Page 4 - Cinquième rapport sur la biosurveillance humaine des substances chimiques de l'environnement au Canada

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13 Sommaires et résultats liés aux pesticides

13.1 Pesticides organophosphorés

Les composés organophosphorés forment un groupe de substances chimiques étroitement apparentées qui sont largement utilisées au Canada comme pesticides en agriculture ainsi qu'à des fins domestiques et vétérinaires (Santé Canada, 2013a; Santé Canada, 2018a; Santé Canada, 2019). Cette catégorie de pesticides a gagné en popularité suite à l'interdiction de l'utilisation des pesticides organochlorés dans les années 1970. Les pesticides organophosphorés sont moins persistants dans l'environnement et contribuent moins au développement de la résistance aux ravageurs que les pesticides organochlorés (Wessels et coll., 2003). 18 pesticides organophosphorés étaient homologués au Canada au cours de la période d'échantillonnage du cycle 2 (2009 à 2011) de l'Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS) – le dernier cycle à présenter des données sur les métabolites dialkylphosphates – alors qu'il n'y en avait plus que 14 (voir le tableau 13.1.1 ci-dessous) au cours de celle du cycle 5 (2016 à 2017) (Santé Canada, 2019).

Même si les pesticides organophosphorés sont liés à des composés d'origine naturelle produits par les algues et les bactéries, leur présence dans l'environnement est presque entièrement attribuable à leur utilisation anthropique comme pesticides (Neumann et Peter, 1987). Malgré leur dégradation rapide dans l'environnement, de faibles quantités peuvent être détectées dans les aliments et l'eau potable (Hao et coll., 2010; Santé Canada, 2003; Santé Canada, 2004).

Les principales utilisations des composés organophosphorés sont les suivantes : comme insecticides sur les cultures vivrières et fourragères, le bétail et les plantes d'ornement; dans le traitement des semences et la lutte contre les insectes dans les zones de stockage des aliments, les serres et les structures forestières; et dans la lutte contre les parasites chez les animaux de compagnie et les moustiques (Santé Canada, 2013a; Santé Canada, 2019). Bien que la majorité des composés organophosphorés soient utilisés comme insecticides, le bensulide lui est employé comme herbicide sélectif pour combattre les mauvaises herbes dans le gazon et les concombres (Santé Canada, 2013a). Le dichlorvos et le trichlorfon sont employés à des fins vétérinaires pour combattre les parasites du bétail (Santé Canada, 2018a).

La population générale est principalement exposée aux composés organophosphorés par l'ingestion d'aliments traités aux pesticides organophosphorés et l'ingestion d'eau potable contaminée par le lessivage des terres cultivées (ATSDR, 1997a; ATSDR, 1997b; ATSDR, 2003). Les autres voies d'exposition incluent le contact cutané et l'inhalation survenant au cours de l'utilisation de produits contenant des composés organophosphorés ou d'une activité se déroulant dans des zones préalablement traitées par ces composés.

Les composés organophosphorés sont absorbés de façon efficace par inhalation ou ingestion, alors que leur absorption par contact cutané varie selon la substance (EPA, 2013). Après leur absorption dans l'organisme, les pesticides organophosphorés sont métabolisés rapidement, principalement dans le foie, puis excrétés dans l'urine (Barr et Needham, 2002). L'hydrolyse du composé d'origine produit divers métabolites dialkylphosphates. Un métabolite peut être associé à plus d'un pesticide organophosphoré et de nombreux composés organophosphorés peuvent former plus d'un de ces métabolites (voir le tableau 13.1.1). Dans l'environnement, ces métabolites peuvent également provenir de la dégradation du composé d'origine. Les métabolites dialkylphosphates ne sont pas considérés comme des substances toxiques, mais plutôt comme biomarqueurs d'exposition aux pesticides parents ou à leurs métabolites dans l'environnement (CDC, 2009; EPA, 2013). Outre les métabolites dialkylphosphates, les composés organophosphorés d'origine et d'autres produits de dégradation peuvent être mesurés dans le sang et dans l'urine, leur présence indiquant généralement qu'une exposition est survenue dans les jours précédant l'analyse (CDC, 2005; EPA, 2013). Le 3,5,6-trichloro-2-pyridinol (TCPy) issu du métabolisme du chlorpyrifos ou du chlorpyrifos-méthyl et l'acide dicarboxylique de malathion (DCA) issu du métabolisme du malathion sont d'autres exemples de métabolites des composés organophosphorés (bien que le métabolisme des composés organophosphorés d'origine entraîne également la formation de métabolites dialkylphosphates). Certains pesticides organophosphorés, comme l'acéphate et le méthamidophos, ne se dégradent pas en métabolites dialkylphosphates (Barr et Needham, 2002; Wessels et coll., 2003).

Le tableau 13.1.1 ci-dessous présente les métabolites dialkylphosphates mesurés dans l'urine des participants du cycle 5 de l'ECMS ainsi que les pesticides organophosphorés d'origine correspondants. Il existe six métabolites dialkylphosphates : le diméthylphosphate (DMP), le diméthylthiophosphate (DMTP), le diméthyldithiophosphate (DMDTP), le diéthylphosphate (DEP), le diéthylthiophosphate (DETP) et le diéthyldithiophosphate (DEDTP). Ce tableau présente également deux autres métabolites des composés organophosphorés, soit le TCPy et le DCA, qui ont été mesurés dans l'urine des participants du cycle 3 de l'ECMS ainsi que les composés d'origine correspondants.

Les composés organophosphorés sont des pesticides inhibiteurs de la cholinestérase qui stimulent de façon excessive le système nerveux des insectes et des mammifères en bloquant la transmission de l'influx nerveux (EPA, 2013). Les symptômes d'une surexposition aiguë peuvent inclure des céphalées, des étourdissements, de la fatigue, une irritation des yeux ou du nez, des nausées, des vomissements, de la salivation, de la sudation et des variations de la fréquence cardiaque. Une très forte exposition peut notamment provoquer une paralysie, des convulsions, des évanouissements et même la mort (ATSDR, 1997a; ATSDR, 1997b; ATSDR, 2003; EPA, 2013). Toutefois, une exposition aux pesticides organophosphorés par ingestion de nourriture est généralement faible. Une exposition chronique à de faibles doses de composés organophosphorés pourrait néanmoins présenter des risques toxicologiques (Ray et Richards, 2001). Une exposition prénatale aux composés organophosphorés a été associée à une réduction du temps de gestation et du poids à la naissance, ainsi qu'à des troubles du développement neurologique chez les jeunes enfants (Bouchard et coll., 2011; EPA, 2016; Eskenazi et coll., 2007; González-Alzaga et coll., 2014; Muñoz-Quezada et coll., 2013; Rauch et coll., 2012). Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé plusieurs pesticides organophosphorés homologués au Canada : le malathion et le diazinon dans le groupe 2A, à savoir celui des agents probablement cancérogènes pour les humains; le tétrachlorvinphos et le dichlorvos dans le groupe 2B, à savoir celui des agents peut-être cancérogènes pour les humains; et le trichlorfon dans le groupe 3, à savoir celui des agents inclassables quant à leur cancérogénicité pour les humains (CIRC, 1983; CIRC, 1991; CIRC, 2017).

Au Canada, la vente et l'utilisation des pesticides organophosphorés sont régies par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires (Canada, 2002). L'ARLA évalue la toxicité d'un pesticide et son risque d'exposition avant de lui accorder une homologation selon l'usage particulier qui en est fait. Dans le cadre du processus d'homologation, l'ARLA établit les limites maximales de résidus pour pesticides dans les aliments, notamment celles pour les pesticides organophosphorés homologués (Santé Canada, 2012a). L'ARLA réévalue les pesticides homologués de façon cyclique. Une réévaluation du malathion a conclu que la plupart de ses utilisations, notamment les utilisations de produits commerciaux en contexte agricole, non agricole et résidentiel, ne présentent aucun risque inacceptable pour la santé humaine; par contre, la plupart des utilisations de diazinon ont été graduellement éliminées, à l'exception de quelques applications, en raison de risques préoccupants pour la santé et l'environnement (Santé Canada, 2012b; Santé Canada, 2013b). Santé Canada a récemment proposé de maintenir l'homologation, à des fins de vente et d'utilisation, des produits contenant du dichlorvos, à condition que des mesures d'atténuation des risques soient mises en place (Santé Canada, 2017). Plus récemment, l'ARLA a adopté un plan de travail afin d'établir l'ordre de priorité des réévaluations de pesticides, y compris les composés organophosphorés suivants : l'acéphate, le bensulide, le chlorpyrifos, le coumaphos, le dichlorvos, le naled, le phorate, le phosmet, le propétamphos et le tétrachlorvinphos (Santé Canada, 2018b).

Santé Canada a élaboré une recommandation pour la qualité de l'eau potable au Canada qui fixe la concentration maximale acceptable de chlorpyrifos, de diazinon, de diméthoate, de malathion, et de phorate dans l'eau potable (Santé Canada, 1989a; Santé Canada, 1989b; Santé Canada, 1989c; Santé Canada, 1990; Santé Canada, 1991). Plusieurs pesticides organophosphorés font également partie des substances analysées dans le cadre de l'Étude canadienne sur l'alimentation totale actuellement menée par Santé Canada (Santé Canada, 2016). L'étude vise à estimer les concentrations des substances chimiques auxquelles la population canadienne est exposée par l'intermédiaire de l'alimentation, selon la tranche d'âge et le sexe.

En 2003, une étude de biosurveillance a mesuré la concentration de six métabolites dialkylphosphates dans l'urine du matin de 89 enfants québécois âgés de 3 à 7 ans. La moyenne géométrique et la valeur correspondant au 95e centile des concentrations mesurées étaient respectivement de 20 μg/g de créatinine et de 97 μg/g de créatinine pour le DMP, de 18,8 μg/g de créatinine et de 210,9 μg/g de créatinine pour le DMTP, de 2,8 μg/g de créatinine et de 45,9 μg/g de créatinine pour le DMDTP, de 4,8 μg/g de créatinine et de 29 μg/g de créatinine pour le DEP, de 0,7 μg/g de créatinine et de 8 μg/g de créatinine pour le DETP, et de 0,4 μg/g de créatinine et de 0,4 μg/g de créatinine pour le DEDTP (Valcke et coll., 2006).

La concentration de six métabolites dialkylphosphates dans l'urine a été mesurée pour les participants âgés de 6 à 79 ans lors du cycle 1 (2007 à 2009) et pour ceux âgés de 3 à 79 ans lors du cycle 2 (2009 à 2011) et du cycle 5 (2016 à 2017) de l'ECMS. La concentration de 3,5,6-trichloro-2-pyridinol et d'acide dicarboxylique de malathion dans l'urine a été mesurée pour les participants âgés de 3 à 79 ans lors du cycle 3 (2012 à 2013) et du cycle 4 (2014 à 2015) de l'ECMS. En plus des données relatives aux métabolites des composés organophosphorés, les données relatives à deux autres pesticides organophosphorés, soit l'acéphate et le méthamidophos, mesurés dans l'urine des participants âgés de 3 à 79 ans lors du cycle 3 (2012 à 2013) de l'ECMS, sont disponibles et présentées ci-dessous. Les données de ces cycles sont exprimées à la fois en µg/L et en µg/g de créatinine (voir les tableaux 13.1.2 à 13.1.21). La présence d'une quantité mesurable de pesticides organophosphorés ou de leurs métabolites dans l'urine est un indicateur d'une exposition à ces substances, mais elle n'entraîne pas nécessairement d'effets nocifs.

Références

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13.2 Pyréthroïdes

Les pyréthrines sont des composés présents à l'état naturel dans certaines fleurs de chrysanthème (ATSDR, 2003). Elles sont utilisées pour leurs propriétés insecticides depuis le début des années 1800 en Asie dans la lutte contre les tiques et d'autres insectes, comme les puces et les moustiques (ATSDR, 2003). Les pyréthroïdes sont des pyréthrines de synthèse dont la structure a été modifiée pour en accroître leur efficacité en tant que pesticide en augmentant leur stabilité dans l'environnement et leur toxicité (ATSDR, 2003; EPA, 2017). De nombreux pyréthroïdes sont homologués comme pesticides au Canada. Le tableau 13.2.1 présente les pesticides qui sont les composés d'origine des métabolites mesurés lors du cycle 5 de l'Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS) (Santé Canada, 2019). D'autres pyréthroïdes, comme la tétraméthrine et la bifenthrine, sont homologués au Canada, mais ne font pas partie du tableau, puisqu'ils ne produisent aucun des métabolites analysés dans ce cycle.

Les pyréthroïdes s'introduisent dans l'environnement principalement par le biais de leur usage comme pesticides; cependant, comme ils se décomposent rapidement, seules des quantités traces sont généralement présentes dans l'air, l'eau, le sol et les aliments (ATSDR, 2003). Dans l'environnement, les pyréthroïdes se dégradent en métabolites carboxyliques et phénoxybenzoïques mesurés dans la poussière prélevée dans les habitations et les garderies (Starr et coll., 2008). Comme les pyréthroïdes se lient solidement aux particules de sol, ils ne sont pas acheminés par lessivage dans les eaux souterraines, mais demeurent plutôt dans le sol (ATSDR, 2003).

Au Canada, les utilisations des pyréthroïdes sont les suivantes : comme insecticides sur le gazon et les cultures, et dans les vergers, les pépinières et les serres; comme insecticides domestiques d'usage général pour l'intérieur et l'extérieur dans la lutte contre les insectes rampants et aériens; dans la lutte contre les moustiques adultes autour des édifices; dans les étiquettes d'oreille pour le bétail; dans la lutte contre les acariens dans les colonies d'abeilles; et dans la lutte contre les puces et les tiques chez les animaux de compagnie (Santé Canada, 2004; Santé Canada, 2019). Dans les régions où le paludisme est endémique, les moustiquaires et les vêtements sont imprégnés de pyréthroïdes pour prévenir cette maladie (Santé Canada, 2004). L'utilisation des pyréthrines et des pyréthroïdes a augmenté au cours des dix dernières années avec l'utilisation décroissante des pesticides organophosphorés qui sont beaucoup plus toxiques pour les oiseaux et les mammifères (EPA, 2017).

La perméthrine est le pyréthroïde le plus couramment utilisé au Canada et elle est présente dans plus de 350 pesticides homologués (CCME, 2006; Santé Canada, 2019). Elle est utilisée pour diverses applications insecticides à usage domestique ainsi que dans les domaines de l'agriculture, de l'élevage et de la foresterie. En plus de son usage comme pesticide, la perméthrine entre également dans la fabrication des médicaments destinés au traitement de la gale (Santé Canada, 2013). La cyfluthrine et la bêta-cyfluthrine sont employées comme insecticides agricoles et de contact pour combattre les insectes rampants et aériens (Santé Canada, 2019). La cyperméthrine est utilisée dans les domaines de l'agriculture et de la foresterie, sur le bétail et sur les sols non cultivés dans les zones industrielles (Santé Canada, 2018c). La lambda-cyhalothrine est utilisée en agriculture, et sur le gazon, le bétail et les structures (Santé Canada, 2017a). La deltaméthrine a plusieurs applications agricoles, en plus d'être employée sur le gazon et dans les serres; elle est également employée pour traiter les vêtements et les zones de repos dans les pays touchés par le paludisme (Santé Canada, 2004; Santé Canada, 2009). La d-phénothrine est surtout utilisée en milieu résidentiel, tandis que le tau-fluvalinate est employé dans la lutte contre les acariens dans les colonies d'abeilles (Santé Canada, 2009).

La population générale est principalement exposée aux pyréthroïdes par l'utilisation de produits en contenant, comme les insecticides ménagers et les vaporisateurs pour animaux de compagnie, et par l'ingestion de résidus de pyréthroïdes présents dans les aliments (EPA, 2009a).

Les pyréthroïdes sont rapidement métabolisés, puis éliminés de l'organisme par hydrolyse, oxydation et conjugaison. Après une exposition par voie orale, par inhalation ou par voie cutanée, les pyréthroïdes sont métabolisés en acide carboxylique et en acide phénoxybenzoïque, puis excrétés dans l'urine. Les concentrations de pyréthroïdes et de leurs métabolites peuvent être mesurées dans le sang et dans l'urine, et leur présence reflète une exposition récente au composé d'origine ou au métabolite (en tant que produit de dégradation) dans l'environnement (ATSDR, 2003; CDC, 2009; Kuhn et coll., 1999; Starr et coll., 2008). Les métabolites urinaires des pyréthroïdes peuvent être spécifiques d'un seul pyréthroïde ou communs à plusieurs. Le tableau 13.2.1 ci-dessous présente les métabolites des pyréthroïdes mesurés dans le cadre de l'ECMS ainsi que les composés d'origine correspondants homologués au Canada.

Les pyréthroïdes, comme les pyréthrines d'origine naturelle, agissent principalement sur le système nerveux des insectes et des mammifères (Davies et coll., 2007), et plus particulièrement sur les axones au niveau des systèmes nerveux central et périphérique en prolongeant le temps d'ouverture des canaux sodiques de faible conductance, ce qui entraîne une dépolarisation des membranes et une excitabilité excessive. Ces effets provoquent une paralysie, puis la mort des insectes nuisibles ciblés. Les pyréthroïdes sont 2 000 fois plus toxiques pour les insectes que pour les mammifères, les insectes possédant des canaux sodiques plus sensibles, une masse corporelle réduite et une température corporelle plus basse (Bradberry et coll., 2005). Les mammifères peuvent également métaboliser rapidement les pyréthroïdes en formes inactives, puis les éliminer (Santé Canada, 2009).

Leurs effets nocifs peuvent inclure des étourdissements, des nausées, des céphalées, des tremblements, de la salivation, des mouvements involontaires et des convulsions; une très forte exposition peut provoquer des évanouissements (ATSDR, 2003; CDC, 2005). Des effets neurocomportementaux, comme une baisse de l'activité motrice, ont été observés chez des animaux de laboratoire ayant été exposés à des pyréthroïdes par voie orale (Wolansky et Harrill, 2008). Cependant, l'existence d'un lien entre l'exposition de longue durée à de faibles concentrations de pyréthroïdes et des effets neurologiques et sur la reproduction n'a pu être démontrée chez les mammifères, probablement en raison du métabolisme et de l'élimination rapides de ces composés (ATSDR, 2003; Kolaczinski et Curtis, 2004; Saillenfait et coll., 2015). Des réactions allergiques ont été signalées chez les humains après une exposition aux pyréthroïdes; mais en l'absence d'effets clairs et cohérents, l'Environmental Protection Agency (EPA) des États-Unis n'a pu corroborer l'existence d'un lien entre l'exposition aux pyréthroïdes et l'asthme et les allergies (EPA, 2009b; Moretto, 1991; Salome et coll., 2000; Vanden Driessche et coll., 2010). Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a, quant à lui, classé la perméthrine et la deltaméthrine dans le groupe 3, à savoir celui des agents inclassables quant à leur cancérogénicité pour les humains, en l'absence de preuves (CIRC, 1991).

Au Canada, la vente et l'utilisation de pyréthroïdes sont régies par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires (Canada, 2002). L'ARLA évalue la toxicité d'un pesticide et son risque d'exposition avant de lui accorder une homologation selon l'usage particulier qui en est fait. Dans le cadre du processus d'homologation, l'ARLA établit les limites maximales de résidus pour les pesticides dans les aliments. Plusieurs pyréthroïdes sont soumis à des limites maximales de résidus dans les aliments, notamment la cyfluthrine, la cyperméthrine, la deltaméthrine, la lambda-cyhalothrine et la perméthrine (Santé Canada, 2012). L'ARLA réévalue les pesticides homologués de façon cyclique. Après avoir réévalué la deltaméthrine, la cyfluthrine, la cyperméthrine et la d-phénothrine, Santé Canada a déterminé que la plupart de leurs utilisations ne présentent aucun risque inacceptable pour la santé humaine ou l'environnement lorsqu'elles sont utilisées conformément au mode d'emploi figurant sur l'étiquette et a donc maintenu leur homologation (Santé Canada, 2016; Santé Canada 2018a; Santé Canada 2018b; Santé Canada 2018c). Santé Canada a récemment publié des projets de décision pour la perméthrine et la lambda-cyhalothrine (Santé Canada, 2017a; Santé Canada, 2017b); les décisions de réévaluation pour ces substances chimiques seront publiées en 2019. Le tau-fluvalinate figure dans le plan de travail de l'ARLA visant à établir l'ordre de priorité des réévaluations de pesticides, qui dure jusqu'en 2023 (Santé Canada, 2018d).

En 2005, la concentration des métabolites des pyréthroïdes a été mesurée chez 89 enfants âgés de 6 à 12 ans et 81 adultes âgés de 18 à 64 ans du Québec (Fortin et coll., 2008). Ces analyses ont été effectuées sur des échantillons d'urine prélevés pendant 12 heures chez les enfants et pendant deux périodes consécutives de 12 heures chez les adultes. Chez les enfants, la médiane et la valeur correspondant au 95e centile des concentrations mesurées étaient respectivement inférieure à 0,005 μg/L et de 0,02 μg/L pour le 4-F-3-PBA, inférieure à 0,006 μg/L et de 0,09 μg/L pour le cis-DBCA, de 0,10 μg/L et de 0,76 μg/L pour le cis-DCCA, de 0,24 μg/L et de 4,10 μg/L pour le trans-DCCA, et de 0,20 μg/L et de 1,54 μg/L pour le 3-PBA. Chez les adultes, la médiane et la valeur correspondant au 95e centile des concentrations mesurées étaient respectivement inférieure à 0,005 μg/L et de 0,03 μg/L pour le 4-F-3-PBA, inférieure à 0,006 μg/L et de 0,14 μg/L pour le cis-DBCA, de 0,10 μg/L et de 1,15 μg/L pour le cis-DCCA, de 0,25 μg/L et de 3,48 μg/L pour le trans-DCCA, et de 0,17 μg/L et de 4,23 μg/L pour le 3-PBA (Fortin et coll., 2008).

Ferland et coll. (2015) ont indiqué une moyenne géométrique allant de 0,038 à 0,605 µmol/mol de créatinine pour les concentrations de trans-DCCA, et de 0,032 à 2,56 µmol/mol de créatinine pour celles de 3-PBA après une période d'échantillonnage de 3 jours effectué auprès de 12 travailleurs agricoles dans la production du maïs (92 % d'hommes âgés de 39 ans en moyenne). Une étude menée auprès de 26 travailleurs agricoles québécois (85 % d'hommes âgés de 37 ans en moyenne, dont 8 ont fourni deux séries d'échantillons d'urine après avoir effectué différentes tâches) exposés à la cyperméthrine a indiqué une moyenne géométrique allant de 0,080 à 1,668 µmol/mol de créatinine pour les concentrations de 3-PBA après une période d'échantillonnage de 3 jours, alors que celle de trans-DCCA était inférieure à la limite de détection pour la majorité des échantillons (Ratelle et coll., 2016).

La concentration de cinq métabolites des pyréthroïdes (voir le tableau 13.2.1) dans l'urine a été mesurée pour les participants âgés de 6 à 79 ans lors du cycle 1 (2007 à 2009) et pour ceux âgés de 3 à 79 ans lors du cycle 2 (2009 à 2011) et du cycle 5 (2016 à 2017) de l'ECMS. Les données de ces cycles sont exprimées à la fois en µg/L et en µg/g de créatinine (voir les tableaux 13.2.2 à 13.2.11). La présence d'une quantité mesurable de métabolites des pyréthroïdes dans l'urine est un indicateur d'une exposition à ces substances, mais elle n'entraîne pas nécessairement d'effets nocifs.

Références

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13.3 Éthylène bisdithiocarbamates

Les éthylène bisdithiocarbamates (EBDC) forment un groupe de pesticides utilisés principalement comme fongicides organométalliques à large spectre. Les trois EBDC homologués au Canada au cours de la période d'échantillonnage (2016 à 2017) du cycle 5 de l'Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS) étaient le mancozèbe, le métirame et le nabame (Santé Canada, 2019). L'éthylène thiourée (ETU; n^o CAS 96-45-7), également appelée imidazolidine-2-thione, est un métabolite, un produit de dégradation dans l'environnement et un contaminant de synthèse des EBDC. L'ETU peut également être produite commercialement et elle est principalement utilisée dans la fabrication de plastiques et de caoutchoucs (CDC, 2016; CIRC, 2001; Environnement et Changement climatique Canada, et Santé Canada, 2017; EPA, 2016; NTP, 2016).

Les EBDC s'introduisent dans l'environnement par le biais de l'utilisation de fongicides. Comme ils se décomposent rapidement en ETU et en d'autres métabolites, ils ne devraient pas être présents dans l'eau potable (Santé Canada, 2018c; Santé Canada, 2018d). Par contre, l'ETU qui est modérément persistante et plus mobile que les fongicides d'origine pourrait être présente dans la colonne d'eau (NTP, 2016). L'ETU est hautement mobile dans le sol, mais s'y biodégrade rapidement, alors qu'elle se dégrade photochimiquement dans l'air. L'ETU dans l'environnement peut également provenir de la fabrication de plastiques et de caoutchoucs. Bien que la vulcanisation du caoutchouc convertisse l'ETU en d'autres composés, des résidus d'ETU pourraient demeurer (CIRC, 1974). L'ETU peut donc potentiellement migrer depuis la surface du caoutchouc.

Les EBDC sont utilisés dans un grand nombre d'applications. Le nabame est un biocide à large spectre homologué au Canada pour la lutte contre les microorganismes formant des biofilms dans les liquides issus de procédés industriels d'un certain nombre d'industries. En tant qu'agent de contrôle des boues microbiennes, il est utilisé dans les laveurs d'air, les tours de refroidissement d'eau, les condenseurs à évaporation, les usines de pâtes et de papiers, et les liquides de forage et les eaux des systèmes de récupération secondaire et tertiaire des installations pétrolières (Santé Canada, 2012). Le mancozèbe et le métirame sont des fongicides de contact à action préventive agissant sur plusieurs sites; ils ont traditionnellement été utilisés sur diverses cultures vivrières et fourragères pour combattre un large éventail de maladies des plantes. À la suite d'une décision de réévaluation de 2018, Santé Canada a abandonné toutes les utilisations du métirame, à l'exception de son application foliaire sur les pommes de terre (Santé Canada, 2018d). En outre, Santé Canada a récemment proposé d'abandonner graduellement toutes les utilisations du mancozèbe, sauf celle sur le tabac cultivé en serre (Santé Canada, 2018c).

La population générale pourrait être exposée aux EBDC par l'ingestion d'aliments traités avec ces substances. Les autres voies d'exposition incluent l'inhalation au cours d'une activité se déroulant à proximité de champs traités avec des EBDC. L'exposition à l'ETU découle de sa présence comme contaminant dans le fongicide appliqué, de la dégradation du fongicide d'origine ou comme sous produit résultant de la cuisson d'aliments contaminés par un EBDC (CIRC, 2001). L'utilisation des EBDC pourrait également entraîner la contamination des aliments et de l'eau potable par l'ETU. La fumée de cigarette peut également constituer une importante source d'exposition aux EBDC et à l'ETU en raison de l'utilisation de fongicides sur les cultures de tabac (CIRC, 2001; Houeto et coll., 1995). L'exposition aux EBDC à et à l'ETU peut également survenir par contact cutané avec des pesticides, et l'exposition à l'ETU seule par contact cutané avec du caoutchouc en contenant (Environnement et Changement climatique Canada, et Santé Canada, 2017; EPA, 2016; HSDB, 2010; Santé Canada, 2012; Santé Canada, 2018c; Santé Canada, 2018d).

Les EBDC sont principalement absorbés par ingestion, et dans une moindre mesure, par inhalation ou contact cutané; ils sont métabolisés rapidement dans l'organisme pour produire de l'ETU et d'autres substances (CDC, 2016; Houeto et coll., 1995). Après une exposition par voie orale, l'ETU est facilement absorbée, puis excrétée dans l'urine inchangée ou sous forme de métabolites oxydatifs (CDC, 2016; Houeto et coll., 1995). Une fois absorbée, l'ETU se répartit dans tout l'organisme, mais principalement dans la thyroïde (CIRC, 2001). L'ETU peut traverser la barrière placentaire et a été détectée dans le lait maternel des animaux de laboratoire (CDC, 2016; HSDB, 2010). La demi-vie de l'ETU est de 32 à 100 heures chez les humains (Kurttio et Savolainen, 1990). Des études animales et humaines montrent que l'ETU est rapidement éliminée, principalement dans l'urine, et dans une moindre mesure dans les matières fécales (CDC, 2016, Houeto et coll., 1995). La concentration urinaire d'ETU reflète une exposition récente aux EBDC ou à l'ETU (CDC, 2016).

La caractérisation des risques potentiels pour la santé humaine associés à une exposition aux EBDC et à leur métabolite ETU comprend leurs principaux effets sur la thyroïde. Parmi les fongicides à base d'EBDC, le nabame est celui qui présente la plus forte toxicité, probablement en raison sa solubilité dans l'eau et de son absorbabilité élevées (Frakes et Hicks, 1993). Dans l'ensemble, la toxicité des composés d'origine des EBDC est relativement faible, cette toxicité étant essentiellement attribuée à leurs métabolites, notamment à l'ETU (Frakes et Hicks, 1993). L'exposition aiguë à l'ETU par voie orale a été associée à une hyperplasie de la thyroïde et à une baisse des taux d'hormones thyroïdiennes, tandis que l'exposition de courte durée par inhalation peut irriter les voies respiratoires (EPA, 2016; Houeto et coll., 1995). L'exposition aiguë à des concentrations plus élevées d'ETU peut provoquer des symptômes allant de la nausée et de la sudation à un œdème pulmonaire entraînant la mort. Les études animales montrent que la thyroïde est l'organe cible de la toxicité chronique de l'ETU, ce qui explique la présence de nombreux symptômes associés à une baisse des taux d'hormones thyroïdiennes comme un myxœdème et un goitre. Des lésions hépatiques, rénales et hypophysaires peuvent également survenir (HSDB, 2010).

Des études menées sur des animaux de laboratoire ont également montré que l'ETU peut être un perturbateur endocrinien, nuisant à la synthèse des hormones thyroïdiennes, et qu'elle est un agent tératogène, provoquant des anomalies musculosquelettiques et du système nerveux central (CDC, 2016; EPA, 1991; Hurley, 1998). Les données probantes laissent supposer que l'ETU peut être faiblement génotoxique. L'exposition d'animaux de laboratoire a également provoqué des tumeurs hépatiques et des tumeurs hypophysaires bénignes par un mode d'action moins clair (CIRC, 2001; NTP, 2016; Santé Canada, 2018c). D'autres études laissent supposer que l'ETU est cancérogène, provoquant des tumeurs de la thyroïde chez les animaux exposés par un mode d'action non génotoxique. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé l'ETU dans le groupe 3, à savoir celui des agents inclassables quant à leur cancérogénicité pour les humains (CIRC, 2001). À l'heure actuelle, le CIRC n'a pas évalué le potentiel cancérogène des fongicides à base d'EBDC homologués au Canada.

Au Canada, la vente et l'utilisation de pesticides à base d'EBDC sont régies par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires (Canada, 2002). L'ARLA évalue la toxicité d'un pesticide et son risque d'exposition avant de lui accorder une homologation selon l'usage particulier qui en est fait. Dans le cadre du processus d'homologation, l'ARLA établit des limites maximales de résidus pour pesticides dans les aliments. La révocation de toutes les limites maximales de résidus établies pour les EBDC est actuellement à l'étude et des limites maximales de résidus de métirame sur les pommes de terre ont été proposées (Santé Canada, 2018b). L'ARLA réévalue les pesticides homologués de façon cyclique. Dans le cadre de ce processus, Santé Canada a récemment réévalué le nabame et le métirame et publié un projet de décision de réévaluation pour le mancozèbe (Santé Canada, 2014; Santé Canada 2018c; Santé Canada, 2018d).

En vertu du Plan de gestion des produits chimiques, le gouvernement du Canada a mené une évaluation scientifique préalable pour déterminer si l'ETU présente ou pourrait présenter un risque pour la santé humaine ou l'environnement selon les critères détaillés à l'article 64 de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) (LCPE [1999]) (Canada, 1999; Environnement et Changement climatique Canada, et Santé Canada, 2017). Cette évaluation propose de conclure que l'ETU ne satisfait à aucun des critères établis des substances toxiques en vertu de la LCPE (1999) (Environnement et Changement climatique Canada, et Santé Canada, 2017). Bien que l'exposition aux concentrations actuelles d'ETU n'est pas préoccupante, l'ébauche d'évaluation préalable indique que l'ETU est associée à des effets sur la santé humaine et qu'une augmentation de l'exposition pourrait être préoccupante. Des mesures sont actuellement considérées pour faire le suivi des changements dans les tendances en matière d'exposition ou d'utilisation commerciale (Canada, 2017). L'ETU figure dans la Liste des contaminants et des autres substances adultérantes dans les aliments, incorporée par renvoi au titre 15 du Règlement sur les aliments et drogues, qui interdit la présence de contaminants dans certains aliments et qui fournit des concentrations maximales pour d'autres (Canada, 1978; Santé Canada, 2018a). Cette liste stipule qu'aucune quantité d'ETU n'est acceptable dans les aliments, sauf dans les fruits, les légumes et les céréales pour lesquels une concentration maximale doit être respectée (Santé Canada, 2018a).

La concentration d'ETU dans l'urine a été mesurée pour les participants âgés de 3 à 79 ans lors du cycle 5 (2016 à 2017) de l'ECMS. Les données de ce cycle sont exprimées à la fois en μg/L et en μg/g de créatinine. La présence d'une quantité mesurable d'ETU dans l'urine est un indicateur d'une exposition directe à cette substance ou à un fongicide à base d'EBDC, mais elle n'entraîne pas nécessairement d'effets nocifs.

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• Santé Canada (2018a). Liste des contaminants et des autres substances adultérantes dans les aliments. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 2 octobre 2018].
• Santé Canada (2018b). Limites maximales de résidus proposées PMRL2018-27, Fongicides du groupe contenant de l'éthylène bisdithiocarbamate (EBDC) : mancozèbe, métirame, manèbe et zinèbe. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 20 mars 2019].
• Santé Canada (2018c). Projet de décision de réévaluation PRVD2018-17, Mancozèbe et préparations commerciales connexes. Document de consultation. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 19 septembre 2019].
• Santé Canada (2018d). Décision de réévaluation RVD2018-20 – Métirame et préparations commerciales connexes : décision finale. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 19 septembre 2019].
• Santé Canada (2019). Recherche dans les étiquettes de pesticides. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 18 octobre 2019].

13.4 ortho-Phénylphénol

L'ortho-phénylphénol (OPP; n^o CAS 90-43-7), également appelé 2-phénylphénol ou biphényl-2-ol, est un composé phénolique synthétique qui se présente sous la forme de cristaux floconneux de couleur blanche ou rosée dans les conditions ambiantes (ANSES, 2014; CIRC, 1999). L'OPP peut être synthétisé par divers procédés chimiques, notamment à partir de cyclohexanone en utilisant un catalyseur (ANSES, 2014; Dow, 2008). L'OPP et ses sels sont utilisés comme fongicides, germicides et bactériostatiques à des fins commerciales, industrielles, agricoles et résidentielles (Appel, 2000; Brusick, 2005). Au Canada, ils sont homologués pour combattre la prolifération bactérienne et fongique sur les poires (Santé Canada, 2008b). L'OPP et ses sels sont également employés à des fins domestiques et commerciales comme désinfectants pour surfaces dures, produits de préservation du bois et produits de protection comme les glaçures pour céramique, les joints de feutre, les colorants à papier, l'amidon à lessive, les adjuvants de béton, les adhésifs, les peintures, le cuir, les textiles, les liquides métallurgiques, les solutions pour extincteurs, les émulsions de cire à parquets, les toilettes chimiques, les matériaux de construction et l'alcool polyvinylique (Appel, 2000; Brusick, 2005; CDC, 2016; EPA, 2006; Santé Canada, 2008b; Santé Canada, 2014).

L'OPP n'existe pas à l'état naturel dans l'environnement; il y est libéré à partir de sources anthropiques. Il peut s'introduire dans l'environnement par le rejet d'émissions dans l'air ou dans l'eau provenant d'installations de fabrication et de transformation (CIRC, 1999; Dow, 2008). Il peut également provenir de l'utilisation de produits commerciaux ou résidentiels.

La population générale peut être exposée à l'OPP par le biais des milieux environnementaux, comme l'air extérieur et intérieur, et de produits de consommation, comme les désinfectants ou les produits traités à l'OPP (CDC, 2016). Les enfants peuvent y être exposés par ingestion après avoir touché un plancher ou un textile traité à l'OPP (Santé Canada, 2008a). L'exposition peut également survenir par l'ingestion d'aliments traités (Appel, 2000; CDC, 2016).

Bien qu'aucune étude humaine n'ait pu être relevée sur l'absorption par voie orale ou par inhalation, des études sur l'exposition professionnelle ont montré que l'OPP est fortement absorbé par voie cutanée (Bomhard et coll., 2002; CIRC, 1999; Commission européenne, 2015; INRS, 2016). Des études menées sur des animaux de laboratoire ont démontré son absorption après une exposition par voie orale ou par inhalation (ANSES, 2014; INRS, 2016). Une fois absorbé, l'OPP se répartit rapidement dans tout l'organisme (ANSES, 2014; INRS, 2016). Certaines données probantes issues d'études humaines et animales laissent supposer que l'OPP ne s'accumule pas dans l'organisme, ce qui est confirmé par sa courte demi-vie de 0,8 heure (ANSES, 2014; Bomhard et coll., 2002; CDC, 2016; Commission européenne, 2002). Des études in vivo et in vitro ont démontré que l'OPP est fortement métabolisé par le cytochrome P450. Les principales voies métaboliques sont la conjugaison de l'OPP au glucuronide ou au sulfate (Commission européenne, 2002). Les deux principaux métabolites, soit l'OPP-glucuronide et l'OPP-sulfate, sont des composés inactifs; des études in vitro ont également démontré que différentes voies métaboliques peuvent produire différents métabolites de l'OPP, notamment des composés actifs comme la phényl hydroquinone et la phényl benzoquinone (ANSES, 2014; Brusick, 2005; INRS, 2016). L'élimination est rapide et se fait principalement par l'urine (90 %), ainsi que par les matières fécales (5 %). Des études menées sur des animaux de laboratoire ont montré que 99 % de l'OPP est éliminé sous forme de métabolites après 48 heures. La concentration urinaire d'OPP reflète une exposition récente (CDC, 2016).

Des études menées sur des animaux de laboratoire ont également signalé une toxicité minimale après une exposition aiguë à l'OPP par voie orale et par inhalation; l'OPP constitue toutefois un irritant fort pour la peau et modéré pour les yeux (Bomhard et coll., 2002; CDC, 2016; Stouten, 1998). Aucune donnée évaluant sa toxicité chronique chez les humains n'a été relevée, mais des études animales ont signalé une toxicité générale après une exposition chronique à l'OPP par voie orale, notamment une anémie, une perte de poids et une augmentation du poids de plusieurs organes (ANSES, 2014; CDC, 2016). Une exposition de longue durée par voie cutanée n'a relevé qu'une toxicité locale (lésions cutanées), sans effet systémique (Stouten, 2018). Dans les études animales, de fortes doses d'OPP ont été associées à des tumeurs de la vessie et des reins, ce qui est confirmé par des études in vitro rapportant des effets mutagènes de l'OPP (Bomhard et coll., 2002; CDC, 2016; CIRC, 1999). Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé l'OPP dans le groupe 3, à savoir celui des agents inclassables quant à leur cancérogénicité pour les humains, sur la base de données insuffisantes chez les humains et de données probantes limitées chez les animaux de laboratoire; l'OPP de sodium a toutefois était classé dans le groupe 2B, à savoir celui des agents peut-être cancérogènes pour les humains, sur la base de données insuffisantes chez les humains et de données probantes suffisantes chez les animaux de laboratoire (CIRC, 1999).

Au Canada, la vente et l'utilisation d'OPP en tant que pesticide sont régies par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires (Canada, 2006). Dans le cadre du processus d'homologation, l'ARLA établit les limites maximales de résidus d'OPP dans les aliments, en vertu de la Loi sur les aliments et drogues qui interdit toute vente d'aliments contenant des pesticides à une concentration supérieure aux limites maximales de résidus établies. L'OPP est actuellement homologué au Canada pour le traitement après récolte des poires et comme agent de conservation pour un large éventail de produits (Santé Canada, 2008b). En 2008, l'ARLA a réévalué l'OPP et a déterminé que ces utilisations ne présentent aucun risque inacceptable pour la santé humaine ou l'environnement lorsqu'il est utilisé conformément au mode d'emploi figurant sur l'étiquette et a donc maintenu son homologation.

Les désinfectants pour surfaces dures sont réglementés comme drogues et soumis aux exigences de la Loi sur les aliments et drogues et de ses règlements; en 2014, Santé Canada a publié des lignes directrices sur l'étiquetage et l'utilisation des produits destinés à l'utilisation pour la désinfection des surfaces dures, y compris l'OPP (Santé Canada, 2014).

La concentration de deux métabolites d'OPP (ortho-Phénylphénol-glucuronide et ortho-Phénylphénol-sulfate) dans l'urine a été mesurée pour les participants âgés de 3 à 79 ans lors du cycle 5 (2016 à 2017) de l'Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS). Les données de ce cycle sont exprimées à la fois en µg/L et en µg/g de créatinine. La présence d'une quantité mesurable d'OPP dans l'urine peut être un indicateur d'une exposition à cette substance, mais elle n'entraîne pas nécessairement d'effets nocifs.

Références

• ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire alimentation, environnement, travail) (2014). Profil toxicologique de l'o-phenylphénol (OPP). Rapport d'expertise collective. France. [consulté le 31 octobre 2019].
• Appel, K.E. (2000). The carcinogenicity of the biocide ortho-phenylphenol. Archives of Toxicology, 74(2), 61–71.
• Bomhard, E.M., Brendler-Schwaab, S.Y., Freyberger, A., Herbold, B.A., Leser, K. H., et Richter, M. (2002). O-phenylphenol and its sodium and potassium salts: a toxicological assessment. Critical Reviews in Toxicology, 32(6), 551–626.
• Brusick, D. (2005). Analysis of genotoxicity and the carcinogenic mode of action for ortho‐phenylphenol. Environmental and Molecular Mutagenesis, 45(5), 460–481.
• Canada (2006). Loi sur les produits antiparasitaires. L.C. 2002, ch. 28. [consulté le 18 septembre 2018].
• CDC (Centers for Disease Control and Prevention) (2016). Biomonitoring Summary – ortho-Phenylphenol CAS No. 90-43-7. Centers for Disease Control and Prevention, Georgia, USA. [consulté le 17 septembre 2018].
• CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) (1999). IARC Monographs on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans Volume 73. Some Chemicals that Cause Tumours of the Kidney or Urinary Bladder in Rodents and Some Other Substances. Lyon : Organisation mondiale de la Santé. [consulté le 14 septembre 2018].
• Commission européenne (2002). Study on the scientific evaluation of 12 substances in the context of endocrine disrupter priority list of actions. WRc-NSF Ref: UC 6052. Office for Official Publications of the European Communities, Luxembourg. [consulté le 3 octobre 2018].
• Commission européenne (2015). Opinion on o-Phenylphenol, Sodium o-phenylphenate and Potassium o-phenylphenate. SCCS (Scientific Committee on Consumer Safety). SCCS/1555/15. [consulté le 3 octobre 2018].
• Dow (2008). Product Safety Assessment: 2-Phenylphenol and Salts. The Dow Chemical Company, Midland, MI. [consulté le 27 septembre 2018].
• EPA (U.S. Environmental Protection Agency) (2006). Reregistration Eligibility Decision for 2-phenylphenol and Salts (Orthophenylphenol or OPP). Washington, DC. [consulté le 14 septembre 2018].
• INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) (2016). Fiche Demeter O-phényphénol. INRS, Département Etudes et Assistances Médicales, Paris, France. [consulté le 31 octobre 2019].
• Santé Canada (2008a). Projet de décision de réévaluation PRVD2008-04 : 2-Phénylphénol et ses sels. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 14 septembre 2018].
• Santé Canada (2008b). Décision de réévaluation RVD2008-13 : 2-phénylphénol et ses sels. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 14 septembre 2018].
• Santé Canada (2014). Monographie – Désinfectants pour surfaces dures. Ottawa (Ont.) : ministre de la Santé. [consulté le 27 septembre 2018].

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