Chapitre 7 – Évaluation du système de cours martiales actuel

7.1 Introduction

Dans le présent chapitre, l’ERGCM évalue le système de cours martiales actuel en fonction des critères établis au chapitre 6 ci-dessus (Fondement théorique d’un système de cours martiales).

7.1.1 Remarque importante concernant l’évaluation du « système »

Il est important de souligner, encore une fois, que les propos tenus dans le présent chapitre, et même dans le présent rapport, ne doivent en aucun cas être perçus comme étant critiques ou désobligeants à l’endroit de l’un ou l’autre des acteurs du système de cours martiales actuel. L’ERGCM n’a pas été chargée d’évaluer le rendement, la compétence ou la bonne foi de personnes, entités ou groupes appelés à intervenir dans le système de cours martiales et n’a en aucune façon procédé à une telle évaluation. L’évaluation qui suit porte sur le système de cours martiales.

Même les personnes les plus compétentes, vaillantes et dévouées ne réussiraient pas invariablement à obtenir des résultats conformes à l’objet du système de cours martiales, si le système lui-même n’est pas structuré de manière à réaliser au mieux cet objet. C’est pourquoi des évaluations périodiques du système proprement dit doivent être effectuées, tel qu’il est indiqué au paragraphe 9.2(2) de la LDN (en vertu duquel le JAG procède ou fait procéder périodiquement à un examen de l’administration de la justice militaire).

Dans les termes de référence, l’ERGCM s’est vu confier le vaste mandat d’évaluer l’efficacité, l’efficience et la légitimité du système, tout en anticipant implicitement que des changements au système proprement dit pourraient être envisagés afin de mieux respecter les principes fondamentaux énoncés.

Quelques-unes des options susceptibles d’améliorer le système sont examinées dans les chapitres qui suivent, conformément au mandat confié à l’ERGCM.1

7.1.2 Sources d’information utilisées

L’ERGCM s’est appuyée sur un large éventail de sources d’information pour réaliser l’évaluation présentée dans le présent chapitre.

Afin de mesurer l’efficience du système, l’ERGCM s’est fondée sur des données quantitatives et l’analyse comparative entreprise dans le cadre de la révision globale par les représentants de l’organisation du directeur général – Services d’évaluation, sous la responsabilité du SMA (Svcs Ex). Les personnes qui ont compilé ces données et qui ont effectué cette analyse sont des employés civils au sein du MDN. Les feuilles de calcul et la présentation que ces personnes ont préparées pour l’ERGCM sont fournies aux annexes BB, CC, DD, EE et FF. L’ERGCM s’est également fiée à sa propre analyse comparative, aux perspectives critiques adoptées par le passé à l’égard du système de cours martiales et à d’autres sources de données, telles que les rapports annuels du JAG et l’information publiquement accessible sur les cours martiales, afin d’évaluer l’efficience du système.

Pour évaluer l’efficacité et la légitimité, l’ERGCM s’est fiée principalement aux renseignements qui ont été recueillis lors des consultations et qui sont décrits au chapitre 4 ci-dessus. L’évaluation de l’efficacité a été effectuée en se fondant, dans une plus large mesure, sur les consultations internes des FAC, tandis que celle de la légitimité a été menée en s’appuyant sur toutes les formes de consultations, soit des consultations publiques, internes et ciblées. Dans certains cas, les évaluations de l’efficacité et de la légitimité ont également été effectuées en se fondant sur les perspectives critiques adoptées par le passé à l’égard du système de cours martiales, qui ont été examinées au chapitre 3 ci-dessus. Ces évaluations ont également permis, le cas échéant, d’établir un parallèle pertinent entre les problèmes rencontrés dans le système de cours martiales canadien et les systèmes analogues d’autres pays, qui ont été étudiés dans le cadre de l’analyse comparative de l’ERGCM.

7.2 Aperçu : évaluation du système de cours martiales actuel

La constitutionnalité du système de cours martiales n’est pas sérieusement mise en doute. Les principaux aspects du système de justice militaire parallèle du Canada ont récemment été confirmés par la CSC2 et la CACM.3 L’historique du système de cours martiales du Canada a été présenté au chapitre 2 ci-dessus, et les réformes et les modifications relativement récentes, dont certaines faisaient suite à des décisions judiciaires concernant d’anciens aspects du système, y ont été examinées. Lorsque le présent rapport a été rédigé, aucune décision judiciaire concernant le fonctionnement ou la constitutionnalité du système n’étaient pendantes. Les Canadiens peuvent avoir pleinement confiance en la constitutionnalité de leur système de cours martiales.

Toutefois, comme l’a indiqué l’ancien juge en chef du Canada, Antonio Lamer, « [l]es personnes responsables de l’organisation et de l’administration du système de justice militaire du Canada se sont efforcées, et doivent continuer de s’efforcer, d’offrir un meilleur système et non simplement un système dont la constitutionnalité ne peut être contestée ».4 La constitutionnalité du système de cours martiales est une nécessité, mais elle ne garantit pas nécessairement que le système répond aux besoins du Canada en tant que mécanisme visant à soutenir la capacité du gouvernement à contrôler et à utiliser les FAC.

L’ERGCM a conclu que le système de cours martiales du Canada est passablement efficace (surtout pour ce qui est de sa capacité à assurer l’ordre et le bien-être publics), et aussi que maintes améliorations semblent pouvoir y être apportées pour en accroître l’efficience, de sorte qu’il soulève des questions sur le plan de la légitimité.

7.3 Évaluation des composantes individuelles du système de cours martiales actuel

Dans les sous-sections du présent chapitre, l’ERGCM a évalué chacune des composantes pertinentes du système de cours martiales. Certaines des observations jugées fondamentales dans le cadre de ces évaluations (comme les délais observés et la difficulté à produire des résultats en temps opportun que ceux-ci entraînent) ont une portée générale et seront examinées en détail; il en sera plus brièvement question par la suite dans différents contextes.

7.3.1 Statut et structure institutionnelle des tribunaux

En ce qui concerne l’efficacité du système, il est clair que plusieurs des utilisateurs des FAC ayant été consultés croient que le système de cours martiales fonctionne bien.5

Le système semble être assez universel pour répondre aux besoins des FAC, dans la mesure où il a permis de juger des infractions commises tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Canada. L’ERGCM a constaté que le système n’a pas vraiment fait ses preuvesen ce qui a trait à la capacité de tenir des procès sur les lieux d’un déploiement. Lorsque les FAC ont participé aux opérations en Afghanistan, aucune cour martiale n’a été tenue dans le théâtre d’opérations. Dans un cas particulier, la prise de témoignage a été effectuée dans un théâtre d’opérations, alors que le reste des procédures devant la cour martiale s’est déroulé au Canada.6 Dans cette affaire, l’accusé a proposé que la cour martiale soit convoquée en Afghanistan plutôt qu’à Gatineau, mais sa proposition a été rejetée.7 Cela dit, il n’est pas nécessaire qu’une cour martiale puisse siéger sur les lieux d’un déploiement pour préserver son caractère universel. En effet, cela semble être l’opinion de nombreux dirigeants des FAC, et certains d’entre eux ont même laissé entendre qu’ils ne souhaitaient pas qu’une cour martiale siège dans des théâtres d’opérations.8

Certains dirigeants des FAC pensent également que le système de tribunaux actuel a un effet de dissuasion et qu’il favorise le respect de la loi.9

Il n’a pas été établi avec certitude que ce système de tribunaux est toujours efficace pour ce qui est de produire des résultats justes et appropriés. Certains des intervenants consultés étaient d’avis que le système de tribunaux actuel est structuré de façon appropriée pour permettre aux acteurs du système de comprendre tant les questions de nature criminelle que les questions de nature militaire et d’en arriver à une décision. Toutefois, d’autres estimaient que le système ne repose pas sur un juste équilibre des attributs nécessaires – à savoir, l’expertise militaire et la connaissance du droit criminel – pour prendre les décisions les plus appropriées.10 Plus précisément, certains dirigeants des FAC, qui ont été consultés, ont indiqué que les juges militaires ont beaucoup moins d’expérience comme juges que leurs homologues civils,11 tandis que ceux d’un autre groupe « ont précisé qu’un tribunal civil pourrait effectivement être plus enclin à prendre en considération le témoignage des membres de la chaîne de commandement et se sont dits déçus de la façon dont les procureurs et les juges militaires considèrent leurs points de vue dans le système actuel ».12 Bon nombre des personnes consultées considéraient que la capacité du système actuel à infliger des peines justes et appropriées suscite plus particulièrement des préoccupations parce que les peines imposées en cour martiale sont trop clémentes.13

Bien que cela n’ait pas été soulevé dans le cadre des consultations, l’ERGCM a constaté que le système de tribunaux actuel semble être efficace en ce qu’il protège le public contre les militaires qui commettent des inconduites en imposant des peines. L’examen par l’ERGCM des peines imposées en cour martiale du 1er avril 2012 au 31 mars 2017 révèle que sur les 245 contrevenants jugés au cours de cette période, 57 d’entre eux (23 p. 100) se sont vu imposer une peine de détention ou d’emprisonnement quelconque. Le taux des peines d’emprisonnement est comparable à celui observé dans le système de justice pénale civil14 et amène l’ERGCM à penser – sans que cela soit déterminant – que le système de cours martiales a pour effet d’aider à protéger le public.

La plupart des points soulevés ci-dessus indiquent à l’ERGCM que le système de cours martiales est passablement efficace – principalement en ce qui a trait à sa capacité à promouvoir l’ordre et le bien-être publics. Toutefois, du point de vue de la discipline, certains éléments démontrent clairement – pratiquement tous les dirigeants consultés au sein des FAC étaient de cet avis – que le système de cours martiales n’est pas efficace pour ce qui est de contribuer à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes au sein des FAC. La raison la plus souvent invoquée pour expliquer pourquoi le système de tribunaux actuel est perçu comme inefficace pour répondre aux besoins de la chaîne de commandement des FAC en matière disciplinaire est le défaut de produire des résultats en temps opportun.15

En ce qui concerne le défaut de produire des résultats en temps opportun,16 l’ERGCM a constaté, d’après les données compilées par le DPM pour l’exercice 2016-2017, qu’en moyenne, 434 jours sont actuellement nécessaires à la tenue d’une cour martiale, de la date du dépôt des accusations jusqu’à la fin des procédures.17 La période moyenne sur laquelle s’étale les procédures peut être répartie comme suit : 69 jours entre la date du dépôt des accusations et le renvoi du dossier devant le DPM; 89 jours entre la date où l’avis de renvoi est reçu et celle où les accusations sont portées; 250 jours entre la date où les accusations sont portées et le début de la procédure devant la cour martiale.18 À partir de ces données, il est possible de conclure que le délai moyen entre le début et la fin des procédures devant une cour martiale est de 26 jours. Ce délai total de 434 jours est sensiblement plus long que les 180 jours que les dirigeants des FAC consultés considéraient la durée maximale de la période pouvant s’écouler entre un incident et son règlement, avant que la procédure perde sa pertinence pour ce qui est de faire respecter la discipline militaire.19 Ce délai est également sensiblement plus long que la période moyenne de 112 jours nécessaire (entre la première comparution et la fin du procès) pour instruire les affaires criminelles dans le cadre d’un procès relevant du système de justice pénale civil du Canada.20 Toutefois, pour évaluer le système de tribunaux actuel, l’information clé à retenir est qu’à partir du moment où des accusations sont déposées en vue d’un procès en cour martiale, il faut, en moyenne, 276 jours (250 jours + 26 jours) pour que la cour martiale entende l’affaire et statue sur les accusations portées.

Ce délai persiste malgré le fait que les commandants militaires,21 les membres des forces armées,22 les analystes,23 les autorités indépendantes,24 chargées des examens,25 et la CSC26 ont tous indiqué que pour répondre aux besoins en matière disciplinaire, les inconduites militaires doivent être traitées promptement, de façon générale, et doivent, plus particulièrement, être gérées plus rapidement que ne le seraient des cas semblables dans le système de justice pénale civil; les politiques internes reflètent également ce point de vue.

L’ERGCM a été informée que plusieurs des commandants consultés considèrent que, à eux seuls, les délais observés dans le système de cours martiales font en sorte qu’il perd largement de son utilité pour ce qui est d’aider la chaîne de commandement à faire respecter la discipline.27 Cette perception concorde avec une observation formulée en 2008 par le Bronson Consulting Group, qui a indiqué ce qui suit : [traduction] « dans le système de justice militaire, la lenteur des procédures en cour martiale est telle que l’objet même de l’existence d’un système distinct de justice militaire s’en trouve compromis ».28 L’incapacité à produire des résultats en temps opportun – du moins, en ce qui a trait à ce que les dirigeants des FAC jugent nécessaire pour assurer la discipline – perdure depuis au moins 17 ans.29 Les délais ont persisté même lorsque trois ou quatre juges militaires ont été nommés à la cour et le nombre de juges en mesure de siéger à un moment donné ne semble pas avoir une véritable incidence sur ceux-ci.

L’ERGCM a constaté que le système de tribunaux actuel n’est pas la seule cause des délais dans le système de cours martiales; d’autres causes seront examinées ci-dessous. Toutefois, les tribunaux contribuent inutilement aux retards.

Par exemple, il n’y a pas de mécanisme en place pour régler les litiges efficacement et avec célérité, en enregistrant un plaidoyer de culpabilité. Considérant qu’au cours des 5 dernières années, un plaidoyer de culpabilité a été prononcé dans 65 p. 100 des cas,30 le fait de permettre l’enregistrement d’un tel plaidoyer à la première occasion pourrait avoir une incidence importante sur les délais. Toutefois, dans l’état actuel des choses, les plaidoyers de culpabilité sont prononcés le premier jour de la mise au rôle pour l’instruction, là où le tribunal siège (ce qui nécessite souvent que le juge militaire, le sténographe judiciaire, l’avocat de la défense et le procureur militaire se déplacent), même si toutes les parties savent qu’un plaidoyer de culpabilité sera enregistré. Cette situation a été signalée par le Bronson Consulting Group en 2008.31

Un autre exemple de cas où les délais sont attribuables au processus judiciaire a trait aux audiences de détermination de la peine. Dans son rapport publié en 2008, le Bronson Consulting Group a fait remarquer que les audiences de détermination de la peine tenues en cour martiale – même celles où des observations conjointes sont présentées – sont excessivement longues.32 L’ERGCM a constaté que ces audiences sont encore longues aujourd’hui.33

Selon l’ERGCM, l’absence de mécanisme de règlement rapide et l’habitude de tenir de longues audiences de détermination de la peine font partie du problème que les auteurs du rapport Bronson (DPM) de 2008 auraient corrigé par une [traduction] « gestion efficace des dossiers ». En plus des deux recommandations susmentionnées en prévision d’une réforme, des pratiques telles que l’établissement d’un comité de gestion des instances,34 la coordination des procès,35 des processus de mise au rôle améliorés,36 des conférences judiciaires préalables à l’instruction,37 et des audiences de confirmation38 ont toutes été recommandées afin d’accélérer les procédures dans le système de cours martiales et de faire une utilisation plus efficace de ses importantes ressources. Il semblerait que dans le système de tribunaux actuel la loi confère au JMC le pouvoir d’établir des règles qui permettraient de mettre en œuvre un système de gestion des instances.39 Cependant, quelle que soit la mesure dans laquelle ces recommandations ont été appliquées (et il semble qu’aucune d’entre elles n’ait été mise en œuvre officiellement au moyen de règles de pratique et de procédure réglementaires), elles n’ont pas permis de réduire les délais au cours des neuf dernières années.

L’ERGCM a remarqué l’introduction d’un système permettant une [traduction] « meilleure gestion des instances » à la cour martiale du Royaume-Uni. Ce système, qui s’apparente beaucoup à ce qui a été recommandé par le Bronson Consulting Group en 2008, n’a toujours pas d’équivalent dans le système de cours martiales du Canada.

[traduction]
Le système visant à assurer une meilleure gestion des instances en cour martiale met l’accent sur l’importance de gérer efficacement les procédures, tout en préservant la discrétion judiciaire et en faisant en sorte que les affaires dans lesquelles un plaidoyer de culpabilité est prononcé soient réglées dans les meilleurs délais. Pour ce faire, il faut cibler et examiner rapidement les dossiers où le défendeur plaidera vraisemblablement coupable et tenir des discussions entre les parties tôt dans le processus afin de déterminer les questions à trancher dans les affaires contestées. Par la suite, en fonction du degré de complexité de l’affaire, des échéanciers sont prévus en vue de la préparation des dossiers, une fois les questions à trancher déterminées, de façon à ce que les parties puissent se concentrer sur les questions en litige plutôt que sur celles qui n’ont pas été contestées. 40

Au Royaume-Uni, le système de gestion améliorée des instances a été imposé aux acteurs de la cour martiale par les juges, qui ont vu ce système à l’œuvre et ses répercussions positives sur l’administration de la justice, lorsqu’ils ont présidé la cour de la Couronne en tant que juges civils (comme ils le font tous chaque année pendant au moins trois mois).

Il est important de reconnaître que la difficulté de produire des résultats en temps opportun n’est pas propre au système de cours martiales. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles du Canada a récemment fait observer ce qui suit dans le cadre de son étude du système de justice pénale civil :

Le comité respecte l’indépendance de la magistrature et son rôle dans l’application de la common law et des lois fédérales, provinciales et territoriales, y compris la Constitution et la Charte canadienne des droits et libertés. Tandis que l’heure est à la réforme et au changement de culture, les juges doivent se mobiliser pour dresser l’inventaire des pratiques de gestion des instances et se doter des moyens technologiques pouvant servir à moderniser la gestion des dossiers dans tout le pays.41

Ces observations s’appliquent probablement tout aussi bien au système de cours martiales, au sein duquel les délais sont, en moyenne, plus importants que dans le système de justice pénale civil.

L’efficacité du système de cours martiales est mise en doute de bien d’autres façons. Certains estiment que la structure des tribunaux militaires ne permet pas de répondre aux besoins des dirigeants des FAC sur le plan de la discipline, puisqu’elle ne permet pas de dissuader les militaires de commettre des inconduites ni de montrer que la collectivité (militaire) condamne de telles inconduites de leur part. De façon plus précise, certains dirigeants des FAC estiment que les mesures visant à garantir son indépendance, dont le tribunal a besoin pour s’acquitter de ses fonctions constitutionnelles, l’empêchent en réalité de prendre dûment en considération le point de vue des dirigeants quant à ce qu’ils jugent nécessaire, dans un cas particulier, pour assurer la discipline. Ces dirigeants des FAC sont d’avis que le statut de militaire des membres du tribunal crée une sorte de confusion en ce qui concerne la discipline, qui compromet leur autorité en la matière, dans les cas où le tribunal rend une décision (p. ex., concernant la peine) qui ne concorde pas avec ce qu’ils croient être une décision appropriée dans les circonstances.42

À la lumière de toutes les observations et analyses ci-dessus, l’ERGCM conclut que le système de tribunaux actuel est passablement efficace, dans la mesure où il permet souvent d’assurer l’ordre et le bien-être publics, mais qu’il permet rarement de réaliser l’objectif relatif à la discipline (certains dirigeants des FAC considèrent même parfois qu’il nuit à cette dernière).

En ce qui concerne l’efficience, il est permis de penser que les résultats produits par le système de tribunaux actuel nécessitent une utilisation disproportionnée des ressources humaines ou financières.

En ce qui a trait aux coûts financiers, les coûts moyens engagés au titre des services judiciaires pour tenir un procès en cour martiale, au cours des 5 dernières années, s’élevaient à 31 880 $ (ce qui inclut les traitements des juges et des sténographes judiciaires calculés au prorata, les salaires versés au personnel civil, dont l’ACM, tous les frais de déplacement engagés pour assurer l’administration de la justice et les services judiciaires, ainsi que les frais de fonctionnement et d’entretien normaux des organisations chargées de l’administration des tribunaux et des affaires judiciaires).43 Les coûts équivalents dans les systèmes examinés à des fins de comparaison sont les suivants :

Comme ces chiffres l’indiquent, les coûts financiers par procès dans le système de tribunaux actuel sont plus de 15 fois supérieurs aux coûts équivalents pour un procès dans le système de justice pénale civil canadien et près de 4 fois plus élevés que ceux associés à un procès devant la cour martiale au Royaume-Uni. Même en tenant compte des frais de déplacement inhérents au système de cours martiales actuel, dans ce système, les coûts financiers sont considérablement plus élevés que dans certains systèmes examinés à des fins de comparaison.

Au cours des 5 dernières années, 63 procès ont été instruits, en moyenne, par année dans le système de cours martiales. Sur le plan des ressources humaines, au cours des 5 dernières années, les juges militaires (en tenant compte des périodes où trois et quatre juges militaires siégeaient) ont chacun présidé, en moyenne, 17,1 cours martiales par année (incluant aussi bien les affaires contestées que non contestées). En moyenne, 6 de ces 17 affaires ont donné lieu à des procès complets, en plus des 1 ou 2 audiences de détermination de la peine contestées à la suite d’un plaidoyer de culpabilité. Dans les 9 ou 10 autres procédures, il y avait eu des plaidoyers de culpabilité suivis de recommandations conjointes relatives à la peine. Ces données peuvent être comparées avec les données suivantes, présentées sous forme de moyennes :45

Ces quelque 17 cours martiales (6 affaires contestées) par juge militaire, par année, ont nécessité que chacun des juges tienne en moyenne 59,3 jours d’audience. Une comparaison peut être faite entre ce nombre et :

Comme les cours martiales sont des « instances » ad hoc et qu’elles sont habituellement convoquées par l’ACM à l’endroit où la présumée infraction a été commise (ou à tout autre endroit, en fonction des considérations relatives au lieu où se trouvent l’accusé, les témoins ou les autres membres des FAC concernés), elles nécessitent des déplacements, et cette réalité doit être prise en compte. En supposant que des déplacements ont été nécessaires lors de chacun des procès tenus en cour martiale,48 cela équivaudrait à 34 jours de déplacement, en plus des 59 jours d’audience, pour un total, par juge, de 93 jours « consacrés aux cours martiales » chaque année. Ce nombre se rapproche davantage du nombre total de « jours d’audience » enregistré au Royaume-Uni et au Manitoba. Toutefois, les juges de ces systèmes instruisent entre 5 et 25 fois plus de procès par année que les juges militaires canadiens. Les juges doivent également effectuer certains travaux judiciaires les jours où ils ne siègent pas, ce qui n’est pas pris en compte dans les données ci-dessus concernant les jours d’audience devant les juges du système de cours martiales ou des systèmes examinés à des fins de comparaison.49

Selon les comparaisons effectuées ci-dessus, il est évident que le système de cours martiales du Canada fait partie de ceux qui exigent le plus de ressources sur le plan judiciaire, même après avoir tenu compte de sa nature itinérante.

Les coûts liés aux ressources humaines du tribunal, autres que les membres de la magistrature, sont également relativement élevés. Les services administratifs des tribunaux judiciaires, qui comprennent l’ACM, les sténographes judiciaires et les autres membres du personnel, comptent, au total, 17 employés à temps plein. Chaque fois qu’une cour martiale est convoquée, les unités locales doivent également fournir les services d’officiers de justice et d’autres personnes au sein du secteur de l’unité (qui cessent alors d’exercer leurs fonctions habituelles) afin de doter en personnel cette « instance » en cour martiale. La durée des services ainsi requis peut varier entre 1 à 2 jours pour un plaidoyer de culpabilité et une recommandation conjointe à plusieurs semaines dans les autres cas. Si une CMG est convoquée, il faut alors ajouter aux autres coûts liés aux ressources humaines ceux associés au comité de militaires, dont les membres doivent cesser d’exercer leurs fonctions habituelles afin d’agir uniquement à titre de juges des faits.

En ce qui concerne la légitimité, personne ne met sérieusement en doute le fait que les juges militaires respectent leurs obligations constitutionnelles en matière d’impartialité et d’indépendance judiciaire. Les cours martiales présidées par les juges militaires sont équitables du point de vue constitutionnel. Néanmoins, l’ERGCM a recueilli les commentaires de certains intervenants, qui croient que les cours martiales ne reflètent pas les valeurs de la société, d’une manière qui confère une légitimité fondamentale aux processus.

Dans le cadre de ses consultations, l’ERGCM a reçu un certain nombre de commentaires concernant la réputation des tribunaux militaires. Par exemple, un commandant a indiqué à l’ERGCM que selon lui, les juges militaires ont beaucoup moins d’expérience que les juristes civils, et néanmoins pas autant d’expérience et d’ethos militaires que les personnes jugées.50 Un autre commandant de la Force de réserve (un procureur de la Couronne aguerri exerçant ses fonctions au civil) a, pour sa part, indiqué à l’ERGCM que [traduction] « le niveau d’expérience des juges de la cour est préoccupant ».51 Ces commentaires dénotent une perception selon laquelle le système de tribunaux actuel est moins équitable et moins intelligible, de par sa conception, que les tribunaux du système de justice pénale civil, en raison des différences relatives observées, en ce qui a trait à l’expérience, entre les juges des cours martiales et les juges des cours civiles de juridiction criminelle semblables. Ces commentaires – s’ils s’avèrent exacts d’un point de vue objectif – laisseraient également entendre que le système de tribunaux actuel a de la difficulté à produire des résultats justes et appropriés.

En outre, le statut et le grade militaires des membres du tribunal ont une incidence sur la perception d’équité. Certains ont suggéré à l’ERGCM que des personnes pourraient remettre en question l’équité d’un procès instruit par un juge militaire, si celui-ci est membre de la Force régulière et qu’il détient un grade inférieur à celui du commandant local (p. ex., le commandant de la base), d’un témoin, de l’avocat de la poursuite ou de la défense, ou même de l’accusé.52 De même, lors des consultations publiques, certains ont laissé entendre qu’une personne accusée pourrait juger inéquitable un comité composé de dirigeants militaires parce que les personnes chargées de juger l’affaire sont des représentants de l’institution même qui a intenté une action contre elle.53 Par ailleurs, les membres du public, en particulier les victimes, peuvent être enclins à penser que les juges militaires et les comités de militaires font partie « de la même équipe » que l’accusé et qu’ils seront donc plus susceptibles de traiter ce dernier avec clémence ou, pire encore, de lui permettre de s’en tirer en toute impunité.54

L’ERGCM a relevé d’autres préoccupations en ce qui concerne l’équité des comités. À l’époque de la rédaction du présent rapport, les militaires détenant des grades de caporaux et de soldats ne pouvaient pas siéger à ces comités. Certains intervenants ont indiqué à l’ERGCM que cette situation est problématique du point de vue de la perception d’équité,55 étant donné que presque tous les militaires – indépendamment de leur grade – devraient être en mesure de tirer des conclusions de fait et de participer à l’établissement du verdict, tout comme pratiquement tous les civils peuvent le faire lorsqu’ils agissent comme juré.

Un élément corrélatif au système de tribunaux actuel, qui peut contribuer aux coûts financiers disproportionnés, est l’obligation légale de procéder à l’examen quadriennal de la rémunération des juges militaires. Cet examen, qui est exigé par la Constitution, est effectué par le Comité d’examen de la rémunération des juges militaires,56 lequel est composé de 3 militaires nommés par le gouverneur en conseil, qui examinent les observations présentées par le gouvernement et les juges militaires (3 ou 4) concernant le caractère adéquat de la rémunération de ces derniers et qui produisent ensuite un rapport aux fins d’examen par le gouvernement. La formation d’un comité semblable est prévue à l’article 76 de la Loi sur les juges; ce comité a pour mandat d’enquêter sur le caractère adéquat de la rémunération des 1 154 juges civils57 (environ) de nomination fédérale. L’obligation de créer un comité séparé et les coûts associés à ce comité résultent sans doute uniquement du caractère distinct d’un petit groupe de juges militaires, et des méthodes plus efficaces et plus économiques pourraient probablement être utilisées pour s’acquitter de cette obligation.

Un dernier volet de l’étude du système de tribunaux actuel concerne la prestation des services de sténographie judiciaire. L’analyse comparative suggère que dans les systèmes où des fournisseurs civils offrent les services de sténographie judiciaire sur une base contractuelle, les transcriptions sont produites en temps opportun (généralement dans un délai de 24 heures), ce qui peut contribuer à la production de résultats justes et appropriés, à un coût financier proportionnel, et ce, sans affecter l’universalité du système.58

Dans le système de cours martiales actuel, le fait que les sténographes judiciaires sont des membres du personnel militaire à temps plein ne semble pas produire les mêmes résultats. Bien qu’il soit précisé à l’article 112.66 des ORFC qu’« [a]ussitôt que possible après la fin des procédures de la cour martiale », la transcription des débats doit être préparée, l’ERGCM comprend qu’il est devenu pratique courante de produire uniquement des transcriptions lorsque la décision d’une cour martiale est portée en appel et que des mois peuvent être nécessaires pour produire ces dernières.

Le défaut de produire des transcriptions en temps opportun peut rendre difficile la production de résultats justes et appropriés. En outre, les procureurs, les avocats de la défense et les juges militaires seraient en mesure de travailler plus efficacement s’ils avaient accès à une transcription exacte pendant le procès afin de préparer et de présenter leurs observations et leurs décisions. De plus, le système actuel semble moins adaptable et les coûts liés aux ressources humaines et financières qui s’y rattachent semblent moins proportionnels, étant donné que le niveau de capacité établi devra être maintenu, quel que soit le volume de travail que le système exige des sténographes judiciaires, à un moment donné.

7.3.2 Statut et structure institutionnelle du service des poursuites

Du point de vue de l’efficacité, il est clair que le système actuel du service des poursuites permet, dans une certaine mesure, de promouvoir l’ordre et le bien-être publics. Le système du service des poursuites permet de s’assurer que les dossiers renvoyés au DPM sont traités, et des accusations sont fréquemment portées en vue de la tenue d’un procès en cour martiale.59

Sur le plan de l’universalité, le système actuel du service des poursuites contribue à l’efficacité du système de cours martiales, dans la mesure où les procureurs ont démontré qu’ils sont capables d’exercer leurs fonctions dans l’ensemble du spectre des opérations et des contextes propres aux FAC. En outre, le système est quelque peu adaptable, puisque plus de procureurs militaires (de la Force régulière ou de la Force de réserve) peuvent être affectés au sein de l’organisation du DPM ou mutés en dehors de celle-ci, au besoin, afin de répondre aux augmentations ou aux diminutions imprévues du volume de travail dans le système, mais ce dernier n’est pas aussi souple qu’il pourrait l’être si le DPM détenait des pouvoirs semblables à ceux du DSAD, qui peut retenir, si besoin est, les services d’avocats ou de mandataires externes (qui ne sont pas des officiers des FAC). Le DPM peut appliquer une politique qui l’autorise à nommer des « procureurs spéciaux » dans certains cas, ce qui permettrait d’augmenter la capacité du service des poursuites, mais comme les avocats ainsi nommés doivent obligatoirement être des officiers, la possibilité pour le système de se doter d’une capacité accrue grâce à ces « procureurs spéciaux » est relativement faible.

Comme il a été mentionné précédemment (en ce qui concerne les tribunaux), de nombreuses affaires instruites devant une cour martiale ont mené à l’imposition de périodes de détention ou d’emprisonnement lors de la détermination de la peine, ce qui indique que le système du service des poursuites contribue efficacement à protéger le public contre les militaires qui commettent des inconduites. En outre, certains dirigeants des FAC pensent que le système de cours martiales actuel a un effet de dissuasion et qu’il favorise le respect de la loi.60 Le système actuel du service des poursuites contribue forcément, dans une mesure importante, à cet effet de dissuasion.

Plusieurs ont exprimé leurs préoccupations à l’ERGCM, affirmant qu’ils doutent que la structure du service des poursuites actuel favorise la production de résultats justes et appropriés. Par exemple, selon certains commentaires recueillis lors des consultations publiques, les procureurs militaires devraient pouvoirsuivre, à tout le moins, un cheminement de carrière spécialisé.61 Bon nombre des dirigeants des FAC, qui ont été consultés, ont laissé entendre que des efforts supplémentaires devraient être faits pour s’assurer que les procureurs contribuent à la production de résultats justes et appropriés, notamment en intégrant les procureurs militaires aux services des poursuites civils pour qu’ils acquièrent une plus grande expertise grâce à un volume de travail plus élevé,62 en ayant recours à des procureurs civils de carrière,63 et en utilisant un service mixte composé de procureurs civils et militaires.64 Tous les commentaires du genre donnent à penser que de l’avis des gens, le système actuel du service des poursuites présente un déséquilibre en ce qui a trait à l’expertise en droit pénal et en droit militaire nécessaire pour produire des résultats justes et appropriés.

En ce qui a trait à la capacité du système actuel du service des poursuites à contribuer à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes, on trouve plusieurs indications selon lesquelles le modèle actuel n’offre pas une efficacité optimale. De nombreux membres des équipes de commandement qui ont été consultés se sont dits frustrés que la discipline au sein de l’unité et l’autorité de commandement soient compromises lorsqu’un procureur militaire décide de ne pas donner suite aux accusations d’infractions disciplinaires qui ont été portées par le personnel de l’unité,65 en particulier lorsque les motifs justifiant cette décision ne sont pas clairement communiqués.66

Cette frustration donne à penser que le système actuel du service des poursuites n’est pas perçu comme étant en mesure de montrer que la collectivité condamne les inconduites de la part du personnel militaire, dans la mesure attendue par les dirigeants des FAC. Du point de vue de ces dirigeants des FAC, le problème ne semble pas découler des décisions proprement dites prises isolément par les procureurs ni de l’indépendance de ces derniers (qui est considérée comme un aspect positif). Au contraire, le problème semble venir du fait que le système actuel crée une sorte de confusion quant au rôle exercé sur le plan disciplinaire, dans la mesure où il permet aux procureurs de contrer l’effet que le commandant recherchait en renvoyant les accusations devant le DPM.

L’incapacité du système actuel à produire des résultats en temps opportun a plus souvent été mentionnée comme une indication que le système actuel ne permet pas de contribuer à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes au sein des FAC. Le système actuel du service des poursuites contribue aux retards. Le temps moyen que les procureurs militaires ont mis, en 2016-2017, pour décider s’il est approprié d’intenter ou non une action en justice, après qu’un dossier eut été renvoyé au DPM, est de 89 jours. Ce délai – bien qu’il ait diminué par rapport à la moyenne de 103 jours en 2006-200767 – fait contraste avec la norme qui existe, d’après les auteurs du rapport Bronson (DPM), au sein du système de justice pénale civil, où les décisions relatives à la mise en accusation sont prises en quelques minutes ou quelques heures, plutôt qu’au bout de quelques semaines ou mois.68

Dans le rapport Bronson (DPM), on mentionne les nombreuses façons dont les responsables de l’examen considèrent que le système de poursuites a contribué aux retards problématiques. L’ERGCM a noté, plus particulièrement, un de ces facteurs qui est encore présent aujourd’hui : l’inexpérience relative des procureurs militaires.69 Dans la mesure où des recommandations faites dans le rapport Bronson (DPM) [ou le rapport LeSage, qui reprend certaines recommandations formulées dans ce dernier] ont été adoptées, ces dernières n’ont pas permis, de manière significative, de réduire les retards attribuables au système actuel du service des poursuites. En outre, bon nombre de ces recommandations (comme suivre un cheminement de carrière spécialisé pour accélérer le déroulement des poursuites) n’ont jamais été mises en œuvre, comme en témoignent les observations faites par le DPM dans son plus récent rapport annuel à l’intention du JAG :

[L]e SCPM a accueilli cinq nouveaux capitaines lors de ou juste avant le début de la période de référence. Dû à leur expérience limitée, ils prennent plus de temps pour réviser des dossiers de niveau de complexité comparable. On leur assigne donc des dossiers moins complexes qui prennent moins de temps à réviser. Ils doivent par ailleurs être supervisés davantage et ils sollicitent l’aide des procureurs d’expérience, ce qui se traduit par une diminution du temps que ces derniers consacrent à leurs propres dossiers. Les procureurs expérimentés se voient donc confier une part plus importante des dossiers complexes qui sont plus longs à traiter alors qu’ils ont pourtant moins de temps à leur consacrer que s’il y avait un nombre plus important de procureurs aguerris. Cependant, la venue de ces capitaines se voulait un choix conscient du DPM et résolument orienté vers l’avenir en raison du talent et du potentiel de ceux-ci. Nous croyons qu’avec l’expérience, ces nouveaux procureurs pourront rapidement devenir plus efficaces et seront en mesure de traiter des dossiers plus complexes tout en demandant moins de supervision. Ceci devrait permettre aux procureurs expérimentés de consacrer davantage de temps à leurs propres dossiers. De manière générale, ceci devrait se traduire par une réduction du temps requis pour procéder à la révision postérieure à l’accusation au cours de l’AF 20172018.70

Bien que la situation décrite ci-dessus par le DPM puisse sembler inhabituelle, elle se reproduira forcément dans un système où au moins trois procureurs par année seront remplacés, à supposer que tous les procureurs sont nommés pour une période de cinq ans au sein de l’organisation du DPM. Le problème lié au roulement de personnel, qui mène à la création d’un nouveau groupe de procureurs inexpérimentés au sein de l’organisation, est donc un problème de structure et non un cas isolé. Certaines façons de corriger ce problème (p. ex., en créant un parcours de carrière d’avocats plaidants pour les procureurs militaires) seront examinées dans un chapitre subséquent.

Le système actuel du service des poursuites contribue largement aux retards faisant en sorte que les affaires sont réglées bien au-delà de la période de six mois au-delà de laquelle les dirigeants des FAC que l’ERGCM a consultés, estiment que les poursuites et les procès n’ont plus l’effet souhaité (ou ont un effet préjudiciable) sur la discipline. Par conséquent, dans une large mesure, le système actuel du service des poursuites ne permet pas de favoriser la production de résultats en temps opportun, d’une manière qui contribuerait à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes des FAC.

Cela étant dit, de nombreux éléments inhérents au système de cours martiales actuel, qui sont à l’origine des retards, sont hors du contrôle du service des poursuites et contribuent à la période de 434 jours qui s’écoule entre la date du dépôt des accusations et la fin des procédures. Sous le régime législatif et réglementaire actuel, pour bon nombre des accusations les plus graves sur lesquelles sont appelées à statuer les cours martiales, les personnes chargées de porter une accusation doivent d’abord déférer celle-ci à un commandant, lequel présente ensuite une demande à l’autorité de renvoi concernant le dépôt de ces accusations devant la cour martiale. L’autorité de renvoi doit renvoyer les accusations au DPM, et les procureurs qui relèvent de ce dernier décident alors s’il convient ou non de prononcer la mise en accusation. Si la mise en accusation est prononcée, l’ACM doit alors convoquer une cour martiale en tenant compte des disponibilités du juge militaire, du procureur et de l’avocat de la défense. Le procès est ensuite tenu. Toutes ces étapes prennent du temps et occasionnent des délais.

En ce qui concerne l’efficience, même en tenant compte du problème associé au manque d’expérience temporaire (potentiel) décrit ci-dessus, les coûts liés aux ressources humaines et financières engagés au sein du système de poursuites actuel sont disproportionnés.

En ce qui a trait aux coûts financiers, les coûts moyens liés au service des poursuites lors d’un procès en cour martiale, au cours des 5 dernières années, se sont élevés à 48 966 $.71 Ce montant représente les salaires des militaires et des civils, les frais de déplacement et les frais de fonctionnement et d’entretien normaux du service des poursuites, divisés par le nombre total de cours martiales tenues.72 Les coûts équivalents dans les systèmes examinés à des fins de comparaison sont les suivants :

Comme ces chiffres l’indiquent, les coûts financiers par procès du système actuel du service des poursuites sont plus de 30 fois supérieurs aux coûts équivalents pour un procès au sein du système de justice pénale civil canadien et plus de 2 fois plus élevés que ceux associés à un procès devant la cour martiale au Royaume-Uni. Toutefois, ces coûts sont comparables à ceux enregistrés au sein du service des poursuites militaires de l’Australie.

En ce qui concerne les coûts liés aux ressources humaines, le SCPM compte actuellement 16,8 équivalents temps plein (ETP) occupant des postes de procureurs (combinaison de membres de la Force régulière et de la Force de réserve).74 En 2016-2017, il était indiqué dans le Rapport annuel du DPM que l’organisation compte 16 procureurs à temps plein de la Force régulière (incluant le DPM lui-même) et 8 procureurs à temps partiel de la Force de réserve (en plus d’un poste vacant supplémentaire à pourvoir par un réserviste). L’organisation compte également 6 civils membres à temps plein du personnel de soutien administratif et un technicien juridique à temps plein.

Tel qu’il a été indiqué précédemment lors de l’évaluation du statut et de la structure des tribunaux militaires, 63 procès sont instruits, en moyenne, chaque année au sein du système, et 65 p. 100 des dossiers traités se règlent au moyen d’un plaidoyer de culpabilité.

Cela signifie qu’en ce qui concerne les ressources humaines requises pour assurer les poursuites, selon les données des 5 dernières années, chaque procureur militaire canadien (procureurs à temps plein et ETP) a présidé, en moyenne, 3,8 cours martiales par année (avec un taux de 1,33 procès contestés chaque année). Ces données peuvent être comparées avec la moyenne de :

Il est clair qu’en ce qui concerne le volume de travail, le service des poursuites militaires du Canada est celui qui dispose du plus grand nombre de ressources parmi tous les systèmes comparés et qu’il bénéficie de beaucoup plus de ressources que les deux services de poursuites provinciaux examinés à des fins de comparaison.

Tel qu’il est indiqué également dans le rapport Bronson (DPM) en ce qui a trait au faible volume de dossiers traités par chaque procureur au sein du système actuel du service des poursuites, ce volume de travail est probablement insuffisant pour permettre aux procureurs qui y travaillent d’acquérir l’expertise requise pour devenir des procureurs hautement compétents (ce qui aurait une incidence sur l’efficacité et l’efficience du système). Selon les auteurs de ce rapport, un procureur civil aurait besoin d’exercer la profession à temps plein et de travailler dans le domaine des affaires contentieuses pendant 3 ou 4 ans, au cours desquels il profiterait du mentorat d’avocats plaidants chevronnés, pour devenir un procureur « hautement compétent ».77 Cela suppose qu’un procureur devrait participer à l’instruction d’entre 300 et 600 procès avant d’atteindre la norme de compétence décrite – cela prendrait donc 75 ans au moins, dans le cas des procureurs militaires au sein du système actuel, qui n’ont aucune expérience antérieure des procès criminels, en supposant que chaque procureur participe à 4 cours martiales par année (ce qui est légèrement supérieur à la moyenne actuelle).

En outre, il est important de souligner que les procureurs de la Force de réserve, au sein de l’organisation du DPM, sont toujours, de façon générale, des procureurs civils qui exercent la profession en tant que civils et qui possèdent, à tout le moins, l’expérience minimale en matière d’affaires contentieuses que les responsables de l’examen du groupe Bronson jugent nécessaire de la part d’un procureur hautement compétent.

Les renseignements ci-dessus concernant les coûts liés aux ressources humaines et financières, lorsqu’on les compare à ceux d’autres systèmes qui produisent des effets identiques ou semblables, indiquent que le système actuel du service des poursuites utilise ces ressources de façon disproportionnée et n’est donc pas efficient.

De façon plus précise, le système actuel du service des poursuites semble devenir de plus en plus inefficient avec le temps. Lorsque le rapport Bronson (DPM) a été rédigé en 2008, les responsables de l’examen ont indiqué ce qui suit : [traduction] « Nous avons conclu que le manque de ressources n’est pas un facteur qui contribue aux lenteurs du système des cours martiales. Certaines personnes à qui nous avons parlé ont même laissé entendre que trop de ressources y sont consacrées. Sans aller aussi loin, nous pensons que les lenteurs du système sont causées par les politiques et les pratiques qui y sont mises en œuvre plutôt que par l’insuffisance des ressources ».78 Depuis 2008, 3 procureurs militaires à temps plein se sont joints au service des poursuites (qui est passé de 13 à 16 procureurs),79 mais le volume des affaires portées devant la cour martiale que le service des poursuites a traités est, en réalité, demeuré le même.80 Les procureurs militaires traitent actuellement moins de dossiers en cour martiale, par personne, qu’en 2008, époque où il a été suggéré que trop de ressources étaient peut-être déjà consacrées à ce service – bien que le temps moyen requis pour prendre la décision d’intenter ou non des poursuites soit passé de 103 à 89 jours.

Il est important de reconnaître que les procureurs militaires – comme tous les autres procureurs publics au Canada – peuvent effectuer beaucoup de travail dans un dossier qui ne donnera jamais lieu à un procès, en donnant des conseils aux enquêteurs, au besoin, et en procédant à la révision postérieure à l’accusation de déterminer s’il y a lieu de poursuivre ou non. Toutefois, même en tenant compte du nombre total de dossiers traités d’une quelconque façon par le service des poursuites au sein du système actuel – qui était de 300 dossiers, au total, en 2016-2017 (le nombre le plus élevé des 4 dernières années),81 cela représente, pour cette année-là, environ 17,6 dossiers par procureur militaire.82

Ces données peuvent être comparées avec celles tirées du Rapport annuel 2015-2016 du Service des poursuites pénales du Canada (SPPC).83 Lors de la rédaction de ce rapport, le SPPC employait 536 avocats et comptait sur les services de 409 autres représentants permanents. Le nombre total de dossiers traités pendant l’année s’élève à 72 538. Cela signifie que chaque avocat ou représentant traite, en moyenne, environ 76 dossiers par année. D’autres données tirées du rapport indiquent que 41 862 dossiers (64 p. 100) étaient « de complexité faible » et qu’un total de 313 558 heures ont été consacrées à ces dossiers par les procureurs (pour une moyenne de 7,5 heures par dossier). En outre, 21 061 autres dossiers (32 p. 100) étaient « de complexité moyenne » et un total de 505 588 heures ont été consacrées à ces derniers par les procureurs (pour une moyenne de 18,7 heures par dossier). Enfin, 2 374 autres dossiers (4 p. 100) étaient « de complexité élevée » et un total de 306 853 heures ont été consacrées à ces derniers par les procureurs (pour une moyenne de 129 heures par dossier).

Comme les dossiers portés devant la cour martiale sont différents de ceux traités par le SPPC, il est possible qu’ils soient en général plus complexes. En supposant que le tiers des dossiers traités par les procureurs militaires sont « de complexité élevée » (c.-à-d. 33 p. 100 de leurs dossiers comparativement à 4 p. 100 dans le cas des procureurs du SPPC) et qu’aucun n’est « de complexité faible » (c.-à-d. les 67 p. 100 restants des dossiers traités par les procureurs militaires sont « de complexité moyenne »), les procureurs militaires ayant un niveau d’efficience équivalant à celui des procureurs du SPPC auraient alors, en moyenne, environ 20 semaines de travail à consacrer chaque année à leurs 6 dossiers « de complexité élevée » et et une autre période de 6 semaines de travail à leurs 12 dossiers « de complexité moyenne »– s’ils travaillent 40 heures par semaine. Ces données fournissent une indication du type de résultats proportionnés sur le plan des ressources humaines et financières qui pourraient être obtenus au sein du système de cours martiales, si le système permettait l’acquisition du type d’expertise en matière d’affaires contentieuses et de droit pénal que semblent posséder les procureurs du SPPC.

En ce qui a trait à la légitimité, la validité constitutionnelle du statut et de la structure institutionnelle du service des poursuites actuel n’est pas sérieusement mise en doute. Dans une affaire récente, la CSC a confirmé le pouvoir conféré par la loi au ministre de la Défense nationale, d’interjeter appel devant la cour martiale84 (ce pouvoir est régulièrement exercé par le DPM, à la demande du ministre).85 Il est donc permis de penser que les normes minimales d’équité sont respectées.

Le DPM agit sous la supervision générale d’un autre officier militaire, à savoir le JAG.86 Le JAG est habilité à fournir des instructions générales au DPM,87 ainsi que des instructions particulières concernant une poursuite donnée.88 Toutefois, ces instructions générales ou particulières doivent être accessibles au public afin de garantir la transparence voulue,89 Le JAG supervise le DPM et le DSAD,90 en plus d’exercer « son autorité sur tout ce qui touche à l’administration de la justice militaire au sein des Forces canadiennes ».91 Certaines personnes consultées ont indiqué à l’ERGCM que cette structure méconnue donne l’impression que l’équité et l’intelligibilité du processus s’en trouvent réduites. Pour reprendre les propos d’un des intervenants, cette situation est comparable à [traduction] « un jeu d’échecs, où le JAG établit toutes les règles et contrôle ensuite les déplacements de l’équipe des Noirs, puis ceux de l’équipe des Blancs ».92 Quelle que soit la mesure dans laquelle une telle déclaration s’avère inexacte d’un point de vue objectif, cette simple perception entache la légitimité du système du service des poursuites et a amené certains intervenants à suggérer d’instaurer une structure où le DPM relèverait directement du ministre, plutôt que d’être placé sous la supervision générale du JAG.93

Enfin, le seul fait que le DPM est un officier militaire, qui relève manifestement d’un grand nombre d’officiers militaires (notamment du JAG), peut créer des difficultés en ce qui a trait à la perception d’équité. Lors des consultations ciblées, certains intervenants ont indiqué à l’ERGCM que toute possibilité que la chaîne de commandement militaire ou la direction générale des services juridiques des forces armées puissent influer sur des poursuites intentées à l’égard d’infractions assimilables à des actes criminels pourrait laisser planer des doutes. Selon eux, un cas de ce genre créerait une sorte de double suspicion : soit que le service des poursuites use de son autorité et de son pouvoir discrétionnaire pour protéger les militaires afin qu’ils ne soient pas tenus responsables de leur inconduite (surtout dans les cas où il s’agit de l’inconduite d’un haut gradé) ou qu’il use de son autorité et de son pouvoir discrétionnaire pour cibler injustement des militaires subalternes qui commettent une inconduite, en entamant une procédure qui offre moins de protection ou une protection moins grande que celle offerte par un système exclusivement civil.94

Dans le cadre de son étude comparative à l’échelle internationale, l’ERGCM a constaté que plusieurs pays qui ont civilarisé le poste correspondant,95 ou aboli tout grade associé à ce poste,96 tirent avantage de cette approche en ce qui a trait à la perception d’équité. L’ERGCM a entendu des commentaires semblables lors des consultations publiques.97

L’ERGCM a également appris, lors des consultations internes, que les membres des équipes de commandement ne sont pas informés de la cause des lenteurs du système, qu’ils estiment n’être informés des décisions des procureurs de ne pas donner suite aux accusations ou de réduire la gravité de ces dernières qu’après que la décision a été rendue et qu’une lettre a été envoyée à l’accusé, et qu’ils s’entendent, dans l’ensemble, pour dire que les décisions proprement dites manquent de transparence.98 De telles observations donnent à penser qu’on pourrait accroître la transparence du système du service des poursuites..

7.3.3 Prestation des services d’avocats de la défense

Il est clair, d’après les consultations internes, que les dirigeants des FAC croient que le système de prestation des services d’avocats de la défense est efficace, en grande partie en raison du fait qu’il aide le système de cours martiales à produire des résultats justes et appropriés. De façon plus précise, plusieurs dirigeants des FAC ont dit croire que le système actuel permet d’atteindre un juste équilibre entre l’expertise en matière de droit pénal et l’expertise militaire.99 Aucun intervenant lors des consultations internes n’a laissé entendre que le système actuel présente des problèmes importants sur le plan de la qualité. De même, aucune observation n’a été formulée quant à son caractère universel; l’ERGCM a constaté que les acteurs du système ont été appelés à intervenir dans le cadre d’un large éventail d’opérations et de contextes propres aux FAC.

En ce qui concerne l’efficience, l’ERGCM s’est vu livrer un message empreint de circonspection lors des consultations internes : les services d’avocats de la défense doivent être largement accessibles, mais sans doute dans une mesure moindre qu’ils ne le sont à l’heure actuelle; chose certaine, ils ne devraient pas être illimités.100 Lors de ces consultations, il a été suggéré – en raison de la responsabilité accrue qui incombe aux membres des FAC parce qu’ils effectuent un travail dangereux et difficile – que l’État finance entièrement les services d’avocats de la défense offerts aux militaires accusés, dans les cas où les actes reprochés sont liés aux fonctions militaires qu’ils étaient tenus d’exercer, mais non dans ceux où les accusations n’ont rien à voir avec ce que l’accusé était censé faire, dans les circonstances, en sa qualité de militaire. Dans ce dernier cas, les intervenants consultés ont indiqué qu’un modèle de contribution, selon lequel les personnes accusées assumeraient une partie ou la totalité des coûts associés à leur défense, serait approprié. Ces commentaires, tirés des consultations internes des FAC, ont joué un rôle important pour ce qui est d’aider l’ERGCM à comprendre l’étendue des services d’avocats de la défense qui doivent être offerts, selon les dirigeants des FAC, dans le système; ce facteur a été pris en compte par l’ERGCM dans son évaluation de l’efficience.

En ce qui concerne la proportionnalité des coûts liés aux ressources humaines et financières, l’ERGCM a constaté que le système des services d’avocats de la défense est plus difficile à évaluer par rapport aux systèmes comparables appropriés, étant donné que le modèle des services entièrement financés du système de cours martiales, où les avocats de la défense offrent leurs services à temps plein, est différent de celui de la plupart des autres systèmes militaires comparables et qu’il diffère considérablement des régimes civils d’aide juridique et du modèle des services de défense en matière pénale offerts par les avocats de pratique privée. Par exemple, aucun autre pays, à l’exception des États-Unis, n’a adopté un modèle de services entièrement financés, où les avocats de la défense offrent leurs services à temps plein.101

En ce qui a trait aux coûts financiers, les coûts moyens liés aux services d’avocats de la défense lors d’un procès en cour martiale, au cours des 5 dernières années, s’élevaient à 28 485 $ (ce qui inclut les salaires des militaires et des civils, les frais de déplacement et les frais de fonctionnement et d’entretien normaux du SAD).102 Dans la mesure où des comparaisons peuvent être faites, les coûts équivalents dans les systèmes examinés à des fins de comparaison sont les suivants :103

Comme ces chiffres l’indiquent, les coûts financiers par procès du système actuel du SAD sont plus de 15 fois supérieurs aux coûts équivalents pour un procès au sein du système de justice pénale civil de l’Ontario et plus de 4 fois plus élevés que ceux d’un procès devant la cour martiale au Royaume-Uni.

Cependant, au moment de comparer ce système au régime d’aide juridique civil du Canada, il est important de souligner que de nombreux acteurs du système de justice civil, dont l’ABC, jugent inadéquate la contribution du gouvernement au financement de l’aide juridique : « Il faudrait manifestement plus d’argent pour les services d’aide juridique au Canada ».105 Par conséquent, dans ce cas-ci, l’ERGCM considère la comparaison avec le système de cours martiales du Royaume-Uni comme étant la plus appropriée, étant donné que d’après l’analyse comparative de l’ERGCM, les intervenants britanniques semblent être pleinement satisfaits de la qualité des services d’avocats de la défense reçus106 qui sont offerts à une fraction des coûts engagés dans le système actuellement utilisé au Canada pour ces services.

En ce qui concerne les coûts liés aux ressources humaines, au cours des 5 dernières années, les avocats de la défense (ETP) affectés au SAD ont chacun participé, en moyenne, à 6,7 cours martiales par année. En moyenne, 2,3 de ces procès ont été contestés. Les avocats reçoivent l’aide de 1 technicien juridique et de 2 membres du personnel de soutien administratif. Le DSAD a indiqué à l’ERGCM qu’en février 2017, le plus grand nombre de dossiers traités par un même avocat au sein de son organisation avait été de 23 dossiers. En gardant à l’esprit que plus d’un an (434 jours) s’écoule,107 en moyenne, entre le moment où les accusations sont portées et la fin des procédures en cour martiale, l’ERGCM suppose qu’un avocat de la défense du système militaire actuel du SAD ne traiterait habituellement pas plus de 20 dossiers environ au cours d’une année donnée.

Il ressort du rapport Bronson de 2009 que la charge de travail habituelle des avocats de la défense au sein des bureaux d’aide juridique ou des avocats de pratique privée varierait davantage entre 70 et 100 dossiers (ou plus) par année.108 Le Bronson Consulting Group a souligné l’ampleur de l’écart observé :

[traduction]

Le Bureau du droit criminel de Brampton compte deux avocats-conseils à l’interne, un directeur, un travailleur juridique communautaire et un préposé à la réception. À l’heure actuelle, les effectifs du bureau d’Ottawa sont considérablement réduits, mais à des fins de comparaison, nous utiliserons les chiffres de 2006 et de 2007, étant donné qu’à l’époque, le bureau comptait un directeur, deux avocats-conseils à l’interne, un travailleur juridique communautaire et un préposé à la réception. En 2006 et en 2007, au sein de chacun des bureaux du droit criminel, les avocats-conseils et le directeur assumaient une pleine charge de travail et offraient des services juridiques à leurs clients à tous les échelons du système judiciaire, notamment dans le cadre d’appels devant la Cour supérieure.

Le Bureau du droit criminel de Brampton a ouvert 314 dossiers en 2006 et 162 dossiers au cours de la période de 6 mois allant de janvier à juin 2007. Le Bureau du droit criminel d’Ottawa a ouvert, quant à lui, 276 dossiers en 2006 et 120 dossiers au cours de cette même période de 6 mois. À l’époque, les deux bureaux comptaient au sein de leurs effectifs un directeur et deux avocats-conseils, ainsi que le personnel de soutien susmentionné. Il est important de souligner que la plupart des dossiers qui ont été ouverts étaient ceux de clients accusés d’infractions au Code criminel pour lesquelles il était peu probable qu’une peine d’incarcération soit imposée, advenant un verdict de culpabilité. Chaque bureau traitait un volume relativement peu élevé de cas qui pourraient être considérés comme des « cas d’infractions graves ».

Il convient simplement de dire que la différence observée entre le volume de travail des avocats du SAD et celui des employés des bureaux d’aide juridique est considérable et justifie une analyse plus approfondie.109

Même en tenant compte du fait que les avocats militaires qui relèvent du DSAD sont également responsables du service téléphonique des avocats commis d’office, il apparaîtrait que les coûts liés aux ressources humaines et financières engagés au sein du système de cours martiales sont disproportionnés.

Les dépenses importantes associées au modèle actuel du SAD n’ont donc rien d’étonnant. En août 1997, l’équipe d’étude sur les avocats de la défense des FAC a constaté que le modèle actuel représentait l’option la plus coûteuse parmi toutes celles examinées.110

Cette même équipe d’étude a souligné que ce modèle poserait des difficultés, compte tenu du faible volume de travail à venir, pour ce qui est de maintenir un niveau d’expertise et de compétence adéquat111 - tout comme les auteurs du rapport Bronson de 2008 l’ont soulevé au sujet des procureurs.112

Le DSAD actuel a indiqué, de manière implicite, qu’il est difficile de maintenir les niveaux de compétence nécessaires pour que le système de cours martiales fonctionne plus efficacement, lorsqu’il a fait remarquer que la structure de gouvernance actuelle du DSAD est problématique, [traduction] « étant donné que les avocats de la défense relèvent toujours du commandement du JAG, qui est membre de l’équipe de direction, et que ce dernier contrôle leur paye, leur affectation et leur évaluation annuelle, malgré le fait qu’ils représentent la partie adverse ». En outre, il a parlé de l’incidence de l’organisation interne sur la capacité de veiller au maintien des compétences au sein de l’organisation :

[traduction]
Le problème que je juge très préoccupant en ce qui a trait au niveau d’expérience des avocats militaires de la défense est le fait que l’an dernier et l’année d’avant, on ne m’a effectivement pas dit quels avocats militaires avaient exprimé le désir de faire partie du SAD. Il s’agit là d’un revirement complet de situation par rapport à mes premières années à ce poste. Cette situation risque d’influer grandement sur le niveau de compétence au sein de l’organisation, étant donné que d’autres choisissent unilatéralement les personnes qui en feront partie. De plus, il est décevant pour les jeunes officiers qui me disent avoir émis le souhait d’être affectés au SAD d’apprendre que je n’ai jamais été informé de leur désir de faire partie de l’organisation.113

Le DSAD a laissé entendre que comme il n’a aucun contrôle sur les employés affectés au sein de son équipe et ceux qui en sortent, et qu’il ne sait pas quels avocats militaires ont exprimé le désir de faire partie du SAD, il a récemment été incapable de remplacer plusieurs avocats plus expérimentés, à la suite de leur départ à la retraite, par des avocats possédant une expérience comparable, compromettant ainsi les chances de maintenir le niveau d’expertise en matière d’affaires contentieuses au sein de son organisation.114

Un autre problème lié au modèle actuel a été soulevé dans l’étude sur les avocats de la défense réalisée en 1997 : si le système devait continuer de disposer d’une grande quantité de ressources, en dépit d’un volume de travail aussi peu élevé, alors [traduction] « les avocats pourraient être tentés de faire des recherches et de présenter des arguments et des requêtes qui autrement n’auraient pas été jugés pertinents, ce qui prolongerait la durée du procès et augmenterait les coûts ».115 Douze ans plus tard, le groupe Bronson a formulé les observations suivantes dans son rapport, paru en 2009 :

[traduction]
Chaque avocat est libre de gérer ses dossiers comme il l’entend. Les avocats ne consignent pas leurs heures de travail et peuvent consacrer autant de temps à un dossier lié à une absence non autorisée qu’à un dossier d’homicide involontaire, s’ils le souhaitent [...]. Nous n’avons pas réussi à déterminer le nombre d’heures que les avocats consacrent aux différents dossiers qu’ils traitent. Nous savons, d’après les statistiques, que les avocats-conseils traitent chacun, en moyenne, entre 10 et 12 dossiers par année. Les réservistes sont censés traiter entre 3 et 5 dossiers par année, mais leur charge de travail, l’an dernier, s’élevait à près de 10 dossiers chacun. Nous avons recueilli la preuve anecdotique d’un réserviste qui affirme qu’il lui faut en moyenne 3 jours pour se préparer en vue d’un procès devant la cour martiale, sans compter ses déplacements et sa présence lors de l’instruction. Ces chiffres soulèvent des questions concernant les activités des avocats de la défense, dont la charge de travail semble peu volumineuse lorsqu’on la compare à celle des employés civils des bureaux d’aide juridique de l’Ontario.116

Par ailleurs, le groupe Bronson a également précisé ce qui suit :

[traduction]
Nous craignons que les clients ne soient pas pleinement conscients des délais occasionnés dans leur dossier par de telles requêtes [fondées sur la Charte]. Lorsque nous avons soulevé ces préoccupations, certaines personnes que nous avons interrogées nous ont assuré que leurs clients, même s’ils étaient au fait des problèmes causés par ces requêtes, ont malgré tout demandé à leur avocat d’aller de l’avant. D’autres personnes estimaient qu’en fait, les clients n’étaient pas forcément informés comme il se doit. Comme nous n’avions pas pour mandat d’interroger les clients, nous n’avions aucun moyen de savoir dans quelle mesure ces derniers participent aux décisions prises dans leur dossier. Les renseignements contradictoires recueillis auprès d’anciens avocats de la défense et de titulaires actuels de ce poste étaient suffisants pour soulever des doutes à cet égard.117

Enfin, dans son rapport de 2009, le groupe Bronson a exprimé des préoccupations au sujet d’une perception entretenue par certaines personnes :

[traduction]
L’objectif du SAD était de réformer le système de justice militaire plutôt que de représenter des clients individuels. Selon certaines personnes à qui nous avons parlé, y compris des avocats de la défense, cela était parfois plus important que de répondre aux besoins des clients. Nous avons été informés d’un cas particulier où le client ne savait même pas que l’avocat chargé de son dossier avait interjeté appel devant la CSC, par exemple.

L’ERGCM ne peut pas dire si des arguments manifestement inappropriés ou infondés sont invoqués par les avocats des services d’avocats de la défense, mais elle constate que les avocats des accusés ont, dans bien des cas, obtenu gain de cause lorsqu’ils ont présenté des demandes fondées sur la Charte, lesquelles peuvent s’avérer profitables pour leurs clients devant la cour martiale et la CACM. En outre, l’ERGCM n’a pris connaissance d’aucun commentaire de la part des membres du barreau ou des juges, concernant les activités des avocats de la défense, qui donnerait à penser qu’ils ne représentent pas adéquatement les accusés.

Toutefois, en ce qui concerne la proportionnalité des ressources humaines et financières, l’ERGCM partage les préoccupations exprimées par le groupe Bronson en 2009 quant à l’existence d’un système qui n’établit aucune limite externe et qui n’exerce aucun contrôle ni aucune surveillance sur l’étendue des services d’avocats de la défense offerts à toute personne accusée, aux frais de l’État. En outre, à la lumière des commentaires des dirigeants des FAC, qui ont indiqué que les services d’avocats devraient être entièrement financés uniquement dans les cas où une personne accusée est traduite devant les tribunaux par suite des fonctions militaires qu’elle était tenue d’exercer, l’ERGCM estime qu’il y a un fondement valable à la recommandation du groupe Bronson voulant que le SAD assure un suivi approprié du temps consacré par les avocats de la défense à leurs dossiers,118 et qu’une limite raisonnable soit établie en ce qui a trait à l’étendue des services juridiques financés par l’État :

[traduction]
Bien que nous soyons d’accord sur le fait que nos militaires méritent ce qu’il y a de mieux, il convient d’établir des limites raisonnables. Si un client [...] ne conteste pas les allégations qui ont donné lieu aux accusations et que la peine à laquelle il s’expose est relativement mineure, il n’est pas logique de dépenser des milliers de dollars en temps et en déplacements. Il pourrait être approprié de se laisser guider par la question suivante : « Est-ce qu’un membre des FC détenant un grade équivalent dépenserait ce montant s’il devait lui-même payer pour ces services? »119

À la lumière de tous les renseignements et analyses ci-dessus, l’ERGCM conclut que le système actuel des services d’avocats de la défense est plutôt inefficient, particulièrement dans la mesure où aucun contrôle externe important n’est exercé sur l’étendue des services offerts dans chaque cas, ce qui peut entraîner des coûts disproportionnés sur le plan des ressources humaines et financières. L’ERGCM constate que dans la plupart des systèmes de cours martiales qui offrent une aide juridique comparable aux militaires, il appert qu’un tarif établissant les niveaux de service de base à fournir dans différentes catégories d’affaires,120 ou un système de contribution selon lequel une personne accusée assume une partie des coûts,121 de sa défense a nettement favorisé l’efficience du système d’aide juridique.

En ce qui concerne la légitimité, l’ERGCM constate qu’aucun des commentaires reçus dans le cadre des consultations publiques ou internes au sein des FAC ne donne à penser que le recours aux avocats militaires de la défense, dans le système actuel des services d’avocats de la défense, crée des problèmes au chapitre de l’équité ou de l’intelligibilité du processus. Dans les cas où le SAD a été mentionné lors de ces consultations, la perception du service qu’avaient les intervenants semblait positive, de sorte que sa légitimité s’en trouve renforcée.122

Toutefois, les perspectives critiques adoptées par le passé à l’égard du système de cours martiales et les consultations ciblées donnent à penser que certaines préoccupations liées à l’équité et à l’intelligibilité peuvent émerger au sein du système actuel des services d’avocats de la défense. Par exemple, en 1997, l’équipe d’étude sur les avocats de la défense a souligné que l’équité du processus pourrait être mise en doute si un officier militaire était désigné pour défendre l’accusé. Les membres de l’équipe ont indiqué ce qui suit :

[traduction]
Le statut d’officier des avocats de la défense n’empêche pas, comme certains militaires du rang l’ont soulevé, que certains croient que les avocats de la défense se montrent loyaux envers le corps des officiers et le système plutôt qu’envers le militaire lui-même. Ce problème de perception peut être quelque peu atténué en exigeant que les avocats de la défense revêtent la toge lors des procès plutôt que de se présenter en uniforme. Toutefois, comme les participants au procès sauraient quand même quel grade détiennent le procureur de la poursuite et l’avocat de la défense, ce changement aurait, au mieux, une valeur symbolique.123

Dans le même ordre d’idées, le président de la SIDMDG était d’avis qu’un avocat en uniforme sera toujours suspecté de ne pas être en mesure d’offrir des conseils d’une manière totalement indépendante, compte tenu de la relation professionnelle (à long terme, en principe) qu’il entretient avec le ministère de la Défense. Par conséquent, il a recommandé de ne pas avoir recours aux avocats militaires pour assumer le rôle des avocats de la défense dans un système semblable à celui de cours martiales.

De même, un autre participant aux consultations ciblées de l’ERGCM a suggéré que la structure hiérarchique, au sein du système actuel des services d’avocats de la défense, pourrait créer des problèmes de légitimité en raison de problèmes perçus en matière d’équité et d’intelligibilité du fait que l’officier (JAG) dont relève le DSAD est celui qui assure la supervision générale du service des poursuites et qui agit également comme conseiller juridique auprès du ministre et des FC dans les affaires relevant du droit militaire.124

L’ERGCM a remarqué que certains pourraient penser que les avocats de la défense au sein du système actuel se trouvent constamment dans une situation de conflit d’intérêts, qui risque de compromettre l’équité et l’intelligibilité : les avocats de la défense ont l’obligation éthique de défendre leurs clients contre la Couronne et doivent plaider contre l’organisation dont relèvent les officiers des FAC qui gèrent entièrement leur carrière (notamment leur affectation, leurs promotions et les augmentations salariales connexes) et à laquelle ces derniers offrent principalement leurs services et leurs conseils juridiques. Cela dit, l’ERGCM tient à souligner qu’elle n’est au fait d’aucun cas où un avocat de la défense au sein du système actuel a demandé à se retirer du dossier d’un client en raison d’un tel conflit d’intérêts. Par conséquent, il semblerait que les avocats eux-mêmes ne voient pas là un conflit d’intérêts qui les forcerait, d’un point de vue éthique, à se retirer du dossier de leur client.

Dans ce cas-ci, même si les dirigeants des FAC considèrent comme juste et efficace le système actuel des services d’avocats de la défense, l’ERGCM a accordé beaucoup de poids à l’opinion des experts, selon lesquels il existe certains problèmes sur le plan de la légitimité liés principalement au chapitre de l’équité du fait que les avocats de la défense proviennent de l’organisation (militaire) même ayant des intérêts opposés à ceux des personnes accusées, alors que ces dernières sont représentées par les avocats militaires de la défense.

Dans le cadre de son étude comparative à l’échelle internationale, l’ERGCM a observé que dans les pays où des avocats de la défense civils défendent les militaires accusés, on constate un haut niveau de confiance dans l’équité des procédures.125

7.3.4 Le corpus d’infractions d’ordre militaire

En ce qui a trait à l’efficacité, l’ERGCM n’a recueilli aucun commentaire donnant à penser que la série d’infractions d’ordre militaire actuellement prévues est inadéquate. Certains dirigeants des FAC parmi ceux qui ont été consultés ont laissé entendre qu’il faudrait, si la compétence de juger les infractions commises est conférée aux cours martiales, qu’elles soient dans tous les cas jugées plus rapidement au sein de ce système qu’elles ne le seraient dans le système civil;126 un autre intervenant a plutôt suggéré de réduire le nombre d’infractions à l’égard desquelles l’accusé « peut choisir la procédure » de façon à ce que la chaîne de commandement soit mieux en mesure de veiller à ce que les affaires mineures fassent l’objet d’un procès sommaire.127 Pour répondre à cette préoccupation, des modifications allant dans le sens des propositions faites dans le projet de loi C-71 (qui aurait permis de créer des catégories mutuellement exclusives de « fautes » donnant lieu à des procès sommaires et d’« infractions » menant à la tenue d’un procès devant une cour martiale – voir l’hypothèse no 1 au chapitre 1) pourraient être apportées à la loi.

L’ERGCM constate que la série d’infractions existante répond aux critères d’universalité du fait que la compétence de juger des infractions d’ordre militaire peut être exercée partout dans le monde, peu importe l’endroit où l’infraction a été commise.

Il ne semble pas y avoir de lacunes dans la série d’infractions d’ordre militaire existante. Certes, il est possible que certaines de ces infractions soient désuètes ou redondantes, mais ce problème ne semble pas nuire à l’efficacité. Par conséquent, l’ERGCM estime que la série d’infractions d’ordre militaire existante contribue efficacement à l’atteinte des objectifs du système de cours martiales.

En ce qui concerne l’efficience – qui consiste pour un système à remplir son objectif sans entraîner des coûts disproportionnés –, les renseignements dont l’ERGCM dispose donnent à penser que la série d’infractions d’ordre militaire existante est problématique, comme il sera expliqué dans les paragraphes qui suivent.

De bien des façons, l’évaluation des systèmes de tribunaux et de poursuites actuels réalisée par l’ERGCM donne à penser que ces systèmes sont efficaces seulement pour atteindre le même genre d’objectifs (ordre et bien-être publics) que ceux visés par le système de justice pénale civil à l’égard des infractions de droit commun.

Au Canada, aucun précédent ni aucun renseignement ne porte à croire que le système de justice pénale civil permettrait d’assurer l’ordre et le bien-être publics en ce qui a trait aux infractions exclusivement militaires – et l’absence de toute expertise militaire au sein du système actuel donne à penser que ce dernier parviendrait difficilement à produire des résultats justes ou appropriés à l’égard de ce type d’infractions.

Toutefois, il y a amplement de renseignements et de précédents qui suggèrent que le système de justice pénale civil peut favoriser et favorise effectivement l’ordre et le bien-être publics en ce qui a trait aux infractions criminelles ordinaires. Il s’agit de la raison d’être du système de justice pénale civil du Canada, et malgré toute lacune que peut présenter le système en raison de ses lenteurs ou d’autres facteurs, il est clair qu’il est efficace pour ce qui est d’assurer l’ordre et le bien-être publics.

Efficience – infractions exclusivement militaires. Dans la mesure où le système de cours martiales dispose de l’expertise militaire nécessaire pour produire des résultats justes et appropriés en ce qui concerne les infractions exclusivement militaires, alors que le système de justice pénale civil ne dispose pas actuellement de cette expertise, toute analyse de l’efficience qui s’attache à la proportionnalité des coûts liés aux ressources humaines et financières du système de cours martiales actuel liés à ce type d’infractions, est foncièrement inutile, étant donné qu’aucun autre système à l’heure actuelle ne peut ou ne devrait juger ces infractions. Autrement dit, la compétence pour juger les infractions exclusivement militaires au sein du système de cours martiales ne peut pas entraîner des coûts disproportionnés sur le plan des ressources humaines et financières, étant donné que toute solution impliquant le retrait de cette compétence contrecarrerait l’atteinte des objectifs du système de cours martiales en raison de l’impunité qui serait accordée dans les cas d’infractions exclusivement militaires. (Toutefois, il est important de souligner que la façon dont cette compétence est exercée à l’égard des infractions exclusivement militaires pourrait entraîner des coûts disproportionnés sur le plan des ressources humaines et financières, même si la simple existence de la compétence de juger les infractions militaires occasionne des coûts proportionnés.)

Efficience – infractions criminelles ordinaires. Si, pour ce qui est des infractions criminelles ordinaires, le système de cours martiales et le système de justice pénale civil actuels permettent tous deux d’assurer de façon acceptable et sensiblement semblable l’ordre et le bien-être publics, toute analyse de l’efficience portant sur la proportionnalité des coûts liés aux ressources humaines et financières du système de cours martiales actuel, qui sont attribuables à ce type d’infractions (jugées comme des infractions militaires), devrait avoir presque exclusivement pour but de déterminer lequel de ces systèmes peut traiter ces infractions criminelles ordinaires à moindre coût – étant donné que les deux systèmes permettent d’assurer de façon acceptable l’ordre et le bien-être publics lorsqu’il est question de telles infractions.

Dans les sections précédentes du présent chapitre, il a été question des coûts engagés lors d’un procès tenu devant une cour martiale pour les services judiciaires, les services de poursuites et ceux des avocats de la défense. Lorsqu’on additionne tous ces coûts, le coût total moyen d’un procès en cour martiale s’élève à 109 331 $.128 Le coût équivalent par procès (en tenant compte des mêmes catégories de coûts, à savoir le coût des services judiciaires, le coût des services de poursuites et les coûts totaux de l’aide juridique dans les affaires criminelles pour l’ensemble des procès) est de 3 561 $ au Manitoba et de 3 690 $129 en Ontario. Comme ces chiffres l’indiquent, les coûts associés à la tenue d’un procès dans le système de cours martiales actuel sont d’environ 30 fois supérieurs à ceux engagés au sein du système de justice pénale civil.

En se fondant sur ces données, de même que sur les assertions voulant que le système de justice pénale civil et le système de cours martiales soient tous deux capables d’assurer de façon acceptable et sensiblement semblable l’ordre et le bien-être publics et que le système de cours martiales actuel ne permette pas de faire respecter la discipline dans la plupart des cas, l’ERGCM conclut – strictement en ce qui concerne l’ordre et le bien-être publics – que la série d’infractions d’ordre militaire existante est inefficiente, dans la mesure où elle permet que des infractions civiles ordinaires soient jugées dans un système 30 fois plus coûteux qu’un autre système convenable. À cet égard la série d’infractions d’ordre militaire existante entraîne, en ce moment, des coûts disproportionnés sur le plan des ressources humaines et financières dans jusqu’à 25 procès en cour martiale par année – le nombre moyen de procès, sur une période de 5 ans, relatifs à des accusations portées en vertu de l’article 130 de la LDN à l’égard d’une infraction criminelle de droit commun.130

Cela dit, si un objectif disciplinaire était atteint en intentant des poursuites dans le système de cours martiales à l’égard d’infractions civiles ordinaires (notamment dans les cas où des militaires volent ou agressent d’autres militaires), et que cet objectif ne pouvait pas être atteint à l’issue de poursuites dans le système de justice pénale civil, cette analyse de l’efficience devrait alors être modifiée afin de tenir compte de l’avantage supplémentaire, sur le plan disciplinaire, qui pourrait justifier – en théorie – les coûts additionnels engagés lors d’une poursuite devant une cour martiale. L’ERGCM constate qu’en raison du temps mis pour mener un procès à terme dans le système de cours martiales, les hauts dirigeants des FAC consultés ont été nombreux à indiquer que le système permet rarement de favoriser la discipline.

En ce qui concerne la légitimité, plusieurs personnes ont indiqué à l’ERGCM, lors des consultations publiques, que les cours martiales ne devraient pas avoir compétence à l’égard des infractions criminelles de droit commun, alors que d’autres ont précisé que cette compétence devrait leur être dévolue uniquement dans les cas où il y a un lien étroit avec le service militaire. D’autres intervenants ont laissé entendre que les cours martiales ne devraient pas avoir compétence dans les cas d’agressions sexuelles. L’ERGCM en vient à la conclusion que ces commentaires peuvent avoir été faits en raison de certaines préoccupations concernant l’équité, l’intelligibilité ou la transparence du processus, mais elle ne peut pas en être certaine.

Comme le démontrent ces données, des préoccupations quant à la légitimité résultent de l’existence de la compétence à l’égard des infractions criminelles de droit commun faisant partie de la série d’infractions d’ordre militaire actuellement prévues, alors qu’aucune préoccupation du genre n’a été exprimée en ce qui concerne les infractions exclusivement militaires.

7.3.5 Peines, sanctions et détermination de la peine

Lors de son évaluation du système de sanctions et de peines actuel, l’ERGCM a examiné le régime juridique proprement dit, ainsi que la façon dont ce dernier est appliqué au sein du système de cours martiales.

En ce qui concerne l’efficacité, l’ERGCM a conclu que, compte tenu de la disponibilité et de l’utilisation des peines d’emprisonnement et de détention, le système de cours martiales permet d’assurer, dans une certaine mesure, la protection du public contre les militaires qui commettent des inconduites. L’examen par l’ERGCM des décisions rendues en cour martiale concernant les sentences, du 1er avril 2012 au 31 mars 2017, a révélé que 57 contrevenants (23 p. 100 de tous ceux qui se sont vu infliger une peine en cour martiale) ont été condamnés à une période d’emprisonnement ou de détention. Ce taux est comparable à celui observé dans le système de justice pénale civil,131 et amène l’ERGCM à penser que le système de tribunaux militaires a pour effet d’aider à protéger le public, au besoin.

Toutefois, compte tenu de certaines perceptions largement répandues parmi les personnes consultées par l’ERGCM – tant les membres des FAC (parmi les hauts dirigeants132 et les moins hauts gradés133) que les intervenants externes134 – selon lesquelles les peines imposées aux contrevenants sont trop clémentes, dans bien des cas, l’ERGCM craint que le régime de sanctions et de peines actuel ne permette pas de montrer de manière adéquate que la collectivité condamne les inconduites de la part du personnel militaire.

Il ressort également que certains aspects du régime de sanctions et de peines actuel ne semblent aucunement contribuer à assurer la réadaptation des militaires qui commettent des inconduites ou de montrer que la collectivité condamne de telles inconduites de leur part. Plus précisément, il a été constaté que la majeure partie du personnel estime que la plupart des militaires ne comprennent pas les sanctions imposées par le commandement – avertissements, réprimandes et blâmes –, et qu’ils estiment qu’elles n’ont pas de portée pratique et qu’elles ne constituent qu’une simple « tape sur les doigts ».135

Enfin, plusieurs intervenants ont indiqué que l’échelle des peines actuellement prévue à l’article 139 de la LDN136 et le fait que des mesures disponibles dans le système civil137 en matière de détermination de la peine ne le soient pas dans le système de cours martiales s’avèrent problématiques. L’ERGCM conclut que ces commentaires reposent sur la perception que le régime de sanctions et de peines actuel ne permet pas forcément d’en arriver à des résultats justes et appropriés en matière de détermination de la peine.

En ce qui concerne l’efficience, l’ERGCM n’a obtenu aucun renseignement qui l’amène à penser que le régime de sanctions et de peines actuel soulève des préoccupations en ce qui a trait à la proportionnalité des coûts liés aux ressources humaines ou financières au sein du système de cours martiales.

En ce qui concerne la légitimité, plusieurs intervenants ont indiqué à l’ERGCM que le régime de sanctions et de peines actuel n’est pas équitable parce qu’il n’est pas parfaitement équivalent au régime de peines civil en ce qui a trait aux options offertes et aux règles applicables.138 Dans le même ordre d’idées, un haut dirigeant des FAC a indiqué qu’il n’était pas équitable, non plus, de conserver des peines exclusivement d’ordre militaire, puisque cela expose le personnel militaire à des peines dons les autres Canadiens ne sont pas passibles.139

D’autres intervenants ont laissé entendre que l’exercice du pouvoir discrétionnaire en matière de détermination de la peine sous le régime actuel entraîne des résultats incohérents140 ou inappropriés141 et ont indiqué que des lignes directrices en la matière142 et des règles de preuve qui forceraient la cour martiale à entendre le témoignage et les recommandations de la chaîne de commandement concernant la peine à imposer devraient être adoptées,143 et des peines minimales obligatoires devraient être prévues pour certaines infractions144 – ce qui permettrait possiblement d’accroître la transparence des décisions rendues à cet égard et de favoriser davantage la production de résultats justes et appropriés en matière de peines.

7.3.6 Les règles de preuve

L’ERGCM a obtenu de nombreuses indications selon lesquelles les règles de preuve qui s’appliquent actuellement devant les cours martiales, énoncées dans les RMP, ne sont que passablement efficaces et efficientes.

Ces indications ont été obtenues dans le cadre des consultations publiques145 et ciblées146 et des consultations internes des FAC.147 Des indications semblables figuraient dans le rapport LeSage de 2011, dans lequel le juge LeSage a formulé les observations et les recommandations suivantes :

Dans la structure des cours martiales, il existe depuis des années des Règles militaires de la preuve pour orienter et faciliter la procédure applicable en cour martiale. Ces règles n’ont pas été régulièrement mises à jour et elles n’ont pas suivi le même rythme que l’évolution du droit de la preuve en common law. Les juges militaires d’aujourd’hui sont parfaitement qualifiés et connaissent bien le droit et la procédure, au même titre que les avocats qui comparaissent devant eux. Les Règles militaires de la preuve ne sont plus nécessaires, à mon avis, aux instances devant la cour martiale. Les règles de la preuve de la common law ainsi que la Loi sur la preuve au Canada et, s’il y a lieu, d’autres lois provinciales et fédérales sur la preuve, de même que les décisions judiciaires bien connues des juges militaires et de l’avocat, devraient fournir des directives amplement suffisantes pour les poursuites devant la cour martiale. C’est tout ce dont on a besoin.

Recommandation 28
Les Règles militaires de la preuve doivent être remplacées par les règles de preuve prévues par la loi et la common law dans le système de cour martiale.148

Depuis des années, des efforts ont été faits en vue de réformer les RMP149 et de les étudier au sein du milieu académique,150 mais malgré cela, elles n’ont pas été mises à jour de manière à en favoriser l’efficacité (en aidant à produire des résultats justes et appropriés) ou l’efficience (en permettant d’obtenir des résultats en temps opportun lors des procès, grâce à des règles de preuve qui accélèrent la procédure devant les tribunaux, dans la mesure du possible).

Dans le cadre de son étude comparative internationale, l’ERGCM a constaté que bien que la plupart des pays appliquent dans leurs systèmes de cours martiales les règles ordinaires de preuve applicables devant les tribunaux civils, bon nombre d’entre eux maintiennent en vigueur quelques règles spéciales (p. ex., des règles sur la façon de mettre en preuve des éléments d’ordre militaire, comme les ordres permanents, ou d’établir qu’un navire est un navire de guerre, ou de créer une présomption à cet égard)151 qu’ils jugent utiles.

Bien que cela n’ait pas été indiqué lors des consultations, l’ERGCM estime que le droit de la preuve applicable actuellement pose probablement un problème de légitimité, dans la mesure où les règles de preuve dans le système de cours martiales sont méconnues comparativement aux règles équivalentes applicables dans le système de justice pénale civil et sont donc moins intelligibles.

7.3.7 Les droits, motifs et mécanismes d’appel

La seule observation recueillie par l’ERGCM concernant les appels laissait entendre, de façon implicite, qu’il serait utile que la CACM bénéficie d’une plus grande expertise en droit pénal et militaire puisque cela favoriserait la production de résultats justes et appropriés et donc l’efficacité. Plus précisément, un intervenant a suggéré que la Cour soit autorisée à nommer un ami de la cour ou à utiliser un tout autre moyen en vue d’attirer l’attention de la Cour sur des questions d’ordre militaire particulières, hors du champ d’expertise habituel de cette dernière.152 Un autre intervenant a laissé entendre que la CACM devrait être composée de juges civils et d’un juge militaire qui apporterait ses connaissances militaires à la Cour.153 Un autre a indiqué que le recours aux juges de la Cour fédérale pour présider la CACM n’était pas l’idéal et a recommandé que seuls les juges des cours d’appel provinciales soient appelés à siéger à la CACM.154

Malgré ces observations et ces suggestions, il appert à l’ERGCM que le système d’appels actuel est somme toute efficace.

Bien qu’aucun commentaire n’ait été formulé à cet égard lors des consultations, l’ERGCM a conclu que le système d’appels actuel est efficient, étant donné que la CACM tire profit de l’infrastructure existante des services judiciaires et a recours uniquement à des juges civils, qui sont déjà affectés à des tribunaux canadiens qui tiennent régulièrement des audiences. Les coûts supplémentaires sont donc négligeables. Le nombre de juges nommés à la Cour et la répartition géographique de ces derniers facilitent la prise de décisions en temps opportun lors de tout appel. Le modèle utilisé est très efficient.

Là encore, bien qu’aucun commentaire n’ait été formulé à cet égard lors des consultations, l’ERGCM a reconnu le système d’appels actuel – c’est-à-dire le tribunal utilisé pour entendre les appels – comme étant très légitime. La CACM ressemble sous la plupart des aspects à une cour d’appel civile et est composée entièrement de juges civils, ce qui la rend familière et intelligible. Les procédures sont aussi transparentes qu’elles le seraient devant la Cour fédérale.

Toutefois, comme l’a souligné un haut dirigeant des FAC, les droits d’appel de l’accusé et du ministre dans le système de cours martiales devraient être les mêmes que ceux accordés aux parties dans le système de justice pénale civil.155 Ce point a également été soulevé par au moins un intervenant ayant exprimé un point de vue critique.156 Bien que les droits d’appel soient semblables actuellement, il existe des différences subtiles. Par exemple, le ministre peut interjeter appel d’un verdict de non-culpabilité sur une question de droit seulement ou une question mixte de droit et de fait,157 alors que dans le système de justice pénal civil les poursuivants peuvent uniquement interjeter appel sur une question de droit.158 Il est possible que ces différences ne soient pas intelligibles et créent certaines perceptions qui affaiblissent la légitimité perçue du système actuel.

7.3.8 Les besoins spéciaux des groupes particuliers, dont les victimes, les jeunes et les contrevenants autochtones

7.3.8.1 Les victimes/survivants

L’ERGCM a recueilli des commentaires auprès de différentes sources, qui donnent à penser que les gens sont nombreux à croire que le système de cours martiales actuel n’est pas équitable envers les victimes et ne permet pas de protéger ces dernières contre les conséquences des inconduites commises par le personnel militaire. Plus précisément, l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels a indiqué à l’ERGCM que dans le système de cours martiales les victimes devraient, au moins, avoir les mêmes droits que ceux qui leur seraient accordés si l’affaire était jugée dans le système de justice civil.159 Différents commentaires ont été formulés sur ce point lors des consultations publiques,160 ciblées,161 et internes.162 Le fait que dans la réalité, les victimes demeurent désavantagées dans le système de cours martiales par rapport au système de justice pénale civil diminue l’efficacité du système actuel et donne l’impression que ce dernier est moins équitable et que sa légitimité est questionnable.

Il existe actuellement un nombre limité de dispositions concernant les victimes dans la LDN. Bon nombre des procédures et des processus utilisés pour aider et protéger les victimes, introduits par voie législative dans le système de justice pénale civil, ne l’ont pas été dans le système de cours martiales. Par exemple, le pouvoir d’ordonner une interdiction de publication peut être exercé, en vertu du Code criminel, dans maintes situations et à l’égard de nombreuses infractions,163 mais ce pouvoir n’est pas expressément prévu dans la LDN. N’ayant pas ce pouvoir particulier en vertu de la LDN, les juges militaires invoquent le paragraphe 179(1) de la LDN pour exercer le pouvoir de gérer les publications en vertu de la common law.164

De la même façon, des questions telles que la « protection des victimes de viol » et la communication des renseignements concernant les victimes détenus par des tiers relèvent de la common law, étant donné qu’il n’y a pas de dispositions semblables à celles que l’on retrouve à l’article 276 (et les suivants) du Code criminel dans la LDN. En outre, l’article 278.1 (et les suivants) du Code criminel établit un processus détaillé pour la protection des dossiers détenus par des tiers (c.-à-d. les dossiers qui ne sont pas en la possession ou sous la responsabilité de la Couronne) qu’un accusé cherche à consulter, comme le dossier médical ou psychiatrique d’un plaignant dans une affaire d’agression sexuelle. Ce régime législatif a été adopté en réponse à l’arrêt de la CSC dans l’affaire R. c. O’Connor165 et prévoit un processus en deux étapes, qui est quelque peu différent de celui proposé par la CSC dans O’Connor. Aucun régime équivalent n’existe en vertu de la LDN, ce qui signifie qu’un juge militaire qui applique la common law (tel qu’il a été établi par la CSC dans O’Connor) en cour martiale suivra un processus différent de celui que le législateur a jugé plus approprié dans le système de justice pénale civil, lorsqu’il a adopté l’article 278.1 (et les suivants) du Code criminel. Les différences entre ces processus – dont l’application vise généralement à aider et à protéger les victimes et les plaignants – pourraient donner l’impression que le système de cours martiales est moins équitable et moins intelligible que le système de justice pénale civil.

Lorsque le projet de loi C-15 entrera en vigueur, un certain nombre des dispositions qui y figurent conféreront aux victimes d’infractions militaires des droits procéduraux particuliers. La déclaration de la victime permettra aux victimes d’infractions, en particulier à celles qui ont subi un préjudice financier et émotionnel important, de s’exprimer individuellement dans le cadre du processus de détermination de la peine. La cour martiale aura le pouvoir de rendre des ordonnances de dédommagement contre le contrevenant, dans les cas où la victime a subi des dommages matériels, la perte de biens ou des blessures corporelles ou psychologiques. La disposition prévue à cet effet permettra aux victimes d’infractions d’ordre militaire d’obtenir un dédommagement, sans avoir à intenter une action dans le système civil.

En dépit des changements positifs qu’apportera la mise en œuvre du projet de loi C-15 pour ce qui est d’aider et de protéger les victimes, le système de cours martiales n’offrira toujours pas des procédures et des processus centrés sur les victimes aussi poussés que ceux en place au sein du système de justice pénale civil.

L’ERGCM constate également que certains efforts ont été faits récemment pour améliorer l’expérience des victimes au sein du système de cours martiales. Le DPM a récemment mis à jour sa série de directives afin de mieux tenir compte, entre autres, des besoins des victimes.166

Toutefois, même si ces directives mises à jour étaient en vigueur depuis environ un an au moment où l’ERGCM a mené les consultations ciblées pertinentes, l’ERGCM a recueilli des observations démontrant que les victimes continuent de penser que le système pose problème sur le plan de la transparence à différentes étapes des processus des cours martiales167 et du système de justice pénale civil et elle reconnaît que ces problèmes affaiblissent la légitimité perçue du système actuel.

En ce qui a trait aux infractions sexuelles, le système de cours martiales n’est toujours pas considéré comme aussi efficace que le système de justice pénale civil pour juger ces infractions, peut-être en raison de l’écart important observé dans le volume de cas traités par chacun de ces systèmes168 ou encore de l’incidence des grades et des répercussions que les cas jugés en cour martiale ont sur la carrière ainsi que sur la vie sociale et professionnelle des victimes membres des forces armées.169 Cette perception donne à penser que le système de cours martiales actuel peut être moins équitable que le système civil, tant pour les victimes que pour les accusés, ce qui affaiblit la légitimité perçue du système.

Bien que le DPM ait tenté de veiller à ce que les procureurs du SCPM reçoivent une formation supplémentaire,170 il n’est pas clair si cette formation peut compenser le volume relativement faible de dossiers traités par chaque procureur – il faut se rappeler que chaque procureur militaire participe (en moyenne) à 3,8 cours martiales par année171 et que selon le rapport Bronson (DPM), il faudrait de 3 à 4 ans à un procureur civil172 (qui participe à plus de 100 procès par année) pour devenir « hautement compétent ».173 L’ERGCM constate, d’un point de vue subjectif, que dans de nombreux cas où des accusations d’agression sexuelle ont été portées, le DPM s’est fié aux procureurs de la Force de réserve (qui ont une expérience très riche et très diversifiée en tant que procureurs civils) pour mener les poursuites.

L’ERGCM a recueilli d’autres commentaires de personnes ayant survécu à une inconduite sexuelle concernant la formation des acteurs du système de cours martiales et la pertinence du système pour ce qui est de juger les infractions sexuelles; ces commentaires l’amènent également à penser que le système actuel présente des problèmes d’efficacité et de légitimité relativement à la façon dont les victimes sont traitées :

[traduction]
Tous les juges militaires devraient être tenus de respecter les mêmes normes que les juges civils, et le projet de loi C-337 devrait s’appliquer également à eux, les obligeant à suivre une formation sur le droit en matière d’agression sexuelle, ainsi qu’une formation professionnelle continue dans ce domaine.174 Comme le droit militaire comporte de nombreux enjeux particuliers dans ce domaine, les FAC devraient élaborer un volet exclusivement militaire pour compléter cette formation à l’intention de tous les juges et avocats militaires et de tous ceux qui soutiennent ce système, dont les membres de la PM et le personnel médical. Un mécanisme de surveillance plus transparent devrait être établi à l’endroit des juges, dans les cas où leur partialité ou leur comportement est mis en doute sur le plan personnel ou professionnel. Les victimes d’agressions sexuelles au sein des forces armées sont généralement des femmes agressées par des hommes, et les hommes à l’origine des agressions occupent habituellement un poste les plaçant en position d’autorité par rapport à leur victime. Les juges qui ont eux-mêmes été impliqués dans des cas de fraternisation ne devraient pas siéger ou devraient, du moins, être récusés dans les affaires liées à l’appartenance sexuelle.175

Dans l’ensemble, malgré les efforts positifs et proactifs déployés pour améliorer l’expérience des victimes au sein du système de cours martiales, certains continuent de penser que ces dernières sont désavantagées par rapport aux victimes dans les affaires instruites par les tribunaux civils de juridiction criminelle.

7.3.8.2 Les jeunes

Il n’y a pas de régime particulier, au sein du système de cours martiales, qui permet de tenir compte des besoins spéciaux des personnes accusées qui seraient considérées comme des « jeunes » dans le système de justice pénale civil. Même s’il est rare que des infractions impliquant ainsi des jeunes soient jugées dans le système de cours martiales, de tels cas existent malgré tout; par exemple, une recrue âgée de 17 ans serait assujettie au CDM et pourrait être jugée en cour martiale pour une infraction criminelle ordinaire, auquel cas elle serait soumise à des règles et à des processus différents de ceux qui s’appliqueraient, en vertu de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA), si elle était jugée devant un tribunal civil. L’ERGCM n’a recueilli aucun commentaire lors des consultations concernant des jeunes qui auraient fait l’objet d’accusations dans le système de cours martiales.

Quoi qu’il en soit, l’ERGCM estime que l’absence de procédures particulières à l’égard des jeunes dans le système de cours martiales, alors que de telles procédures se sont avérées efficaces pour ce qui est de favoriser l’ordre et le bien-être publics dans le système de justice pénale civil, met en question l’efficacité et la légitimité du traitement réservé aux jeunes dans le système de cours martiales actuel.

7.3.8.3 Les Autochtones

Comme il a été mentionné au chapitre 2 ci-dessus, il n’existe pas actuellement de disposition dans la LDN équivalente à l’alinéa 718.2e) du Code criminel. En vertu de cette disposition du Code criminel, le tribunal doit déterminer la peine à infliger en tenant compte du principe suivant : « [L]’examen, plus particulièrement en ce qui concerne les délinquants autochtones, de toutes les sanctions substitutives qui sont raisonnables dans les circonstances et qui tiennent compte du tort causé aux victimes ou à la collectivité. »

Dans l’arrêt de principe R. c. Gladue,176 sur l’interprétation de cette disposition, la CSC a affirmé que pour donner effet à cette dernière, il est nécessaire de recueillir certaines preuves sur la situation d’un délinquant autochtone afin d’orienter le juge chargé de déterminer la peine. À la suite de cet arrêt, il est devenu pratique courante pour les tribunaux de justice pénale civils d’ordonner la production de rapports présentenciels de type « Gladue », lesquels attirent l’attention sur les facteurs systémiques particuliers qui ont pu amener le délinquant autochtone devant les tribunaux et fournissent des renseignements sur les processus communautaires de réadaptation, qui pourraient être appropriés ou non sur le plan culturel.

En l’absence d’une disposition équivalente à l’alinéa 718.2e) du Code criminel dans la LDN, les cours martiales ne disposent généralement pas de rapports de type « Gladue » au moment de déterminer la peine des délinquants autochtones. Toutefois, dans une affaire récente, l’avocat militaire de la défense, qui représentait un contrevenant autochtone, a de manière ingénieuse demandé et obtenu un rapport de type « Gladue », au nom du contrevenant, et a présenté ce dernier à la cour martiale pour l’aider à déterminer la peine. La cour martiale a accepté ce rapport et l’a trouvé utile.177

Bien que l’ERGCM n’ait recueilli aucun commentaire sur ce point lors des consultations, elle estime que l’absence de procédures particulières pour tenir compte des circonstances propres aux contrevenants autochtones dans le système de cours martiales, alors que de telles procédures se sont avérées efficaces pour ce qui est de produire des résultats justes et appropriés en matière de détermination de la peine dans le système de justice pénale civil, remet en question l’efficacité et la légitimité du traitement réservé aux contrevenants autochtones dans le système de cours martiales actuel.

7.3.9 Évaluation globale

L’ERGCM n’a pas été chargée d’évaluer le rendement des personnes et n’a pas effectué une telle évaluation. La présente révision globale ne concerne pas les personnes – elle concerne un système; dans le présent chapitre, l’ERGCM a conclu que ce système est passablement efficace (surtout quant à sa capacité à assurer l’ordre et le bien-être publics), que maintes améliorations semblent pouvoir y être apportées pour en accroître l’efficience et donc que sa légitimité est mise en question.

Même les personnes les plus dévouées, les plus assidues et les plus fidèles ne pourraient pas obtenir les résultats voulus au sein d’un système qui n’est pas entièrement conçu et structuré de manière à atteindre ses objectifs. L’ERGCM prend acte du haut niveau de professionnalisme, de la grande loyauté et du sens aiguisé de l’éthique de tous les intervenants du système de cours martiales qu’elle a rencontrés dans le cadre de la présente révision. Ils avaient tous à cœur de respecter un même engagement, soit celui de remplir leur rôle sur les plans constitutionnel, légal et autre au sein du système de cours martiales.

7.4 Conclusion

L’évaluation du système de cours martiales actuel réalisée dans le présent chapitre indique que ce système – comme tous les autres systèmes de justice dont l’ERGCM a connaissance – pourrait vraisemblablement profiter de certaines améliorations.

Bon nombre des aspects examinés dans le cadre de cette évaluation, les plus susceptibles de contribuer à l’amélioration générale du système de cours martiales, sont étroitement liés à certains des thèmes les plus souvent évoqués lors des consultations de l’ERGCM (voir, au chapitre 4, la section « Principales observations tirées des consultations »).

Plus précisément, comme l’évaluation ci-dessus l’a démontré, les lenteurs du système de cours martiales compromettent l’efficacité et l’efficience du système. De même, le fait que les intervenants consultés sont nombreux à croire que les peines imposées sont trop clémentes remet en cause l’efficacité et la légitimité du système. En outre, un grand nombre d’entre eux sont d’avis que des groupes d’intervenants clés au sein du système de cours martiales pourraient bénéficier d’une expertise militaire plus poussée et d’une plus grande expérience du droit pénal et des affaires contentieuses; cette perception met en question la légitimité du système – et si elle s’avère exacte d’un point de vue objectif, elle pourrait en compromettre l’efficacité. Enfin, la légitimité et l’efficacité du système pour ce qui est de servir l’objectif de la discipline sont mises en question, dans la mesure où de nombreux dirigeants des FAC qui ont formulé des commentaires sur ce point – et qui reconnaissent et soutiennent l’obligation constitutionnelle d’assurer l’indépendance des acteurs du système de cours martiales – croient que ces officiers militaires indépendants rendront des décisions qui ne cadrent pas avec les mesures disciplinaires que les dirigeants des FAC jugent nécessaires dans les circonstances.

En plus de ces enjeux importants, qui sont directement liés aux commentaires recueillis par l’ERGCM dans le cadre des consultations, l’évaluation réalisée ci-dessus souligne également la mesure dans laquelle les coûts du système de cours martiales peuvent être disproportionnés et montre la façon dont une partie ou la totalité de cette disproportion potentielle pourrait être réduite en apportant au système des améliorations favorisant l’efficience.

Dans les chapitres qui suivent, on présente plusieurs options à des fins d’amélioration, en fonction des éléments visés dans les termes de référence de l’ERGCM. Ces options ont principalement pour but de réduire ou d’éliminer les lacunes les plus importantes et les plus souvent signalées dans le système de cours martiales actuel, bien que bon nombre d’entre elles visent également à perfectionner d’autres aspects du système afin d’améliorer les caractéristiques qui en favorisent l’efficacité, l’efficience et la légitimité.


Notes de bas de page

1 C’est-à-dire lorsqu’il était approprié de le faire afin d’élaborer et d’analyser les options de nature à améliorer le système.

2 R. c. Moriarity, 2015 CSC 55.

3 R. c. Dery, 2017 CACM 2.

4 Canada, ministère de la Défense nationale, Le premier examen indépendant par le très honorable Antonio Lamer C.P., C.C., C.D., des dispositions et de l’application du projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d’autres lois en conséquence, conformément à l’article 96 des Lois du Canada (1998), ch. 35, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 2003 (rapport Lamer), p. 1.

5 Voir l’annexe U, mémoire des FMAR(P) [Force régulière et Force de réserve] à l’intention de l’ERGCM, 23 novembre 2016.

6 R. c. Semrau, 2010 CM 4010.

7 R. c. Semrau, 2010 CM 1003.

8 Voir la section 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

9 Voir les sections 4.5.4.1.4 (QG 35 GBC) et 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

10 Voir les sections 4.5.3 (COMFOSCAN), 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC), 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant), 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) et 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

11 Voir la section 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

12 Voir la section 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

13 Voir les sections 4.5.4.3 (5 Div CA – adjudant-chef), 4.5.5.1 [FMAR(P)], 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC), 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) et 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

14 Ashley Maxwell, Statistiques sur les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes au Canada, 2013-2014, Ottawa, Centre canadien de la statistique juridique, 2015, graphique 5, p. 11 (on y indique qu’en 2013-2014, 36,2 p. 100 des contrevenants au sein du système de justice pénale civil du Canada se sont vu infliger une peine comportant un placement sous garde).

15 Voir les sections 4.4.5 (Lcol Perron [à la retraite]), 4.4.6 (Capc Lévesque [à la retraite]), 4.5.3 (COMFOSCAN), 4.5.4.3 (5 Div CA – adjudant-chef) et 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

16 La durée des procès est également problématique dans le système de justice pénale civil du Canada. Voir R. c. Jordan, 2016 C.S.C. 27; R. c. Cody, 2017 C.S.C. 31.

17 Canada, ministère de la Défense nationale, Rapport annuel du Directeur des poursuites militaires, 2016-17, Ottawa, CJAG, 2017, p. 22 [Rapport annuel du DPM, 2016-2017].

18 Ibid.

19 Andrejs Berzins, c.r. et Malcolm Lindsay, c.r., External Review of the Canadian Military Prosecution Service, Ottawa, Bronson Consulting Group, 2008, p. 10 [le rapport Bronson (DPM)]. Voir la section 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

20 Voir Sénat, Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, Justice différée, justice refusée : L’urgence de réduire les longs délais dans le système judiciaire au Canada (rapport final), juin 2017, p. 32 (président : l’honorable Bob Runciman) [Rapport du Sénat 2017]. Rapport final du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (Rapport du Sénat 2017).

21 Voir les sections 4.5.3 (COMFOSCAN), 4.5.4.3 (5 Div CA – adjudant-chef) et 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

22 Voir la section 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

23 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 10.

24 Rapport Lamer, précité, note 4, p. 73-76; Canada, ministère de la Défense nationale, Rapport du Groupe consultatif spécial sur la justice militaire et sur les services d’enquête de la police militaire, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 1997 (président : le très honorable Brian Dickson), p. 7; Canada, ministère de la Défense nationale, Rapport final de l’autorité indépendante chargée du deuxième examen à l’honorable Peter G. MacKay, Ministre de la Défense nationale, Ottawa, ministère de la Défense nationale, 2011 (président : l’honorable Patrick J. LeSage), p. 11 [rapport LeSage].

25 Juge-avocat général, « Directive du JAG 013/01, Lignes directrices concernant le [sic] délais dans le processus des cours martiales », 30 mars 2001.

26 R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259, p. 293 : « Les manquements à la discipline militaire doivent être réprimés promptement et, dans bien des cas, punis plus durement que si les mêmes actes avaient été accomplis par un civil. »

27 Voir les sections 4.5.3 (COMFOSCAN) et 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) cidessus.

28 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 8.

29 Voir les sections 3.3.1 à 3.3.5 (commentaires des intervenants concernant la justice militaire) du chapitre 3 (Études antérieures) pour un résumé des points de vue des membres de la chaîne de commandement, notamment en ce qui concerne les délais observés.

30 Voir l’annexe Z, présentation du DPM au SMA(Svcs Ex), le 23 janvier 2017.

31 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 65 :

[traduction]

Nous pensons que l’une des améliorations du système de cours martiales qui contribuerait le plus à la réduction des délais serait l’institution d’un tribunal ou d’une procédure pour traiter les plaidoyers de culpabilité au début du processus. Dans le système civil, tout est mis en œuvre pour favoriser le règlement des affaires avant procès devant des tribunaux spéciaux dits « tribunaux des plaidoyers » établis à cette fin.

Le projet de loi C-45, s’il est adopté, donnera au juge en chef plus d’« outils » pour permettre l’inscription de plaidoyers de culpabilité au début du processus. On devrait envisager de faire un plus grand usage de la salle d’audience de Gatineau (Québec) pour les plaidoyers de culpabilité dans les cas appropriés, en assurant la transmission vidéo de la procédure au sein de l’unité de l’accusé dans une autre région du Canada.

32 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 65-66 :

[traduction]

On nous a informés que les audiences de détermination de la peine peuvent prendre deux jours, même lorsque les parties ont déposé des recommandations conjointes. Nous tenons pour acquis que le principe auquel souscrivent les cours d’appel civiles, selon lequel le juge chargé de prononcer la peine ne devrait pas s’écarter de la proposition commune des parties à moins que l’acceptation de celle-ci soit de nature à déconsidérer l’administration de la justice ou ne soit d’autre manière contraire à l’intérêt public, est aussi appliqué dans le système de justice militaire.

Nous nous rendons bien compte que la détermination de la peine est une question très importante et que la discipline militaire fait intervenir des facteurs qui n’ont pas leurs parallèles dans le système civil. Cependant, nous estimons que le système de cours martiales accuse des retards tels qu’il ne peut tout simplement pas consacrer autant de temps à la détermination de la peine, en particulier dans les affaires peu complexes. Il faut trouver d’autres façons de présenter à la cour les renseignements dont les juges ont besoin pour déterminer les peines.

33 Voir, par exemple, R. c. Dowe, 2017 CM 1009. Cette affaire, qui s’est déroulée à Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest, concerne un adjudant, qui a plaidé coupable à une accusation d’ivresse, en vertu de l’article 97 de la LDN. Les procureurs et les avocats de la défense ont convenu de présenter une recommandation conjointe quant à la peine à imposer. Deux jours d’audience ont été consacrés à détermination de la peine. L’adjudant Dowe a été condamné à une amende de 2 000 $.

34 Ibid., p. 61.

35 Ibid., p. 62.

36 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 59.

37 Ibid., p. 63.

38 Ibid., p. 64.

39 Loi sur la défense nationale, L.R.C. 1985, ch. N-5, art. 165.3 [LDN] :

Avec l’approbation du gouverneur en conseil, le juge militaire en chef peut, après avoir consulté un comité des règles établi par règlement du gouverneur en conseil, établir des règles concernant :

40 Voir « Memorandum 13 – Better Case Management in the Court Martial », Practice in the Service Courts – Collected Memoranda (version 6), Londres, Military Court Service, 2016, p. 56. Le système de gestion des instances amélioré prévoit des délais obligatoires pour les audiences judiciaires et des dates limites à respecter pour les causes contestées.

41 Rapport du Sénat 2017, précité, note 20, p. 84. Voir également le même rapport à la p. 74, où l’on cite les propos de l’honorable Terrence Matchett, juge en chef, Cour provinciale de l’Alberta : « Comme les tribunaux possèdent un degré d’impartialité et d’autorité auquel aucun autre intervenant ne peut prétendre, nous avons un rôle très important à jouer pour ce qui est d’exercer notre leadership et d’amener toutes les parties à travailler ensemble à l’amélioration de la gestion des dossiers et d’inscrire les affaires au rôle le plus tôt possible. »

42 Voir les sections 4.5.3 (COMFOSCAN) et 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) cidessus.

43 Voir, à l’annexe BB, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – cours et juges.

44 Ibid.

45 Des données sont disponibles pour les provinces et les pays mentionnés, ayant fait l’objet d’un examen comparatif, uniquement en ce qui concerne le nombre total de procès, sans égard au fait qu’il s’agisse de procès complets, de procès réglés à la suite d’un plaidoyer de culpabilité ou encore d’un plaidoyer de culpabilité et de recommandations conjointes quant à la peine.

46 Voir, à l’annexe BB, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – cours et juges.

47 Ibid.

48 Les cours martiales ne se déroulent pas toutes à l’extérieur de la région géographique du juge militaire. Bon nombre de procès sont tenus dans la région de la capitale nationale, par exemple, où se trouve le Cabinet du JMC. Toutefois, il faut également tenir compte du fait que certaines cours martiales nécessitent plus d’un « déplacement » pour se rendre à l’endroit où se déroule la procédure compte tenu de la disponibilité des participants.

49 L’ERGCM était sensible au fait qu’en tant que membres de la Force régulière, les juges militaires pourraient devoir consacrer du temps à d’autres engagements, en plus de leurs fonctions judiciaires, que n’auraient pas les juges de la cour martiale du Royaume-Uni ni ceux des tribunaux de droit commun du Manitoba et de l’Ontario. Par exemple, tous les membres des FAC doivent, chaque année, se soumettre à un test d’aptitude physique pour les opérations et obtenir de nouveau l’autorisation d’utiliser une arme personnelle et doivent renouveler, une ou deux fois par année, leurs qualifications en matière de défense chimique, biologique, radiologique et nucléaire. Ces obligations peuvent nécessiter un investissement de temps assez important, allant d’une à deux semaines par année. Toutefois, un juge militaire à la retraite a indiqué à l’ERGCM que les juges militaires ne pouvaient pas être tenus de participer à cette formation et qu’en fait, ils ne devraient pas la suivre. L’ERGCM a donc jugé approprié de ne pas tenir compte de ces obligations en matière de formation au moment de déterminer le temps et les ressources humaines qu’il conviendrait de consacrer aux tribunaux militaires, compte tenu du statut et de la structure institutionnelle de ces derniers. (Section 4.4.5 [Lcol Perron (à la retraite)] du chapitre 4 [Consultations]).

50 Voir la section 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

51 Voir la section 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

52 Michel W. Drapeau et Gilles Létourneau, Behind the times: Modernization of Canadian Military Criminal Justice, 2017, p. 80-81 [Drapeau et Létourneau]; rapport LeSage, précité, note 24, p. 47-48.

53 Voir la section 4.3.1 (résumé des résultats) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

54 Voir la section 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

55 Voir la section 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

56 LDN, précitée, note 39, art. 165.33 (et les suivants).

57 Pour obtenir des renseignements sur le nombre de juges de nomination fédérale et le ressort dans lequel ils siègent, voir sur Internet : <URL : http://www.fja.gc.ca/appointments-nominations/judges-juges-fra.aspx>.

58 Voir les sections 5.2.2 (Australie) et 5.2.5 (Royaume-Uni) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

59 Selon une moyenne établie sur 5 ans, le service des poursuites militaires dépose des accusations dans environ 67 p. 100 des dossiers renvoyés au DPM.

60 Voir les sections 4.5.4.1.4 (QG 35 GBC) et 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

61 Voir la section 4.3.1 (résumé des résultats) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

62 Voir la section 4.5.3 (COMFOSCAN) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

63 Voir la section 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

64 Voir la section 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

65 Voir la section 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

66 Voir plus loin la discussion concernant la transparence, note 97 (et le texte d’accompagnement).

67 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 11.

68 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 12.

69 Rapport annuel du DPM, 2016-2017, précité, note 17, p. 23.

70 Rapport annuel du DPM, 2016-2017, précité, note 17, p. 23.

71 Voir, à l’annexe CC, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – service des poursuites.

72 L’ERGCM constate que certains officiers au sein du service des poursuites ne s’occupent pas, en général, des poursuites intentées devant la cour martiale; ils remplissent plutôt un rôle stratégique, conseillent le SNE ou assument des rôles de supervision. Quoi qu’il en soit, pour les besoins du présent calcul, les coûts associés à la présence de ces officiers au sein du service des poursuites ont été pris en compte et comptabilisés dans le coût d’opération total du service des poursuites actuel, ainsi que dans le coût total par cour martiale.

73 Voir, à l’annexe CC, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – service des poursuites.

74 Ibid.

75 Dans le rapport Bronson, précité, note 19, p. 8, on précise que les PMR ont traité, en moyenne, 9 dossiers qui ont été instruits en cour martiale, en 2007-2008 : rapport Bronson (DPM). Toutefois, l’ERGCM comprend qu’à l’époque, 13 avocats militaires au total occupaient différents rôles au sein du service des poursuites (rôle stratégique, rôle de supervision ou autre). Par conséquent, l’ERGCM qu’en moyenne 6 affaires étaient instruites en cour martiale par chacun des avocats miliaires du service des poursuites de l’époque (78 cours martiales et 13 avocats militaires au sein du service).

76 Voir, à l’annexe CC, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – service des poursuites.

77 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 69.

78 Ibid., p. 9.

79 Cette augmentation observée après 2008 a fait suite à une tendance qui avait commencé en 2001 lorsque le nombre de PMR a doublé, passant de quatre à huit, tel qu’il a été rapporté dans Canada, ministère de la Défense nationale, Rapport annuel du Juge-avocat général au ministre de la Défense nationale sur l’administration de la justice militaire au sein des Forces canadiennes : Examen portant sur la période du 1er avril 2000 au 31 mars 2001, Ottawa, CJAG, 2001, p. 38; on compte actuellement neuf PMR. Les deux autres ajouts à l’organisation du DPM depuis 2008 sont des officiers détenant le grade de lieutenant-colonel ou de capitaine de frégate; les effectifs sont ainsi passés d’un à trois officiers poursuivants assumant un poste plus haut gradé ou un rôle de supervision.

80 Il est indiqué dans le rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 8, que du 1er avril 2000 au 31 mars 2007, 62 procès ont été tenus en cour martiale, en moyenne, par année.

81 Voir Canada, ministère de la Défense nationale, Rapport annuel du Directeur des poursuites militaires, 2016-17, Ottawa, CJAG, 2017, p. 11 [Rapport annuel du DPM, 2016-2017].

82 Les « dossiers » comprennent tous les dossiers antérieurs et postérieurs à la mise en accusation, quelle qu’en soit la source, qui ont été traités par les procureurs durant l’année.

83 Rapport annuel 2015-2016 du Service des poursuites pénales du Canada.

84 R. c. Cawthorne, 2016 C.S.C. 32.

85 LDN, précitée, note 39, art. 165.1 et 230.1.

86 Ibid., paragr. 165.17(1).

87 Ibid., paragr. 165.17(2).

88 Ibid., paragr. 165.17(3).

89 Ibid.

90 Ibid., paragr. 249.2(1).

91 Ibid., paragr. 9.2(1).

92 Voir la section 4.4.6 (Capc Lévesque [à la retraite]) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

93 Voir la section 4.4.5 (Lcol Perron [à la retraite]) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

94 Voir la section 4.4.7 (président de la SIDMDG) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

95 Voir les sections 5.2.5 (Royaume-Uni), 5.2.6 (Norvège) et 5.2.8 (Finlande) du chapitre 5 (Étude comparative) cidessus.

96 Voir la section 5.2.7 (Danemark) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

97 Voir, à l’annexe C, le babillard des consultations publiques de l’ERGCM. Voir, plus particulièrement, les observations de Martin Gagnon en date du 26 octobre 2016.

98 Voir les sections 4.5.3 (COMFOSCAN), 4.5.4.2 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) et 4.5.4.1.3 (5 RGC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

99 Voir les sections 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant), 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) et 4.5.4.2.3 (R Regt C) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

100 Voir les sections 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC), 4.5.4.2.2 (RHFC), 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) et 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

101 Voir la section 5.2.1 (États-Unis) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

102 Voir, à l’annexe DD, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – SAD.

103 Lors de la rédaction du présent rapport, ni l’ERGCM ni le SMA(Svcs Ex) n’avait accès à des données concernant les coûts de l’aide juridique ou ceux des services d’avocats de la défense en Australie ou au Manitoba.

104 Voir, à l’annexe DD, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – SAD.

105 Sur Internet : <URL : https://www.cba.org/Sections/Legal-Aid-Liaison/Resources/Resources/Legal-Aid-in-Canada?lang=fr-CA>.

106 Voir la section 5.2.5 (Royaume-Uni) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus, où l’on ne dénote aucun signe de mécontentement à l’égard des services d’avocats de la défense.

107 Rapport annuel du DPM, 2016-2017, précité, note 17, p. 22.

108 Andrejs Berzins, c.r. et Malcolm Lindsay, c.r., External Review of Defence Counsel Services, Ottawa, Bronson Consulting Group, 2009, p. 16-17 (le rapport Bronson [DSAD]).

109 Ibid., p. 17.

110 Canada, ministère de la Défense nationale, Provision of Defence Counsel Services in the Canadian Forces, rapport de l’équipe d’étude sur les avocats de la défense, Ottawa, CJAG, 1997, p. 42 (le rapport de 1997 du DSAD).

111 Ibid., p. 41.

112 Ibid., p. 69.

113 Voir, à l’annexe Y, le mémoire du DSAD à l’intention du SMA(Svcs Ex), 13 février 2017, p. 6.

114 Ibid.

115 Rapport de 1997 du DSAD, précité, note 110, p. 42.

116 Rapport Bronson (DSAD), précité, note 108, p. 15.

117 Ibid., p. 48-49.

118 Ibid., p. 30.

119 Ibid.

120 Voir les sections 5.2.3 (Nouvelle-Zélande) et 5.2.4 (Irlande) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

121 Voir les sections 5.2.3 (Nouvelle-Zélande) et 5.2.5 (Royaume-Uni) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

122 Voir les sections 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant), 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) et 4.5.4.2.3 (R Regt C) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

123 Rapport de 1997 du DSAD, précité, note 110, p. 41.

124 Voir la section 4.4.6 (Capc Lévesque [à la retraite]) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

125 Voir les sections 5.2.5 (Royaume-Uni), 5.2.7 (Danemark) et 5.2.8 (Finlande) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

126 Voir les sections 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) et 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

127 Voir la section 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

128 Voir, à l’annexe EE, la feuille de calcul du SMA(Svcs Ex) – comparaison globale.

129 Ibid. Il est intéressant de préciser que le coût moyen d’un procès dans le système de cours martiales du RoyaumeUni est de 37 357 $.

130 Voir, à l’annexe FF, la présentation du SMA(Svcs Ex) sur la révision de la cour martiale, diapositive 13. Il convient de noter que certaines de ces accusations pourraient concerner des infractions criminelles de droit commun visées à l’alinéa 130(1)b) de la LDN qui ont été commises à l’extérieur du Canada et à l’égard desquelles les tribunaux civils canadiens n’ont habituellement pas compétence. C’est pourquoi l’ERGCM indique que des coûts disproportionnés sur le plan des ressources humaines et financières sont actuellement engagés dans jusqu’à 25 procès en cour martiale par année du fait que les cours martiales exercent leur compétence à l’égard d’infractions qui, autrement, pourraient potentiellement être jugées par les tribunaux civils canadiens de juridiction criminelle. Il convient également de souligner que les tribunaux civils canadiens bénéficient d’une compétence extraterritoriale à l’égard d’un certain nombre d’infractions criminelles civiles de droit commun qui sont commises à l’étranger, notamment toutes celles énumérées à l’article 7 du Code criminel et toutes celles prévues dans la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

131 Ashley Maxwell, Statistiques sur les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes au Canada, 2013-2014, Ottawa, Centre canadien de la statistique juridique, 2015, graphique 5, p. 11 (on y indique qu’en 2013-2014, dans le système de justice pénale civil du Canada, 36,2 p. 100 des contrevenants se sont vu infliger une peine comportant un placement sous garde).

132 Voir les sections 4.5.4.3 (5 Div CA), 4.5.5.1 [FMAR(P)] et 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

133 Voir la section 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

134 Voir la section 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

135 Voir la section 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

136 Voir la section 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

137 Voir les sections 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) et 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

138 Voir les sections 4.3.1 (résumé des résultats), 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité), 4.5.4.2.2 (RHFC) et 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

139 Voir la section 4.5.4.1.1 (Svc pers 2 Div CA – commandant) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

140 Voir les sections 4.4.4 (IJ 700) et 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

141 Voir la section 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

142 Voir la section 4.5.5.1 [FMAR(P)] du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

143 Voir la section 4.5.4.2.1 (GS 4 Div CA et 2 GBMC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

144 Voir la section 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

145 Voir la section 4.4.5 (Lcol Perron [à la retraite]) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

146 Voir, à l’annexe C, le babillard des consultations publiques de l’ERGCM. Voir, plus particulièrement, les observations datées du 8 novembre 2016 de Bruce MacGregor qui, sur le plan professionnel, est le titulaire actuel du poste de DPM, mais qui a formulé ses observations en son nom personnel, tel qu’il était exigé dans le CANFORGEN 186/16 – ORIENTATION DU CHEF DE LA DÉFENSE – CONSULTATION SUR LA RÉVISION GLOBALE DE LA COUR MARTIALE. L’ERGCM a accordé le même poids à ses observations personnelles qu’à celles d’autres intervenants publics, tout en tenant dûment compte de sa connaissance approfondie et de son expérience du système de justice militaire.

147 Voir la section 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

148 Rapport Lesage, précité, note 24, p. 52.

149 Canada, ministère de la Défense nationale, Rapport annuel du Juge-avocat général au ministre de la Défense nationale sur l’administration de la justice militaire au sein des Forces canadiennes : Examen portant sur la période du 1er avril 2001 au 31 mars 2002, Ottawa, CJAG, 2002, p. 42.

150 G. Herfst, Meeting the Needs of Military Justice: An Examination of the Military Rules of Evidence, mémoire de maîtrise en droit (non publié), Université Dalhousie, 1995.

151 Voir la section 5.2.1 (Royaume-Uni) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

152 Voir la section 4.4.5 (Lcol Perron [à la retraite]) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

153 Voir la section 4.5.4.1.2 (Svc pers 2 Div CA – adjudant-chef de l’unité) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus. Il s’agit là de la façon dont la chambre militaire de la cour d’appel d’Arnhem, aux Pays-Bas, est structurée. Voir la section 5.2.10 (Pays-Bas) du chapitre 5 (Étude comparative) ci-dessus.

154 Voir la section 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

155 Voir la section 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

156 Gilles Létourneau, « L’effeuillage (strip-tease) du système de justice pénale militaire canadien », blogue dans Global Military Justice Reform (21 mars 2016).

157 LDN, précitée, note 39, al. 230.1b).

158 Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-34, al. 676(1)a) [Code criminel].

159 Voir la section 4.4.1 (ombudsman fédérale des victimes d’actes criminels) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

160 Voir la section 4.3.1 (résumé des résultats) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

161 Voir les sections 4.4.1 (ombudsman fédérale des victimes d’actes criminels), 4.4.3 (CIIS) et 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

162 Voir les sections 4.5.1 (EISF-IS), 4.5.4.1.4 (QG 35 GBC) et 4.5.4.2.2 (RHFC) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

163 Voir, par exemple, le Code criminel, précité, note 158, art. 486.4 et 486.5 (infractions d’ordre sexuel et bonne administration de la justice), art. 517 (audiences sur la mise en liberté provisoire par voie judiciaire), paragr. 631(6) [sélection des membres du jury] et art. 672.51 et 672.501 (troubles mentaux/audiences de la commission d’examen).

164 Voir, par exemple, R. c. Rivas, 2011 CM 2012; voir également Société Radio-Canada c. Boland, [1995] 1 R.C.F. 323.

165 R. c. O’Connor, [1995] 4 R.C.S. 411.

166 Le DPM a mis à jour sa directive no 007/99, « Répondre aux besoins des victimes », le 17 mai 2016. La directive mise à jour indique ce qui suit : « En règle générale, une victime exige plus que les informations requises par d’autres témoins dans les procédures en cour martiale. Par exemple, une victime d’un crime peut se sentir lésé[e] par les décisions de ne pas poursuivre, ou les décisions de poursuivre quand ils ne sont pas favorables à la poursuite. Le procureur doit tenir la victime informée de manière appropriée tout au long du processus. » En outre, la directive précise ensuite que la « victime peut participer à l’instance en cour martiale autrement que par un témoignage. Le procureur doit tenir compte des points suivants à l’égard de la victime : a. chaque fois qu’un accusé est mis en liberté en attendant la fin de l’instance, le procureur doit prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que la victime est au courant de la mise en liberté, des conditions de celle-ci et de toute modification apportée aux conditions; b. si le procureur provoque la conclusion définitive d’une affaire en exerçant son pouvoir discrétionnaire, il doit s’assurer que les victimes des infractions présumées soient avisées de la décision et de ses motifs; c. si le procureur divulgue à l’avocat de la défense des renseignements sensibles concernant la victime, le procureur doit prendre les mesures nécessaires pour en empêcher une utilisation ou une diffusion inappropriée de ces renseignements; d. le droit de la victime à être informée en temps opportun des discussions concernant le plaidoyer et la sentence; et e. la participation de la victime aux audiences de détermination de la peine en témoignant en personne ou autrement. » [Les notes de bas de page ont été supprimées.] Cette directive s’applique en parallèle avec la directive du DPM no 012/00, « Interrogatoire des témoins », qui a également été mise à jour en mai 2016. On y indique ce qui suit : « Des considérations supplémentaires s’appliquent à l’interrogatoire de la victime qui nécessite davantage de renseignements que les autres témoins dans la procédure en cour martiale. Les principes suivants s’appliquent à la victime : a. Le procureur doit traiter tous les témoins, et les victimes en particulier, avec courtoisie, sensibilité et respect, tout en gardant à l’esprit l’intérêt émotionnel de la victime dans la procédure. b. Le procureur doit s’efforcer de répondre aux questions posées par la victime à l’égard de la procédure. c. Le procureur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que la victime comprend bien la nature de la procédure. d. Le procureur doit, au besoin, informer la victime de l’aide et des ressources de conseillers disponibles qu’il connaît. e. Le procureur doit s’efforcer de tenir la victime au courant de la procédure, y compris les discussions sur le plaidoyer et la peine en cours, le verdict, la sentence ou autre décision définitive à l’égard de l’affaire; et f. Le procureur doit toujours songer à la nécessité d’obtenir une salle d’audience spéciale, et discuter de sa disponibilité avec la victime, le cas échéant. » Qui plus est, la directive du DPM no 003/00, « Révision postérieure à l’accusation », qui a également été mise à jour en mai 2016, oblige le procureur à prendre en compte le point de vue de la victime lorsqu’il décide d’exercer ou non son pouvoir et précise que la victime dont l’« intégrité personnelle » a été violée a le droit d’être informée, entre autres, de la décision de ne pas poursuivre ainsi que des raisons de cette décision. L’ERGCM a recueilli le commentaire ci-dessus auprès de l’EISF-IS, malgré le fait que ces directives mises à jour étaient en vigueur depuis plus d’un an lors des consultations de l’ERGCM. Le CIIS a également indiqué à l’ERGCM dans ses observations, reproduites à l’annexe H, que les victimes constatent un manque de transparence à diverses étapes des processus du système de cours martiales et du système de justice pénale civil.

167 Voir les sections 4.4.3 (CIIS), 4.4.4 (IJ 700) et 4.5.1 (EISF-IS) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

168 Voir la section 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

169 Voir la section 4.5.5.2 (équipage du NCSM Ottawa) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus.

170 Voir le Rapport annuel du DPM, 2016-2017, précité, note 17, p. 23 et p. 50-51.

171 See Annex CC, ADM (RS) Spreadsheet – Prosecutions.

172 Ibid.

173 Rapport Bronson (DPM), précité, note 19, p. 69.

174 L’ERGCM constate que certains doutent de la validité constitutionnelle de ce projet de loi, qui obligerait les juges à suivre une formation sur les agressions sexuelles (entre autres choses). Voir, par exemple, http://policyoptions.irpp.org/fr/magazines/mai-2017/judicial-education-doesnt-breach-independence-but-bill-c-337-might/.

175 Voir la section 4.4.4 (IJ 700) du chapitre 4 (Consultations) ci-dessus. En ce qui concerne les observations d’IJ 700 au sujet des juges militaires qui ont eux-mêmes été impliqués dans des cas de fraternisation, l’ERGCM attire l’attention sur des allégations concernant le JMC actuel selon lesquelles ce dernier aurait peut-être commis une infraction militaire en violant la politique des FAC relative aux relations personnelles lorsqu’il s’est engagé dans une relation avec une personne qui relevait de son commandement, mais constate également que la plainte déposée auprès du comité d’enquête sur les juges militaires concernant cette allégation a été rejetée : https://www.thelawyersdaily.ca/articles/2075/military-judge-will-not-face-court-guns?article_related_content=1.

176 R. c. Gladue, [1999] 1 R.C.S. 688.

177 R. c. Levi-Gould, 2016 CM 4003.

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