les villes suivantes :
- À Ottawa, également connu sous le nom d'Adawe, sur le territoire traditionnel et non cédé du peuple algonquin, signataire de l'Entente sur l'autonomie gouvernementale de la Nation Anishinabek.
- À Halifax, également connu sous le nom de K'jipuktuk, le territoire ancestral et non cédé du peuple micmac, faisant partie du Mi'kma'ki. Ce territoire est visé par les « traités de paix et d'amitié » que les Micmacs et les Wolastoqiyik (Malécites) ont signés avec la Couronne britannique en 1725. Les traités ne portaient pas sur la cession des terres et des ressources, mais reconnaissaient en fait le titre de propriété des Micmacs et des Wolastoqiyik (Malécites) et établissaient les règles de ce qui devait être une relation continue entre les nations.
- À Montréal, également connu sous le nom de Tiohti:áke, le territoire traditionnel et non cédé Kanien'kehà:ka. Un site qui a longtemps servi de lieu de rencontre et d'échange entre de nombreuses Premières Nations, notamment les Kanien'kehá:ka de la Confédération Haudenosaunee, les Hurons-Wendat, les Abénakis et les Anichinabés.
- Enfin, à Toronto, également connu sous le nom de Tkaronto, le territoire traditionnel de nombreuses nations, dont les Mississaugas de Credit, les Anichinabés, les Chippewas, les Haudenosaunee et les Wendat, et qui est maintenant le lieu de résidence de nombreuses Premières Nations, Inuits et Métis en milieu urbain. Toronto se trouve sur les terres protégées par les ceintures wampums d'« un plat à une cuillère », qui représentent les ententes conclues entre les Haudenosaunee et les Anichinabés et les nations alliées sur le partage pacifique et le soin des ressources dans la région des Grands Lacs.
Nous reconnaissons qu'il reste encore beaucoup à faire pour réparer les conséquences dévastatrices du colonialisme et du racisme, qui engendre encore des iniquités entre les communautés autochtones et non autochtones. Nous demeurons fermement déterminés à travailler en collaboration pour faire progresser la réconciliation au Canada.
Partie 1 : Les changements climatiques : une menace pour la santé, le bien-être et notre planète
« Lorsque l'OMS [Organisation mondiale de la Santé] affirme que c'est la plus grande menace pour la santé au XXIe siècle, pourquoi ne pas la prendre au mot? Pourquoi ne l'acceptons-nous pas? Pourquoi ne pas la considérer comme telle? S'il s'agit de la plus grande menace pour la santé de la population au XXIe siècle, commençons à la traiter comme telle. »
Les changements climatiques constituent une crise qui menace tous les aspects de la vie. Les répercussions sur notre environnement, notre économie, et surtout, notre santé et notre bien-être sont déjà visiblesNote de bas de page 5Note de bas de page 18. Les aléas climatiques continueront de se produire au cours des deux prochaines décennies et au-delà, et sans mesures significatives, l'habitabilité de la planète est en périlNote de bas de page 19. Les changements climatiques influent sur les conditions fondamentales de la vie, y compris l'air que nous respirons, la nourriture que nous mangeons, l'eau que nous buvons et la terre que nous habitonsNote de bas de page 5Note de bas de page 18Note de bas de page 20Note de bas de page 21Note de bas de page 22Note de bas de page 23. L'accélération des changements climatiques accroît également les problématiques de santé existantes, notamment la propagation de maladies infectieuses sensibles au climat et l'exacerbation des iniquités en matière de santéNote de bas de page 5Note de bas de page 18Note de bas de page 24.
Sans une prise de mesures immédiates et efficaces, les changements climatiques posent des risques catastrophiques pour les générations actuelles et futures. Nous devons agir de toute urgence pour réduire ces risques, car comme nous disent les évaluations nationales et internationales, plus tard il sera trop tardNote de bas de page 5Note de bas de page 25. La réduction des émissions de gaz à effet de serre qui retiennent la chaleur est essentielle pour limiter les changements climatiques. Cependant, même avec les efforts d'atténuation les plus draconiens visant à réduire ces émissions, la planète continuera de se réchauffer au cours des prochaines décennies en raison des gaz à effet de serre déjà présents dans l'atmosphèreNote de bas de page 19. Afin d'assurer la pérennité de la planète et de réduire les dommages causés à nos collectivités, à nos écosystèmes et à nos économies, nous devons agir dès maintenant et continuer de réduire les émissions tout en nous adaptant aux effets inévitables actuels et futurs.
Pour les systèmes de santé publique, l'urgence de la situation exige des mesures fermes et efficaces de tous les secteurs et toutes les administrations afin de prévenir, de réduire et d'atténuer les effets des changements climatiques sur la santé. Nous devrons également détecter et surveiller les menaces pour la santé et prendre des mesures directes et concertées pour y faire face. Ce faisant, la santé publique pourra contribuer à recentrer l'effort collectif sur l'équité, la promotion de la santé et les partenariats intersectoriels et contribuer à la lutte contre les changements climatiques d'une manière qui soutienne et protège la santé.
Les changements climatiques, un problème mondial
Les changements climatiques correspondent aux variations à long terme des conditions météorologiques moyennes d'une région, comme la température, les précipitations et les ventsNote de bas de page 26. Ils impliquent des changements dans les conditions météorologiques moyennes, ainsi que de la variabilité, comme des phénomènes météorologiques extrêmesNote de bas de page 27. Les vagues de chaleur sans précédent survenues en Amérique du Nord et en Europe au cours des étés 2021 et 2022 sont des conséquences récentes qui ont affecté le quotidien de nombreuses personnes.
Les changements climatiques sont causés par les gaz à effet de serre, dont une grande partie est libérée en raison de notre forte dépendance aux combustibles fossilesNote de bas de page 5Note de bas de page 28Note de bas de page 29. Chaque année, la combustion du charbon, du pétrole et du gaz libère des milliards de tonnes de dioxyde de carbone dans l'atmosphèreNote de bas de page 30. Le méthane, l'oxyde nitreux et les chlorofluorocarbones sont d'autres principaux gaz à effet de serre libérés par la production de combustibles fossiles, l'agriculture, les sites d'enfouissement et l'utilisation d'engraisNote de bas de page 31. Les concentrations croissantes de ces gaz dans notre atmosphère ont entraîné des hausses sans précédent des températures moyennesNote de bas de page 29. Ce réchauffement a perturbé les systèmes météorologiques, entraînant des vagues de chaleur extrêmes, des feux de forêt, une élévation du niveau de la mer, des inondations et des sécheresses. Les températures mondiales atteindront bientôt des niveaux critiques à moins que des mesures importantes ne soient prises dans le monde pour réduire de manière considérable nos émissionsNote de bas de page 32Note de bas de page 33.
Comme dans le cas de la COVID-19, les conséquences des changements climatiques sont mondiales et menacent les nécessités de la vie. Alors que 800 millions de personnes sont actuellement sous-alimentées, les changements climatiques accentuent l'insécurité alimentaire en raison de la hausse des températures, de l'évolution des tendances de précipitations et de l'augmentation de la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmesNote de bas de page 5Note de bas de page 34Note de bas de page 35Note de bas de page 36. Des modélisations montrent que 529 000 décès dans le monde pourraient survenir entre 2010 et 2050 en raison de la réduction de la disponibilité des aliments et des changements dans les habitudes alimentaires attribuables aux changements climatiquesNote de bas de page 5Note de bas de page 37. Même dans un scénario d'émissions négatives, c'est-à-dire qui implique des activités d'élimination de dioxyde de carbone de l'atmosphère, le nombre de décès augmenteraNote de bas de page 5Note de bas de page 37. Les changements climatiques aggraveront les conditions de vie en général et la santé des individus à l'échelle mondialeNote de bas de page 35Note de bas de page 38. De plus, on estime que, d'ici 2050, 200 millions de personnes par année pourraient avoir besoin d'une aide humanitaire internationale en raison des changements climatiques. C'est presque le double du nombre de personnes qui ont eu besoin d'aide en 2018 en raison d'inondations, de tempêtes et de feux de forêtNote de bas de page 5Note de bas de page 39.
Les changements climatiques menacent l'habitabilité de nos villes et de nos collectivités. Près des deux tiers des villes de plus de cinq millions d'habitants se trouvent dans des zones à risque d'élévation du niveau de la merNote de bas de page 40, et près de 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres d'une côteNote de bas de page 40. En l'absence d'actions robustes et coordonnées, des endroits comme New York, Shanghai, Abu Dhabi, Osaka et Rio de Janeiro pourraient être submergés au cours de notre existence, forçant le déplacement de millions de personnesNote de bas de page 41.
Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), un organisme des Nations Unies chargé de faire progresser les connaissances sur les changements climatiques, évalue régulièrement les données scientifiques les plus récentesNote de bas de page 42. Son sixième rapport d'évaluation, Climate Change 2022: Impacts, Adaptation and Vulnerability (en anglais seulement) évalue les conséquences des changements climatiques sur les écosystèmes, la biodiversité et les communautés humaines à l'échelle mondiale et régionaleNote de bas de page 43. Selon le rapport, dans tous les scénarios, les risques pour la santé augmenteront au cours de ce siècle, causant des dommages et des pertes de vie, ayant une incidence sur la santé physique et mentale, endommageant les infrastructures et les écosystèmes, perturbant les services de soins de santé et d'autres services essentiels, et menaçant les moyens de subsistanceNote de bas de page 44.
Les conséquences climatiques ne seront pas réparties équitablement. Ceux qui contribuent le plus aux changements climatiques sont les moins susceptibles d'en subir les effets négatifsNote de bas de page 45. À l'échelle mondiale, les enfants assumeront 88 % du fardeau des maladies causées par les changements climatiquesNote de bas de page 5Note de bas de page 46. Des situations comme la pauvreté et la marginalisation socioéconomique ou politique sont susceptibles de désavantager les femmes, les enfants, les personnes âgées et d'autres populationsNote de bas de page 35Note de bas de page 47Note de bas de page 48. Par exemple, les enfants confrontés à la pauvreté sont plus à risque d'être exposés aux inondations et aux sécheresses en milieu urbain, lesquelles peuvent contaminer l'eau et entraîner des maladies diarrhéiquesNote de bas de page 35Note de bas de page 49. Les personnes vivant dans les pays à revenu faible et moyen, les populations en situation de vulnérabilité dans les pays à revenu élevé et les communautés autochtones subissent déjà les conséquences inéquitables et disproportionnées des changements climatiquesNote de bas de page 45.
En outre, le GIEC reconnaît que le colonialisme est l'un des facteurs de vulnérabilité aux conséquences climatiques dans le mondeNote de bas de page 19. Pour cette raison, l'action internationale pour le climat doit reconnaître et respecter les droits des peuples autochtones. Ces derniers sont particulièrement sensibles aux conséquences des changements climatiques en raison des liens étroits qu'ils entretiennent avec la terre, les écosystèmes et les ressources naturelles dont ils dépendentNote de bas de page 50. Grâce aux savoirs intergénérationnels et traditionnels, les peuples autochtones ont été parmi les premiers à constater les changements climatiques. Ils font preuve d'une réflexion critique pour y faire face et s'y adapterNote de bas de page 51. À l'échelle mondiale, les visions du monde autochtones prennent de plus en plus d'importance, mettant l'accent sur le lien qui unit la nature à la terre, aux animaux, aux plantes et aux peuplesNote de bas de page 52Note de bas de page 53Note de bas de page 54. De plus, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) établit le « droit à la préservation et à la protection de l'environnement »Note de bas de page 55Note de bas de page 56Note de bas de page 57Note de bas de page 58. Si nous voulons prendre des mesures fermes et durables pour lutter contre les changements climatiques à tous les niveaux, nous devons respecter les droits et l'expertise des Autochtones.
Malgré l'urgence de la situation climatique, il y a encore de l'espoir. La réponse mondiale aux changements climatiques est de plus en plus axée sur les répercussions sur la santé. En 2021, plus de 200 revues médicales internationales ont publié des éditoriaux sur les conséquences catastrophiques sur la santé et le besoin urgent d'agirNote de bas de page 59. Lors de la 26e Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26), l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a tenu une conférence parallèle sur la santé, l'équité et les changements climatiques. À l'heure actuelle, 60 pays se sont engagés à participer à au moins une des initiatives de systèmes de santé résilients aux changements climatiques et à faibles émissions de carbone dans le cadre du Programme de santé de la COP26Note de bas de page 60. La COP27 à venir devrait réunir la communauté mondiale de la santé et des partenaires pour veiller à ce que la santé et l'équité soient au cœur des négociations pour le climat dans le cadre de la conférenceNote de bas de page 61. Les résultats d'une enquête mondiale publiée par l'OMS indiquent que plus de 60 pays ont réalisé ou entrepris une évaluation de la vulnérabilité de la santé aux changements climatiques. Ces évaluations sont essentielles pour établir une base de données probantes permettant de comprendre les risques pour la santé, d'évaluer les groupes plus vulnérables, de cerner les lacunes dans les mesures actuelles et de définir des mesures d'adaptation efficaces pour soutenir la prise de décisionsNote de bas de page 62.
Les organisations internationales de santé publique et les collectivités ont déployé des efforts pour attirer davantage l'attention sur la question des liens entre santé et changements climatiques. L'Association internationale des instituts nationaux de santé publique (IANPHI) a publié la Feuille de route de l'IANPHI pour l'action sur la santé et le changement climatique à la COP26. Cette feuille de route souligne les rôles actuels et potentiels des instituts nationaux de santé publique dans l'action climatique et comprend des engagements à soutenir leurs efforts d'adaptation et d'atténuation ainsi que l'élaboration de politiquesNote de bas de page 45. En 2020, l'IANPHI a mis sur pied un groupe de travail sur les changements climatiques afin de promouvoir la collaboration internationale entre les instituts nationaux de santé publique et d'autres intervenantsNote de bas de page 63.
La santé dans un climat en changement : le contexte canadien
Les faits démontrant que les changements climatiques ont déjà des conséquences sur la santé et le bien-être des personnes vivant au Canada sont nombreuxNote de bas de page 5. En juin 2021, l'Ouest canadien a connu un dôme de chaleur historique, qui a causé 619 décès liés à la chaleur. Une température maximale de 49,6 °C a été enregistrée à Lytton, en Colombie-Britannique, un record canadienNote de bas de page 64Note de bas de page 65Note de bas de page 66. Une vague de chaleur importante au Québec a entraîné 86 décès en 2018, l'été le plus chaud jamais enregistré en 146 années d'observations météorologiques dans la provinceNote de bas de page 5Note de bas de page 67Note de bas de page 68Note de bas de page 69. De plus, la superficie brûlée par les feux de forêt au Canada a doublé entre les années 1970 et 2000Note de bas de page 5Note de bas de page 70. En 2021, un printemps exceptionnellement sec d'un bout à l'autre du pays a déclenché une saison des feux de forêt hâtive, qui aura causé 2 500 incendies actifs de plus que l'année précédenteNote de bas de page 65. Des millions de personnes au Canada ont été exposées à la fumée des feux de forêt et près de 50 000 évacuations ont eu lieu en Colombie-Britannique seulementNote de bas de page 65.
Dans un pays qui compte plus de 243 000 kilomètres de côtes peuplés d'environ 6,5 millions de personnes, les régions côtières, les écosystèmes et les collectivités du Canada sont sérieusement menacés par l'élévation du niveau de la merNote de bas de page 71. Bien que les fluctuations du niveau de la mer varient considérablement selon l'emplacement, certaines régions, comme le Canada atlantique, devraient connaître une hausse supérieure à la moyenne globaleNote de bas de page 5Note de bas de page 72. Cela pose des risques immédiats et à long terme, comme l'érosion côtière, l'augmentation de la fréquence des ondes de tempête, l'invasion d'eau salée, les inondations et les dommages aux infrastructures, aux biens personnels et aux transportsNote de bas de page 65Note de bas de page 71Note de bas de page 72. De plus, dans le Nord, où les températures augmentent le plus rapidement, le dégel du pergélisol, la modification des conditions de la glace et de la neige et le déplacement de l'habitat faunique menacent des modes de vie. On note des conséquences pour la culture, les infrastructures, les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire et la qualité de l'eauNote de bas de page 5Note de bas de page 21Note de bas de page 72Note de bas de page 73Note de bas de page 74. À l'heure actuelle, le pergélisol recouvre 40 % de la masse terrestre du Canada. Cependant, les estimations prévoient que ce chiffre pourrait diminuer de 16 % à 20 % d'ici 2090Note de bas de page 75Note de bas de page 76.
Au large des côtes, le réchauffement et l'acidification des océans entraînent des changements irréversibles aux écosystèmes qui perturbent les populations fauniques et l'approvisionnement alimentaireNote de bas de page 5. L'augmentation des températures atmosphériques et de l'humidité risque d'aggraver la pollution de l'air et de créer des conditions favorables à la propagation de maladies à transmission vectorielle, comme la maladie de LymeNote de bas de page 5Note de bas de page 77Note de bas de page 78Note de bas de page 79Note de bas de page 80Note de bas de page 81. La figure 1 illustre quelques-unes des vastes répercussions des changements climatiques observées au Canada ayant une incidence sur la santé et le bien-être. Au moyen de cartes interactives, de vidéos et d'articles, l'Atlas climatique du Canada fournit de plus amples renseignements sur les répercussions prévues des changements climatiques et sur la façon dont elles affectent différemment les régionsNote de bas de page 82. Il est important de noter, cependant, que même si de nombreuses conséquences climatiques sont observées à l'échelle régionale, elles peuvent avoir des effets de grande portée.
En 2015, le Canada a ratifié l'Accord de Paris aux côtés de 195 autres paysNote de bas de page 32. Ce traité juridiquement contraignant fixe des objectifs à long terme pour les États membres visant à limiter le réchauffement de la planète bien en deçà de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et à déployer des efforts considérables pour limiter cette augmentation de la température mondiale à 1,5 °CNote de bas de page 32. À ce jour, les températures mondiales moyennes ont augmenté de 1,1 °CNote de bas de page 84. Si les émissions mondiales de gaz à effet de serre se maintiennent à leur rythme actuel, il y a un risque élevé que le monde dépasse l'objectif de 1,5 °C entre 2030 et 2052. Le rythme actuel de la lutte internationale contre les changements climatiques n'est pas assez rapide. Des données probantes montrent que les températures mondiales dépasseront le seuil de 2 °C d'ici la fin du siècle, à moins que l'on observe des réductions importantes et rapides des émissions dans tous les secteursNote de bas de page 85.
Chaque augmentation future de la température pose des risques importants et augmente la probabilité de conséquences cumulées sur la santé et la survie des humains, des animaux et des végétaux. Cependant, limiter les augmentations des températures moyennes à l'échelle planétaire à 1,5 °C aura pour effet de réduire les risques de conséquences graves des changements climatiques. Le dépassement de ce seuil aura pour effet de causer des éclosions de maladies et des phénomènes météorologiques extrêmes qui à leur tour entraîneront de nombreuses maladies, blessures et décès évitables à l'échelle mondialeNote de bas de page 86. Une hausse de 2 °C des températures moyennes mondiales entraînerait quant à elle des conditions plus extrêmes et des changements spectaculaires des systèmes terrestres, aériens et aquatiques qui permettent la survie de toutes les espèces. Dans certains cas, les dommages qui en résultent seront irréversibles. On prévoit qu'une augmentation de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels exposera régulièrement plus d'un tiers de la population mondiale à des vagues de chaleur menaçant la santé, ainsi qu'à une élévation du niveau de la mer qui accentuera le risque d'inondation pour 10 millions de personnes de plus dans le mondeNote de bas de page 84Note de bas de page 87.
L'ensemble du Canada se réchauffe à un rythme deux fois plus rapide que la moyenne mondiale. Quant au Nord, il se réchauffe de trois à quatre fois plus vite (figure 2)Note de bas de page 5Note de bas de page 23Note de bas de page 74. Depuis 1948, les températures moyennes au Canada ont augmenté de 1,7 °C, tandis que le nord du pays, qui compte pour près des deux tiers de sa masse terrestre, s'est réchauffé de manière alarmante de 2,3 °C en moyenneNote de bas de page 23. Selon le scénario de faibles émissions de gaz à effet de serre défini par l'Accord de Paris, les modèles climatiques prévoient que la température annuelle moyenne du Canada augmentera de 1,8 °C d'ici 2050. Dans un scénario d'émissions de gaz à effet de serre à forte rétention de la chaleur, la température annuelle moyenne du Canada augmenterait de plus de 6 °C d'ici la fin du siècleNote de bas de page 88. La réalité est que, même avec les mesures les plus rigoureuses de réduction des gaz à effet de serre, nous sommes aux prises avec un réchauffement du climat pour les prochaines décennies en raison des gaz à effet de serre déjà présents dans l'atmosphèreNote de bas de page 89Note de bas de page 90. Quoi qu'il en soit, une aggravation de la situation dans un scénario de fortes émissions risquerait de dépasser notre capacité d'intervention et de protection de la santé.
Sans une intensification rapide des mesures d'adaptation, les répercussions des changements climatiques sur la santé s'aggraveront à mesure que les températures annuelles moyennes augmenterontNote de bas de page 5Note de bas de page 22Note de bas de page 91. Ces changements progressifs risquent également de limiter l'efficacité des efforts d'adaptation pouvant être déployés, rendant plus difficile la protection de la santé de la populationNote de bas de page 19. Cette réalité souligne l'importance des accords internationaux pour la lutte et l'adaptation aux changements climatiques qui peuvent offrir d'importants co-bénéfices pour la santé. Ces co-bénéfices se produisent lorsque des politiques visant d'autres secteurs, comme l'environnement, produisent également des effets positifs sur la santé et le bien-êtreNote de bas de page 1. Par exemple, des efforts d'atténuation efficaces déployés dans les secteurs de l'énergie, des transports, de la construction, de l'infrastructure et de l'agriculture peuvent sauver des vies et réduire le fardeau des maladies chroniques grâce aux avantages qu'ils procurent sur les plans de la qualité de l'air, de l'activité physique, des normes de logement et de l'alimentationNote de bas de page 7.
Des dangers climatiques aux effets sur la santé : les risques pour la santé découlant des changements climatiques au Canada
Les voies qui relient l'exposition aux dangers climatiques et les répercussions sur la santé sont complexes et multidimensionnelles (figure 3). Les vulnérabilités, comme le statut socioéconomique ou l'emplacement géographique, augmentent le risque de répercussions négatives sur la santé pour les personnes, les collectivités et la populationNote de bas de page 5Note de bas de page 43. Alors que certains aléas climatiques, comme les tempêtes violentes, peuvent entraîner des répercussions négatives sur la santé qui sont facilement identifiables (comme les blessures ou les décès), les répercussions des changements climatiques sur la santé ne se produisent souvent pas de manière isoléeNote de bas de page 5Note de bas de page 44. Par exemple, l'exposition à des phénomènes météorologiques extrêmes peut causer non seulement des blessures, mais elle peut aussi entraîner des répercussions à long terme sur la santé mentale en raison des évacuations, des dommages matériels et des pertes de biens. Les personnes et les collectivités peuvent faire face à des menaces multiples et en série, ou à des conséquences cumulées au fil du tempsNote de bas de page 5Note de bas de page 44. Les inondations peuvent entraîner la destruction d'infrastructures communautaires essentielles, comme les réseaux d'électricité et d'approvisionnement en eau, en plus de causer des problèmes de sécurité alimentaire en raison des perturbations ou des dommages aux processus et aux systèmes de production alimentaireNote de bas de page 92. Ces risques s'aggravent si les menaces climatiques se multiplient ou se répètent. La compréhension de ces voies, ainsi que des conditions qui créent la vulnérabilité, contribue à définir les points d'entrée pour l'action et l'intervention en santé publique.
Les systèmes de santé résilients capables de faire face aux changements climatiques tout en continuant d'offrir des fonctions essentielles de santé publique sont le fondement d'une intervention efficace. En effet, ces systèmes peuvent anticiper les chocs et les éléments perturbateurs liés au climat, y réagir, y faire face, s'en rétablir et s'y adapterNote de bas de page 5Note de bas de page 93. Cela va de pair avec les systèmes de soins de santé plus résilients aux conditions météorologiques défavorables et aux perturbations de la chaîne d'approvisionnement et de la prestation de services. Comme l'OMS l'a mentionné, la résilience aux changements climatiques est nécessaire pour que les systèmes de santé puissent accroître leur capacité à protéger et à promouvoir la santé dans un climat instable et en changementNote de bas de page 94.
Aléas climatiques, voies d'exposition et incidences sur la santé
À mesure que notre climat continuera d'évoluer, les menaces actuelles pour la santé s'intensifieront et de nouveaux risques émergeront. Alors que nous découvrons encore toute l'ampleur des incidences des changements climatiques sur la santé, les recherches existantes ont généré d'importantes données probantes sur les catastrophes climatiques, les voies d'exposition et les risques pour la santé, comme les maladies infectieuses et les répercussions sur la santé mentale. Cette section résume les principales constatations sur certaines des répercussions des changements climatiques sur la santé.
L'exposition aux phénomènes météorologiques extrêmes, comme les inondations, les sécheresses et les tornades, ou aux catastrophes naturelles comme les feux de forêt et les glissements de terrain, pose de graves risques pour la santé et la sécurité. En plus d'entraîner un risque de blessures, de maladies et de décès, ces phénomènes peuvent également avoir des incidences sur la santé en raison de l'isolement, de la perturbation des infrastructures par des pannes de courant, des dommages matériels, des évacuations et des déplacements associés des maisons, des emplois et des écolesNote de bas de page 5Note de bas de page 72. Les conditions météorologiques extrêmes peuvent également restreindre l'accès à la nourriture et à l'eauNote de bas de page 72. Une forte tempête hivernale à St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador, en 2020, a contraint la Ville à mettre en place l'état d'urgence, forçant les entreprises, y compris les épiceries, à fermer leurs portes pendant quatre jours. Cette perturbation de la chaîne d'approvisionnement alimentaire régionale, conjuguée à la forte demande des consommateurs, a empêché de nombreuses personnes de se procurer des aliments de baseNote de bas de page 5.
Les phénomènes météorologiques extrêmes peuvent également limiter ou retarder l'accès à des services de santé, sociaux et communautaires essentiels. Les hôpitaux touchés par les inondations sont susceptibles de devoir fermer des salles d'urgence, retarder des procédures médicales, évacuer des patients et réduire la capacité opérationnelle si le personnel est incapable de se rendre au travail. Dans les collectivités du Nord, l'accès aux services médicaux risque également de se voir compromis par des routes inaccessibles en raison du dégel du pergélisol, d'inondations et de feux de forêtNote de bas de page 95Note de bas de page 96Note de bas de page 97.
Le stress thermique et les risques pour la santé liés à la chaleur sont associés à des périodes de températures anormalement élevées. Des vagues de chaleur extrêmes sont déjà ressenties par des millions de personnes chaque année au CanadaNote de bas de page 64Note de bas de page 98. Les répercussions directes sur la santé de l'exposition à la chaleur sont importantes et comprennent les coups de chaleur, la déshydratation, les incidences sur la santé mentale (p. ex., les hospitalisations liées à la santé mentale et les tendances suicidaires), les complications liées à la grossesse, les maladies cardiovasculaires et respiratoires et la mortNote de bas de page 5Note de bas de page 91Note de bas de page 99. En Ontario, entre 1996 et 2010, pendant l'été, chaque augmentation de 5 °C a été associée à une augmentation de 2,5 % des décès. Ces décès étaient principalement liés à des maladies cardiovasculairesNote de bas de page 5. Les vagues de chaleur de 2010 et de 2018 au Québec ont entraîné une augmentation quotidienne de la mortalité, des visites à l'urgence, des déplacements en ambulance et des hospitalisationsNote de bas de page 67Note de bas de page 68. La perte de biodiversité, la transmission de maladies, l'insécurité alimentaire et la sécheresse sont d'autres conséquences pour la santéNote de bas de page 35Note de bas de page 100. Les vagues de chaleur et leurs répercussions sur la santé risquent de s'aggraver et de gagner en intensité, car les températures moyennes annuelles continuent d'augmenter d'un bout à l'autre du paysNote de bas de page 5Note de bas de page 101.
La chaleur extrême présente des risques accrus pour de nombreuses populations, qui touchent de manière disproportionnée les personnes âgées, les enfants, les nourrissons, les personnes souffrant de certains problèmes de santé physique et mentale préexistants, les personnes qui vivent ou travaillent à l'extérieur ainsi que les personnes qui ont un soutien financier ou social limité pour se protéger contre la chaleurNote de bas de page 102Note de bas de page 103. De nombreuses personnes en situation d'itinérance sont plus exposées aux phénomènes météorologiques extrêmesNote de bas de page 5Note de bas de page 104. Une exposition prolongée à une chaleur extrême peut exacerber les problèmes de santé préexistants, comme les problèmes de santé mentale ou les maladies chroniques, et les comportements à risque, y compris la consommation de substancesNote de bas de page 5Note de bas de page 104Note de bas de page 105Note de bas de page 106. De plus, les personnes qui n'ont pas accès à un logement sécuritaire ou qui peinent à garder un logement peuvent avoir de la difficulté à recevoir les avertissements de chaleur de services qui fournissent également de l'information sur les stratégies de rafraîchissementNote de bas de page 5Note de bas de page 104. Il peut également s'avérer plus difficile pour les personnes en situation d'itinérance d'avoir accès à l'eau potable ou d'éviter que la nourriture se gâte pendant les épisodes de chaleur extrêmeNote de bas de page 5Note de bas de page 104.
Au Canada, les changements climatiques se traduiront par des épisodes de chaleur extrême plus fréquents et plus intensesNote de bas de page 66. La recherche en santé publique et les rapports des coroners indiquent que les personnes et les groupes de personnes connaissant des difficultés matérielles et ayant un faible réseau social sont les plus à risque. En effet, un lien clair a été établi entre les températures intérieures élevées et les blessures et décès liés à la chaleurNote de bas de page 66. Plus précisément, les personnes âgées, en situation de handicap, vivant avec une maladie mentale ou une maladie chronique, ainsi que celles qui n'ont pas accès à la climatisation ou à la protection d'espaces verts environnants, comptent parmi les plus susceptibles à la chaleur extrêmeNote de bas de page 107. Des études sont en cours pour comprendre les conséquences de la chaleur extrême et les mesures possibles en matière de santé climatique, afin de réduire les températures intérieures dangereuses (voir l'encadré « Politiques fondées sur des données probantes et environnement bâti intérieur : limiter les températures intérieures pour prévenir les décès et les blessures liés à la chaleur »).
Politiques fondées sur des données probantes et environnement bâti intérieur : limiter les températures intérieures pour prévenir les blessures et les décès liés à la chaleur
Une étape cruciale vers la résilience aux changements climatiques est la mise en place d'une norme nationale en matière de température intérieure maximale. Les codes du bâtiment, les normes de construction, les lois sur la location résidentielle et l'aménagement urbain ciblé pourront ensuite être mobilisés pour en assurer la mise en œuvre. Parallèlement, il est essentiel de renforcer les liens sociaux et atténuer les risques d'isolement social (p. ex. faire des visites de santé lors d'événements de chaleur extrême) pour réduire le nombre de blessures et de décès liés à la chaleur dans les prochaines annéesNote de bas de page 108.
Au Canada, nous avons fixé des températures intérieures minimales pour protéger la santé pendant les hivers froids, mais aucune température intérieure maximale n'a été établie pour les périodes de grande chaleurNote de bas de page 109Note de bas de page 110. Il s'avère que l'exposition à des températures intérieures supérieures à 26°C est associée à une augmentation du nombre d'appels d'urgence et de décèsNote de bas de page 107Note de bas de page 111Note de bas de page 112Note de bas de page 113Note de bas de page 114Note de bas de page 115. Une limite supérieure de 26°C à l'intérieur a été proposée et serait suffisante pour protéger la plupart des occupants contre les blessures et les décès causés par la chaleur, y compris les personnes qui sont plus vulnérables en raison de leur âge ou de leur état de santéNote de bas de page 107Note de bas de page 111Note de bas de page 112Note de bas de page 113Note de bas de page 114Note de bas de page 115.
Garder les bâtiments au frais dans un climat plus chaud
L'utilisation généralisée de la climatisation centrale est une façon de s'assurer que les températures intérieures ne dépassent pas 26 °C. Toutefois, la climatisation contribue aux émissions de gaz à effet de serre, exerce une pression sur l'alimentation en électricité lors d'événements de chaleur extrême et comporte le risque de faire un grand nombre de victimes en cas de panneNote de bas de page 116Note de bas de page 117Note de bas de page 118Note de bas de page 119. Une approche multidimensionnelle s'impose pour favoriser des températures intérieures saines et durables. Les mesures doivent être adaptées aux différents types de logements. Les services de santé publique peuvent collaborer avec les secteurs de l'aménagement, de l'énergie et de la construction pour mettre au point des systèmes qui protègent les gens, sans déstabiliser le réseau électrique ou alimenter les changements climatiques. Ces stratégies peuvent inclure un refroidissement localisé au moyen de thermopompes, ainsi que des options non mécaniques, comme le recours à différents matériaux de couverture et des dispositifs d'ombrage à l'extérieur des fenêtres, qui aident à réduire la chaleur du bâtimentNote de bas de page 118.
Nouveaux bâtiments : les températures intérieures doivent être précisées dans les codes du bâtiment
L'élaboration d'un nouveau code national du bâtiment intégrant la résilience aux changements climatiques est en cours et comprendra une norme de température intérieure maximaleNote de bas de page 120. Les modifications au code doivent faire en sorte que le rendement du bâtiment tienne compte de la santé humaine dans le contexte d'autres objectifs, comme l'efficacité énergétique et les émissions de carbone. Sinon, il peut en résulter une maladaptation climatique, comme des bâtiments étanches à l'air qui surchauffent dangereusement durant les périodes de grande chaleurNote de bas de page 121.
Bien que les modifications au code du bâtiment soient un outil d'adaptation prometteur, il faudra du temps pour les adopter aux échelles nationale et provinciale. Les municipalités et les administrations locales peuvent agir plus rapidement en créant de nouvelles normes et des règlements de construction. La région métropolitaine de Vancouver a déjà modifié son règlement de construction pour exiger que tous les nouveaux immeubles résidentiels à logements multiples soient équipés d'un système mécanique de refroidissement pouvant maintenir une température intérieure inférieure à 26 °C d'ici 2025Note de bas de page 114.
Bâtiments existants : évaluation et modernisation encouragées par des moyens volontaires et réglementaires
La durée de vie moyenne des immeubles résidentiels publics au Canada varie de 40 à 80 ansNote de bas de page 122. La plupart des 14 millions de maisons du pays ont été construites pour les conditions climatiques du passéNote de bas de page 123. Il faudra déployer des efforts pour évaluer et moderniser les logements existants afin de pouvoir maintenir des températures sécuritaires par temps chaud. Dans les régions où le climat de référence demeurera tempéré, il pourrait ne pas être nécessaire de rafraîchir toute la maison. Une ou deux pièces fraîches peuvent suffire pour assurer la sécurité des occupants pendant les périodes de grande chaleur, ce qui est plus facilement réalisable.
L'évaluation des maisons individuelles à risque de surchauffe peut être effectuée au moyen de technologies peu coûteuses, comme des thermostats connectés à Internet. Les propriétaires, les locataires et les propriétaires fonciers pourraient profiter de programmes visant à encourager l'utilisation de ces technologies et se fier aux directives de santé publique sur la préparation aux situations d'urgence en cas de chaleur extrême pour cibler les environnements à risqueNote de bas de page 124.
Certaines mesures volontaires visant à réduire le risque de chaleur dans les bâtiments existants peuvent être encouragées par des subventions et des programmes de remise, mais elles ne profiteront pas nécessairement aux populations les plus à risque. Des mesures réglementaires seront sûrement nécessaires pour lutter équitablement contre la surchauffe résidentielle. L'établissement d'une température intérieure maximale dans les règlements de location résidentielle, comme c'est le cas pour les températures minimales acceptables, et la mise à jour des règlements désuets qui limitent l'installation de dispositifs de refroidissement dans les immeubles résidentiels à logements multiples sont deux options à envisagerNote de bas de page 125.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Dre Angela Eykelbosh, chercheuse en santé environnementale et spécialiste en application des connaissances scientifiques, et Dre Leah Rosankrantz, chercheuse en santé environnementale et spécialiste en application des connaissances scientifiques
Centre de collaboration nationale en santé environnementale
Les changements climatiques augmenteront les concentrations de polluants et la quantité de pollen dans l'air. L'augmentation des concentrations de polluants et de la quantité de pollen est associée à une exacerbation des maladies respiratoires comme, l'asthme, et des allergies et intensifie le risque de maladies cardiovasculaires et de décèsNote de bas de page 5. Chaque année au Canada, les concentrations actuelles de pollution de l'air causent 15 300 décès prématurés pour lesquels le coût économique est évalué à 114 milliards de dollarsNote de bas de page 128. Les concentrations de polluants dans l'air, comme l'ozone troposphérique et les particules fines, devraient augmenter à mesure que les changements climatiques élèvent les températures et l'humidité dans de nombreuses régions du paysNote de bas de page 126Note de bas de page 127. L'ozone troposphérique, le polluant atmosphérique le plus souvent lié au smog, est néfaste pour les poumons. Il exacerbe les problèmes d'asthme et augmente le nombre d'hospitalisations et de décès prématurésNote de bas de page 128.
On estime que le tiers des personnes vivant au Canada présentent au moins un facteur de risque les rendant plus vulnérables aux effets néfastes de l'exposition à la pollution atmosphériqueNote de bas de page 129. Toutefois, certaines personnes font face à des risques disproportionnés pour la santé liés à la pollution de l'air et aux allergènes, notamment les personnes âgées, les enfants, les femmes enceintes, les peuples autochtones, les personnes ayant des problèmes respiratoires et cardiaques préexistants, les personnes vivant dans des ménages à faible revenu, les personnes qui vivent dans des zones à forte pollution de l'air et les personnes qui vivent, travaillent ou sont actives à l'extérieurNote de bas de page 130.
En raison de l'augmentation de la fréquence et de l'intensité des feux de forêt causés par les changements climatiques, le dégagement de fumée expose des millions de personnes à des niveaux élevés de polluants atmosphériques toxiques pendant des jours et des semaines. On estime qu'entre 570 et 2 700 décès prématurés surviennent chaque année au Canada en raison d'une exposition prolongée aux particules fines de la fumée des feux de forêtNote de bas de page 5. De manière générale, l'exposition peut entraîner un large éventail de complications pour la santé, allant de l'irritation des yeux, du nez et de la gorge à l'aggravation des maladies cardiovasculaires et pulmonairesNote de bas de page 131. Les personnes qui vivent dans des régions sujettes aux feux de forêt peuvent également faire face à un risque accru de développer un cancer du poumon et des tumeurs cérébralesNote de bas de page 132. La fumée des feux de forêt peut également entraîner des conséquences pour la qualité de l'air sur de grandes distances ainsi que des répercussions sur la santé respiratoire des personnes qui vivent à des centaines, voire à des milliers de kilomètres de distanceNote de bas de page 133. En 2018, la fumée des feux de forêt provenant de la Colombie-Britannique et de l'Alberta a traversé le Canada et nuit à la qualité de l'air en Ontario, au Québec et dans les provinces de l'Atlantique. La fumée de ces feux de forêt s'est répandue aussi loin qu'en IrlandeNote de bas de page 134.
L'augmentation des températures et des concentrations de dioxyde de carbone dans l'atmosphère a modifié la répartition géographique des plantes, prolongeant la saison des aéroallergènes au Canada et augmentant la quantité de pollensNote de bas de page 72Note de bas de page 102. Les pollens représentent une cause importante d'allergies, ou de rhinite allergique, en Amérique du NordNote de bas de page 135.
La qualité, la salubrité et la sécurité des aliments sont essentielles à la santé. Toutefois, cette sécurité alimentaire est menacée par les changements climatiques en raison des défis qu'ils posent pour les piliers mondiaux et nationaux des systèmes alimentaires. Le réchauffement des températures et l'augmentation de la fréquence des précipitations peuvent accroître la présence d'agents pathogènes et de maladies d'origine alimentaire. Les sécheresses et les inondations peuvent perturber les chaînes d'approvisionnement alimentaire en endommageant les cultures ou en diminuant leur rendement, en réduisant la qualité nutritionnelle des aliments et en interrompant le processus de production alimentaire en raison de la perte de productivité qui en découle. Ces conséquences se répercutent sur la disponibilité, la qualité et les coûts des aliments, entraînant des changements dans l'alimentation, une sous-alimentation et l'insécurité alimentaireNote de bas de page 5Note de bas de page 17Note de bas de page 72Note de bas de page 99Note de bas de page 102Note de bas de page 136.
Les provinces des Prairies sont particulièrement vulnérables à ces incidences des changements climatiques. L'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba comptent plus de 80 % des terres agricoles du Canada et la majorité de l'agriculture pratiquée dans le paysNote de bas de page 137. Les températures élevées, combinées aux sécheresses, aux inondations et aux précipitations de plus en plus variables, peuvent avoir des répercussions négatives sur le rendement des cultures dans ces régions et ainsi nuire à l'approvisionnement alimentaire du pays. Par exemple, la chaleur accablante peut réduire le rendement de la production du maïs, du soja, du canola et du bléNote de bas de page 137. Les perturbations des systèmes de production alimentaire du Canada, cinquième plus grand marché d'exportation de produits agroalimentaires et de produits de la mer au monde, pourraient avoir des conséquences à l'échelle mondialeNote de bas de page 138.
Les changements climatiques peuvent également accroître les risques de contamination chimique des sources alimentaires. Les inondations et la fumée des feux de forêt transportent des polluants sur les terres agricoles, détériorant ou contaminant les cultures et le bétail. Les collectivités du Nord sont particulièrement à risque, car la fonte des glaciers et de la glace de mer libère des contaminants qui s'accumulent dans les sources alimentaires, comme les poissons et les mammifèresNote de bas de page 5Note de bas de page 36.
Les communautés autochtones qui dépendent des aliments traditionnels sont plus à risque d'insécurité alimentaire, car le déclin de la biodiversité, les changements des habitudes migratoires des animaux et la sédentarisation des populations entraînent des conséquences sur les sources alimentairesNote de bas de page 139Note de bas de page 140. Dans les régions du Nord, l'évolution rapide de l'environnement modifie l'habitat des principales espèces, tandis que la fonte de la glace de mer nuit au déplacement sécuritaire des chasseurs, limitant l'accessibilité et la disponibilité de la nourritureNote de bas de page 5Note de bas de page 76Note de bas de page 139. De plus, le déclin des pêches marines en raison du climat a déjà des répercussions sur les collectivités autochtones côtières qui dépendent des fruits de mer récoltés traditionnellement comme source importante de nutriments difficiles à remplacerNote de bas de page 141. Cette situation exacerbe les défis posés par la perturbation coloniale des systèmes alimentaires autochtones et la perte d'accès aux terres traditionnelles.
La qualité, la salubrité et la sécurité de l'eau subissent également les conséquences des changements climatiques, car ces derniers accentuent le risque de microorganismes et de toxines pouvant causer des maladies d'origine hydriqueNote de bas de page 17. Les précipitations abondantes, la fonte rapide des neiges et l'élévation du niveau de la mer peuvent réduire la disponibilité de l'eau douce et endommager les systèmes d'approvisionnement, augmentant ainsi le risque de présence de contaminants dans l'eau utilisée pour boire, cuisiner, se laver et nettoyer ou encore dans les eaux récréatives ou l'eau utilisée à des fins cérémoniales.
Les collectivités qui n'ont déjà pas accès à l'eau potable peuvent ressentir plus fortement les conséquences des changements climatiques. Environ 14 % de la population canadienne, principalement dans les collectivités rurales et éloignées, dépendent de petits systèmes d'alimentation en eau potable qui desservent moins de 300 personnesNote de bas de page 142. Ces systèmes, en particulier ceux des collectivités autochtones, sont touchés de façon disproportionnée par les problèmes de qualité et d'approvisionnement de l'eau. Par exemple, en 2021, 89 % des avis d'ébullition d'eau visaient des réseaux d'alimentation en eau potable desservant des collectivités de 500 personnes ou moins, et en date du mois de mai 2022, 29 collectivités des Premières Nations vivant dans les réserves étaient toujours touchées par des avis d'ébullition d'eau prolongéeNote de bas de page 143Note de bas de page 144. Pour atténuer ces menaces, les systèmes de santé publique peuvent soutenir la résilience des systèmes d'approvisionnement en eau (voir l'encadré « Protection de la santé, climat et petits réseaux d'alimentation en eau potable au Canada »).
Protection de la santé, climat et petits réseaux d'alimentation en eau potable au Canada
Les changements climatiques pourraient exacerber les défis inhérents liés aux petits réseaux d'alimentation en eau potable en affectant leur qualité, leur quantité et leur infrastructure.
L'eau de source deviendra plus variable et difficile à traiter de façon uniforme et selon une norme acceptable
Les changements des régimes de précipitations et d'inondations entraîneront une augmentation périodique de la contamination bactérienne et chimique de l'eau de source, ainsi que des matières organiques qui peuvent nuire au processus de traitementNote de bas de page 145Note de bas de page 146Note de bas de page 147Note de bas de page 148. Les proliférations plus fréquentes de cyanobactéries augmenteront le risque de présence de cyanotoxines dans l'eau potableNote de bas de page 149. Les feux de forêt modifieront l'hydrologie du bassin versant, ce qui affectera l'infiltration et le ruissellement ainsi que la qualité des eaux de surface et l'alimentation des nappes souterrainesNote de bas de page 150Note de bas de page 151. L'élévation du niveau de la mer aggravera l'intrusion d'eau salée dans les eaux souterraines insulaires ou côtièresNote de bas de page 148. La sécheresse réduira l'alimentation des nappes souterraines, augmentera la demande en eau et entraînera une plus grande concentration des polluants dans les eaux de surface.
Les infrastructures d'alimentation en eau seront plus à risque de contamination et de dommages
Les changements de la température et de la qualité de l'eau auront une incidence sur la croissance microbienne dans les tuyaux et les réservoirs de stockage. Les événements météorologiques extrêmes causeront des pannes de courant dans les stations de pompage et les usines de traitement, empêchant l'approvisionnement et le traitement. Les dommages aux conduites de distribution et aux systèmes de stockage, comme les fuites et les ruptures causées par des inondations ou des feux de forêt, pourraient entraîner une perte de pression, nuire à la distribution de l'eau et permettre aux polluants de s'infiltrer dans les systèmes. Les feux de forêt endommageront les infrastructures, les détruiront et feront fondre les tuyaux en plastique dans les réseaux de distribution, ce qui causera une contamination chimiqueNote de bas de page 152Note de bas de page 153. Le dégel du pergélisol déstabilisera le sol et endommagera les tuyaux souterrains et les réservoirs de stockage, ce qui entraînera la contamination de l'eau ou des infrastructuresNote de bas de page 154.
Réduction des répercussions des changements climatiques sur les petits réseaux d'alimentation en eau potable au Canada
Les organismes régionaux, provinciaux et fédéraux peuvent contribuer à protéger la santé et à renforcer la résilience des réseaux d'approvisionnement en eau en encourageant les auteurs de plans de salubrité de l'eau à inclure les risques associés aux changements climatiques pour les sources d'eau et les infrastructuresNote de bas de page 155. Ils peuvent améliorer l'accès aux données sur la qualité de l'eau grâce à un meilleur suivi, une surveillance accrue et des outils de partage des données, ainsi qu'à l'analyse des tendances, la modélisation et la mise au point d'outils de prévision de la qualité de l'eau et des systèmes d'alerteNote de bas de page 156.
À l'échelle de la collectivité, une intervention intersectorielle et une formation poussée s'imposent pour assurer une prévision, une préparation et une intervention suffisantes en cas d'urgence, avec notamment des compétences dans l'exploitation et l'entretien des bâtimentsNote de bas de page 157. Il est également nécessaire d'offrir un soutien et des ressources pour les analyses de la qualité de l'eau afin de faciliter l'intervention et le rétablissement en cas d'événements extrêmes.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Dre Juliette O'Keeffe, chercheuse en santé environnementale et spécialiste en application des connaissances scientifiques
Centre de collaboration nationale en santé environnementale
Le dégel du pergélisol, les sécheresses et les inondations causés par les changements climatiques aggraveront les problèmes de santé actuels découlant d'un accès restreint à de l'eau douce propreNote de bas de page 5. On s'attend à ce que le Canada atlantique connaisse la plus forte élévation du niveau de la mer à l'échelle locale, ce qui se traduira par une augmentation des inondations des maisons, des entreprises, des collectivités et des infrastructures maritimes. Cela posera des problèmes importants pour la foresterie, les pêches, l'agriculture et le transportNote de bas de page 158. La perte ou les dommages causés aux maisons et aux effets personnels augmentent le risque d'exposition physique aux éléments, aux agents pathogènes et à la prolifération de moisissures. Ils réduisent la qualité de l'air intérieur, nuisent aux déplacements et entraînent des problèmes de santé mentaleNote de bas de page 158.
Les risques pour la santé liés au climat amplifient le besoin de respecter les droits relatifs à l'eau, qui sont essentiels à l'équité en santé et à la justice. Les droits relatifs à l'eau font référence au droit inhérent à une eau potable sans discrimination pour une utilisation personnelle et domestique, ainsi qu'à des fins sociales, économiques et culturellesNote de bas de page 159Note de bas de page 160. Les Nations Unies reconnaissent que l'accès à des services d'approvisionnement en eau et d'assainissement est un droit de la personne, car un manque d'accès entraîne des conséquences dévastatrices sur la santé et brime d'autres droits de la personneNote de bas de page 161.
Les droits relatifs à l'eau vont au-delà de la salubrité de l'eau potable et comprennent les droits aux plans d'eau pour la pêche. Avant la colonisation, les pratiques autochtones encadraient l'utilisation de l'eau. De nos jours, le manque d'accès à une eau potable et durable accroît la vulnérabilité de certaines communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis aux maladies d'origine hydrique et à l'exposition aux contaminants chimiquesNote de bas de page 162Note de bas de page 163.
Les lacunes en matière de gouvernance rendent difficile l'exercice des droits inhérents et issus de traités relatifs à l'eau pour les peuples autochtonesNote de bas de page 159. La répartition, en vertu de la Constitution, des pouvoirs relatifs à l'eau entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral contribue à l'incohérence des normes de protection de l'eau. Les communautés autochtones se retrouvent dans un système de réglementation fragmenté qui accroît les défis liés à l'accès à l'eau potableNote de bas de page 164.
Le risque de maladies infectieuses augmente en raison d'un climat en évolution rapide. Les fluctuations de la température et les changements de précipitation élargissent et modifient l'aire de répartition géographique et l'abondance des maladies infectieuses influencées par le climat. De plus, la menace de réapparition ou d'introduction de zoonoses transmises entre les humains et les animaux est aggravée par les changements climatiques, la perte de biodiversité et d'habitat, le commerce et les déplacements. Cette situation augmente le risque de maladies émergentes futures (voir l'encadré « Changements climatiques et risques de maladies émergentes »).
Changements climatiques et risques de maladies émergentes
Les changements climatiques ont une incidence sur les cycles de vie et la transmission de virus et d'autres pathogènes en raison des modifications radicales aux régimes climatiques, à la qualité de l'eau, à la végétation, aux déplacements des populations et à d'autres facteurs environnementaux. L'élargissement des plages de vecteurs a contribué à une plus grande propagation de maladies, comme la maladie de Lyme, et d'une myriade de pathogènes viraux transmis par les moustiques et les tiques. Par exemple, un examen de 2013 a révélé une augmentation de 10 % à 50 % des maladies à transmission vectorielle dans le nord des États-Unis par rapport à la médiane des 10 années précédentesNote de bas de page 165. Les tiques, les souris et les moustiques porteurs de pathogènes continuent de se propager dans le sud du Canada.
L'influence des changements climatiques sur la propagation des maladies infectieuses dépend d'interactions complexes entre le comportement humain, l'utilisation des terres, l'urbanisme, la biologie des vecteurs, les stratégies d'atténuation et les facteurs socioéconomiques. Par exemple, les changements climatiques amènent certains groupes de personnes, comme les populations déplacées ou mal logées, à vivre dans des milieux surpeuplés, comme des refuges ou des centres communautaires, ce qui peut faciliter la propagation des maladies infectieusesNote de bas de page 166. Les changements de température et d'humidité favorisent la survie et la propagation de virus, tandis que les changements de régime alimentaire peuvent rendre le microbiome intestinal plus propice aux pathogènesNote de bas de page 166. De plus, le commerce et les voyages peuvent importer des maladies endémiques ailleurs dans le monde.
Les risques climatiques peuvent également créer des conditions propices à la propagation des maladies infectieuses. Par exemple, l'interruption de l'accès aux sources d'eau potable et aux réseaux d'égout endommagés par des phénomènes météorologiques extrêmes augmente le risque de maladies diarrhéiques et hydriquesNote de bas de page 167.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Dr Yoav Keynan, responsable scientifique, et Margaret Haworth-Brockman, gestionnaire principale de programme
Centre de collaboration nationale des maladies infectieuses
Les changements climatiques entraînent également des risques de nouvelles maladies à transmission vectorielle, car la possibilité que des vecteurs s'établissent dans de nouveaux endroits au Canada augmenteNote de bas de page 168. Les changements climatiques ont déjà agrandi l'aire de répartition des tiques et des moustiques, augmentant le risque d'exposition humaine à des vecteurs de transmission de maladies comme la maladie de Lyme et le virus du Nil occidental (voir l'encadré « Maladie de Lyme et changements climatiques »)Note de bas de page 91.
Maladie de Lyme et changements climatiques
Les maladies transmises par les tiques sont de plus en plus courantes dans certaines régions du Canada, en partie à cause des changements climatiques et de l'évolution de l'utilisation des terres. Depuis les années 1990, lorsque les tiques ont atteint pour la première fois le sud de l'Ontario, l'Agence de la santé publique du Canada surveille les déplacements des populations de tiques et les tendances d'exposition des individusNote de bas de page 169. La maladie de Lyme est causée par une bactérie et se propage par la piqûre d'une tique à pattes noires infectée. Il s'agit de l'une des maladies infectieuses émergentes qui se propagent le plus rapidement au Canada et de la maladie à transmission vectorielle la plus fréquemment signalée en Amérique du Nord. Son incidence s'est multipliée par plus de 17 entre 2009 et 2019Note de bas de page 170. En plus de la maladie de Lyme, d'autres maladies transmises par les tiques, comme l'anaplasmose, la babésiose et le virus Powassan, commencent à apparaître au Canada et sont susceptibles d'augmenter en fréquence.
Les changements climatiques ont des répercussions sur les populations de tiques en raison des étés plus longs et plus chauds et des hivers plus doux qui favorisent leur taux de survie, de croissance et de reproductionNote de bas de page 171. En d'autres termes, elles peuvent survivre et s'établir dans des régions où elles ne le pouvaient pas auparavant et augmenter en nombre là où elles étaient déjà installées. Des étés plus longs signifient également une saison prolongée pendant laquelle les tiques sont actives et les gens sont à l'extérieur, ce qui augmente la possibilité d'interaction physique.
De plus, les changements climatiques accroîtront vraisemblablement l'aire de répartition, l'abondance et l'activité des rongeurs, des oiseaux et des cerfs hôtes porteurs de la maladie. Ces hôtes permettent aux tiques de se déplacer tout au long de leur cycle de vie et peuvent les transporter sur de longues distancesNote de bas de page 171.
Texte partiellement adapté de l'Atlas climatique du CanadaNote de bas de page 169. Pour en savoir plus sur la maladie de Lyme au Canada, notamment sur les mesures de prévention, les symptômes et les risques.
Les maladies non transmissibles et l'incapacité, ainsi que les maladies chroniques préexistantes, seront également aggravées par les changements climatiquesNote de bas de page 172Note de bas de page 173. Les personnes vivant avec des maladies chroniques et les personnes en situation de handicap font face à un plus grand risque de maladie ou de décès lorsqu'elles sont exposées à des épisodes de chaleur accablante, des phénomènes météorologiques extrêmes, des maladies transmissibles par l'eau ou une mauvaise qualité de l'airNote de bas de page 5Note de bas de page 174. Par exemple, les personnes âgées atteintes de maladies cardiovasculaires, d'hypertension ou de diabète sont particulièrement vulnérables à la chaleur extrême. Les facteurs de risque associés aux maladies non transmissibles et à l'incapacité sont également affectés par les changements climatiques. On reconnaît de plus en plus que les maladies infectieuses peuvent entraîner des maladies chroniques et que les maladies infectieuses sont plus graves chez les personnes atteintes de maladies chroniquesNote de bas de page 5. Il faut resserrer les liens entre les efforts de santé publique pour mieux comprendre ces préoccupations de santé et intervenir.
La relation entre le bien-être mental et les changements climatiques est également complexe, car elle implique les risques découlant d'événements cumulés et en série. Il peut s'agir de répercussions négatives sur la santé mentale, spirituelle et émotionnelle découlant de l'exposition à des phénomènes météorologiques extrêmes, d'évacuations d'urgence, de déplacements forcés, d'insécurité alimentaire et hydrique et de perturbations sociales et économiquesNote de bas de page 175. Les changements climatiques à évolution lente, comme la hausse des températures, l'élévation du niveau de la mer, le dégel du pergélisol et l'érosion côtière, peuvent avoir des répercussions sur les paysages essentiels, les pratiques culturelles et les sites patrimoniaux. Cela entraîne une augmentation des problèmes de santé mentale, surtout chez les personnes qui établissent des liens profonds avec la terreNote de bas de page 175. Le traumatisme associé à ces changements, leurs répercussions et leurs conséquences peuvent exacerber les problèmes de santé mentale existants ou en créer de nouveaux. Cela a une incidence sur le bien-être mental individuel ainsi que sur le bien-être social de la communauté, qui est vu comme un aspect de la santé mentale positiveNote de bas de page 17Note de bas de page 99.
« Je crois que nous avons vraiment sous-estimé les répercussions de l'information relative aux [changements climatiques] sur la santé mentale, car ce dont nous parlons essentiellement, c'est d'un diagnostic angoissant qui nous affecte tous, tous les patients que nous traiterons un jour, notre famille et nos amis. »
De nombreuses personnes au Canada subissent déjà des effets néfastes sur leur santé mentale en raison des répercussions actuelles et futures des changements climatiques. Dans un sondage mené auprès de 2 000 adultes canadiens, 49 % des répondants ont indiqué qu'ils étaient de plus en plus préoccupés par les effets des changements climatiques, et 25 % ont déclaré penser souvent aux changements climatiques et être "vraiment inquiets" à ce sujetNote de bas de page 5. Un lien a été établi entre les réactions émotionnelles et comportementales négatives, comme l'inquiétude, le chagrin, l'anxiété, la colère, le désespoir et la peur, et les menaces prévues associées aux changements climatiquesNote de bas de page 5.
Les enfants et les jeunes sont particulièrement vulnérables à l'anxiété découlant des changements climatiques, car ce sont eux qui auront la lourde tâche de faire face à la menace grandissante des changements climatiquesNote de bas de page 176. Dans le monde entier, les jeunes font état d'une grande détresse à l'égard des répercussions sur leur quotidien, y compris la peur pour leur avenir et l'avenir de l'humanité, l'absence d'intervention ou d'urgence du gouvernement et le sentiment d'être trahis et abandonnés par les adultesNote de bas de page 176. Ces sentiments qui peuvent être chroniques, prolongés et inévitables, augmentent le risque de futurs problèmes de santé mentale si des efforts d'atténuation et d'adaptation fructueux ne sont pas déployésNote de bas de page 176.
À l'échelle des collectivités, les changements climatiques peuvent perturber la cohésion sociale et le bien-être de la collectivité en raison de la détérioration des pratiques culturelles, du sentiment d'identité, de l'attachement au lieu, du sentiment d'appartenance et de la transmission intergénérationnels du savoirNote de bas de page 21. Ces répercussions peuvent être immédiates ou progressives, imposant un fardeau aux générations futures et accentuant la nature structurelle et systémique de la vulnérabilitéNote de bas de page 177. Les changements climatiques deviennent un facteur de stress supplémentaire pour la santé mentale des collectivités qui dépendent des ressources naturelles. Dans les régions nordiques comme le Nunavut, la perturbation des activités terrestres ainsi que la perte de confort et d'identité culturelle ont une incidence négative sur la santé mentale et le bien-êtreNote de bas de page 178.
L'incidence négative sur la santé mentale causée par la crise climatique touche de manière disproportionnée les enfants, les jeunes et les aînés, les peuples autochtones, les personnes qui ont certains problèmes de santé physique et mentale préexistants, ainsi que les groupes socioéconomiquement défavorisés et les populations qui font face à l'itinéranceNote de bas de page 179. De plus, certains groupes professionnels peuvent également subir des répercussions disproportionnées sur la santé mentale en raison des changements climatiques, comme ceux qui dépendent des conditions météorologiques pour leurs activités (p. ex., les agriculteurs) et ceux qui occupent des emplois d'intervention directe face aux urgences liées au climat (p. ex., les pompiers et les premiers intervenants)Note de bas de page 175.
Les risques pour la santé associés aux changements climatiques sont déterminés par un certain nombre de dangers climatiques, l'exposition et la capacité d'adaptation. Les dangers et les risques pour la santé sont vécus de différentes façons, à différents endroits et par différents groupes de personnes. L'exposition, la vulnérabilité et la capacité d'adaptation sont influencées par les conditions sociales, économiques et écologiques qui définissent les niveaux de santé des personnes, des collectivités et des populationsNote de bas de page 5Note de bas de page 180Note de bas de page 181. Ces risques changent tout au long de la vie (figure 4)Note de bas de page 5Note de bas de page 17Note de bas de page 176Note de bas de page 182.
La vulnérabilité et les répercussions inéquitables sur la santé
« Les plus pauvres et les plus vulnérables seront plus durement affectées. Nous avons donc le devoir de protéger la population, et ce, en remédiant aux iniquités. De nombreuses études révèlent que moins il y a d'iniquités dans les sociétés, plus la population est résiliente et moins elle sera durement affectée par une crise. »
Il est important de comprendre le concept de la vulnérabilité aux changements climatiques et de l'appliquer avec soin au contexte de la santé publique. En plus de fournir des renseignements sur les risques accrus pour la santé, la connaissance de la vulnérabilité aux changements climatiques peut contribuer à déterminer là où on a le plus besoin de ressources et de mesures d'adaptationNote de bas de page 5.
Dans le domaine de la santé publique, le concept de vulnérabilité peut être très stigmatisantNote de bas de page 5. Il est donc important de reconnaître que la vulnérabilité aux conséquences des changements climatiques ne peut être directement associée à des collectivités ou des populations en particulier. Elle se profile plutôt lorsque des tendances systémiques et prolongées d'iniquité mènent à une exposition, une sensibilité et une capacité d'adaptation différentes aux dangers climatiquesNote de bas de page 5. La vulnérabilité est influencée par des facteurs comme la géographie, l'âge, le sexe, l'orientation sexuelle, l'identité et l'expression de genre, l'expérience de la colonisation, l'éducation, l'ethnicité, la race, l'incapacité, le revenu, l'environnement bâti, ainsi que les conditions de vie et de travailNote de bas de page 183. Collectivement, ces facteurs sont appelés les déterminants sociaux de la santéNote de bas de page 184Note de bas de page 185Note de bas de page 186Note de bas de page 187. La compréhension de ces facteurs doit inclure les déterminants structurels de la santé comme la colonisation et les politiques d'assimilationNote de bas de page 188. Ces forces en amont influencent les politiques, les programmes et les systèmes qui profitent à certains groupes de personnes plutôt qu'à d'autresNote de bas de page 189.
Les personnes qui subissent une marginalisation fondée sur le genre font face à un risque plus élevé d'exposition et de sensibilité aux dangers climatiquesNote de bas de page 5. Les femmes sont susceptibles de souffrir davantage d'anxiété liée au climat et de troubles de stress post-traumatiques, en plus d'assumer des rôles de soins de manière disproportionnéeNote de bas de page 190. Les changements climatiques peuvent exacerber la violence fondée sur le genre et poser un risque accru pendant ou après des phénomènes extrêmes. Les inondations de 2013 dans le sud de l'Alberta ont eu des effets sur la santé mentale différents selon le genre, notamment une multiplication des ordonnances de somnifères et de médicaments contre l'anxiété chez les femmes, et une augmentation des agressions sexuellesNote de bas de page 191Note de bas de page 192.
La vulnérabilité aux changements climatiques dépend du degré d'exposition aux dangers climatiques, de la sensibilité aux répercussions potentielles et de la capacité d'adaptation. Ces facteurs peuvent être fortement influencés par les conditions sociales et structurelles (figure 5)Note de bas de page 5. Dans le cas des inondations côtières, tout le monde ne connaît pas les mêmes risques ni les mêmes répercussions. Le type de logement et son emplacement, l'accès à des ressources financières pour réparer les dommages et le paiement des dépenses associées au déplacement temporaire ou permanent, ainsi que la stabilité des activités de subsistances sont quelques-uns des facteurs qui peuvent influer sur les conséquences des inondations sur la santé physique et mentale d'une collectivité.
Certains facteurs sociaux et économiques entraînent également un accès différentiel aux ressources matérielles et sociales nécessaires pour atténuer les conséquences des changements climatiques et s'y adapterNote de bas de page 5Note de bas de page 193. Par exemple, les séquelles historiques et durables du colonialisme sous-tendent et perpétuent la déresponsabilisation structurelle des peuples autochtones et les iniquités de santé, sociales et économiquesNote de bas de page 194. Des générations de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis ont vu la terre et la faune détruites ainsi que les modes de vie traditionnels dégradés par les changements climatiques, ce qui a exacerbé davantage les iniquités préexistantes sur les plans de la santé, de la société et de l'économieNote de bas de page 20Note de bas de page 188. Ces bouleversements ont des répercussions sur les ressources dont disposent les peuples autochtones pour faire face aux risques climatiques et s'y adapter. Par exemple, les infrastructures communautaires sont inadéquates, surtout dans les collectivités nordiques et éloignéesNote de bas de page 20Note de bas de page 91. Comme mentionné précédemment, les changements climatiques perturbent les liens uniques que les Premières Nations, les Inuits et les Métis entretiennent avec la terre, et cette perturbation a une incidence sur leur bien-être physique, émotionnel, spirituel, psychologique et culturel (voir l'encadré « Environnement : L'écosystème est notre santé »)Note de bas de page 5Note de bas de page 195.
Environnement : L'écosystème est notre santé
Extrait abrégé de Vers un avenir meilleur : santé publique et populationnelle chez les Premières Nations, les Inuits et les MétisNote de bas de page 196
Dans le territoire qui a donné naissance au Canada, les conceptions des peuples autochtones entourant les relations, la responsabilité et la réciprocité se sont heurtées à une vision différente du monde dès la fin du 15e siècle. Les colons considéraient l'environnement, de même que les peuples qui y vivaient, comme des biens marchandables qui pouvaient être acquis, contrôlés et colonisés. Cette vision anthropocentrique du monde est à l'origine de politiques et de gestes qui ont nui à la santé de l'environnement ainsi qu'à tous les êtres qui lui sont liés. Les effets de cette vision deviennent flagrants au fur et à mesure que nous avançons dans le 21e siècle. Les humains ont exploité les ressources naturelles de la Terre mère, menaçant un million d'espèces d'extinction à ce jour. Cette perte de la biodiversité affecte les rapports entre tous les êtres. En outre, les peuples qui dépendent de ces rapports pour leur survie, leur sécurité alimentaire, leur santé et leur qualité de vie se sentent également mis en danger.
La perte de la biodiversité et les changements climatiques sont étroitement liés, et il faut agir sur leur base communeNote de bas de page 197. Pour ce faire, il faut reconnaître que la Terre mère joue un rôle fondamental dans la santé de tous les êtres puisque l'écosystème est notre système de santé. Nous devons nous détourner de la vision anthropocentrique et réapprendre que nous, les humains, faisons partie d'un réseau complexe et interdépendant.
En tant que femme hul'qumi'num et médecin hygiéniste de ma région, je vais me baigner à la rivière, comme les Aînés me l'ont appris. Je demande à l'eau d'emporter mes soucis. La terre et l'eau ont des propriétés curatives, comme la recherche l'a récemment révélé.
Il est urgent de revoir notre relation à l'environnement, et les signaux en ce sens abondent, dont la vague de chaleur extrême que l'ouest de l'Amérique du Nord a connue au début de l'été 2021. Des températures élevées encore jamais observées ont alors entraîné un nombre accru de décès humains, des pertes chez d'autres espèces (on estime à plus d'un milliard les animaux du littoral ayant péri sur la côte de la mer de Salish seulement), des fontes de neige précipitées, des inondations, des sécheresses accrues et des feux de forêtNote de bas de page 198Note de bas de page 199. Le sérieux de la situation exige un virage fondamental : il est impératif de placer la santé de l'environnement au centre de tout notre processus décisionnel. Nous devons sans attendre changer la vision anthropocentrique prédominante pour une vision où nous honorons notre relation avec tous les êtres vivants dans un milieu qui nous est commun.
Nous devons reconnaître, soutenir et promouvoir la souveraineté autochtone si l'on veut protéger l'environnement, car celle-ci est synonyme de durabilité.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Dre Shannon Waters, médecin hygiéniste pour la région de la vallée de Cowichan à la régie de la santé de l'île de Vancouver
L'accès inéquitable aux ressources influe sur la façon dont une collectivité peut se préparer, réagir et s'adapter aux changements climatiques. Les iniquités entravent la mise en œuvre proactive de mesures d'adaptation aux changements climatiques par certaines collectivités et populationsNote de bas de page 200. Même si les collectivités rurales et éloignées sont généralement plus touchées par les changements climatiques en raison de leur dépendance aux ressources naturelles et aux écosystèmes, elles ont souvent moins de ressources, de systèmes et de services pour faire face aux perturbations. En revanche, ces collectivités préconisent des approches fondées sur les atouts qui soutiennent la résilience et l'adaptation aux changements climatiquesNote de bas de page 5Note de bas de page 201.
Les conditions sociales et écologiques qui façonnent la santé dans un climat en changement
Les déterminants sociaux de la santé influencent les déterminants écologiques de la santéNote de bas de page 8. Les déterminants écologiques de la santé font référence aux nécessités de la vie, c'est-à-dire les sources alimentaires, l'eau douce, l'oxygène et les autres ressources naturelles. Les collectivités canadiennes se heurtent à un accès inégal à ces déterminants écologiques, ce qui s'avère particulièrement inquiétant dans un contexte où le climat en changement menace davantage leur qualité, leur quantité et leur disponibilité.
L'environnement bâti démontre les interconnexions complexes entre les déterminants écologiques écologiques et sociaux de la santé. La façon dont les villes et les collectivités sont construites a une influence sur les conditions propices à un mode de vie sain, sur les émissions de gaz à effet de serre et sur la mesure dans laquelle les dangers climatiques ont une incidence sur la santéNote de bas de page 202. Nos bâtiments et nos maisons influent sur notre vulnérabilité aux risques climatiques (p. ex., chauffage et climatisation, ventilation, résistance aux conditions météorologiques extrêmes)Note de bas de page 5. Les logements insalubres entraînent des risques accrus pour la santé qui peuvent être aggravés par des phénomènes météorologiques extrêmes, des vagues de chaleur, le dégel du pergélisol, des ondes de tempête et une forte érosion côtièreNote de bas de page 5Note de bas de page 202Note de bas de page 203Note de bas de page 204. Les caractéristiques générales d'aménagement des collectivités jouent également un rôle majeur, car la capacité piétonnière, les pistes et les voies cyclables, le réseau de transport en commun et les espaces verts ont le potentiel d'encourager les modes de transport actifs et, par conséquent, de réduire les émissions de gaz à effet de serreNote de bas de page 202.
Les déterminants sociaux influencent le type d'environnement bâti dans lequel nous vivons. Les espaces verts, qui améliorent la qualité de l'air, réduisent la quantité d'îlots de chaleur urbains et atténuent les inondations, sont liés à un éventail d'avantages pour la santé, y compris la réduction du stress, l'augmentation de l'activité physique, le renforcement des liens sociaux et la réduction du risque de décès prématuréNote de bas de page 206Note de bas de page 207Note de bas de page 208Note de bas de page 209Note de bas de page 210. Cependant, dans les régions urbaines canadiennes, l'accès aux espaces verts n'est pas toujours égal. On a observé une exposition à la « verdure » résidentielle plus faible chez les personnes vivant avec un faible revenu, les immigrants (surtout les immigrants récents), les jeunes adultes, les personnes appartenant à une minorité visible et les locatairesNote de bas de page 211. Les avantages des espaces verts sont donc injustement répartis. Si l'on ne change pas la façon dont les ressources naturelles et l'environnement sont valorisés et gouvernés, ces iniquités s'accentuerontNote de bas de page 212.
La santé et le bien-être sont étroitement liés aux conditions écologiques et aux écosystèmes dans lesquels nous vivonsNote de bas de page 8Note de bas de page 213. La demande insoutenable de ressources naturelles, les changements dans l'aménagement du territoire (p. ex., désertification, déforestation) et la pollution accrue modifient de manière fondamentale nos écosystèmesNote de bas de page 212. La façon dont les choses sont actuellement gérées entraîne de multiples privations, de la marginalisation et des iniquités structurellesNote de bas de page 212. Les changements climatiques ont modifié les territoires, les pratiques saisonnières et la capacité des collectivités à accéder aux terres et aux ressources, vidant ainsi de leur sens de nombreux articles de la DNUDPA, de même les droits de la personne des peuples autochtones en raison des défis climatique comme l'insécurité alimentaireNote de bas de page 214Note de bas de page 215.
La triste réalité est que même si les collectivités du Nunavut génèrent le moins de gaz à effet de serre par habitant, ces collectivités connaissent un réchauffement trois ou quatre fois plus rapide qu'ailleurs au Canada, ce qui a de graves répercussions à l'échelle localeNote de bas de page 5Note de bas de page 23Note de bas de page 74Note de bas de page 216. Cette iniquité est la même ailleurs dans le monde, car la plupart des grands pays émetteurs sont parmi les moins vulnérables aux conséquences des changements climatiques, tandis que les pays qui émettent le moins d'émissions sont souvent très vulnérablesNote de bas de page 217.
Allier la santé publique et l'action climatique pour faire face à la menace
Les défis en matière de santé publique sont nombreux, mais étant donné que les changements climatiques menacent l'habitabilité de la planète, aggravent les problèmes de santé existants et accroissent les iniquités en matière de santé, il faut en faire notre priorité. Il faut mettre en place des mesures de santé publique qui visent l'atténuation des changements climatiques, l'adaptation, la progression des co-bénéfices et la prévention de la maladaptation.
Il y a des limites à ce qui peut être fait pour traiter des blessures ou des maladies, tout comme il y a des limites à la façon dont l'adaptation permet d'atténuer les répercussions des changements climatiques sur la santé. Une augmentation de la température moyenne mondiale annuelle de 1,5 °C entraînerait des situations où il serait extrêmement difficile de protéger la santéNote de bas de page 19. Pendant des vagues de chaleur, certains endroits seront trop chauds pour permettre la vie. Bien que l'adaptation soit importante et qu'elle soit au cœur de nombreuses initiatives actuelles en matière de santé publique, la menace climatique grave et croissante nécessite une attention égale entre l'adaptation et l'atténuation. Il faut s'attaquer aux menaces pour la santé les plus pressantes et qui résultent déjà des changements climatiques, tout en s'efforçant de réduire les émissions de gaz qui retiennent la chaleur et leurs effetsNote de bas de page 5Note de bas de page 25Note de bas de page 43Note de bas de page 218Note de bas de page 219Note de bas de page 220Note de bas de page 221.
Une intervention robuste en matière de santé publique nécessitera une approche à volets multiples, qui commence par l'élaboration d'une action climatique axée sur la santé, ainsi que par la recherche de points d'entrée pour la santé publique dans les efforts de lutte contre les changements climatiques au sein des administrations et des paliers gouvernementauxNote de bas de page 43Note de bas de page 222. Les co-bénéfices pour la santé ouvrent la voie à une discussion sur le rôle de la santé publique. Par exemple, selon des travaux de modélisation à Toronto et à Hamilton, en plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre, une électrification plus efficace des voitures, des autobus de transport en commun et des camions permettrait d'améliorer la qualité de l'air et de sauver des vies grâce à une meilleure santé respiratoire et cardiovasculaire, en plus d'économiser des milliards de dollars en avantages sociaux chaque annéeNote de bas de page 223. En démontrant les co-bénéfices pour la santé et en leur accordant la priorité, on peut aider les personnes, les collectivités et les décideurs à reconnaître les avantages directs et tangibles de l'action climatique, y compris les résultats immédiats dans certains casNote de bas de page 5Note de bas de page 224Note de bas de page 225. Cela contribue ainsi à contrer la perception selon laquelle les efforts climatiques exigent de renoncer au confort et à la liberté de choix contre un vague avantage à long terme sur le plan environnementalNote de bas de page 224Note de bas de page 225.
La santé publique a aussi un rôle clé à jouer dans la prévention de la maladaptation. La maladaptation fait référence à toute modification délibérée des systèmes naturels ou humains qui augmente par inadvertance la vulnérabilité aux conséquences climatiques plutôt que de la réduireNote de bas de page 12. Elle se produit lorsque des mesures augmentent l'exposition et les risques, causant une situation qui est difficilement modifiable et exacerbant les inégalités existantesNote de bas de page 19. L'approche intersectorielle et axée sur l'équité de la santé publique est pertinente pour prévenir la maladaptation en veillant à l'application de processus décisionnels inclusifs qui tiennent compte des perspectives de divers groupes et des risques différentiels auxquels ils font faceNote de bas de page 3Note de bas de page 19. La santé publique joue également un rôle essentiel dans la prévention des risques ou l'aggravation des iniquités liées à la santé découlant de mesures d'atténuation des gaz à effet de serre mal planifiéesNote de bas de page 3.
Les possibilités d'action des systèmes de santé publique dans la lutte aux changements climatiques sont décrites en détail dans la partie 2. Il est notamment question de miser sur les forces existantes des approches et des systèmes de santé publique et d'explorer les moyens de soutenir l'atténuation, l'adaptation et les co-bénéfices.
Mesures actuelles de santé publique dans un climat en changement
La communauté internationale accorde une attention croissante aux changements climatiques et à la santé. En plus de l'accent mis par l'OMS sur la santé, l'équité et les changements climatiques à la COP26, le journal The Lancet publie annuellement un Compte à rebours sur la santé et les changements climatiques, où il est question des progrès internationaux à l'égard de 41 indicateurs liés aux changements climatiques et à la santéNote de bas de page 226. Le GIEC, qui oriente les discussions internationales et les politiques nationales sur les changements climatiques, documente également les conséquences pour la santéNote de bas de page 42. La communauté internationale œuvrant en santé participe également à l'évaluation des engagements des pays dans le cadre de l'Accord de Paris (également connus sous le nom de contributions déterminées au niveau national), pour évaluer la façon dont la santé est intégrée à la politique climatique, lorsqu'elle l'estNote de bas de page 227.
Au Canada, on travaille actuellement à l'élaboration et à la mise en œuvre d'une Stratégie nationale d'adaptation (SNA)Note de bas de page 228. La stratégie établit une vision commune qui comprend des objectifs transformationnels et des cibles tangibles pour favoriser la cohésion et la collaboration, et ainsi préparer le Canada aux changements climatiques. Elle énonce une approche pansociétale qui comprend des rôles pour les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux, autochtones et locaux, ainsi que pour le secteur privé, les collectivités et les particuliers. La santé et le bien-être constituent l'un des cinq domaines thématiques prioritaires. Les partenaires de la santé publique appuient activement ces piliers dans le cadre du travail d'élaboration de politiques. De plus, Santé Canada offre un financement pluriannuel pour renforcer les capacités du secteur de la santé par l'entremise du programme ADAPTATIONSanté, qui appuie les objectifs en matière de santé humaine et de bien-être du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiquesNote de bas de page 229.
De plus, au Canada, les travaux à la base des connaissances et des données probantes sur le climat et la santé progressent. Le récent rapport intitulé La santé des Canadiens et des Canadiennes dans un climat en changement : faire progresser nos connaissances pour agir fournit les données les plus récentes au sujet des répercussions sur la santé des personnes et des systèmes de santé, ainsi que des renseignements sur les mesures d'adaptation efficacesNote de bas de page 5. Les organisations médicales et de santé publique du Canada préparent une présentation annuelle sur les politiques canadiennes et les principaux enjeux au pays, pour le Compte à rebours du LancetNote de bas de page 226. Concernant l'avenir, le document Science du climat 2050 : Faire progresser la science et le savoir sur les changements climatiques (SC2050) est un effort national de synthèse des données probantes en cours visant à mieux comprendre l'étendue des besoins en matière de science et de connaissances sur les changements climatiques au Canada. Il permettra d'orienter les investissements scientifiques et la planification de la recherche afin d'en établir l'ordre de priorité, dans le but d'augmenter la résilience du Canada face aux changements climatiquesNote de bas de page 230. Il s'agit notamment d'efforts visant à réduire les émissions de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2030, ainsi que l'objectif ambitieux d'un Canada carboneutre d'ici 2050, qui n'émettra aucun gaz à effet de serre ou qui compensera les émissions au moyen de mesures de captage du carboneNote de bas de page 230Note de bas de page 231. Le plan propose également cinq piliers thématiques, dont l'un porte sur la résilience et la santé des Canadiens et des Canadiennes.
Les organisations autochtones nationales font preuve, depuis longtemps et de manière continue, de leadership et de proactivité en matière de changements climatiques. Les Premières Nations, les Inuits et les Métis ont été aux premières lignes de la lutte aux changements climatiques pour protéger leurs communautés et l'environnement en général. De nombreux dirigeants autochtones ont demandé plus d'actions pour réduire les émissions, atténuer les effets des changements climatiques et améliorer les pratiques de protection et de respect de l'environnementNote de bas de page 232. Toutes les mesures de lutte aux changements climatiques devraient reconnaître le leadership et le travail des peuples autochtones, ainsi que leur statut de titulaires de droits.
En 2020, l'Assemblée des Premières Nations a organisé une rencontre nationale sur le climat pour discuter de la crise climatique et explorer les perspectives des Premières Nations sur ses répercussions, ses risques et ses possibilitésNote de bas de page 233. Le rapport final soulignait qu'un environnement sain est le fondement de tous les autres aspects de la vie, y compris la santé et le bien-être, la langue et la culture, l'eau et la sécurité alimentaireNote de bas de page 233. La Stratégie nationale inuite sur les changements climatiques de 2019 de l'Inuit Tapiriit Kanatami reconnaît que la santé des Inuits est l'une des cinq priorités orientant l'action climatique pour ces collectivitésNote de bas de page 21. De plus, en 2020, les Métis ont défini les priorités pour faire progresser leur leadership en matière de climat, lesquelles comprennent le renforcement des capacités, le savoir traditionnel, la recherche et la collecte de données pour orienter leurs politiques sur les changements climatiques et la santéNote de bas de page 232.
Les partenaires fédéraux continuent également de soutenir le leadership autochtone en matière de climat à l'échelle locale. Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada offre du financement pour des projets d'adaptation au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Nunavik, au Nunatsiavut, dans le territoire d'Eeyou Istchee et au NunatuKavut dans le cadre du programme Se préparer aux changements climatiques dans le NordNote de bas de page 234. Ce programme vise à collaborer avec les communautés autochtones et les collectivités nordiques, les gouvernements territoriaux et régionaux ainsi que d'autres intervenants pour définir les priorités en matière d'adaptation et d'action climatique. Les projets sont axés sur les connaissances et les expériences locales. Services aux Autochtones Canada a mis en œuvre le Programme sur le changement climatique et l'adaptation du secteur de la santé (PCCASS) en 2008Note de bas de page 235. Il a également été élaboré en réponse aux préoccupations des collectivités inuites et des Premières Nations du Nord qui sont aussi touchées par les changements climatiquesNote de bas de page 235Note de bas de page 236Note de bas de page 237. En 2016, le PCCASS a été élargi pour inclure les Premières Nations au sud du 60e parallèle. Il finance les collectivités et les organisations qui travaillent au nom des communautés autochtones ou en partenariat avec elles, pour soutenir les efforts visant à cerner les répercussions des changements climatiques sur la santé, à les évaluer et à y réagir tout en respectant la souveraineté autochtoneNote de bas de page 235Note de bas de page 238.
Les efforts des provinces et des territoires continuent de faire progresser les mesures climatiques priorisant la santé. Dans le Nord du Canada, les initiatives sur les changements climatiques ont mis l'accent sur la sécurité alimentaire en tant que facteur déterminant de la santéNote de bas de page 239. Les évaluations des changements climatiques et de la santé ont permis d'établir des plans d'intervention en cas d'urgence pour chaque grand établissement de santé du territoire, tandis que les évaluations des installations communautaires d'air pur fournissent des zones sécuritaires en cas d'événements extrêmes, comme les feux de forêt. Des efforts continus sont aussi déployés dans les territoires pour surveiller et planifier les répercussions des événements extrêmes sur la santéNote de bas de page 239Note de bas de page 240. Dans l'Ouest canadien, une carte interactive de la qualité de l'air a permis de mieux comprendre la pollution de l'air, comme la fumée des feux de forêt, et de fournir des conseils pour réduire les risquesNote de bas de page 241. Parallèlement, au Canada atlantique, une analyse de l'état de préparation aux changements climatiques a été élaborée pour le secteur des soins continus. La santé et la sécurité publiques ont en outre été intégrées aux évaluations des risques liés aux changements climatiquesNote de bas de page 242.
De la même manière, les efforts locaux en matière de santé publique ont galvanisé l'action locale. Comme les répercussions des changements climatiques varient d'une région à l'autre au pays, les efforts des systèmes de santé publique locaux ne fournissent pas de résultats universels, car ils se fondent sur les priorités et les besoins locaux. Il s'agit notamment d'adapter des initiatives de santé publique existantes pour mettre davantage l'accent sur les changements climatiques.
Les sections suivantes présentent des exemples de mesures provinciales, territoriales et locales en matière de santé climatique qui illustrent le leadership continu des systèmes de santé publique dans l'ensemble des juridictions au Canada.
Les mesures de santé publique en vigueur, tant à l'échelle locale qu'à l'échelle mondiale, contribuent grandement aux efforts déployés pour contrer les effets des changements climatiques sur la santé. Cependant, la gravité et l'urgence de la crise climatique exigent une attention particulière plus importante. La partie 2 examine comment des mesures de santé publique plus rigoureuses et de plus grande portée peuvent favoriser la promotion et la protection de la santé. On y explique également la nécessité d'un système de santé publique solide pour faire face à cette crise de santé publique complexe.
Partie 2 : Occasions de faire avancer la lutte aux changements climatiques en santé publique
Pour promouvoir et protéger efficacement la santé dans un climat qui change rapidement, les systèmes de santé publique canadiens doivent à la fois élargir et peaufiner leurs fonctions, outils et activités. Ce rapport propose une feuille de route pour appuyer les discussions en cours sur le rôle de la santé publique dans l'action climatique, ainsi que les conversations plus générales sur la transformation du système de santé publique suscitées pendant la pandémie de COVID-19 (figure 6).
Cette feuille de route a été élaborée à la suite d'une revue de la littérature et de la consultation d'experts en santé publique et des changements climatiques de partout au Canada (voir Annexe C : Méthodologie). Elle vise à renforcer et à compléter les directives existantes, comme les travaux sur la promotion de systèmes de santé résilients aux changements climatiques et les directives sur l'évaluation de la vulnérabilité sanitaire et l'adaptation aux changements climatiques de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), ainsi que les travaux de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS) sur les nouvelles fonctions essentielles en santé publique et environnementaleNote de bas de page 94Note de bas de page 243Note de bas de page 244Note de bas de page 245Note de bas de page 246. Cette feuille de route reprend leur intérêt pour la compréhension et à la gestion des risques climatiques pour la santé et au renforcement de la résilience. Elle offre également une contribution unique en mettant l'accent sur la mobilisation des systèmes de santé publique dans la lutte aux changements climatiques au Canada, dans le contexte de transformation plus générale du système de santé publique (voir le rapport annuel 2021 de l'ACSP : Une vision pour transformer le système de santé publique du Canada).
Chaque domaine d'action de la feuille de route a une incidence sur les fonctions essentielles de santé publique et les éléments de base du système, et est illustré par des exemples de pratique de partout au pays. De nombreux domaines vont au-delà des changements climatiques et peuvent appuyer des mesures visant à régler d'autres enjeux complexes de santé publique.
Pour faire face aux incidences des changements climatiques sur la santé, les systèmes de santé publique devront agir sur l'ensemble des fonctions essentielles de santé publiqueNote de bas de page 243Note de bas de page 247Note de bas de page 248Note de bas de page 249Note de bas de page 250. Élaborées pour la première fois pour le Canada en 2003 dans la foulée de la crise du SRAS, ces fonctions définissent le fondement des mesures de santé publiqueNote de bas de page 251Note de bas de page 252. Il s'agit d'une façon utile de décrire l'ampleur et l'étendue des efforts en santé publique, qui comprennent la promotion de la santé, la surveillance de la santé, la protection de la santé, l'évaluation de la santé de la population, la prévention des maladies et des blessures, ainsi que la prévision, la préparation et les réponses aux situation d'urgence.
Ces fonctions sont interconnectées et utilisées conjointement pour soutenir un large éventail de mesures de santé liées au climat. Ces fonctions vont d'initiatives de promotion de la santé, comme l'appui de projets de reverdissement des parcs et des terrains de jeux, à la surveillance et au contrôle des vecteurs de transmission de maladies pour lutter contre la propagation des moustiques et des tiques, favorisée en partie par les changements climatiques. La fonction d'évaluation liée aux changements climatiques et les évaluations de la vulnérabilité et de l'adaptation de la santé sont particulièrement importantes pour définir les risques climatiques futurs pour la santé et s'y préparer. L'annexe A présente d'autres exemples d'application des fonctions de santé publique dans ce contexte.
Mettre en œuvre une gamme d'interventions pour relever les défis immédiats en matière de santé et prévenir les risques sanitaires futurs liés aux changements climatiques
« La santé publique fait beaucoup de choses qui sont entièrement liées aux changements climatiques […] les connexions sont présentes. Certains services de santé réussissent très bien, s'engagent réellement dans l'aménagement du territoire et la planification des transports. Dans ces cas-là, nous devenons des partenaires dans l'élaboration conjointe de politiques, de plans et de stratégies qui intègrent tout ce dont nous avons besoin pour créer des collectivités saines et durables. »
La meilleure manière pour les systèmes de santé publique de soutenir l'action climatique est de défendre et de mettre en œuvre un continuum d'interventions en amont et en aval (figure 7). En santé publique, on a l'habitude de travailler simultanément à relever les défis immédiats et à prévenir les risques futurs (voir le rapport de l'ACSP de 2021)Note de bas de page 253. Ce travail s'aligne également sur le double objectif de l'atténuation et de l'adaptation qu'exigent les mesures de lutte aux changements climatiques. Il sera toujours nécessaire de trouver le juste équilibre entre, en aval, l'adaptation aux répercussions des changements climatiques et, en amont, les conditions qui rendent les personnes et les collectivités vulnérables et les causes profondes des changements climatiques. Sans cet équilibre, et surtout en l'absence de mesures en amont, les répercussions climatiques sur les maladies et les blessures en aval continueront de croître et de peser sur le système de santé et les systèmes socioéconomiques en général.
L'atténuation des changements climatiques est un élément clé des mesures de la santé publique en amont. Les deux plus grandes sources de gaz à effet de serre au Canada sont le secteur pétrolier et gazier et le secteur des transportsNote de bas de page 254. Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a insisté sur le fait que la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur de l'énergie passe par une réduction substantielle de l'utilisation des combustibles fossiles, l'amélioration de l'efficacité énergétique et les économies d'énergie, ainsi que l'utilisation de sources d'énergie à faibles émissions et d'autres vecteurs énergétiquesNote de bas de page 255. En plus de soutenir le transport en commun et le transport actif, comme la marche et le vélo, les stratégies d'atténuation dans le secteur des transports comprennent l'usage de véhicules électriques alimentés par de l'électricité à faibles émissionsNote de bas de page 255. Ces mesures peuvent avoir de nombreux co-bénéfices pour la santé, et la santé publique peut jouer un rôle dans l'avancement de ces initiatives grâce à des mesures communautaires et stratégiques et des approches fondées sur la science du comportement pour aider les gens et les collectivités à faire des choix sains et respectueux du climat où ils viventNote de bas de page 256Note de bas de page 257Note de bas de page 258. En milieu urbain, la réduction des gaz à effet de serre peut être réalisée en accordant la priorité à l'énergie et aux matériaux durables, en réaménageant ou en modernisant les bâtiments, en privilégiant un développement urbain dense relié aux réseaux de transport en commun et aux services et emplois locaux, et en augmentant le captage et le stockage du carbone (p. ex., à travers les forêts urbaines, qui peuvent éliminer le dioxyde de carbone de l'atmosphère par la photosynthèse et stocker le carbone dans la végétation)Note de bas de page 255.
Les mesures en amont à l'égard des déterminants sociaux et écologiques de la santé peuvent être soutenues par une approche de promotion de la santé. Cette approche reconnaît que les conditions sociales, économiques, écologiques et politiques se recoupent pour influencer l'endroit, la raison et la façon dont la vulnérabilité et les effets de santé se produisent et sont concentrésNote de bas de page 259Note de bas de page 260Note de bas de page 261Note de bas de page 262. Pour ce faire, il faut des mesures intersectorielles pour élaborer des politiques publiques saines, créer des milieux favorables et sains et renforcer l'action communautaireNote de bas de page 213. Malgré les difficultés qui s'y rattachent, la santé publique peut préconiser et fournir des données probantes pour attirer l'attention sur les principales conditions sociales ayant une incidence sur la santé, comme le revenu, le racisme, la colonisation, l'âgisme, l'emploi, l'éducation, l'environnement bâti et le logementNote de bas de page 5Note de bas de page 8Note de bas de page 102Note de bas de page 263Note de bas de page 264Note de bas de page 265. Les engagements internationaux, y compris la Charte d'Ottawa pour la promotion de la santé, la Charte de Genève pour le bien-être et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA), soulignent l'importance d'une approche de promotion de la santé en amont pour la lutte aux changements climatiquesNote de bas de page 55.
Les initiatives de santé publique visant à contrer les répercussions en aval des changements climatiques doivent être maintenues parallèlement aux mesures en amont. Comme il est expliqué à la partie 1, les changements climatiques présentent plusieurs menaces urgentes pour la santé nécessitant une intervention immédiate. Les systèmes de santé publique dirigent et collaborent à un certain nombre de programmes essentiels pour faire face aux répercussions des changements climatiques, et le besoin de tels programmes est susceptible de croître. Bon nombre de programmes ont trait au rôle de la santé publique dans les interventions d'urgence visant à protéger les populations contre des risques comme les phénomènes météorologiques extrêmes (p. ex., tempêtes, vagues de chaleur), les feux de forêt ou les inondationsNote de bas de page 266Note de bas de page 267. Il est notamment question de mécanismes d'alerte et de plans de préparation, d'éducation du public et de communication des risques. Les répercussions en aval ne se limitent pas qu'aux conséquences sur la santé physique. On accorde de plus en plus d'attention à la nécessité d'aborder le large éventail de répercussions des changements climatiques sur la santé mentaleNote de bas de page 5Note de bas de page 175. Les interventions de santé publique à cet égard comprennent la communication et la sensibilisation, l'engagement communautaire, ainsi que la littératie et la formation en santé mentaleNote de bas de page 5Note de bas de page 102.
Pour s'attaquer à la complexité et à l'ampleur des problèmes de santé liés aux changements climatiques, la santé publique doit accorder une attention à tout le continuum de mesures en amont et en aval. Cette vision s'inscrit dans l'approche Une seule santé, qui adopte une perspective intégrée et unificatrice visant l'équilibre et l'optimisation durable de la santé des humains, des animaux, des plantes et des écosystèmesNote de bas de page 268Note de bas de page 269Note de bas de page 270. Elle implique la collaboration entre les secteurs, les différents domaines et les collectivités pour promouvoir et protéger la santé, prendre des mesures contre les changements climatiques, contribuer au développement durable et répondre à notre besoin collectif d'aliments sains, d'eau propre, d'énergie et d'air (voir la figure 8)Note de bas de page 270. Les relations interdépendantes entre les humains, les animaux, les plantes et leurs environnements communs influencent, et sont influencées, par les conditions et les interventions à chaque jalon du continuum de mesures en amont et en aval. L'approche Une seule santé invite la santé publique à réfléchir au-delà de la santé humaine, ce qui est particulièrement pertinent dans le contexte des changements climatiquesNote de bas de page 265Note de bas de page 271Note de bas de page 272. Toutefois, pour que cette approche reflète pleinement l'équité, un principe directeur des systèmes de santé publique, il est nécessaire de porter explicitement attention à l'équité et à la justice des humains et des animauxNote de bas de page 253Note de bas de page 273.
Prioriser l'expertise et la mobilisation communautaires pour une action climatique équitable et efficace
Les changements climatiques ont de vastes répercussions sur la santé physique et mentale, ainsi que sur notre environnement écologique, social et économique. Cependant, la nature et la gravité de ces répercussions varient grandement en fonction des déterminants de la santé (p. ex., le revenu, l'emploi, les conditions de vie et de travail) et des systèmes structurels d'oppression (p. ex., la colonisation, le racisme, le capacitisme, l'hétéronormativité)Note de bas de page 5Note de bas de page 264. Ainsi, pour comprendre et aborder les répercussions des changements climatiques sur la santé, les systèmes de santé publique doivent accorder la priorité à l'équité et soutenir le leadership communautaire.
Intégrer l'équité et la justice dans les mesures de lutte aux changements climatiques de la santé publique
Il est essentiel de mettre l'accent sur l'équité et les déterminants sociaux de la santé pour comprendre et aborder les répercussions différentielles des changements climatiquesNote de bas de page 19Note de bas de page 264. Il faut voir toutes les fonctions de santé publique sous l'angle de l'équité. Des efforts de surveillance et d'évaluation de la santé de la population doivent être déployés pour cerner les iniquités en santé et en comprendre les causes profondesNote de bas de page 274Note de bas de page 275. Cet angle renforce les arguments en faveur de la promotion de la santé et des mesures de santé publique en amont. En s'efforçant de comprendre qui sont les personnes les plus touchées par les changements climatiques et pourquoi, il est possible d'influencer la cible des fonctions de protection de la santé et la façon dont elles sont appliquées. Cela peut comprendre l'établissement de mesures prioritaires pour les collectivités qui font face à un risque disproportionné, l'assurance que les interventions de santé publique reflètent la collectivité et le contexte, et la réponse aux besoins urgents tout en s'attaquant aux problèmes structurels qui entraînent des risques plus élevés.
Jusqu'à présent, les changements climatiques n'ont pas toujours été considérés sous l'angle de l'équitéNote de bas de page 5Note de bas de page 276Note de bas de page 277. Si certains déterminants sociaux de la santé ont fait l'objet de recherches, d'autres nécessitent une attention plus poussée. Par exemple, les efforts d'adaptation aux changements climatiques ont mis davantage l'accent sur les iniquités liées au revenu, mais moins sur les expériences des Premières Nations, des Inuits et des Métis, des populations racialisées, migrantes et 2ELGBTQI+ et des personnes en situation de handicapNote de bas de page 3Note de bas de page 277Note de bas de page 278Note de bas de page 279.
Envisager les connaissances et la recherche sous l'angle de l'équité permet de mettre en lumière les différences auxquelles sont confrontées certaines populations à l'égard des répercussions des changements climatiques sur la santé. L'angle de l'équité permet également de comprendre comment les changements climatiques et nos mesures d'intervention peuvent créer de nouvelles inégalités. Le risque de maladaptation peut notamment exacerber les iniquités existantesNote de bas de page 5. Par exemple, si de nouveaux espaces verts urbains dans des quartiers à faible revenu entraînent une gentrification, les résidents pourraient être forcés de se déplacerNote de bas de page 5Note de bas de page 19. La maladaptation survient également lorsque des mesures favorisent un groupe plutôt qu'un autre, comme l'absence d'espaces permettant de se rafraîchir dans les régions à faible revenu, malgré la probabilité plus élevée d'un tel besoinNote de bas de page 5. Un engagement à l'égard de l'équité peut également garantir que les éventuels avantages des activités liées aux changements climatiques sont répartis équitablement.
La région de Peel a mis en pratique les principes d'équité pour son projet de forêt urbaine, une priorité locale visant à appuyer l'atténuation des changements climatiques et l'adaptation à ceux-ciNote de bas de page 280. En collaboration avec les organismes de protection de la nature, les municipalités locales, les professionnels de la santé publique, les forestiers et les urbanistes, la région a cerné des quartiers particulièrement vulnérables à la chaleur extrême et leur a accordé la priorité pour la plantation d'arbresNote de bas de page 280Note de bas de page 281. Cette approche visait à améliorer la répartition équitable du couvert forestier et des espaces verts publics dans la régionNote de bas de page 280.
Les concepts de justice sont également importants dans la lutte aux changements climatiquesNote de bas de page 276. La justice environnementale implique qu'aucune population ne subit de préjudice environnemental injuste et disproportionné, et que toute personne soit traitée de manière équitable et participe véritablement aux lois, aux règlements et aux politiques sur l'environnementNote de bas de page 28Note de bas de page 282. L'adoption du principe de justice environnementale veille à ce que les collectivités et les populations en situation de vulnérabilité ne soient pas confrontées à des écosystèmes endommagés ou à des risques accrus pour la santé en raison de leur vulnérabilitéNote de bas de page 28. La santé publique se doit également de prendre en compte l'accès équitable à l'air pur, à l'eau et à la nourriture, qui sont des déterminants écologiques fondamentaux de la santéNote de bas de page 28. La participation de la communauté est essentielle à l'établissement de processus et à l'obtention de retombées équitables lorsqu'il est question de mesures d'adaptation aux changements climatiquesNote de bas de page 5. Pour soutenir ce travail, des ressources destinées au renforcement des capacités communautaires sont nécessairesNote de bas de page 19.
La justice environnementale, inspirée des conceptualisations autochtones de la justice, est particulièrement importante pour les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis. Elle est pertinente dans la lutte contre les changements climatiques et les autres torts causés par la colonisationNote de bas de page 283. Le colonialisme est directement lié aux changements environnementaux. Ces derniers ont eu une incidence sur les systèmes écologiques qui sont au fondement de la culture, de la santé, de l'économie et de l'autodétermination des peuples autochtonesNote de bas de page 284. Le colonialisme a conduit à l'industrialisation et à la création d'économies à consommation élevée de carbone, contribuant aux changements climatiques, à travers la déforestation, l'extraction et la combustion de combustibles fossiles, ainsi que la pollution. Cela a endommagé l'environnement, entraîné le déplacé des peuples autochtones et perturbé les traditions, les compétences et les identités liées aux écosystèmes locaux, y compris les plantes et les animauxNote de bas de page 284. En réponse, une approche de justice environnementale autochtone met l'accent sur l'importance de l'ensemble des relations, ce qui exige une attention simultanée sur les systèmes de connaissances, les ordres juridiques, la gouvernance et les concepts de justice autochtonesNote de bas de page 283.
L'accent mis sur la justice accorde également la priorité aux jeunes et tient compte des risques climatiques que les générations passées et actuelles lèguent aux générations futuresNote de bas de page 285Note de bas de page 286Note de bas de page 287. L'action en faveur de la justice intergénérationnelle a été menée par de jeunes militants qui se sont mobilisés partout dans le monde pour lutter contre les changements climatiquesNote de bas de page 99Note de bas de page 285. Ils ont souligné l'importance de reconnaître les jeunes en tant que leaders, de favoriser leur participation précoce dans la prise de décisions, de leur fournir des plateformes pour discuter de leurs préoccupations en matière de santé climatique, d'investir dans des initiatives dirigées par les jeunes et d'accorder la priorité à diverses voix des jeunesNote de bas de page 99Note de bas de page 288. Le GIEC a insisté sur les conséquences dramatiques des changements climatiques pour les jeunes et souligné l'importance de la mobilisation des jeunes pour une gouvernance climatique efficace et équitableNote de bas de page 255Note de bas de page 289. Des initiatives comme le Groupe consultatif de la jeunesse sur les changements climatiques du Secrétaire général des Nations Unies et le Conseil des jeunes sur l'environnement et les changements climatiques du gouvernement du Canada témoignent de cette mobilisationNote de bas de page 290Note de bas de page 291.
Collaborer avec les collectivités pour une action climatique fondée sur le leadership et les connaissances locales
« Il ne suffit pas d'avoir des épidémiologistes, des virologues, etc. Il est aussi important d'avoir des historiens, des anthropologues, des Aînés autochtones, des Aînés noirs, des représentants de plusieurs communautés, des experts en décolonisation et de réunir une diversité de personnes afin que nous puissions aborder les problèmes et proposer plusieurs solutions pour les résoudre. »
La combinaison complexe des conditions environnementales et sociales qui influent sur la santé se joue différemment d'une collectivité à l'autre, donnant au « lieu », dans un contexte local unique, un rôle central dans la façon dont la santé et l'équité en santé sont comprises et promuesNote de bas de page 292. Comme d'autres enjeux de santé publique, les changements climatiques ont des répercussions mondiales et locales, nécessitant des interventions adaptées au contexte et à la collectivité, tout en étant liées aux efforts nationaux et internationauxNote de bas de page 293Note de bas de page 294.
Les membres de la collectivité sont des experts de leur contexte local, mais ils ne sont souvent pas en relation avec les décideurs qui disposent des ressources et du pouvoir nécessaires pour engendrer un changement systémiqueNote de bas de page 8Note de bas de page 283. Depuis longtemps, on recommande la participation communautaire, partie intégrante de la promotion de la santé, pour combler cette lacuneNote de bas de page 213Note de bas de page 263Note de bas de page 295Note de bas de page 296Note de bas de page 297. Une participation communautaire inclusive et équitable dans les mesures de santé publique s'avère particulièrement essentielle pour aborder efficacement des problèmes complexes et mettre en place les conditions propices à une bonne santéNote de bas de page 5Note de bas de page 94Note de bas de page 298. La santé publique peut orienter et promouvoir la mobilisation de la collectivité dans la lutte aux changements climatiquesNote de bas de page 243.
La participation de la collectivité et la prise de décisions sont essentielles à la justice procédurale, qui est liée à une participation équitable et à un processus justeNote de bas de page 276. La participation des partenaires communautaires aux évaluations de la santé de la population ainsi qu'aux évaluations de la vulnérabilité et de l'adaptabilité de la santé face aux changements climatiques joue un rôle déterminant. Cette forme de mobilisation peut favoriser une meilleure compréhension du contexte local, aider à cerner les menaces locales pour la santé, permettre de recenser les atouts et les ressources communautaires et contribuer à la surveillance et à l'évaluation des interventionsNote de bas de page 5Note de bas de page 94Note de bas de page 229Note de bas de page 277Note de bas de page 299. En examinant simultanément les dangers, les voies d'exposition et les vulnérabilités dans le cadre d'un processus axé sur l'autonomisation et l'action locales, la santé publique peut mieux soutenir la résilience des collectivités aux changements climatiquesNote de bas de page 8Note de bas de page 94Note de bas de page 181Note de bas de page 264Note de bas de page 300.
La mobilisation est essentielle pour assurer une préparation et une réponse appropriées en cas d'urgence. L'augmentation des risques posés par les catastrophes naturelles peut menacer les structures physiques et sociales des collectivités, ce qui exige une attention particulière du système de santé, y compris de la santé publique, pour protéger la santé et prévenir les maladies et les blessures (voir l'encadré : « La préparation axée sur la collectivité pour aborder les enjeux de mobilité de la population soulevés par l'incidence des changements climatiques »).
La préparation axée sur la collectivité pour faire face aux enjeux de mobilité de population causés par les changements climatiques
De nombreux phénomènes météorologiques extrêmes au Canada ont forcé des collectivités à évacuer leurs maisons et leurs régions; parfois à répétition, et parfois même de manière définitiveNote de bas de page 301Note de bas de page 302Note de bas de page 303. Les expériences des personnes évacuées sont traumatisantes lorsqu'une catastrophe se produit et ont des effets à long terme une fois l'événement terminé, ce qui entraîne des taux accrus d'anxiété, de dépression et de troubles de stress post-traumatiqueNote de bas de page 304.
Le rôle de la santé publique consiste à travailler avec les collectivités pour se préparer et s'adapter aux conséquences des évacuations, aux causes de la mobilité de la population, et à les atténuer avant, pendant et longtemps après les évacuations. Ce rôle doit comprendre une préparation axée sur l'appui de la collectivité qui se fonde sur le leadership et les savoirs locaux. Il s'agit, par exemple, de mobiliser les collectivités et de collaborer avec elles pour ce qui est du retour à la maison, de la reconstruction des vies et de la prestation de services clés, comme des services en santé mentale et violence familialeNote de bas de page 305Note de bas de page 306Note de bas de page 307.
L'engagement de la santé publique envers la mobilisation et l'action communautaires dans les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis est particulièrement important étant donné les iniquités sanitaires et sociales préexistantes et continues découlant de la colonisation, et la non-intégration des perspectives autochtones aux efforts de préparation et d'intervention d'urgenceNote de bas de page 308Note de bas de page 309Note de bas de page 310Note de bas de page 311Note de bas de page 312Note de bas de page 313.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Dr Yoav Keynan, responsable scientifique, et Margaret Haworth-Brockman, gestionnaire principale de programme
Centre de collaboration nationale des maladies infectieuses
« La décolonisation de la santé publique couvre tout le spectre. Il s'agit d'un important travail non seulement en matière de réconciliation, mais aussi de résurgence et d'alliances significatives (pas d'alliances symboliques) et de rétrocession des terres. Il est aussi essentiel de réparer, de restaurer et de soutenir les communautés autochtones et leur droit à l'autodétermination, ainsi que leur leadership sur ce plan. »
Pour les Premières Nations, les Inuits et les Métis, le soutien par la santé publique du leadership communautaire doit aller au-delà de la mobilisation et défendre l'autodétermination, à leur rythme et selon leurs manières de faireNote de bas de page 196Note de bas de page 314Note de bas de page 315Note de bas de page 316. Le principe de l'autodétermination consiste à habiliter les communautés pour qu'elles renforcent leurs capacités et prennent le contrôle des facteurs et des forces qui influent sur leur santé et leur bien-êtreNote de bas de page 315. Il s'agit d'un aspect essentiel de la décolonisation des systèmes de santé publique, une condition préalable à la réconciliation et la clé pour corriger les iniquités de longue date qui définissent les nouveaux défis en santé publiqueNote de bas de page 196Note de bas de page 314.
L'autodétermination est profondément pertinente pour faire face aux répercussions des changements climatiques sur la santé et se doit d'être le fondement de la recherche, de l'évaluation, de l'action et de la gouvernance en matière de santé climatique. Malgré la place du leadership autochtone au sein des mouvements de justice environnementale et climatique partout dans le monde, de nombreux plans gouvernementaux sur les changements climatiques ne respectent pas le droit à l'autodéterminationNote de bas de page 316. Les gouvernements et la société civile doivent reconnaître l'expertise et le leadership des Premières Nations, des Inuits et des Métis en appuyant l'autodétermination dans la lutte aux changements climatiquesNote de bas de page 196Note de bas de page 316. Les cadres décoloniaux et antiracistes doivent sous-tendre toute mesure de santé publique afin de remédier à la répartition inégale du pouvoir et de l'accès aux conditions écologiques et sociales qui façonnent notre santéNote de bas de page 317.
Enrichir les connaissances afin de comprendre, prévoir et réagir aux répercussions sanitaires des changements climatiques
Au Canada, il faut acquérir des connaissances plus vastes et plus approfondies pour mieux comprendre l'éventail des répercussions sur la santé associée aux changements climatiques, leur répartition inéquitable entre les populations et la façon de les contrerNote de bas de page 5Note de bas de page 318Note de bas de page 319Note de bas de page 320. À cet égard, afin de comprendre comment protéger et promouvoir la santé dans un climat en changement, il y a lieu d'élargir la recherche sur les liens entre le climat et la santé, d'accorder une plus grande attention à la pluralité des expériences liées aux changements climatiques, de favoriser la surveillance intégrée de la santé climatique et de soutenir la recherche interventionnelle et la science de la mise en œuvre. Ces priorités seront renforcées par une meilleure intégration des connaissances occidentales et autochtonesNote de bas de page 43.
Bien que ces thèmes soient importants pour orienter l'adoption de mesures, ils ne doivent pas empêcher l'action urgente en matière de santé climatique. À ce jour, les efforts ont surtout porté sur la planification et la mise en œuvre, lesquelles se sont avérées lentes, progressives et à petite échelleNote de bas de page 43. L'intensification des mesures existantes et la mise en œuvre de nouvelles mesures sont nécessaires pour prévenir les conséquences catastrophiques sur la santéNote de bas de page 255Note de bas de page 321.
Comprendre l'étendue des répercussions des changements climatiques sur la santé
De nombreuses recherches sur le climat et la santé ont été réalisées. Il incombe toutefois d'accorder une attention plus poussée à la pléthore de relations qui existent entre le climat et la santé. Le domaine de la santé publique doit aider à combler les lacunes en effectuant des recherches sur l'ensemble des répercussions des changements climatiques sur la santé, en faisant progresser la recherche sur les voies qui les relient, et en améliorant les données intersectionnelles de surveillance de la santé publique afin de bien saisir les liens entre le climat et la santé. Ces avancées peuvent aider à déterminer les co-bénéfices pour la santé de diverses actions climatiques et à éclairer les interventions. De plus amples renseignements sur les lacunes en matière de recherche et de santé climatique se trouvent dans les chapitres correspondants du rapport intitulé La santé des Canadiens et des Canadiennes dans un climat en changement, du rapport d'accompagnement de l'ACSP intitulé Générer des connaissances pour éclairer les mesures de santé publique contre les changements climatiques, et du rapport Science du climat 2050 : Faire progresser la science et le savoir sur les changements climatiquesNote de bas de page 230.
Les recherches actuelles se sont concentrées sur certaines conséquences sur la santé liées aux changements climatiques, en particulier les maladies infectieuses, ainsi que les conséquences relatives aux troubles respiratoires, cardiovasculaires et neurologiquesNote de bas de page 319Note de bas de page 320Note de bas de page 322. Les chercheurs ont insisté sur la nécessité de mener d'autres recherches portant sur les conséquences plus vastes sur la santé, comme la santé mentale et la santé des mères et des enfantsNote de bas de page 5Note de bas de page 179Note de bas de page 319Note de bas de page 320Note de bas de page 323. Les recherches actuelles se sont également davantage concentrées sur les conséquences que sur les interventions. Les analyses de la documentation ont souligné la nécessité d'approfondir la recherche sur les mesures d'atténuation et d'adaptationNote de bas de page 91Note de bas de page 319Note de bas de page 320Note de bas de page 324.
Il faut également mener plus de recherches sur les répercussions futures des changements climatiques, en plus d'élaborer des modèles et des simulations climatiques qui montrent ce qui nous attendNote de bas de page 5Note de bas de page 244Note de bas de page 319Note de bas de page 325. La plupart des recherches sur le climat et la santé ont porté sur les conséquences observées par le passé. Par conséquent, il existe d'importantes lacunes dans les connaissances entourant les diverses répercussions sur la santé des changements climatiques selon les scénarios de réchauffement de 1,5 °C et de 2 °CNote de bas de page 86. De plus, on retrouve peu de données probantes sur l'efficacité ou l'inefficacité des stratégies d'adaptation aux changements climatiques à venir selon les différents scénarios de réchauffementNote de bas de page 319Note de bas de page 326.
Il incombe également d'accorder une plus grande attention à la répartition et à la concentration des répercussions du climat sur la santé, ainsi qu'aux mesures requises pour prévenir et contrer ces répercussions. Des recherches ont été menées sur les expériences des collectivités urbaines, mais il faut davantage d'analyses régionales d'un bout à l'autre du Canada, surtout dans les régions rurales et éloignéesNote de bas de page 319Note de bas de page 323. Bien que des recherches menées dans ce domaine explorent le rôle de l'âge, du sexe ou du genre, peu de recherches portent sur les expériences des populations racialisées, des personnes de diverses identités sexuelles ou de genre, des Autochtones, ou encore des personnes en situation d'itinérance ou à faible revenuNote de bas de page 5Note de bas de page 319.
La compréhension de la répartition des répercussions des changements climatiques sur la santé ouvre la voie à une étude plus approfondie des causes profondes du risque différentielNote de bas de page 5Note de bas de page 276. La santé publique peut contribuer à l'enrichissement des connaissances sur les voies complexes, directes et indirectes, entre les déterminants écologiques et sociaux de la santé, les changements climatiques et les conséquences sur la santé. Comme il est décrit dans la partie 1, les déterminants de la santé influent, et sont influencés par, l'exposition différentielle, la sensibilité et la capacité d'adaptation aux changements climatiques, qui peuvent tous avoir une incidence sur les résultats en matière de santé.
Une meilleure compréhension de ces voies directes et indirectes permettrait d'éclairer les interventions visant à protéger la santé et à prévenir les maladies et les blessures associées aux changements climatiquesNote de bas de page 5Note de bas de page 91Note de bas de page 319Note de bas de page 327. Ces interventions peuvent comprendre la recherche interventionnelle ainsi que la recherche en science de la mise en œuvre pour comprendre l'adoption et la mise en œuvre de pratiques fondées sur des données probantes. La recherche en santé publique peut également favoriser une meilleure compréhension de la résilience et des facteurs de protection, ainsi que former des partenariats pour aider à promouvoir la résilience et l'action communautaireNote de bas de page 5Note de bas de page 19Note de bas de page 328.
Renforcer le suivi et la surveillance des répercussions des changements climatiques sur la santé
« Nous devons suivre dans l'ensemble des systèmes de santé les répercussions du changement climatique sur les gens en temps réel […] Si nous ne disposons pas de données, il est vraiment difficile de convaincre les gens de faire quoi que ce soit, de convaincre le gouvernement de faire quoi que ce soit. »
Il est nécessaire d'accroître et d'accentuer la surveillance des répercussions des changements climatiques sur la santé à l'échelle des personnes, des collectivités et des populations pour combler les importantes lacunes dans les connaissances et éclairer les interventionsNote de bas de page 329. La santé publique peut accroître la connaissance des répercussions des changements climatiques sur la santé grâce à son expertise reconnue en matière de traitement des données, de suivi, de surveillance et d'évaluation intégrée des risques. Pour ce faire, il faut adapter les outils de surveillance afin de mieux surveiller les vulnérabilités, les risques et l'exposition aux dangers climatiques, ainsi que les conséquences des changements climatiques sur la santéNote de bas de page 5Note de bas de page 324Note de bas de page 330. Il convient donc aussi d'adopter des approches plus générales comme l'approche Une seule santé pour s'assurer de bien comprendre tout le contexte des relations entre les humains, les animaux et l'environnement qui engendrent ces conséquencesNote de bas de page 331. Un exemple d'intégration de l'approche Une seule santé à la surveillance est en cours en Saskatchewan, en Alberta et en Colombie-Britannique. Ce projet de collaboration vise à produire des données probantes sur les effets des changements climatiques sur les tiques et les maladies transmises par les tiques dans ces trois provinces de l'Ouest, en mettant l'accent sur la santé des animaux et des humainsNote de bas de page 332.
Pour élaborer des mesures de lutte aux changements climatiques exhaustives et ciblées, la surveillance doit intégrer des données sur les écosystèmes, les déterminants environnementaux de la santé, l'infrastructure et la capacité des systèmes à réagir aux dangers climatiquesNote de bas de page 5Note de bas de page 94Note de bas de page 318. Cette forme de surveillance intégrée des risques est recommandée par l'OMS, et l'information qu'elle pourrait générer serait utile pour comprendre les risques différentiels et élaborer des systèmes d'alerte précoceNote de bas de page 94. Par exemple, les pluies abondantes, qui sont liées aux changements climatiques, ont une incidence sur la contamination de l'eauNote de bas de page 333Note de bas de page 334. Cependant, l'OMS a constaté que plus de 60 % des pays, y compris le Canada, n'incluent actuellement pas de renseignements météorologiques et climatiques dans les systèmes de surveillance de la santé pour les maladies d'origine hydriqueNote de bas de page 62.
Au Québec, le système intégré d'avertissement de chaleur extrême (SUPREME) est un exemple de système intégré de surveillance des risquesNote de bas de page 335. Il a été élaboré en collaboration avec l'Institut national de santé publique du Québec, le ministère de la Sécurité publique du Québec et le Service météorologique du Canada d'Environnement et Changement climatique Canada. Il comprend des indicateurs liés à l'exposition, à la vulnérabilité des quartiers et aux répercussions sur la santé, ce qui permet des avertissements de chaleur et des interventions plus ciblés pour atténuer les risques liés à la chaleur, en particulier pour les populations vulnérables.
Les programmes existants de surveillance de la santé publique peuvent être modifiés. Cela exige d'intégrer des données clés, comme les changements environnementaux, la déforestation et d'autres tendances dans l'utilisation des terres, ainsi que la nature cumulative des effets des changements climatiques sur la santéNote de bas de page 62Note de bas de page 330Note de bas de page 336Note de bas de page 337. Ces programmes peuvent également tenir compte d'un contexte géographique et social donné, comme les indicateurs des changements climatiques liés à la santé au NunavutNote de bas de page 338. Les systèmes de surveillance peuvent être renforcés pour assurer une meilleure surveillance du lien entre les changements climatiques et les maladies chroniques, comme les maladies cardiovasculaires causées par la chaleur extrême, et pour mettre l'accent sur la santé des mères, des enfants et des jeunes, la santé mentale, le vieillissement de la population, et sur d'autres personnes qui vivent au Canada en situation de vulnérabilitéNote de bas de page 339.
Les systèmes de santé publique peuvent s'appuyer sur les leçons tirées de la pandémie de COVID-19 pour améliorer la surveillance pancanadienne des changements climatiques et la production de rapports sur les répercussions du climat sur la santé. Par exemple, la COVID-19 a stimulé les efforts pour régler des problèmes de longue date en matière de recueil, de partage, d'accès et d'utilisation des données sur la santé. Ces efforts ont permis de formuler des conseils éclairés en matière de santé publique et d'améliorer le système de santé au moyen de la Stratégie pancanadienne de données sur la santéNote de bas de page 340. Cette capacité est essentielle pour combler les lacunes dans les données existantes au sein de différentes administrations et de silos sectorielsNote de bas de page 44Note de bas de page 318Note de bas de page 341. Il y a d'autres initiatives prometteuses sur lesquelles s'appuyer ici et à l'étrangerNote de bas de page 318. Par exemple, les indicateurs du compte à rebours du Lancet portent sur de multiples domaines, comme l'incidence, l'exposition, la vulnérabilité, l'adaptation, la planification, la résilience en matière de santé, les mesures d'atténuation, les co-bénéfices pour la santé, l'économie, les finances et l'engagement public et politiqueNote de bas de page 226.
Pour étendre la surveillance, il faut aussi mettre l'accent sur les iniquités en santé. Des données qui peuvent être ventilées par variables démographiques amélioreraient grandement les connaissances au sujet des vulnérabilités liées aux changements climatiquesNote de bas de page 5Note de bas de page 190Note de bas de page 243. Cela permettrait également de mieux comprendre les interconnexions entre les iniquités et la façon dont elles entraînent les risques. Un rapport rédigé par le Bureau des coroners de la Colombie-Britannique fournit un bon exemple en révélant que la plupart des décès liés à la chaleur associés au dôme de chaleur de 2021 concernaient des adultes plus âgés qui vivaient seuls et dont la santé était compromise par de multiples maladies chroniquesNote de bas de page 66. Les données montrent également que la majorité des personnes décédées vivaient dans des quartiers socialement ou matériellement défavorisésNote de bas de page 66. Il est possible de saisir les iniquités intersectionnelles à l'aide de stratificateurs d'équité multiples, comme la race, le revenu, le sexe et la situation de handicap, ou au moyen d'indicateursNote de bas de page 342. Cette compréhension appuierait l'évaluation de la santé de la population relativement aux risques et aux répercussions différentiels des changements climatiques sur la santé. L'Agence de la santé publique du Canada a récemment publié une revue de la littérature et une liste de vérification pour appuyer l'intégration de la théorie de l'intersectionnalité dans les analyses quantitatives d'équité en santéNote de bas de page 343.
Les données sur la santé interopérables et la surveillance sont également essentielles pour saisir l'incidence des urgences entraînées par les changements climatiques sur la santé publique. La recherche sur les catastrophes établit mobilise la surveillance et la préparation aux situations d'urgence pour surveiller les répercussions sur la santé liées aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux catastrophes naturelles à l'aide de données sur les hôpitaux, la santé publique et la surveillance des maladies à déclaration obligatoireNote de bas de page 344Note de bas de page 345. Par exemple, pendant les six semaines qui ont suivi les inondations de 2013 dans le sud de l'Alberta, une surveillance de la santé publique a été mise en œuvre pour déceler les incidences sur la santé, comme les blessures, les problèmes de santé mentale et les maladies infectieusesNote de bas de page 192. Les données sur les plaintes à l'endroit des services d'urgence, sur les médicaments d'ordonnance et sur les maladies à déclaration obligatoire ont été utilisées pour éclairer les interventions de santé publiqueNote de bas de page 192.
Une surveillance accrue des répercussions climatiques sur la santé aiderait à faire progresser les évaluations sur les changements climatiques et la vulnérabilité de la santé au Canada. Dans une enquête menée en 2018-2019 auprès de 80 responsables du secteur de la santé partout au Canada, seulement 35 % des répondants ont déclaré avoir entrepris une évaluation de la vulnérabilité et de l'adaptation aux effets des changements climatiques sur la santéNote de bas de page 5. Le programme ADAPTATIONSanté de Santé Canada a récemment octroyé un financement et du soutien à 10 autorités sanitaires locales et régionales pour renforcer leur capacité à comprendre et à gérer les effets des changements climatiques sur la santé, notamment en réalisant des évaluations de la vulnérabilité et de l'adaptationNote de bas de page 5.
Favoriser le leadership en recherche autochtone et la souveraineté des savoirs autochtones
« Ce que nous essayons d'enseigner, c'est que le savoir traditionnel n'est pas seulement pour les Autochtones, mais pour tout le monde. Tout ce qu'il y a à faire, en réalité, c'est de commencer à respecter et à comprendre les connaissances traditionnelles des peuples autochtones, et vous verrez qu'il y aura une série de moyens créatifs et novateurs pour relever les défis auxquels nous faisons face aujourd'hui dans le monde. » Siila Watt-Cloutier, Indigenous Knowledges and Climate Change (Savoirs autochtones et changements climatiques), Atlas climatique du CanadaNote de bas de page 51.
Comme nous l'avons vu dans la partie 1, les systèmes de connaissances des Premières Nations, des Inuits et des Métis sont essentiels pour déterminer les conditions environnementales en changement, les atténuer et s'y adapter. Ils constituent en outre une contribution fondamentale au bassin de connaissances sur les changements climatiques. La combinaison des connaissances spécifiques autochtones et occidentales et l'application des concepts de « double perspective » ont permis d'améliorer le suivi et la surveillance de la santé climatique, de mieux cerner et évaluer les risques climatiques et de renforcer les politiques et les pratiques en matière d'adaptation climatique (voir l'encadré « Savoirs autochtones et mesures de santé climatique »)Note de bas de page 5Note de bas de page 19Note de bas de page 346.
Savoirs autochtones et mesures de santé climatique
Extrait abrégé de Changements climatiques et santé des peuples autochtones au CanadaNote de bas de page 347
« Les peuples autochtones s'appuient sur les savoirs autochtones et la science depuis des millénaires pour comprendre les changements climatiques et environnementaux auxquels ils font face, et y répondre… Nous devons corriger le chemin que nous empruntons et revenir aux relations spéciales, aux enseignements, aux connaissances et aux pratiques qui assurent le respect, l'honneur et la relation avec le monde naturel »Note de bas de page 347.
Les modes de savoir autochtones se composent de connaissances, de compétences et de philosophies sur les aspects éthiques, sociaux, politiques et de gouvernance essentiels à la survie des collectivités et à la durabilité des ressources. Il existe différents types de savoir autochtone, comme le savoir écologique traditionnel, le savoir traditionnel et le savoir inuit ou Inuit Qaujimajatuqangit. Ce sont tous des concepts dynamiques et vivants qui dénotent la compréhension, l'interdépendance et la relativité entre les peuples autochtones et les territoires où ils vivent, y compris toutes les créations et tous les organismes (animés et inanimés) que ces territoires abritentNote de bas de page 348.
Les savoirs autochtones sont enchâssés dans les langues autochtones et transmis aux jeunes générations par le biais des connaissances communautairesNote de bas de page 349Note de bas de page 350Note de bas de page 351Note de bas de page 352. Cela comprend les observations sur la terre, les plantes, les insectes, les forêts, les voies navigables, la mer, la glace de mer, le sol, les conditions météorologiques et les habitudes migratoires des animauxNote de bas de page 348Note de bas de page 349Note de bas de page 353.
Les savoirs autochtones ont contribué de manière significative à la survie et à la résilience des peuples autochtones. Il est reconnu comme l'égal de l'information scientifique pour comprendre les changements climatiques et s'y adapter. En fait, les modes de savoir autochtones et les connaissances scientifiques occidentaux peuvent se renforcer mutuellement dans la compréhension et la lutte aux changements climatiques. Cependant, l'établissement de liens significatifs entre les modes de savoir autochtones, la recherche et les politiques occidentales sur les changements climatiques continuent de présenter un défi. Des efforts doivent être déployés pour soutenir la participation des chercheurs et des détenteurs de savoirs autochtones aux discussions et aux plans d'action sur les changements climatiques afin de mettre en contexte leurs expériences de vie uniques ainsi que les réalités culturelles et coloniales.
Les savoirs et les visions du monde autochtones fournissent des enseignements précieux sur la gouvernance de l'environnement et la manière de réduire la gravité des changements climatiques. Il est possible d'enrichir ces savoirs et de les utiliser judicieusement en adoptant des interventions fondées sur des approches communautaires, participatives et collaboratives. Le rapprochement de la science occidentale et des modes de savoir autochtones doit être guidé par des cadres de coproduction qui visent à relever le défi des iniquités de pouvoir. Une approche de coproduction favorise l'engagement de la communauté, intègre ses besoins et ses intérêts et reflète le contexte local en matière de ressources et de capacité d'adaptation. Les initiatives qui reconnaissent la place des savoirs autochtones dans l'action climatique doivent aller au-delà de l'intégration des savoirs dans la science occidentale, pour plutôt favoriser le leadership de la recherche autochtone et la souveraineté des savoirs autochtonesNote de bas de page 354.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Donna Atkinson, Roberta Stout, Regine Halseth et Margo Greenwood
Centre de collaboration nationale de la santé autochtone
Par exemple, la Nation des Tla'amins, en Colombie-Britannique, termine une évaluation de santé liée aux changements climatiques et un plan d'adaptation visant à cerner et à gérer les risques pour la santé et le bien-être des communautésNote de bas de page 355. Financée par la Régie de la santé des Premières Nations, cette initiative est le résultat d'une collaboration avec les gardiens du savoir tla'amins et la communauté pour tirer parti des savoirs locaux. L'initiative mobilise également les jeunes dans le cadre d'efforts visant à visiter et à surveiller les terres pour déceler des signes de changements climatiquesNote de bas de page 355. Ce projet est dirigé par le personnel de la Nation des Tla'amins et appuyé par un chercheur de l'Université de la SaskatchewanNote de bas de page 355.
Le gouvernement du Canada élabore un cadre stratégique sur les savoirs autochtones dans la foulée de la loi de 2019 qui exige que les savoirs autochtones soient pris en compte dans les examens de projets et les décisions réglementaires liées à la Loi sur l'évaluation d'impact, la Loi sur la Régie canadienne de l'énergie, la Loi sur les pêches et la Loi sur les eaux navigables canadiennesNote de bas de page 356. Ces travaux sont motivés par un engagement fédéral à l'égard de la réconciliation avec les peuples autochtones qui passe par une relation renouvelée de nation à nation, de gouvernement à gouvernement et entre les Inuits et la Couronne fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariatNote de bas de page 356.
Malgré ces progrès, d'autres progrès sont nécessaires pour établir un lien entre les modes de savoir autochtones et les connaissances occidentalesNote de bas de page 283Note de bas de page 316Note de bas de page 357. Par exemple, les idées qui sous-tendent l'approche Une seule santé sont semblables aux perspectives holistiques des peuples autochtones en ce qui concerne les liens entre la santé humaine et le bien-être de la terreNote de bas de page 358. Les savoirs autochtones ont précédé l'émergence d'une perspective Une seule santé, mais peu d'attention a été accordée à la façon dont les savoirs autochtones doivent orienter l'approche Une seule santéNote de bas de page 358. Il s'agit notamment de reconnaître que la colonisation a eu une incidence sur la santé humaine des Autochtones, le bien-être de la terre et le lien avec la terreNote de bas de page 272. En mettant l'accent sur l'autodétermination des Autochtones et l'inclusion des systèmes de savoirs et du leadership autochtones, on peut renforcer de façon considérable les efforts pour l'approche Une seule santé au CanadaNote de bas de page 272Note de bas de page 358.
Pour soutenir le leadership autochtone en matière de climat, il faut respecter les structures de gouvernance des nations. Il s'agit d'appuyer activement les principes d'autodétermination et d'autonomie gouvernementale en faisant une place aux tables de prise de décisions autochtones et en passant de la consultation à une véritable approche de mobilisation et de co-construction. Il est notamment question de politiques et de protocoles qui appuient la collaboration et la recherche (p. ex., les principes propres à la nation sont intégrés aux notions de propriété, de contrôle, d'accès, d'intendance, et de possession des données et des connaissances).
Collaborer entre secteurs pour une action transformatrice en matière de santé climatique et des co-bénéfices intersectoriels
La santé publique est en bonne posture pour aborder les enjeux intersectoriels de la santé publique, comme la lutte aux changements climatiques, et s'y attaquerNote de bas de page 94Note de bas de page 300Note de bas de page 359. Les efforts d'atténuation et d'adaptation aux changements climatiques exigent une action coordonnée vers un objectif commun, entre les différents secteurs et les paliers gouvernementaux. Les efforts isolés d'adaptation et de réduction des gaz à effet de serre ne répondront pas adéquatement aux problèmes écologiques et sociaux qui déterminent la santé. Un manque de coordination pourrait mener à des mesures redondantes, fragmentées ou mal adaptéesNote de bas de page 19Note de bas de page 360Note de bas de page 361. Pour cette raison, le GIEC souligne que les structures de gouvernance inclusives et les cadres institutionnels robustes sont des conditions essentielles à l'adaptation et à l'atténuation des changements climatiquesNote de bas de page 19Note de bas de page 255.
La gouvernance de l'action climatique bénéficie d'un meilleur appui lorsqu'il y a une harmonisation et une coordination entre les secteurs et les domaines de politique, avec des organismes de coordination de haut niveau qui ne sont pas liés par des mandats ministérielsNote de bas de page 19Note de bas de page 255. Ce type d'approche est particulièrement important au Canada, où la responsabilité de la santé publique et des changements climatiques est partagée entre les divers paliers de gouvernement, ce qui peut faire de la cohérence des politiques un défiNote de bas de page 360. Il faut aussi tenir compte de l'autonomie gouvernementale des Autochtones, qui est une composante essentielle de la gouvernance liée aux changements climatiques au CanadaNote de bas de page 362.
La collaboration intergouvernementale et intersectorielle s'avère particulièrement importante pour les initiatives en amont axées sur des mesures plus vastes et plus transformatricesNote de bas de page 5Note de bas de page 363Note de bas de page 364. Les efforts nationaux ont surtout porté sur les répercussions négatives des changements climatiques, en accordant moins d'attention aux causes profondes des risques et de la vulnérabilité (comme les déterminants sociaux de la santé)Note de bas de page 323. La menace croissante des changements climatiques exige une approche plus globale dans les deux casNote de bas de page 323. Cela souligne la nécessité d'un leadership en santé publique pour inciter à l'action.
L'une des façons dont la santé publique peut appuyer l'action intersectorielle consiste à mettre l'accent sur les co-bénéfices pour aider les décideurs à mieux comprendre les avantages de la lutte aux changements climatiques. Les stratégies d'atténuation des changements climatiques et d'adaptation peuvent présenter un certain nombre d'avantages pour la santé. Par exemple, les investissements dans les infrastructures pour les cyclistes et les piétons et pour les espaces verts peuvent réduire les émissions de gaz à effet de serre, augmenter les déplacements actifs, réduire le fardeau des maladies cardiaques et respiratoires et soutenir la santé mentaleNote de bas de page 365. La certification LEED (Leadership in Energy and Environmental Design) permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre, d'améliorer la qualité de l'air et de réduire la morbidité et la mortalité liées aux problèmes respiratoiresNote de bas de page 365. Cependant, la plupart des travaux de recherche sur les co-bénéfices ont porté sur un petit nombre d'enjeux liés à la santé, comme la qualité de l'air et l'activité physiqueNote de bas de page 366Note de bas de page 367Note de bas de page 368.
Les systèmes de santé publique peuvent aider à déterminer les divers effets des changements climatiques sur la santé et contribuer au repérage des co-bénéfices de l'action climatique pour la santé par la recherche, leurs méthodes et leurs outilsNote de bas de page 366Note de bas de page 369. Mettre l'accent sur les co-bénéfices pourrait mener à des efforts d'atténuation et d'adaptation visant à renforcer les déterminants d'une bonne santé et à éliminer les causes profondes de la vulnérabilité différentielleNote de bas de page 5. Il existe déjà de multiples méthodes et outils pour enrichir le plus possible les connaissances sur les co-bénéfices, comme les outils d'évaluation des incidences sur la santé (voir l'étude de cas « Évaluation des incidences sur la santé : Une approche prometteuse de lutte aux changements climatiques »).
Évaluation des incidences sur la santé : Une approche prometteuse de lutte aux changements climatiquesNote de bas de page 369
Une évaluation des incidences sur la santé (EIS) est une approche intersectorielle structurée visant à comprendre les effets potentiels d'une politique, d'un programme ou d'un projet sur la santé d'une population. Mise de l'avant par l'Organisation mondiale de la Santé, cette approche vise à mieux informer les décideurs des conséquences possibles de leurs décisions sur la santé et le bien-être de la population et sur les iniquités.
Les EIS peuvent être appliquées aux politiques et aux stratégies sur les changements climatiques afin de mettre l'accent sur la santé et mener à des choix plus éclairés à long termeNote de bas de page 370. Une étude américaine a analysé douze EIS réalisées dans six États et appliquées aux politiques proposées sur les changements climatiques. Elle a permis de conclure que le processus peut faciliter la collaboration intersectorielle, contribuer à optimiser les co-bénéfices pour la santé et sensibiliser les décideurs aux répercussions d'éventuelles politiques sur la santéNote de bas de page 371.
Exemples d'application
Des EIS ont été utilisées pour évaluer les effets sur la santé des politiques d'atténuation des changements climatiques à l'échelle locale à Genève, en SuisseNote de bas de page 372Note de bas de page 373. À Houston, au Texas, ces évaluations ont permis d'étudier les co-bénéfices pour la santé de trois différents scénarios d'utilisation des terres ayant un potentiel d'adaptation aux changements climatiques et d'atténuation, soit la rénovation d'un immeuble de bureaux au centre-ville, un aménagement urbain et un plan de durabilité d'un campus universitaireNote de bas de page 374. À Bâle, en Suisse, une EIS a été employée pour analyser les effets sur la santé de quatre scénarios de transport liés aux politiques locales d'atténuation des changements climatiquesNote de bas de page 375. Des travaux similaires ont été menés aux Pays-Bas afin d'évaluer les avantages pour la santé des politiques de réduction des gaz à effet de serre dans le secteur des transports de RotterdamNote de bas de page 376. Ces applications des EIS ont contribué à déterminer lequel des scénarios d'atténuation des changements climatiques proposés était le plus bénéfique pour la santé et à définir les mesures nécessaires pour optimiser les co-bénéfices pour la santé qui en découlent.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Centre de collaboration nationale sur les politiques publiques et la santé
La lutte aux changements climatiques peut entraîner d'autres avantages sur différents plans, comme l'innovation, la productivité agricole, les moyens de subsistance, la conservation de la biodiversité, ainsi qu'une réduction des dommages causés par les catastrophes naturellesNote de bas de page 19. Ces avantages ne se matérialisent pas uniquement dans un avenir lointain; certains peuvent se concrétiser en quelques années, comme l'amélioration de la qualité de l'airNote de bas de page 90. De nombreux co-bénéfices dans d'autres secteurs sont également pertinents pour l'amélioration de la santé publique. La mise en évidence des co-bénéfices entre les secteurs pourrait accroître la motivation à l'égard de prise de décisions et d'action intersectorielles.
La recherche sur les co-bénéfices de la lutte aux changements climatiques pourrait mener à une meilleure évaluation économique de ces avantages, ce qui permettrait aux décideurs de comparer de manière plus approfondie les coûts et les économies de l'action par rapport à l'inactionNote de bas de page 367. Les avantages économiques sont souvent un incitatif important pour les gouvernements, et la recherche a montré que les avantages économiques liés à la santé pourraient largement dépasser le coût de l'atténuation des changements climatiquesNote de bas de page 62.
Dans le cadre d'une approche plus large, mettre l'accent sur les co-bénéfices pour la santé appuierait l'intégration d'une approche axée sur la santé publique dans l'ensemble des processus de planification et d'élaboration de politiques sur les changements climatiques. Particulièrement dans les secteurs responsables de l'utilisation des terres, de la planification des transports, des normes de construction, de la planification urbaine et du développement, de la planification énergétique, des pratiques agricoles, de la conservation et de la protection de l'environnement, des moyens de subsistance, des infrastructures, de l'assainissement et de l'eau (voir l'encadré « Plan d'action interministériel 2022-2025 de la Politique gouvernementale de prévention en santé du Québec : un levier de lutte aux changements climatiques »)Note de bas de page 5Note de bas de page 19Note de bas de page 377.
Plan d'action interministériel 2022-2025 de la Politique gouvernementale de prévention en santé du Québec : un levier pour lutter contre les changements climatiquesNote de bas de page 378
En juin 2022, le gouvernement du Québec a publié le Plan d'action interministériel 2022-2025 de la Politique gouvernementale de prévention en santé. Ce plan d'action constitue la deuxième phase de mise en œuvre de la Politique gouvernementale de prévention en santé et dispose d'un budget total de 120 millions de dollars. Sous la direction du ministère de la Santé et des Services sociaux, le plan établit un partenariat de collaboration avec près de 30 ministères et organismes gouvernementaux et plus de 80 partenaires non gouvernementaux afin de mettre en œuvre des mesures visant à améliorer la santé de la population et à réduire les inégalités en matière de santéNote de bas de page 378. Les actions s'articulent autour de quatre grandes orientations : le développement des capacités des personnes dès leur plus jeune âge; l'aménagement de communautés et de territoires sains et sécuritaires; l'amélioration des conditions de vie qui favorisent la santé; et le renforcement des actions de prévention dans le système de santé et de services sociaux.
En particulier, le plan d'action appuie, par le biais de la mesure 2.9, les autorités régionales de santé publique du Québec dans la réalisation de projets intersectoriels de grande envergure sur les changements climatiques au sein des collectivités régionalesNote de bas de page 378. Cette mesure est appuyée par le ministère de la Santé et des Services sociaux, en collaboration avec le ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, et en partenariat avec les 18 autorités régionales de santé publiqueNote de bas de page 378. Un budget de 6 millions de dollars sur trois ans est prévu pour la mise en œuvre de la mesureNote de bas de page 378.
Le plan d'action interministériel est inspiré de l'approche de la Santé dans toutes les politiques et met à contribution des leviers sous la responsabilité de secteurs de santé non gouvernementaux pour agir sur les déterminants de la santé et tenir compte « du caractère indissociable des dimensions sociale, économique et environnementale, en respect des principes de développement durable » (p. IX)Note de bas de page 378. Ces mesures visent à la fois à prévenir l'apparition de problèmes de santé au sein de la population et à alléger la pression sur le système de santé au cours des prochaines annéesNote de bas de page 378.
Nous remercions les auteurs de leur contribution :
Centre de collaboration nationale sur les politiques publiques et la santé
L'intégration des perspectives de la santé publique dans les initiatives de lutte aux changements climatiques peut non seulement accroître les co-bénéfices, mais aussi réduire les maladaptations, qui sont plus susceptibles de se produire lorsque l'attention est accordée uniquement à des risques ou à des secteurs particuliersNote de bas de page 5Note de bas de page 19Note de bas de page 264Note de bas de page 327Note de bas de page 379. Tenir compte de la santé publique permet d'appuyer la cohérence, l'uniformité et l'efficacité des politiques en plus d'assurer une meilleure gestion des compromisNote de bas de page 294. En veillant à ce que les mesures de lutte aux changements climatiques tiennent compte du contexte et favorisent l'équité, on contribue également à réduire la maladaptation en s'assurant que les efforts d'adaptation ou d'atténuation sont adaptés aux collectivités en questionNote de bas de page 5. Le GIEC a déclaré que le risque de maladaptation peut être réduit par une planification multisectorielle, multi-acteurs et inclusiveNote de bas de page 19.
Les villes ont été au premier plan de l'action intersectorielle pour le climat et sont de puissantes sources de mesures ingénieuses et de résilience climatiqueNote de bas de page 380Note de bas de page 381. Le mouvement émergent des villes durables et intelligentes alimente l'innovation locale et soutient des environnements et des infrastructures favorisant l'action climatiqueNote de bas de page 382Note de bas de page 383Note de bas de page 384. Des exemples de collaboration intersectorielle entre les villes et les municipalités, avec une participation explicite de la santé publique, émergent partout au Canada (voir l'encadré « Initiatives intersectorielles locales au Canada »).
Toutefois, pour élargir et normaliser efficacement ces collaborations, il faut des ressources, du temps, de l'engagement et du personnel dédié avec l'expertise nécessaireNote de bas de page 385. Il est possible de soutenir ces efforts en allouant des fonds au système de santé publique pour des initiatives intersectorielles qui aident les services locaux de santé publique à lutter directement avec d'autres secteurs contre les changements climatiques.
Initiatives intersectorielles locales au Canada
Les mesures intersectorielles sont essentielles pour répondre aux enjeux de santé publique complexes et difficiles comme les changements climatiques. Des organisations locales et municipales ainsi que des services locaux de santé publique mènent ces efforts partout au Canada. Voici deux exemples qui illustrent le potentiel de ces approches.
Sur la côte Ouest, à Island Health, sur l'île de Vancouver, les agents en hygiène de l'environnement sont allés au-delà de leur rôle de surveillance réglementaire pour travailler à l'élaboration d'environnements bâtis sains en collaboration avec les urbanistes municipaux, les organismes communautaires et d'autres intervenantsNote de bas de page 386. Ils ont notamment réalisé des travaux sur des enjeux liés à la qualité de l'air, aux changements climatiques, au transport actif et à la cohésion socialeNote de bas de page 386.
En Ontario, Santé publique Ottawa a affecté deux de ses employés au Service de l'urbanisme, de l'immobilier et du développement économique pendant trois ans. Cette initiative visait à éclairer le nouveau plan officiel de la Ville et à faire en sorte qu'il favorise des collectivités saines, inclusives et résilientes. Par conséquent, le plan met l'accent sur le renforcement de la résilience environnementale, climatique et sanitaire en créant des quartiers accessibles à pied en 15 minutes. Cette approche favorise à la fois la santé publique, l'équité en santé ainsi que l'atténuation et l'adaptation aux changements climatiquesNote de bas de page 387.
Renforcer le leadership des systèmes de santé publique en matière de lutte contre les changements climatiques ainsi que les éléments de base de la santé publique pour favoriser la résilience climatique
En plus des partenariats entre les secteurs, il existe un certain nombre de domaines clés où la santé publique peut faire preuve de leadership dans l'ensemble du système tout en préconisant des mesures de lutte contre les changements climatiques. Les systèmes de santé publique peuvent accorder la priorité à des ressources spécialisées afin d'éclairer et de coordonner de façon experte les mesures pour contrer les répercussions sur la santé. Ils peuvent donner l'exemple en passant à des systèmes de santé à faibles émissions de carbone. Ils peuvent aussi renforcer leurs propres fondements pour agir sur des enjeux complexes.
Militer en faveur d'un changement en santé publique
« La santé publique est un véritable catalyseur pour réunir les groupes et éliminer les cloisonnements. Nous avons certainement un rôle d'advocacy à jouer pour sensibiliser les gens aux changements climatiques. Mais, nous avons aussi un rôle à jouer pour construire le système, prendre les devants et relever les défis structurels en amont, en réfléchissant à la façon dont nous pouvons modifier l'aménagement de notre ville. »
Les mesures découlant de cette feuille de route exigeront que la santé publique encourage une transformation allant au-delà de la gestion des risquesNote de bas de page 388Note de bas de page 389. Pour ce faire, elle doit jouer un rôle de leader dans la lutte contre les injustices et les déterminants sociaux, économiques et environnementauxNote de bas de page 181Note de bas de page 390. Un leadership réussi implique l'établissement de coalitions et une influence qui passent par des relations politiques directes et une mobilisation publique indirecteNote de bas de page 388. Pour cela, il faut soutenir les gens qui travaillent dans le domaine de la santé publique afin qu'ils puissent naviguer efficacement dans différents climats politiques à propos d'enjeux de santé hautement politisés, comprendre et saisir les cycles politiques, les fenêtres politiques et le processus décisionnel, et adapter le contenu aux auditoiresNote de bas de page 366Note de bas de page 388Note de bas de page 391.
Ces compétences sont particulièrement nécessaires pour lutter contre les changements climatiques en raison de la complexité du contexte politique et des politiques publiquesNote de bas de page 336Note de bas de page 377Note de bas de page 392. Des intérêts divergents ont entraîné de la mésinformation et de la désinformation qui remettent en question la gravité des changements climatiques et l'urgence de lutter contre ces derniersNote de bas de page 336Note de bas de page 366Note de bas de page 388. Un contre-mouvement modeste, mais bruyant, fait la promotion du scepticisme à l'égard des changements climatiques tout en militant vigoureusement contre les contraintes perçues sur le plan de l'économie et de la libertéNote de bas de page 388Note de bas de page 393. L'échange de connaissances n'est pas toujours suffisant pour changer les croyances dictées par ce genre d'idéologies politiques ou économiquesNote de bas de page 336.
Pour faire avancer la lutte contre les changements climatiques, la santé publique devra être une voix digne de confiance dans nos collectivités. Les responsables de la santé publique ont souvent un rôle unique à jouer en tant que représentants du gouvernement qui ont également des titres de compétences scientifiques. Des travaux de recherche récents révèlent que les personnes qui vivent au Canada considèrent les scientifiques comme des sources fiables d'information sur le climatNote de bas de page 394. Les organismes, les agences et les services de santé publique doivent maintenir leur position d'organismes scientifiquement crédibles pour maintenir la confiance du public.
Mesures de santé consacrées à la lutte aux changements climatiques
L'action climatique nécessite une coordination et une collaboration intersectorielles. Cependant, il faut aussi un leadership expert et dévoué pour orienter les efforts, de la recherche jusqu'à la promotion et la mise en œuvre. Bien que le lien entre le climat et la santé attire davantage l'attention au Canada, y compris dans le cadre de diverses initiatives gouvernementales, les efforts demeurent dispersés plutôt que coordonnés.
Il est important d'intégrer les considérations climatiques et la lutte aux changements climatiques à la santé publique et à d'autres secteurs, mais ce n'est peut-être pas suffisant pour répondre aux changements climatiques. Des travaux de recherche menés en Europe et l'analyse du GIEC indiquent qu'il y a des limites à la façon dont cette perspective peut être utilisée pour intégrer l'adaptation aux changements climatiques dans les priorités et les activités d'autres secteursNote de bas de page 385Note de bas de page 395. L'intégration des efforts d'adaptation aux changements climatiques peut entraîner une répartition inégale entre les secteurs, des responsabilités de mise en œuvre diluées, une planification et des investissements déconnectés, et une coordination insuffisante entre des priorités stratégiques concurrentes ou qui se chevauchentNote de bas de page 395. À l'échelle locale, la meilleure façon de soutenir l'action climatique consiste à combiner des approches climatiques dédiées et l'intégration à d'autres secteurs afin de s'assurer qu'on accorde suffisamment d'attention aux changements climatiques tout en soutenant le passage de la politique à la mise en œuvre dans tous les secteursNote de bas de page 385. Les approches dédiées peuvent impliquer des structures institutionnelles autonomes, avec des ressources et des responsabilités dédiéesNote de bas de page 385Note de bas de page 396. Les milieux universitaires et gouvernementaux comportent certains exemples d'institutions dédiées au lien entre la santé et les changements climatiques.
Afin de mieux comprendre la santé planétaire et de trouver collectivement des solutions, la London School of Hygiene and Tropical Medicine a mis sur pied le Centre on Climate Change and Planetary Health en partenariat avec le milieu universitaire, le gouvernement, l'industrie, les organisations non gouvernementales et la société civileNote de bas de page 397. Les chercheurs du Centre ont récemment collaboré avec la U.K. Health Security Agency. En utilisant les données de l'Office of National Statistics, ils ont repéré les régions géographiques et les sous-groupes de population les plus à risque de surmortalité liée à l'exposition à la chaleur ou au froid en Angleterre et au pays de GallesNote de bas de page 398. Ces résultats peuvent permettre de guider et d'orienter les initiatives de santé publique.
L'Observatoire européen du climat et de la santé est un partenariat entre la Commission européenne et l'Agence européenne pour l'environnement, entre autres. Il a pour objectif d'approfondir la compréhension des effets actuels et futurs des changements climatiques sur la santé afin de guider la prévention et la préparation dans l'ensemble des États membres. Les activités de l'Observatoire comprennent l'élaboration et l'échange de données sur les effets des changements climatiques sur la santé, les indicateurs de risque (intégration de données sur les dangers, l'exposition, la vulnérabilité et la capacité d'intervention), les outils d'évaluation des risques, les outils de surveillance, les outils d'alerte précoce, les prévisions, ainsi que l'appui à l'élaboration de politiquesNote de bas de page 399Note de bas de page 400.
Bâtir des systèmes de santé à faibles émissions de carbone
Au Canada, le secteur de la santé représente 4,6 % des émissions de gaz à effet de serreNote de bas de page 401. Bien que cela soit en grande partie attribuable aux émissions des hôpitaux, des produits pharmaceutiques et des services des médecins, cette proportion comprend également les émissions associées aux systèmes de santé publiqueNote de bas de page 401. Bien qu'il soit difficile de déterminer la quantité précise d'émissions, les travaux et les activités liés à la santé publique, y compris les immeubles à bureaux, les laboratoires, les centres de données, les chaînes d'approvisionnement et le transport, contribuent probablement à l'empreinte carbone du secteur.
L'une des principales façons par lesquelles les systèmes de santé publique peuvent réduire leurs émissions de gaz à effet de serre est de soutenir et de mettre en œuvre des mesures en amont pour éviter le besoin de services de soins de santé cliniques en aval. Par la promotion et la protection de la santé, la santé publique peut réduire les effets négatifs des changements climatiques sur la santé et la demande connexe de services de santé qui exigent beaucoup d'énergie et de ressourcesNote de bas de page 256Note de bas de page 402Note de bas de page 403Note de bas de page 404.
Les systèmes de santé ont la responsabilité de s'engager à atténuer les changements climatiques. Le Canada l'a reconnu en signant les engagements du Programme de santé de la 26e Conférence des Parties des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26), qui comprend des efforts pour bâtir des systèmes de santé durables, résilients aux changements climatiques et à faibles émissions de carboneNote de bas de page 405. Il est notamment question de l'élaboration d'une évaluation de base des émissions de gaz à effet de serre du système et de la création d'un plan pour élaborer un modèle durable à faibles émissions de carboneNote de bas de page 60. Cela peut comprendre l'efficacité énergétique et la conservation de l'énergie, l'utilisation de sources d'énergie renouvelables, l'approvisionnement durable et la réduction des déchetsNote de bas de page 5Note de bas de page 130Note de bas de page 402Note de bas de page 406. Bien que de nombreuses initiatives visant à réduire l'empreinte carbone soient axées sur les établissements et les services de santé, de nombreuses autres recommandations sont utiles pour les systèmes de santé publique. Notamment, l'amélioration de la conception des bâtiments, la réduction de la consommation d'énergie, l'utilisation de sources d'énergie renouvelables, la modification des pratiques d'achat, les ententes avec des fournisseurs durables et l'utilisation de véhicules à faibles émissions pour le transport des fournitures, des déchets et des échantillons de laboratoireNote de bas de page 5Note de bas de page 404Note de bas de page 406Note de bas de page 407. Les recommandations des campagnes visant à réduire les examens médicaux et de laboratoire inutiles et les traitements de santé peuvent également s'appliquer à la santé publique, comme les lignes directrices de la campagne Choisir avec soin Canada, organisée par l'Hôpital St. Michael's de l'Université de Toronto et l'Association médicale canadienneNote de bas de page 408.
Le Toronto Western Hospital, où se trouve le plus grand système de transfert d'énergie des eaux usées brutes au monde, est un bon exemple à l'échelle d'un établissement. Lorsque les travaux qui ont débuté en juin 2022 seront terminés, l'énergie thermique provenant des eaux usées municipales fournira jusqu'à 90 % des besoins de chauffage et de climatisation de l'hôpital, ce qui permettra de réduire les émissions de gaz dans une proportion correspondant à retirer 1 800 voitures de la circulationNote de bas de page 409. En Nouvelle-Écosse, la Environmental Goals and Climate Change Reduction Act exige que les nouveaux immeubles et les rénovations majeures des immeubles du gouvernement, y compris dans le système de santé, soient à consommation énergétique nette zéro et résilients aux changements climatiques (à compter de 2022). Il s'agit là d'un excellent exemple d'initiative provinciale. La loi privilégie et encourage davantage la location de locaux à bureaux dans des immeubles résilients aux changements climatiques et à consommation nette zéro (à compter de 2030)Note de bas de page 410.
Une base solide en matière de santé publique pour lutter contre les changements climatiques
De solides assises sont nécessaires pour s'assurer que les systèmes de santé publique disposent des ressources nécessaires et que les gens qui y travaillent sont prêts à agir. Cela est apparu nettement tout au long de la pandémie de COVID-19, laquelle continue d'avoir une incidence sur les ressources et la capacité des systèmes de santé publique à l'échelle du pays.
Si les fonctions essentielles de la santé publique illustrent la façon dont les systèmes de santé publique font leur travail, les éléments de base qui y sont associés représentent la façon dont ces systèmes sont organisés pour appuyer ces fonctionsNote de bas de page 253. Les études sur la façon dont la santé publique peut s'attaquer aux changements climatiques doivent également tenir compte des exigences de ces éléments de base. Pour un examen détaillé de ces recommandations et des étapes nécessaires à une transformation plus vaste de la santé publique, veuillez consulter le rapport de l'ACSP de 2021. La section ci-dessous traitera brièvement de la façon dont les éléments de base de la santé publique doivent être renforcés dans le contexte de la lutte aux changements climatiques, en mettant particulièrement l'accent sur les ressources financières et humaines et l'expertise de la main-d'œuvre.
Un financement adéquat est essentiel à la capacité des systèmes de santé publique pour protéger et promouvoir la santé dans un climat en changement. En plus d'autres éléments fondamentaux, un financement suffisant et durable est essentiel pour aborder les enjeux primordiaux de santé publiqueNote de bas de page 94Note de bas de page 253Note de bas de page 359Note de bas de page 411. Le financement est particulièrement important pour des enjeux comme la COVID-19 et les changements climatiques, car leur complexité et leur ampleur exigent que les systèmes de santé publique aient la capacité de travailler avec toutes les juridictions, de prioriser l'ensemble des déterminants de la santé, de collaborer avec de multiples collectivités et de promouvoir et appuyer une action intersectorielleNote de bas de page 94Note de bas de page 300Note de bas de page 411. Cependant, au cours de la pandémie, il est apparu évident que les systèmes de santé publique sont déjà aux prises avec des ressources qui ne suffisent pas à leurs mandats élargisNote de bas de page 253Note de bas de page 359. Les programmes d'adaptation aux changements climatiques axés sur la santé n'ont reçu qu'une très faible proportion des fonds affectés aux initiatives d'adaptation au Canada, ce qui s'avère insuffisant pour relever les défis actuels et futurs auxquels nous serons confrontésNote de bas de page 91Note de bas de page 323. Sans un changement systémique plus vaste et un soutien accru, les systèmes de santé publique ne seront pas en mesure de relever de façon efficace et durable les nouveaux défis entraînés par les changements climatiques.
L'expertise de la main-d'œuvre en santé publique est au cœur de l'action climatique.
« L'une des grandes choses qu'il est possible de faire, c'est de changer la façon dont le personnel de la santé publique et les futurs membres du personnel de la santé publique sont formés, afin qu'ils puissent adopter une approche plus écosociale sur divers enjeux. Et penser différemment, afin de pouvoir agir différemment. »
Pour soutenir une action climatique, il faut un large éventail d'expertises, y compris des compétences en science, en évaluation, en leadership, en collaboration, en communication, en planification et en mise en œuvreNote de bas de page 243Note de bas de page 412Note de bas de page 413. La santé publique peut s'appuyer sur l'expertise et les compétences existantes, y compris celles du domaine de la santé environnementale. Cette dernière a toujours été au cœur de la pratique en santé publique avec pour objectifs d'assurer la sécurité de nos aliments, de notre eau, de notre air, de notre sol et de nos installations. Par exemple, les professionnels de la santé publique environnementale peuvent jouer un rôle clé dans la création d'environnements durables et la résolution des problèmes environnementaux liés aux changements climatiques dans le cadre des efforts d'adaptation climatiqueNote de bas de page 414Note de bas de page 415Note de bas de page 416.
Toutefois, un écart de formation persiste au CanadaNote de bas de page 321. Malgré la reconnaissance de leur importance, on accorde une trop petite place aux changements climatiques dans les programmes d'étude des diplômés canadiens en santé publique ou dans les compétences de base en santé publiqueNote de bas de page 9Note de bas de page 417. Les possibilités de perfectionnement professionnel liées aux changements climatiques sont également limitées pour les professionnels de la santé publique actuels. Par conséquent, il est indispensable de former et de soutenir les professionnels de la santé publique afin qu'ils soient suffisamment préparés pour évaluer et aborder les répercussions des changements climatiques sur la santé dans le cadre de leur travail actuelNote de bas de page 418Note de bas de page 419Note de bas de page 420Note de bas de page 421Note de bas de page 422. De plus, comme pour d'autres enjeux de santé publique, les savoirs et le leadership des Premières Nations, des Inuits et des Métis sont essentiels à une action climatique efficaceNote de bas de page 196. Une pratique sécuritaire sur le plan culturel est essentielle à une participation significative, laquelle requiert de l'éducation et de la formation au sein des effectifs de la santé publique sur les savoirs autochtones, la colonisation, la vérité et la réconciliation, et les façons de lutter contre le racisme envers les AutochtonesNote de bas de page 196Note de bas de page 347. Cependant, ces sujets demeurent largement absents de l'éducation, de la formation et des compétences actuelles en santé publiqueNote de bas de page 423Note de bas de page 424.
« Si vous n'avez pas les compétences nécessaires et que vous essayez d'y travailler en plus de toutes les autres tâches prioritaires, il est vraiment difficile de faire avancer les choses. »
L'accès à des ressources financières et humaines suffisantes, ainsi qu'à l'expertise de la main-d'œuvre est nécessaire pour renforcer les systèmes de santé publique et fournir une base solide à partir de laquelle la santé publique peut devenir un partenaire dans la lutte contre les changements climatiques.
Pour ce faire, il faudra veiller à ce que tous les autres éléments de base incluent une dimension climatique afin de favoriser des approches nouvelles et repensées en matière de production de données probantes et de connaissances, de politiques et de programmes, de technologie médicale et numérique, ainsi que de gouvernance et de mobilisation.
La feuille de route de la partie 2 présentait en détail les possibilités de renforcement des systèmes de santé publique partout au Canada et leur réponse à la crise climatique. La protection et la promotion de la santé de toutes les personnes vivant au Canada dans le contexte des changements climatiques nécessiteront des mesures de santé publique audacieuses et continues. La section suivante présente les mesures prioritaires à prendre lors des prochaines étapes de ce parcours essentiel.
La voie à suivre
Des mesures de santé publique urgentes sont nécessaires afin de se préparer aux conséquences actuelles et futures des changements climatiques sur la santé, de s'en protéger et d'y réagir. Les systèmes de santé publique peuvent également apporter une contribution précieuse aux efforts climatiques existants et faire preuve de leadership dans le cadre de mesures qui ont de grandes répercussions. Pour des pays comme le Canada, qui sont parmi les principaux émetteurs de gaz à effet de serre par habitant, cet effort a une importance nationale et mondiale.
La lutte contre les changements climatiques peut avoir des effets bénéfiques importants et presque immédiats sur la santé, tout en protégeant la capacité de survie à long terme de la planète et de ses habitants. Si ces efforts sont adéquats, ils contribueront à promouvoir la santé, l'équité et la justice, maintenant et à l'avenir.
La voie à suivre décrit les domaines d'action prioritaires qui constituent des points de départ pour les systèmes de santé publique afin de mettre en œuvre la feuille de route présentée dans ce rapport. Ils peuvent orienter la préparation des systèmes de santé publique à prendre des mesures immédiates pour lutter contre les changements climatiques, tant à l'intérieur de ces systèmes qu'en travaillant avec d'autres secteurs clés. De cette façon, les domaines d'action sont intersectoriels et appuient la feuille de route de façon générale.
Bien qu'elles ne soient pas exhaustives, ces priorités peuvent aider les professionnels de la santé publique du Canada à être des chefs de file et des partenaires efficaces dans la lutte contre les changements climatiques et leurs répercussions sur la santé de toutes les personnes vivant au Canada, notamment dans le contexte du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques et la première Stratégie nationale d'adaptation.
Intégrer les considérations relatives au climat dans les systèmes de santé publique
Le travail quotidien de la santé publique offre des points de départ pratiques pour la lutte contre les changements climatiques, comme l'intégration délibérée d'une perspective de santé climatique dans les fonctions, les outils et les interventions actuels de la santé publique. Une perspective de santé climatique signifie également qu'il faut s'appuyer sur les approches existantes, comme l'approche « Une seule santé », pour orienter la prise de décisions et la conception des politiques et des programmes. Ces approches doivent mettre l'accent sur les conditions sociales et écologiques qui déterminent la santé physique et mentale et reconnaître l'existence d'une interconnexion entre les humains, les animaux et leur environnement commun. Il s'agit notamment d'établir des liens avec le leadership, les savoirs et les pratiques issus des points de vue et de l'expérience des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et de les soutenir.
Pour que les systèmes de santé publique puissent élaborer et mettre en œuvre de bonnes interventions d'adaptation en matière de santé, il faut disposer des connaissances et des données probantes appropriées. Cela nécessite la compréhension des facteurs géographiques, sociaux, économiques et environnementaux uniques qui influent sur l'exposition aux menaces et les vulnérabilités à l'échelle des collectivités. Il existe des outils d'évaluation qui sont à la fois efficaces et nécessaires pour éclairer les efforts d'adaptation. Ces mesures doivent être mises en œuvre de façon générale et uniforme par les autorités de santé publique en collaboration avec les collectivités touchées.
Priorités réalisables pour intégrer les considérations relatives au climat dans les systèmes de santé publique
- Renouveler les fonctions essentielles de la santé publique pour mettre l'accent sur les facteurs socioécologiques et orienter des mesures de santé publique efficaces en matière de changements climatiques.
- Intégrer les considérations liées au climat et à la santé aux pratiques, aux politiques et aux programmes de santé publique actuels et futurs.
- Mener des évaluations de la vulnérabilité et de l'adaptation en matière de climat et de santé fondées sur l'équité afin d'éclairer les efforts déployés sur place pour se préparer et réagir aux répercussions des changements climatiques sur la santé.
La santé au cœur de la lutte contre les changements climatiques
L'importance accordée à la santé est relativement nouvelle dans le champ des travaux sur l'atténuation des changements climatiques et l'adaptation à ces changements. Nous devons continuer de faire connaître la voix et les efforts de la santé publique dans le cadre des travaux actuels sur les changements climatiques et de mettre l'accent sur les co-bénéfices des interventions qui vont de la promotion de la santé à l'intervention d'urgence, en amont comme en aval. Les systèmes de santé publique devront s'engager dans des partenariats entre les secteurs et les administrations, tout en priorisant les façons de travailler qui donnent à la santé publique une place aux tables de prise de décisions et de planification dans la lutte contre les changements climatiques. Il faut également mettre la santé au cœur de la recherche sur les changements climatiques, qui doit renouveler les possibilités d'intégrer la recherche et les connaissances de toutes les disciplines, de manière à refléter les défis complexes et multidimensionnels que les changements climatiques posent à la santé.
La santé publique dispose des outils et de l'expertise nécessaires pour faire progresser la lutte contre les changements climatiques. Mentionnons les approches en matière de recherche, de participation communautaire et d'évaluation des programmes et des politiques qui visent à comprendre quelles personnes sont les plus touchées par les changements climatiques et à trouver les meilleures solutions pour protéger et promouvoir la santé, tant physique que mentale. La santé publique communique depuis longtemps avec le public au sujet des risques et des mesures de protection. Cette expertise pourrait être utilisée pour diffuser de l'information sur les répercussions des changements climatiques sur la santé et sur les co-bénéfices des mesures portant à la fois sur la santé et les changements climatiques.
Priorités réalisables pour mettre la santé au cœur de la lutte contre les changements climatiques
- Déterminer des modes de collaboration entre les secteurs, les administrations et les systèmes de santé publique pour mettre en œuvre des mesures visant à réduire les répercussions des changements climatiques sur la santé.
- Tirer parti de l'expertise de la santé publique pour mettre en œuvre des plans de communication visant à mobiliser des publics clés sur les mesures visant à réduire les répercussions des changements climatiques sur la santé, comme les professionnels de la santé, les collectivités, les médias, le secteur de l'éducation et les secteurs clés qui ont une incidence sur la santé.
- Élaborer des priorités de recherche interdisciplinaire sur la santé et les changements climatiques afin d'éclairer et de promouvoir des mesures fondées sur des données probantes à l'égard des enjeux prioritaires en matière de santé et de changements climatiques.
- Adapter les outils de santé publique existants qui tiennent compte de l'équité (p. ex., évaluations des incidences sur la santé et l'équité) pour évaluer les effets sur la santé et les possibles maladaptations résultant de la lutte contre les changements climatiques.
Bâtir des systèmes de santé publique et un effectif capables de faire face aux changements climatiques
Les systèmes de santé publique ont besoin de mécanismes spéciaux pour diriger de manière compétente les mesures visant à réduire les effets des changements climatiques sur la santé. Cela exige également une collaboration significative et durable entre les principaux partenaires, y compris les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et d'autres communautés à risque élevé de déplacement ou résultats négatifs sur le plan de la santé. Étant donné que le fardeau des changements climatiques retombera de façon disproportionnée sur les jeunes générations, les structures de gouvernance et de responsabilisation partagées devraient également reconnaître et prendre en compte le leadership des jeunes.
Un financement dédié, durable et suffisant est nécessaire pour soutenir adéquatement les mesures visant à réduire les répercussions des changements climatiques sur la santé, en tenant compte de l'ampleur des nouveaux risques climatiques pour la santé et le bien-être. Depuis trop longtemps, ce travail est relégué au second plan. Ces ressources doivent être mobilisées en priorité dans le cadre des efforts globaux de lutte contre les changements climatiques du gouvernement et pour appuyer les mesures autodéterminées qui orientent les solutions communautaires locales.
Pour que les professionnels de la santé publique et leurs partenaires puissent efficacement élaborer et mettre en œuvre des mesures novatrices en matière de santé climatique et en accroître la portée, ils ont besoin de l'expertise et de ressources permanentes appropriées. L'effectif actuel en santé publique est toujours abondamment sollicité en raison de l'intervention soutenue contre la COVID-19. Pour accomplir le travail nécessaire, les systèmes de santé publique doivent s'appuyer sur leur expertise fondamentale en matière de protection et de promotion de la santé, notamment sur les compétences acquises depuis longtemps en santé environnementale, afin de renforcer les connaissances et les outils qu'ils utiliseront pour cibler les liens entre la santé et les changements climatiques. Les systèmes de santé publique doivent continuer d'établir des relations significatives, de guérison et de coopération où la sécurité et le respect culturels sont prioritaires.
Être un chef de file en matière de changements climatiques, c'est aussi donner l'exemple et travailler activement à l'établissement de systèmes de santé publique résilients et neutres en carbone qui favorisent la santé et le bien-être pour tous.
Priorités réalisables pour bâtir des systèmes de santé publique et un effectif capables de faire face aux changements climatiques
- Établir de nouveaux mécanismes interdisciplinaires durables (p. ex., des centres ou des observatoires) pour attirer l'attention de la santé publique sur les changements climatiques en accordant la priorité aux mesures fondées sur les données probantes et aux structures de gouvernance et de responsabilisation partagées.
- Préconiser des niveaux appropriés de financement de l'adaptation des services de santé et des ressources humaines en santé publique, en mettant particulièrement l'accent sur le soutien des systèmes de santé publique locaux et autochtones pour répondre aux priorités d'adaptation qui tiennent compte du milieu.
- Renforcer la capacité technique et les compétences professionnelles de l'effectif de la santé publique à travailler sur les mesures visant à réduire les répercussions des changements climatiques sur la santé, notamment en mettant à jour les compétences de base en santé publique et en revoyant la formation en santé publique afin que les changements climatiques en fassent partie.
- Réduire l'empreinte carbone des systèmes de santé publique au Canada, notamment en évaluant l'incidence environnementale des activités de santé publique.
Nous sommes à un moment décisif de l'histoire. Les systèmes de santé publique du Canada doivent tirer parti de leurs forces et des leçons apprises de la pandémie de COVID-19 pour mieux nous préparer à la crise climatique et y répondre. Des travaux prometteurs sont déjà en cours partout au Canada pour contrer les conséquences des changements climatiques sur la santé. Nous devons nous appuyer sur ces travaux pour renforcer nos capacités, accroître nos connaissances et optimiser les efforts collectifs des différents systèmes de santé publique, juridictions et secteurs. Nous devons également travailler avec les collectivités pour s'assurer que nos mesures sont efficaces pour tous, peu importe le lieu.
Le temps est venu d'agir, et nous devons agir avec détermination : pour le bien de notre santé, celui de notre planète et celui des générations futures.
Annexe A : Fonctions essentielles de santé publique et mesures de santé publique de lutte aux changements climatiques
Les fonctions essentielles de la santé publique classent les principales activités des systèmes de santé publique. Elles furent élaborées pour la première fois pour le Canada en 2003 dans la foulée de la crise du SRASNote de bas de page 251Note de bas de page 252. Bien que ces fonctions soient présentées comme des catégories distinctes, elles sont interreliées et utilisées ensemble pour protéger et promouvoir la santé. Voici des exemples illustrant comment les activités de santé publique peuvent contribuer à la lutte contre les changements climatiques selon chaque fonction.
La promotion de la santé consiste à travailler en collaboration avec les collectivités et d'autres secteurs pour comprendre et améliorer la santé au moyen de saines politiques sur la santé, d'interventions communautaires, de la participation du public et de la promotion des déterminants de la santé, ou de l'intervention sur ceux-ci.
Exemples d'activités de santé publique liées aux changements climatiques :
- Sensibilisation pour aborder les déterminants de la santé qui ont une incidence sur la vulnérabilité climatique (p. ex., logement abordable)
- Recherche sur les politiques pour une action intersectorielle (p. ex., co-bénéfices pour la santé des investissements en transport en commun)
- Leadership pour des environnements bâtis sains (p. ex., reverdissement des parcs et des terrains de jeu, transport actif)
- Soutien des projets conçus et pilotés par les Premières Nations, les Inuits et les Métis pour renforcer les capacités des communautés
La surveillance de la santé consiste à recueillir des données sur la santé pour faire le suivi des maladies, de l'état de santé des populations et des déterminants de la santé, afin de promouvoir la santé, de prévenir et de réduire les répercussions des maladies, et de surveiller les iniquités en santé.
Exemples d'activités de santé publique liées aux changements climatiques :
- Surveillance des vecteurs de maladies (p. ex., surveillance des populations de moustiques ou de tiques)
- Surveillance de l'incidence des maladies (p. ex., maladie de Lyme, virus du Nil occidental)
- Surveillance syndromique (p. ex., maladies liées à la chaleur dans les services d'urgence)
- Surveillance de la salubrité de l'eau (p. ex., prolifération d'algues)
- Surveillance des maladies d'origine alimentaire (p. ex., salmonelle, campylobactérie)
- Surveillance de la santé mentale (p. ex., Cadre d'indicateurs de surveillance de la santé mentale positive)
- Surveillance de l'environnement bâti (p. ex., le Système de classification du confort et de la sécurité des voies cyclables canadiennes)
La protection de la santé consiste à protéger la population contre les maladies infectieuses, les menaces environnementales et l'insalubrité de l'eau, de l'air et des aliments.
Exemples d'activités de santé publique liées aux changements climatiques :
- Lutte contre les vecteurs (p. ex., moustiques, tiques)
- Analyse de l'eau et émission d'avis (p. ex., analyse de l'eau de puits après une inondation)
- Surveillance de la qualité de l'air et émission d'avis (p. ex., la Cote air santé)
- Salubrité et sécurité des aliments (p. ex., campagnes de sensibilisation du public)
- Programmes d'éducation du public sur les dangers climatiques
L'évaluation de la santé de la population consiste à comprendre la santé des collectivités ou de populations précises et les déterminants de la santé afin d'améliorer les services, les politiques et la recherche pour déterminer les interventions les plus efficaces.
Exemples d'activités de santé publique liées aux changements climatiques :
- Évaluations des changements climatiques et de la vulnérabilité de la santé
- Recherche interventionnelle sur la santé de la population pour évaluer les mesures d'adaptation et d'atténuation, y compris ce qui fonctionne, pour qui et dans quel contexte
- Recherche et évaluation communautaires et locales qui favorisent d'autres systèmes de connaissances (p. ex., savoirs autochtones)
La prévention des maladies et des blessures consiste à promouvoir des modes de vie sains et sécuritaires pour prévenir les maladies et les blessures et réduire le risque d'éclosion de maladies infectieuses grâce à des enquêtes et à des mesures de prévention.
Exemples d'activités de santé publique liées aux changements climatiques :
- Mesures d'adaptation et d'atténuation communautaires, y compris l'accent mis sur la gouvernance, les pratiques et les activités axées sur la terre dans les collectivités autochtones
- Recours à la science du comportement pour encourager les comportements sains qui réduisent le risque de maladies liées aux changements climatiques (p. ex., promouvoir l'utilisation d'insectifuges et de vêtements appropriés pour éviter les maladies transmises par les tiques)
- Programmes communautaires visant à promouvoir la sécurité alimentaire et à assurer l'accès à des aliments nutritifs dans un contexte de climat en changement
- Programmes de santé mentale pour aider à lutter contre l'anxiété et le stress liés au climat
La prédiction des urgences ainsi que la préparation et l'intervention en cas d'urgence consiste à préparer le pays en cas de catastrophe naturelle ou de désastre d'origine humaine afin de réduire au minimum les maladies graves et les décès, et intervenir en cas d'urgence tout en réduisant au minimum les perturbations sociétales.
Exemples d'activités de santé publique liées aux changements climatiques :
- Coordination avec les intervenants et leadership en matière de préparation et d'intervention en cas d'urgences liées à la santé
- Évaluations des risques liés aux éventuelles conséquences des catastrophes naturelles sur la santé publique (p. ex., effets des feux de forêt sur la qualité de l'air)
- Offre de conseils, de services et de soutien en santé publique aux intervenants (p. ex., tests de la qualité de l'air, systèmes d'alerte et d'intervention en cas de chaleur, lieux pour se rafraîchir)
- Sensibilisation de la collectivité et échange d'information pendant les catastrophes naturelles
- Repérage et soutien des populations qui pourraient avoir besoin d'une aide supplémentaire pendant une urgence (p. ex., les personnes âgées)
- Hébergement et autres mesures de soutien pour les populations évacuées à la suite de catastrophes naturelles (p. ex., évacuation des communautés éloignées des Premières Nations en raison d'inondations et de feux de forêt)
- Soutien communautaire en santé mentale destiné aux populations touchées par des catastrophes naturelles et aux intervenants d'urgence
Annexe B : Le point sur la COVID-19 au Canada
Préambule
Cette annexe du Rapport de 2022 de l'ACSP fournit une brève mise à jour des principaux événements liés à la pandémie de COVID-19 au Canada pour la période comprise entre août 2021 et août 2022. Elle propose un portrait et une analyse de l'évolution de la pandémie au cours de la dernière année.
Dans un avenir proche, le virus du SRAS-CoV-2 continuera de circuler et d'évoluer à l'échelle mondiale. On s'attend à ce que de nouveaux variants émergent et se propagent. La nature imprévisible du moment et de la manière dont les résurgences se produiront exige le maintien de la vigilance et d'un état de préparation. Le Canada doit planifier la gestion continue de la COVID-19 à l'automne 2022 et au-delà.
L'arrivée d'Omicron a changé la trajectoire de la pandémie
Après une quatrième vague d'infections à la COVID-19 à l'automne 2021, causée par le variant Delta, un nouveau variant préoccupant, appelé Omicron, a été détecté pour la première fois à l'étranger en novembre 2021. Toutes les vagues précédentes de la pandémie ont été marquées par des caractéristiques distinctes. Cependant, l'arrivée d'Omicron a entraîné les changements peut-être les plus notables et les plus rapides dans l'épidémiologie de la COVID-19 et dans la réponse de la santé publique.
Comparativement au variant Delta, le variant initial BA.1 d'Omicron était nettement plus transmissible et susceptible d'échapper à l'immunité acquise par la vaccination et l'infectionNote de bas de page 425. La baisse de l'immunité et l'augmentation des rassemblements à l'intérieur des habitations au cours de l'hiver, en particulier pendant les vacances, ont intensifié la propagation du variant.
Bien qu'il soit associé à une maladie moins grave que le variant Delta, Omicron a eu des répercussions importantes sur les services de santé et la vie des gens au Canada, avec une augmentation du nombre d'hospitalisations et de décès en raison de la hausse sans précédent du nombre d'infectionsNote de bas de page 426. En seulement quatre semaines, Omicron est devenu le variant dominant en circulation. En janvier 2022, le nombre de cas confirmés quotidiens a presque quintuplé par rapport au nombre le plus élevé précédemment rapporté. De même, le fardeau des hospitalisations liées à la COVID-19 était deux fois plus élevé que le sommet le plus important déjà atteintNote de bas de page 427. Bien que les enfants et les jeunes présentent un risque relativement plus faible de conséquences graves que les adultes, avec l'émergence d'Omicron, les taux d'hospitalisation pédiatrique ont dépassé les tendances historiques (voir l'encadré « Répercussions de la COVID-19 sur les enfants et les jeunes »). La troisième semaine de janvier 2022 a enregistré le plus grand nombre de décès au Canada depuis l'apparition du virus, avec 25 % de décès de plus que ce qui aurait été normalement prévu s'il n'y avait pas eu de pandémieNote de bas de page 428. Même si la surmortalité peut, dans une large mesure, être directement attribuée à la COVID-19, la pandémie a également eu des conséquences indirectes sur la mortalité (voir la figure 9).
Répercussions de la COVID-19 sur les enfants et les jeunes
Depuis janvier 2022, les enfants de moins de 5 ans affichent les taux d'hospitalisation liés à la COVID-19 les plus élevés au Canada parmi tous les groupes de moins de 60 ansNote de bas de page 429. Cela est probablement attribuable au nombre important de cas causés par le variant Omicron hautement transmissible et au fait que les groupes d'âge plus jeune n'étaient pas admissibles à recevoir le vaccin contre la COVID-19 pendant une grande partie de cette périodeNote de bas de page 430Note de bas de page 431. Outre le risque d'hospitalisation, certains enfants peuvent développer une maladie rare, mais grave, appelée syndrome inflammatoire multisystémique chez les enfants (SIM-E), aussi appelé syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (SIMP), dont on estime qu'elle pourrait toucher entre 0,5 % et 3,1 % de tous les enfants ayant reçu un diagnostic de COVID-19Note de bas de page 432. Les enfants et les jeunes peuvent également être susceptibles de développer le syndrome post-COVID-19 (décrit plus en détail ci-dessous)Note de bas de page 433Note de bas de page 434Note de bas de page 435. Cela souligne l'importance de veiller à ce que toutes les personnes admissibles, y compris les enfants, soient protégées en recevant le vaccin contre la COVID-19. Toutefois, en date du 14 août 2022, moins de la moitié des enfants âgés de 5 à 11 ans avaient reçu leur première série de vaccins contre la COVID-19Note de bas de page 436.
Après le déclin de l'importante vague initiale d'Omicron, l'assouplissement des mesures de santé publique et la propagation du sous-variant d'Omicron BA.2, encore plus transmissible, ont entraîné une nouvelle résurgence à l'échelle du pays au printemps et à l'été 2022Note de bas de page 427. En juin 2022, le Groupe de travail sur l'immunité face à la COVID-19 estimait que 56 % des Canadiens avaient été infectés par le SRAS-CoV-2, comparativement à 5 % au début de la quatrième vague en août 2021Note de bas de page 437.
À l'été 2022, le sous-variant d'Omicron BA.5, très transmissible et doté de propriétés immunoévasives, est devenu dominant au Canada, entraînant une augmentation des cas et des conséquences gravesNote de bas de page 427. En raison du niveau sans précédent de transmission virale, le nombre d'hospitalisations et de décès au cours des sept premiers mois de 2022 a dépassé celui de l'année précédente, malgré une immunité plus élevée de la populationNote de bas de page 438. Une surveillance étroite du BA.5 ainsi que d'autres variants émergents qui peuvent échapper à l'immunité existante ou causer des maladies graves continuera d'être importante.
Nouvelles méthodes de surveillance de la propagation du SRAS-CoV-2
Face à l'escalade rapide des cas provoquée par le variant Omicron, les infrastructures de santé publique et de tests en laboratoire ont été débordées. Pour atténuer la pression sur ces ressources, de nombreuses administrations ont modifié l'admissibilité aux tests PCR et encouragé l'utilisation des tests antigéniques rapides à domicileNote de bas de page 439Note de bas de page 440. Cette transition vers un recours plus ciblé des tests PCR au cours de l'hiver 2021-2022, axés sur les fournisseurs de soins de santé et les populations présentant un risque plus élevé de complications graves, a entraîné une sous-estimation importante de la prévalence réelle de la maladie dans la population. Cela signifiait également que toutes données sociodémographiques recueillies sur les cas déclarés étaient moins représentatives de la population générale. Une série d'autres indicateurs et de solutions innovantes utilisés pour surveiller la propagation communautaire ont été de plus en plus mobilisés, comme la génomique virale, la surveillance des eaux usées, ainsi que les données sur le nombre de personnes atteintes de la COVID-19 hospitalisées ou aux soins intensifsNote de bas de page 441.
Évolution des exigences, de l'orientation et des recommandations
L'arrivée du variant Omicron a modifié le cours de la pandémie et l'approche du Canada en matière de gestion de la COVID-19. Au cours de la première vague d'Omicron, certaines mesures de santé publique plus restrictives ont été réintroduites pendant de courtes périodes définies afin de protéger la capacité des soins actifsNote de bas de page 442. Alors que le Canada atteignait des niveaux élevés de couverture vaccinale contre la COVID-19 et que les taux d'hospitalisation diminuaient en février 2022, bon nombre de ces mesures ont été graduellement ajustées. Par exemple, à l'échelle fédérale, le gouvernement du Canada a assoupli progressivement les mesures frontalières internationales, a levé les exigences en matière de vaccination pour le transport intérieur et a élaboré des lignes directrices sur l'évaluation du risque personnel d'infection afin d'aider les gens à prendre des décisions éclairéesNote de bas de page 443Note de bas de page 444Note de bas de page 445. Dans le but constant de réduire au minimum les maladies graves et les décès causés par la COVID-19 tout en minimisant les perturbations sociétales, les autorités de santé publique provinciales, territoriales et locales ont adopté des directives et des recommandations générales plutôt que des restrictions de santé publique sur mesure. Comme les besoins de la population et les capacités en matière de soins de santé varient d'un bout à l'autre du pays, les administrations ont réagi différemment. Elles ont maintenu la surveillance des signaux préoccupants et ont adapté leurs conseils à l'évolution de la situation, notamment en recommandant aux gens de se protéger et de protéger les autres en évaluant les risques et en adoptant plusieurs niveaux de protectionNote de bas de page 446.
Importance des interventions pharmaceutiques : vaccins et traitements
Élargissement de la vaccination contre la COVID-19 et doses de rappel
À l'automne 2021, le Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI) a émis les premières recommandations sur l'utilisation d'une dose de rappel, qui peut aider à rétablir la protection contre la COVID-19. Bien qu'initialement recommandée pour certaines populations à haut risque, la recommandation de doses de rappel a été élargie à tous les adultes en décembre 2021, en réponse aux données probantes sur la diminution de l'immunité et à l'émergence d'OmicronNote de bas de page 447. À peu près au même moment, Santé Canada a également approuvé le premier vaccin contre la COVID-19 pour les enfants de 5 à 11 ansNote de bas de page 448.
Avec la propagation du variant Omicron, qui est davantage immunoévasif, il était de plus en plus évident que deux doses d'un vaccin contre la COVID-19 offraient moins de protection contre l'infection qu'avec les variants précédents. Par conséquent, les doses de rappel sont devenues particulièrement importantes pour augmenter les niveaux d'anticorps en déclin chez les individus et restaurer la protection contre les problèmes de santé graves. Entre avril 2022 et la fin de mai 2022, alors que l'activité du variant Omicron était très élevée au Canada, on estime que les personnes non vaccinées étaient cinq fois plus susceptibles d'être hospitalisées et sept fois plus susceptibles de mourir que les personnes ayant reçu une dose de rappel d'un vaccin contre la COVID-19Note de bas de page 449. Cela montre l'importance de maintenir à jour la vaccination contre la COVID-19 comme base de la protection à la fois individuelle et collective. En date du 14 août 2022, 86 % de la population de 5 ans et plus avaient reçu sa première série de vaccins contre la COVID-19 et 57 % de la population de 12 ans et plus avaient reçu au moins une dose supplémentaire d'un vaccin contre la COVID-19Note de bas de page 436.
En prévision d'une résurgence attendue de l'activité du virus de la COVID-19 à l'automne ou en hiver, le CCNI a publié en juin 2022 des recommandations pour une dose de rappel à l'automne pour les personnes âgées de 12 ans et plus, quel que soit le nombre de doses de rappel reçues précédemment. Cela aiderait à rétablir la protection contre les maladies graves et à réduire la pression potentielle sur le système de santéNote de bas de page 450. Plus tard au cours de l'été 2022, le CCNI a publié des lignes directrices sur les doses de rappel pour les personnes âgées de 5 à 11 ans, et Santé Canada a autorisé pour la première fois l'utilisation d'un vaccin contre la COVID-19 pour les enfants âgés de 6 mois à 5 ansNote de bas de page 433Note de bas de page 451. Les premiers vaccins bivalents contre la COVID-19, conçus à partir de la protéine de spicule de la souche originale du SRAS-CoV-2 et de la souche Omicron BA.1, devaient être approuvés par Santé Canada le 1er septembre 2022Note de bas de page 426Note de bas de page 452. Étant donné que ces formules de vaccins mises à jour offrent une protection plus ciblée contre le variant Omicron et une protection plus large contre les variants préoccupants connus, on s'attend à ce qu'elles soient d'importants outils pour réduire l'impact des futures résurgences.
Progrès en matière de produits thérapeutiques pour la prise en charge de la COVID-19
Le Canada a approuvé l'utilisation de plusieurs traitements à base d'anticorps monoclonaux qui empêchent le virus du SRAS-CoV-2 d'infecter les cellulesNote de bas de page 453. Toutefois, l'arrivée du variant Omicron a rendu bon nombre de ces traitements moins efficaces, en raison des mutations du virusNote de bas de page 454. En janvier 2022, Santé Canada a autorisé l'utilisation du Paxlovid, le premier traitement sous forme de comprimés qui peut être utilisé à la maison pour traiter la COVID-19 légère à modérée, y compris les cas causés par le variant Omicron. En empêchant la réplication du virus, le Paxlovid peut être efficace pour réduire la gravité de la COVID-19 chez les adultes qui présentent un risque élevé de devenir gravement maladesNote de bas de page 455. De plus, en avril 2022, Santé Canada a approuvé l'anticorps monoclonal Evusheld pour la prévention de la COVID-19 chez les personnes immunodéprimées ou pour lesquelles la vaccination contre la COVID-19 n'est pas recommandéeNote de bas de page 456. Le traitement ne remplace pas la vaccination et le maintien à jour de la vaccination contre la COVID-19 demeure l'un des meilleurs moyens de réduire le risque de conséquences graves pour la santé.
Conséquences générales et continues de la COVID-19
Le rapport annuel 2021 de l'ACSP présentait une sélection d'exemples illustrant les conséquences générales de la pandémie de COVID-19 en dehors de ses répercussions directes sur la santé des personnes au Canada. La figure 9 fait le point sur certaines des conséquences générales de la pandémie qui peuvent avoir une incidence sur la santé. Cet ensemble de données n'est pas exhaustif. Il faudra plus de temps pour comprendre les nombreuses conséquences à long terme de la COVID-19 sur la santé physique et mentale et le bien-être des personnes qui vivent au Canada.
Les données montrant que la pandémie a aggravé de nombreux facteurs structurels et systémiques contribuant aux iniquités de santé continuent de s'accumuler. Certains groupes, comme les peuples autochtones, les communautés racialisées, les femmes, les personnes vivant avec un faible revenu et les personnes en situation d'itinérance ont été touchés de façon disproportionnée par les répercussions directes et indirectes de la pandémie, tout comme les personnes en situation de handicap, les personnes qui consomment des substances, les personnes incarcérées et les communautés 2ELGBTQQ+Note de bas de page 468Note de bas de page 469Note de bas de page 470Note de bas de page 471. Par exemple, les taux de mortalité liés à la COVID-19 étaient considérablement plus élevés pour les personnes vivant dans les grandes villes, ainsi que pour celles qui vivent dans des appartements, des quartiers à faible revenu et des quartiers où la concentration de la composition ethnoculturelle était la plus élevéeNote de bas de page 469. Comme souligné dans les rapports précédents de l'ACSP, la lutte contre les iniquités structurelles doit continuellement être au cœur de nos efforts pour aller de l'avant.
Les répercussions du syndrome post-COVID-19 sur les personnes et les collectivités seront probablement importantes
Le syndrome post-COVID-19, aussi appelé COVID de longue durée, désigne les symptômes physiques ou psychologiques nouveaux ou continus qui se manifestent 12 semaines ou plus après une infection initiale au SRAS-CoV-2Note de bas de page 472Note de bas de page 473Note de bas de page 474. Les personnes qui souffrent du syndrome post-COVID-19 ont signalé un large éventail de symptômes différents, notamment la fatigue, les problèmes de mémoire, les troubles du sommeil, l'essoufflement, l'anxiété et la dépressionNote de bas de page 472. Ces symptômes peuvent persister longtemps après une infection initiale par le virus de la COVID-19. Par exemple, une étude menée au Royaume-Uni a estimé que 43 % des personnes atteintes du syndrome post-COVID-19 ont déclaré avoir contracté la COVID-19 pour la première fois au moins un an auparavantNote de bas de page 475.
Selon un examen des données probantes mondiales, on estime qu'entre 30 % et 40 % des personnes qui n'ont pas été hospitalisées lors de leur infection initiale par le virus la COVID-19 signalaient toujours des symptômes après 12 semainesNote de bas de page 472. Bien que ces études soient antérieures à l'émergence d'Omicron, les données préliminaires indiquent que le variant Omicron pourrait être associé à un risque plus faible de syndrome post-COVID-19 que le variant DeltaNote de bas de page 476Note de bas de page 477. De nouvelles recherches portent également à croire que la probabilité de souffrir du syndrome post-COVID-19 était plus élevée chez les femmes et les personnes qui avaient une infection initiale plus graveNote de bas de page 478. De plus, chaque réinfection supplémentaire par le virus de la COVID-19 peut augmenter le risque d'en être atteintNote de bas de page 479. Bien que toute personne puisse développer un syndrome post-COVID-19, le fait d'avoir reçu deux doses ou plus de vaccins contre la COVID-19 avant l'infection peut aider à réduire le risqueNote de bas de page 472Note de bas de page 480.
Les données probantes disponibles indiquent que les répercussions médicales, sociales et économiques du syndrome post-COVID-19 sont importantes et exercent une pression supplémentaire sur les systèmes de soins de santé déjà surchargés. Les personnes touchées peuvent avoir de la difficulté à accéder aux soins et signalent couramment des répercussions négatives sur leur santé mentale et leur fonctionnement quotidien, y compris les études et l'emploiNote de bas de page 472Note de bas de page 481. Cela pourrait entraîner un fardeau économique au niveau de la population, car le syndrome post-COVID-19 a une incidence sur la participation globale au marché du travailNote de bas de page 482. Compte tenu du nombre de cas de COVID-19 chez les travailleurs de la santé, cela a également des répercussions sur la capacité du personnel de la santé à maintenir les niveaux de soinsNote de bas de page 483.
En date d'août 2022, il y avait peu de données permettant de comprendre pleinement la prévalence et la gravité du syndrome post-COVID-19 au Canada. Cependant, des études sont en cours pour élaborer des lignes directrices fondées sur des données probantes pour la prévention, l'identification et la gestion du syndrome post-COVID-19 qui sont adaptées au contexte canadien. Par exemple, en avril 2022, Statistique Canada, l'Agence de la santé publique du Canada et le Groupe de travail sur l'immunité face à la COVID-19 ont lancé un deuxième cycle de l'Enquête canadienne sur la santé et les anticorps contre la COVID-19 pour estimer le pourcentage d'adultes atteints du syndrome post-COVID-19 au Canada et recueillir des renseignements sur les symptômes et les facteurs de risqueNote de bas de page 484. Bien qu'il n'y ait pas d'approche universellement reconnue pour le diagnostic et le traitement du syndrome post-COVID-19, de nombreux centres de soins spécialisés ont été établis partout au CanadaNote de bas de page 485.
L'intervention du Canada en matière de santé publique a contribué à réduire au minimum les méfaits de la COVID-19
L'intervention du Canada en matière de santé publique et l'action collective dans tout le pays ont contribué à minimiser les méfaits de la COVID-19 depuis le début de la pandémie. Au moment de la rédaction de ce rapport, en août 2022, le Canada affichait l'un des taux de vaccination à deux doses contre la COVID-19 les plus élevés au monde. Il faudra toutefois en faire davantage pour accroître la couverture vaccinale pour les doses de rappelsNote de bas de page 486. On estime que la vaccination, combinée à d'autres mesures de santé publique, a sauvé des centaines de milliers de vies au Canada seulementNote de bas de page 449. Sans la combinaison de la vaccination et d'autres mesures de santé publique, on estime que le Canada aurait pu connaître 13 fois plus d'hospitalisations et 20 fois plus de décès en date d'avril 2022Note de bas de page 487.
Bien que l'espérance de vie au Canada ait chuté de sept mois en 2020 en raison de la pandémie, il s'agit d'une baisse moins importante que dans d'autres paysNote de bas de page 488Note de bas de page 489. Par exemple, l'espérance de vie a diminué de 1,8 an aux États-Unis en 2020Note de bas de page 490. De plus, le taux de mortalité lié à la COVID-19 au Canada au cours des deux premières années de la pandémie était le deuxième plus bas parmi les pays du G10, ce qui illustre l'efficacité globale de notre réponse sociétaleNote de bas de page 491.
La préparation et la prévention peuvent nous aider à mieux faire face à la COVID-19 à l'avenir
L'émergence du variant Omicron a démontré que nos systèmes de santé doivent être bien équipés pour être en mesure de s'adapter et de faire face au virus à l'avenir. La réalité est que la COVID-19 sera présente dans un avenir prévisible et les progrès ne seront pas linéaires. Avec la diminution de l'immunité, l'évolution des variants hautement immunoévasifs et l'assouplissement des mesures de santé publique, il peut y avoir des lacunes dans notre protection collective. Notre défi est de maintenir les progrès incroyables que nous avons réalisés, sans perdre de vue la menace permanente que représente la COVID-19 pour notre santé et notre bien-être. Nous avons une responsabilité partagée, notamment entre les individus et entre les gouvernements et secteurs, pour maintenir un état de préparation, remédier aux iniquités de longue date et adopter une approche à long terme de la gestion de la COVID-19.
Sur le plan individuel, le meilleur moyen d'être prêt est de maintenir à jour la vaccination contre la COVID-19 et d'adopter des pratiques de protection individuelle, comme porter un masque facial bien ajusté et bien conçu, éviter les foules et rester à la maison en cas de symptômes ou d'un résultat de test positif au virus du SRAS-CoV-2. Sur le plan sociétal, la gestion continue comprend l'adoption de mesures favorisant la ventilation optimale des lieux publics et institutionnels, l'investissement dans les technologies de vaccin qui peuvent élargir la protection, et le renforcement des outils de surveillance pour suivre la propagation et l'évolution du virus. La lutte contre la mésinformation et la désinformation tout en renforçant la confiance dans les systèmes de santé publique sont également des éléments fondamentaux de la réponse continue à la COVID-19.
En plus de se préparer à la résurgence actuelle et future de la COVID-19, les systèmes de santé continuent de faire face à des problèmes de capacité. Par exemple, des organisations représentant les infirmières et les médecins ont exprimé l'urgence de remédier aux pénuries de personnel et à l'épuisement professionnel exacerbés par la pandémieNote de bas de page 492Note de bas de page 493.
Les systèmes de santé publique devront également se relever pour faire face à d'autres défis, tels que les besoins d'une population vieillissante, le retour et l'émergence d'autres maladies infectieuses (par exemple, la grippe et la variole simienne), la crise actuelle des surdoses d'opioïdes et les effets des changements climatiques sur la santé.
Un système de santé publique robuste et résilient peut protéger les systèmes de santé en réduisant la demande de traitements médicaux et en aidant les gens à rester en bonne santé. Nous avons besoin de systèmes de santé et de santé publique solides pour nous préparer aux menaces actuelles et futures pour la santé et y répondre adéquatementNote de bas de page 446.
Annexe C : Méthodologie
Processus
Le rapport annuel de 2022 de l'administratrice en chef de la santé publique du Canada (ACSP) a été rédigé à la suite d'une revue des meilleures données probantes disponibles, ce qui comprend des données provenant de la recherche universitaire, l'avis d'experts-conseils ainsi que l'expertise de spécialistes des changements climatiques, de la santé publique et des modes de savoir traditionnels. Dans la mesure du possible, les études et les données représentatives canadiennes ont été priorisées. Priorité a également été accordée à l'examen de données déjà publiées, dont celles provenant des rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et du rapport La santé des Canadiens et des Canadiennes dans un climat en changement.
Les données probantes ont été recueillies par les moyens suivants :
Données épidémiologiques
- Information publiée ou transmise par l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC), Statistique Canada et d'autres sources gouvernementales fédérales, provinciales, territoriales ou municipales;
- Initiatives de revue rapide à l'échelle du Canada, comme le réseau de données sur la COVID-19 pour soutenir la prise de décisions (COVID-END), CanCOVID et la plateforme de données du Centre de collaboration nationale des méthodes et outils;
- Revues de la littérature grise et de politiques de sources fiables, comme les publications d'organismes de santé publique (p. ex., Organisation mondiale de la Santé, Institut canadien d'information sur la santé) et les publications gouvernementales (p. ex., Santé publique Ontario)
- Points de presse des autorités sanitaires et déclarations aux médias, lorsque nécessaire.
Revues de la littérature scientifique
- Bibliographie annotée commandée par le Bureau de l'ACSP (BACSP) et dirigée par la Dre Sherilee Harper du Climate Change & Global Health Research Group (groupe de recherche sur les changements climatiques et la santé mondiale), de l'Université de l'Alberta. Le processus d'examen de cette bibliographie annotée comportait une revue de la littérature publiée entre 2013 et 2021 en anglais ou en français. La documentation a été repérée par les moyens suivants :
- Recherche dans cinq bases de données électroniques : MEDLINE via Ovid, CINAHL, Web of Science, Scopus et Embase via Ovid. La chaîne de recherche comprenait des termes liés à trois composantes principales : santé humaine et de la population, changements climatiques et emplacement;
- Recherche manuelle dans les journaux suivants : Environmental Health Perspectives, The Lancet, Climatic Change, Revue canadienne de santé publique et l'American Journal of Public Health;
- Recherche dans la base de données associée à la Global Adaptation Mapping Initiative (GAMI), l'accent étant mis sur la documentation potentiellement pertinente du Canada, des États-Unis, du Royaume-Uni et de l'Australie;
- Examen des listes de références des sections pertinentes des principales publications sur le climat et la santé, dont le rapport du Groupe de travail II du GIEC, (chapitre 7 La santé, le bien-être et l'évolution de la structure des collectivités, et chapitre 14 Amérique du Nord), et le rapport de 2022 de l'Inter-American Network of Academies of Science (IANAS) intitulé Taking Action Against Climate Change Will Benefit Health and Advance Health Equity in the Americas;
- Recherche de documents du gouvernement du Canada à l'aide d'un moteur de recherche programmable de Google afin de repérer les publications gouvernementales pertinentes;
- Recherche dans la littérature grise par une recherche systématique Google au moyen d'une chaîne de recherche comportant la littérature évaluée par les pairs et des champs supplémentaires pour viser une organisation particulière; les organismes nommés dans la recherche étaient l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), Santé Canada et l'ASPC.
- Recherches documentaires fréquentes et continues par le BACSP effectuées par sous-sujet à l'aide de bases de données en ligne comme Medline et Scopus, ainsi qu'un repérage des études nouvelles et existantes tenues par divers éditeurs universitaires, comme le British Medical Journal, The Lancet et Elsevier.
- Examen de la littérature grise par le BACSP, y compris un examen des principales initiatives internationales visant à explorer le rôle de la santé publique dans le contexte des changements climatiques, dont les initiatives de l'OMS visant à bâtir des systèmes de santé résilients aux changements climatiques et la publication de 2022 de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS) sur les nouvelles fonctions essentielles de la santé publique en matière d'environnementNote de bas de page 243Note de bas de page 494.
Rapports sur la santé publique et autre littérature grise
- Recherches documentaires fréquentes et continues par le BACSP pour trouver de la littérature grise et des rapports de santé publique provenant de sources fiables, comme des organismes de santé publique (p. ex., Organisation mondiale de la Santé, OPS), des chercheurs dans le domaine du climat (p. ex., GIEC) et des publications gouvernementales (p. ex., gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux).
- Collaboration avec les Centres de collaboration nationale en santé publique pertinents, notamment le Centre de collaboration nationale de la santé autochtone, le Centre de collaboration nationale des maladies infectieuses, le Centre de collaboration nationale sur les politiques publiques et la santé et le Centre de collaboration nationale en santé environnementale, ce qui a permis d'obtenir auprès de spécialistes des renseignements sur les principaux sujets abordés dans le rapport.
- Détermination d'exemples de santé publique appliquée en collaboration avec les conseillers experts de l'ACSP.
Groupes de discussion et entrevues avec des informateurs clés
- Processus ciblé de mobilisation et de recherche qualitative commandé par le BACSP et dirigé par la Dre Heather Castleden, de l'Université de Victoria, qui a donné lieu à un rapport Ce que nous avons entendu.
- La recherche et le rapport portent sur la contribution actuelle des systèmes de santé publique à l'adaptation aux changements climatiques et à l'atténuation de leurs effets. On y examine les rôles que les systèmes de santé publique pourraient jouer en la matière et la façon dont ces systèmes pourraient être renforcés à cette fin.
- Le processus de mobilisation s'est déroulé comme suit :
- Deux groupes de discussion formés de médecins hygiénistes recrutés par l'entremise du Réseau canadien pour la santé urbaine;
- Entrevues avec 21 experts clés de partout au pays; les participants provenaient du secteur du climat et de l'environnement et de celui de la santé publique et appartenaient à des organismes non gouvernementaux, des établissements de recherche et des organismes de santé publique; les participants ont également été sélectionnés selon des critères; intersectionnels (p. ex., collectivités autochtones ou fondées sur la distinction, racialisées, jeunes, 2ELGBTQI+, personnes en situation de handicap, collectivités de langue minoritaire, migrants) et la représentation géographique (p. ex., régions rurales et éloignées du Nord, autres régions rurales et éloignées, régions urbaines, régions côtières).
Limites
Portée et recherche documentaire
Le rapport annuel de 2022 de l'ACSP explore les répercussions des changements climatiques sur la santé et le rôle potentiel des systèmes de santé publique dans l'action climatique. Il s'agit dans les deux cas de sujets vastes, d'une portée et d'une profondeur considérables qui rejoignent une variété de disciplines universitaires et professionnelles. Étant donné que ce rapport a pour but de fournir une vue d'ensemble des sujets et des concepts présentés, le niveau de détail fourni dans chaque partie est nécessairement limité. Par conséquent, le rapport ne constitue pas un examen exhaustif des données probantes, mais plutôt un résumé de certaines publications clés. Seuls les documents publiés en anglais et en français ont fait l'objet d'une revue. Aucune évaluation détaillée de la qualité de l'étude et du risque de biais n'a été effectuée dans le cadre de cet examen.
Langage
Dans la mesure du possible, nous avons tenté d'utiliser un langage normalisé, inclusif et adapté sur le plan culturel pour décrire les réalités des différentes collectivités et leurs expériences en matière de santé selon les données probantes sous-jacentes. Cependant, nous nous sommes fiés à la terminologie incluse dans les documents sources (p. ex., minorités visibles) lorsque nous n'avons pas été en mesure de trouver une terminologie plus appropriée.
Remerciements
De nombreuses personnes et organisations ont contribué à l'élaboration du présent rapport.
Je tiens à exprimer ma gratitude à toutes les personnes qui ont fourni des conseils précieux, une orientation stratégique et une expertise dans la préparation du rapport annuel :
- Dr Marcos Espinal, directeur adjoint, Organisation panaméricaine de la santé (OPS)
- Dre Sherilee Harper, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les changements climatiques et la santé et professeure agrégée, Université de l'Alberta
- Dre Deborah McGregor, professeure agrégée et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en justice environnementale autochtone à la Osgoode Hall Law School
- Dr Cory Neudorf, professeur, Département de santé communautaire et d'épidémiologie, Collège de médecine, Université de la Saskatchewan, et médecin hygiéniste en chef intérimaire, Régie de la santé de la Saskatchewan
- Kim Perrotta, MHSc, directrice générale, Canadian Health Association for Sustainability and Equity (CHASE)
Je remercie aussi bien sincèrement les experts de partout au Canada, notamment les chercheurs, les praticiens de la santé publique, les dirigeants d'organisations non gouvernementales de santé publique, le personnel du système de santé publique des gouvernements municipaux, provinciaux et fédéraux, les dirigeants communautaires et les professionnels de la santé qui ont participé aux entrevues et aux groupes de discussion. Vos observations ont contribué à éclairer mon rapport sur le rôle que les systèmes de santé publique peuvent jouer pour agir contre les répercussions des changements climatiques sur la santé.
Je remercie les Centres de collaboration nationale (CCN) en santé publique de leur soutien. J'aimerais également remercier le personnel du CCN pour la santé autochtone, du CCN sur les politiques publiques et la santé, du CCN en santé environnementale et du CCN des maladies infectieuses pour leurs commentaires et leur contribution au rapport. De plus, je tiens à remercier les membres de l'OPS qui ont offert de judicieuses observations.
Merci aux nombreux collègues de l'Agence de la santé publique du Canada, de Santé Canada, de Services aux Autochtones Canada, de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, ainsi que d'Environnement et Changement climatique Canada, pour les idées et les conseils fournis tout au long de l'élaboration du rapport et pour leur examen critique des ébauches du rapport.
Enfin, je suis reconnaissante aux membres de mon bureau qui ont travaillé ensemble à l'élaboration de ce rapport. Des remerciements particuliers à l'équipe de production des rapports pour son engagement et son dévouement lors de l'élaboration du présent rapport, de la conception à la publication : Tammy Bell, Fabienne Boursiquot, Dre Marie Chia, Dre Charlene Cook, Dre Sarah Drohan, Elyse Fortier, Rhonda Fraser, Dre Kimberly Gray, Dr David Grote, Holly Lake, Jessica Lepage, Danielle Noble, Kelly Kavanagh Salmond, Kelsey Seal et Inès Zombré.
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