La mise en liberté sous condition : module

La mise en liberté sous condition

Le module La mise en liberté sous condition permet aux étudiants de démystifier le processus menant à la réinsertion sociale d’un délinquant. La forte médiatisation de cas de délinquants en liberté sous condition ayant repris leurs activités criminelles fait en sorte que la population a parfois une idée négative de ce processus pourtant très bien structuré. Ne retourne pas dans la collectivité qui veut : il faut mériter sa mise en liberté, et le chemin vers la sortie se fait graduellement.

Objectifs d'apprentissage

Intégré à leur cours de droit ou de sociologie, le présent module permettra aux participants de :

Droit

  • définir les droits et les responsabilités prévus dans les lois;
  • éveiller leur sens de l’analyse critique à l’égard de questions d’ordre juridique et social;
  • acquérir une connaissance, des habiletés et une attitude positive face à la loi;
  • décrire les divers points de vue exprimés par le public à l’égard des questions controversées qui touchent la société.

Sociologie

  • comprendre que les organisations sociales sont nécessaires au maintien d’une vie sociale ordonnée;
  • évaluer la validité ou la fiabilité d’informations en fonction du contexte, des préjugés, des sources, de l’objectivité ou des éléments de preuve;
  • exercer sa pensée critique, en posant des questions, comparant, résumant, tirant des conclusions et défendant une position, pour porter des jugements éclairés sur une gamme de situations, de questions et de problèmes.

Temps requis (en salle de classe)

Une heure et demie (ou plus, en fonction du temps accordé aux activités de discussion proposées).

1. Mériter sa mise en liberté

Plusieurs personnes se demandent pourquoi on impose à un délinquant une peine d’une certaine durée, pour ensuite le libérer avant la fin de cette peine. Le but de la mise en liberté sous condition est de protéger le public en favorisant une réinsertion sociale sûre, graduelle et surveillée. Le délinquant qui reste derrière les barreaux jusqu’à la fin de sa peine est ensuite libéré sans contrôle ni surveillance; il court donc plus de risque de récidiver.

Mais comment fonctionne le système de mise en liberté sous condition? Six mois après l’admission du délinquant au pénitencier, le Service correctionnel du Canada (SCC) avise le délinquant de ses dates d’admissibilité aux différentes formes de mise en liberté sous condition – permission de sortir, semi-liberté et libération conditionnelle totale -, ainsi que de la date prévue pour sa libération d’office (toutes ces catégories de mise en liberté seront expliquées dans la section suivante de ce module).

Le SCC est chargé de préparer le cas du délinquant en vue d’un examen par la Commission nationale des libérations conditionnelles (CNLC). La CNLC est un tribunal administratif qui, en vertu de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition a le pouvoir exclusif d’accorder, de refuser ou d’annuler une mise en liberté sous condition et, dans certains cas, d’ordonner le maintien en incarcération de délinquants qui, normalement, obtiendraient une libération d’office.

La CNLC a le pouvoir de rendre des décisions sur la mise en liberté sous condition des délinquants incarcérés dans des établissements fédéraux et territoriaux. Elle rend également des décisions sur la mise en liberté sous condition des personnes condamnées à une peine d’emprisonnement de moins de deux ans dans les provinces où il n’y a pas de commission des libérations conditionnelles. C’est aussi la CNLC qui accorde, refuse ou révoque la réhabilitation (pardon), aux termes de la Loi sur le casier judiciaire.

Chaque cas est donc soumis à la CNLC qui examine tous les renseignements disponibles sur le délinquant afin de faire une évaluation préliminaire du risque. Ces renseignements concernent :

  • l’infraction;
  • les antécédents criminels;
  • les problèmes sociaux - alcool, drogue ou violence familiale;
  • la santé mentale, surtout si le délinquant souffre de troubles qui le prédisposent à commettre d’autres crimes;
  • le comportement durant les périodes antérieures de mise en liberté, s’il y a lieu;
  • les relations du délinquant et son expérience de travail;
  • les rapports psychologiques ou psychiatriques, dans certains cas;
  • les avis de professionnels et d’autres personnes (comme les Aînés autochtones, les juges et les agents de police) ainsi que tout autre renseignement indiquant si la mise en liberté présenterait un risque inacceptable pour la société;
  • les renseignements fournis par les victimes.

Les membres de la Commission étudient également la probabilité de récidive à la lumière des statistiques, c’est-à-dire qu’ils examinent le taux de récidive chez un groupe de délinquants ayant sensiblement les mêmes caractéristiques et les mêmes antécédents que le délinquant dont le cas est à l’étude.

Après l’évaluation préliminaire, les commissaires tiennent compte de facteurs comme :

  • la conduite du délinquant durant son incarcération;
  • les propos du délinquant montrant qu’il a changé et qu’il est conscient de son comportement criminel et de la nécessité de contrôler les facteurs de risque;
  • les effets bénéfiques retirés par le délinquant des programmes qu’il a pu suivre, comme des programmes de traitement de la toxicomanie, d’acquisition de compétences psychosociales, de spiritualité ou de counseling autochtone, d’alphabétisation, d’emploi ou d’activités socioculturelles, ou des programmes de prévention de la violence familiale;
  • le fait que le délinquant ait été traité pour un trouble diagnostiqué par un spécialiste;
  • le plan de libération du délinquant.

Tous ces renseignements seront pris en considération lors de l’audience de libération conditionnelle. Cette audience réunit, au minimum, le délinquant, deux commissaires et un greffier de la CNLC. Le délinquant peut être accompagné d’un assistant (un ami, un parent, un avocat, un Aîné ou un employeur éventuel), qui pourra présenter des observations en son nom. Les victimes et d’autres observateurs peuvent aussi assister à l’audience.

Après avoir étudié le cas et posé des questions au délinquant, les commissaires discutent entre eux et annoncent leur décision. En cas de refus de la mise en liberté, le délinquant peut faire appel de la décision auprès de la Section d’appel de la CNLC.

2. Chemin graduel vers la sortie : les types de mise en liberté sous condition

Comme on l’a vu, le processus de mise en liberté sous condition est très bien structuré, et les décisions sont prises à la suite d’une analyse poussée de chaque cas. Chaque mise en liberté est soumise à des conditions strictement définies, et le délinquant doit faire l’objet d’une surveillance tout en étant appuyé dans son cheminement. Il y a cinq types de mise en liberté sous condition :

  • la permission de sortir (avec ou sans escorte) est habituellement le premier type de mise en liberté que peut obtenir un délinquant. Elle peut être accordée pour diverses raisons, comme effectuer du service communautaire, établir ou entretenir des rapports avec sa famille, se perfectionner sur le plan personnel ou consulter un médecin. Les délinquants classés au niveau de sécurité maximale ou qui sont maintenus en incarcération après la date de leur libération d’office ne sont pas admissibles aux permissions de sortir sans escorte;
  • le placement à l’extérieur permet aux délinquants classés au niveau de sécurité minimale ou moyenne et qui ne présentent pas un risque inacceptable pour la société de travailler sous surveillance dans la collectivité, ce qui leur permet de développer leurs compétences et de mieux se préparer au travail après leur mise en liberté. Le placement à l’extérieur accroît l’estime de soi et réduit le risque de récidive;
  • la semi-liberté permet au délinquant de participer à des activités dans la collectivité afin de se préparer à la libération conditionnelle totale ou à la libération d’office. Sauf exception, le délinquant en semi-liberté doit retourner chaque soir à un établissement carcéral ou à un foyer de transition;
  • la libération conditionnelle totale permet au délinquant de purger le reste de sa peine sous surveillance dans la collectivité. Les délinquants condamnés à perpétuité pour meurtre au second degré peuvent faire une demande de libération conditionnelle totale après avoir purgé entre 10 et 25 ans de leur peine, selon la décision du tribunal;
  • la libération d’office est un droit prévu dans la loi; elle survient automatiquement après qu’un détenu a purgé les deux tiers de sa peine. Il s’agit d’une autre forme de liberté sous surveillance, et les délinquants peuvent être réincarcérés s’ils présentent un risque inacceptable pour la société. Les détenus qui purgent une peine d’incarcération à perpétuité ou d’une durée indéterminée ne sont pas admissibles à la libération d’office.

En évaluant le potentiel de réinsertion sociale du délinquant et la nature de l’infraction qu’il a commise, le tribunal peut imposer une ordonnance de surveillance de longue durée au délinquant qui a fini de purger sa peine et dont la mise en liberté est imminente. Ces ordonnances peuvent porter, au besoin, sur une période allant jusqu’à 10 ans afin d’assurer la sécurité publique. Les ordonnances de surveillance de longue durée sont accompagnées de conditions semblables à celles d’une mise en liberté sous condition; si le délinquant ne respecte pas ces conditions, l’ordonnance peut être suspendue et le délinquant réincarcéré.

On comprendra que les délinquants qui sont en liberté sous condition, et donc vivent ou travaillent dans la collectivité, sont très bien encadrés par le SCC et ses partenaires. Lorsque la Commission nationale des libérations conditionnelles accorde une mise en liberté, elle impose un certain nombre de conditions : le délinquant devra se présenter régulièrement à son agent de libération conditionnelle et à la police; il devra aussi porter sur lui, en tout temps, son certificat de mise en liberté ou sa carte d’identité, et les présenter à tout policier qui lui en fait la demande.

3. Option-Vie

Comme on l’a vu, l’un des premiers objectifs de la mise en liberté sous condition, outre de contribuer à la sécurité publique, est de faciliter la réinsertion sociale des détenus. Mais il n’est pas facile pour un délinquant condamné à une peine d’emprisonnement à perpétuité de trouver, au quotidien, la motivation de purger sa peine et de faire tous les efforts nécessaires pour se réhabiliter.

C’est dans cette optique qu’a été créé le programme Option-Vie, un service innovateur mis en place grâce à un partenariat entre le SCC, la CNLC et des organismes non gouvernementaux. Option-Vie fait appel à des délinquants condamnés à une peine à perpétuité qui se sont réinsérés dans la collectivité avec succès depuis au moins cinq ans pour guider d’autres délinquants condamnés à une peine à perpétuité, à une peine de durée indéterminée ou à une longue peine. Ces anciens détenus, qui demeurent en liberté conditionnelle, sont appelés « intervenants accompagnateurs internes » et « intervenants accompagnateurs externes » Les intervenants accompagnateurs internes travaillent à l’intérieur des établissements; ils participent à la mise sur pied de programmes pour les détenus purgeant une peine à perpétuité et ils aident à garder ces détenus motivés. Les intervenants accompagnateurs externes, pour leur part, travaillent auprès des délinquants à perpétuité qui sont mis en liberté et qui ont besoin d’aide pour trouver un travail, reprendre contact avec leur famille, se faire un réseau social, etc.

Les responsables d’Option-Vie peuvent mesurer leur succès au nombre de condamnés à perpétuité qui ont réintégré la collectivité et qui en sont devenus des membres productifs. De plus, le projet sensibilise davantage la collectivité au fait que des condamnés à perpétuité peuvent contribuer à la prévention du crime.

Les différentes étapes de la mise en liberté sous condition et les programmes comme Option-Vie prouvent que plus les délinquants ont de liens avec la collectivité, plus ils ont de chances de réussir la transition.

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