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Recommandations canadiennes pour la prévention et le traitement du Paludisme (Malaria) chez les voyageurs internationaux - 2009

2. Prévention - évaluation du risque

Les éléments de la prévention du paludisme sont souvent décrits comme l'ABCD du paludisme. Tous les voyageurs qui se rendent dans des régions impaludées devraient :

  1. être au courant du risque d'infection palustre (décrit dans le présent chapitre),
  2. connaître la meilleure façon de se protéger contre les piqûres de moustiques (chapitre 3),
  3. suivre une Chimioprophylaxie appropriée (chapitre 3)
  4. être conscients de la nécessité d'obtenir rapidement un Diagnostic et un traitement en cas d'accès fébrile (chapitres 3, 6).

Annexe II : Aide-mémoire pour conseiller les voyageurs qui se rendent dans les régions impaludées.

Risque de contracter le paludisme

On peut contracter le paludisme dans les régions suivantes : la plus grande partie de l'Afrique subsaharienne et de la Nouvelle Guinée; de vastes régions du Sud de l'Asie; certaines régions de l'Asie du Sud Est, de l'Océanie, d'Haïti, de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud; certaines régions restreintes du Mexique, de la République dominicaine, de l'Afrique du Nord et du Moyen Orient. L'annexe I indique le risque de paludisme et la chimioprophylaxie recommandée pour chaque pays. Cette information est tirée des évaluations effectuées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis et l'International Association for Medical Assistance to Travellers (IAMAT); elle fait autorité lorsque vient le temps de prendre des décisions relatives aux voyageurs et au paludisme. Il convient de noter, cependant, que bien des facteurs, comme la différence entre les régions au chapitre des taux de déclaration et de la surveillance, peuvent influer considérablement sur la fiabilité de ces données. En outre, une variabilité importante est possible à l'intérieur des zones géographiques définies à l'annexe I.

Le paludisme se transmet principalement entre le coucher du soleil et l'aube, ce qui correspond aux heures où l'anophèle femelle pique. Le risque de transmission est plus élevé dans les régions rurales et il varie selon les saisons dans de nombreux endroits, étant souvent plus grand durant la saison des pluies. La transmission diminue avec l'altitude et peut être absente dans les zones montagneuses (p. ex. en général au dessus de 2 000 m [6 500 pieds]) et est pratiquement non existante à plus de 2 500 m (8 000 pieds) (voir l'annexe I pour des renseignements sur le risque de paludisme et l'altitude dans chaque pays).

Les voyageurs qui se rendent dans les régions urbaines et touristiques de l'Asie du Sud Est, de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud s'exposent à un risque minime, tandis que ceux qui se rendent dans des régions urbaines d'autres zones impaludées, notamment l'Afrique subsaharienne, le sous continent indien et la Nouvelle Guinée (Papouasie Nouvelle Guinée [PNG] et Papouasie [Irian Jaya]) s'exposent à un risque important. Bien que le risque soit difficile à mesurer et à surveiller, des études rétrospectives portant sur un grand nombre de voyageurs ont permis d'estimer approximativement le risque de paludisme durant un séjour d'un mois sans chimioprophylaxie(14, 15, 16) :

  • Océanie (PNG, Papouasie [Irian Jaya], îles Salomon et Vanuatu) 1:20;
  • Afrique subsaharienne 1:50;
  • Sous-continent indien 1:500;
  • Asie du Sud Est 1:500;
  • Amérique du Sud 1:2 500;
  • Amérique centrale et Antilles 1:10 000.

Comme on le voit, les régions où le risque de paludisme est le plus élevé sont l'Océanie, l'Afrique et, dans une moindre mesure, le sous continent indien, où les risques relatifs de contracter le paludisme en voyage sont 50 à 200 fois plus élevés que dans les zones à faible risque de paludisme(16).

Au cours de la dernière décennie, le paludisme pharmacorésistant n'a cessé de se propager. On a également assisté à l'émergence ou à la réémergence de l'infection, en particulier par P. Falciparum, dans certaines zones géographiques. Par exemple, de vastes éclosions de paludisme sont survenues sur le sous continent indien, où une proportion de plus en plus importante de cas sont dus à des souches pharmacorésistantes de P. Falciparum. Ces dernières années, des touristes ont contracté le paludisme dans des centres touristiques situés dans certaines régions de la République dominicaine(17), de l'île de Great Exuma aux Bahamas(18), et de la Jamaïque(19), où la transmission de paludisme était auparavant inexistante; ils ont contracté l'infection par l'entremise de personnes infectées qui avaient émigré d'une zone impaludée (Haïti). Bien qu'on ait réussi à contenir ces éclosions, celles-ci montrent que le paludisme peut rapidement apparaître ou refaire surface dans des régions antérieurement non touchées. Les professionnels de la santé qui dispensent des conseils aux voyageurs devraient donc surveiller continuellement les avis aux voyageurs et les alertes concernant le paludisme.

Évaluation de l'exposition

Il faut examiner soigneusement l'itinéraire pour voir si des régions à l'intérieur du pays de destination sont des zones connues de transmission du paludisme, afin de déterminer le risque auquel s'exposent les voyageurs. Au nombre des facteurs à considérer pour déterminer le risque d'exposition figurent :

  • le niveau d'endémicité dans la ou les zones visitées;
  • la présence de Plasmodium Falciparum;
  • la durée d'exposition;
  • les séjours en milieu rural, périurbain et urbain;
  • la saison (saison de pluie P. opP. à saison sèche);
  • l'exposition durant la nuit;
  • l'accessibilité et la probabilité d'utilisation d'autres interventions, p. ex. des mesures de protection individuelle.

Le CCMTMV estime que le risque de contracter le paludisme est minime dans les centres urbains de l'Asie du Sud Est et de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud. Lorsqu'on recommande des mesures de prévention contre le paludisme aux Canadiens qui comptent visiter ces régions où le risque de transmission du paludisme est faible, il convient de soupeser le risque estimatif d'acquisition du paludisme, les facteurs de risque énumérés ci dessus et les risques potentiels associés à la chimioprophylaxie du paludisme. Il faut se servir de son jugement clinique et tenir compte des particularités de chaque cas. Il incombe aux professionnels de la santé qui dispensent de conseils aux voyageurs de surveiller les avis aux voyageurs et les alertes (affichés sur les sites Web de l'ASPC et des CDC) pour demeurer au fait des risques de paludisme dans certaines destinations, car le risque peut évoluer rapidement même dans des régions normalement considérées comme à faible risque. Peu importe les régimes chimioprophylactiques employés, le CCMTMV recommande l'utilisation de mesures de protection individuelle. Le lecteur est prié de se reporter à la « Déclaration relative aux mesures de protection individuelle pour prévenir les piqûres ou morsures d'arthropodes » du CCMTMV.

La distribution de la pharmacorésistance (voir l'annexe I) fait également partie de l'évaluation de l'exposition. Le paludisme à P. Falciparum chloroquinorésistant est répandu dans toutes les zones impaludées du monde, sauf au Mexique, dans les Antilles, en Amérique centrale (à l'ouest du canal de Panama) et dans certaines parties du Moyen Orient (y compris l'Égypte)(5, 20). La présence du paludisme à P. Falciparum résistant à la chloroquine ET à la méfloquine a été confirmée dans les régions frontalières de la Thaïlande et du Cambodge et celles de la Thaïlande et du Myanmar (Birmanie), de même que dans les provinces occidentales du Cambodge, les États de l'Est de la Birmanie (Myanmar), à la frontière de la Birmanie et de la Chine, le long des frontières du Laos et de la Birmanie et dans le Sud du Vietnam(20).

Évaluation de l'hôte

Il faut prendre en considération les facteurs liés à la santé du voyageur (p. ex. âge, grossesse, médication actuelle et maladies chroniques telles que l'infection à VIH) pour évaluer le risque d'accès palustre grave et choisir un agent prophylactique approprié (voir le chapitre 4)(21).

Il faut également informer les voyageurs qu'il peut être difficile d'obtenir un diagnostic fiable du paludisme et d'avoir accès aux différentes possibilités de traitement dans bon nombre des destinations visitées(22). L'auto diagnostic du paludisme sur la foi des seuls symptômes, sans diagnostic en laboratoire, laisse à désirer. Certains voyageurs qui se rendent dans des régions éloignées peuvent cependant ne pas avoir d'autre choix que d'avoir recours à l'auto diagnostic et à l'auto traitement (voir le chapitre 7).

Pour évaluer le risque individuel, il faut se poser les questions suivantes :

Évaluation de l'exposition

  1. Le voyageur risque t il d'être exposé au paludisme?
  2. Se rendra t il dans une zone où circulent des souches pharmacorésistantes de P. Falciparum?

Évaluation de l'hôte

  1. Le voyageur court il un risque accru d'accès palustre grave (p. ex. jeune enfant, sujet asplénique, infecté par le VIH, femme enceinte)?
  2. L'usage d'un antipaludéen particulier est il contre indiqué chez ce voyageur?
  3. Le voyageur aura t il accès à des soins médicaux immédiats (y compris des frottis sanguins préparés avec du matériel stérile et interprétés correctement) s'il éprouve des symptômes de paludisme?
Médecine fondée sur les preuves (MFP)
Recommandations dans le cadre d'une approche de la MFP Catégorie MFP
Les voyageurs devraient recevoir l'avis d'un spécialiste concernant les risques de paludisme et les stratégies d'évitement(15). B III
La chimioprophylaxie du paludisme est très efficace et est recommandée aux voyageurs qui se rendent dans des régions impaludées(20). A I
Une évaluation du risque de paludisme (niveau d'endémicité, durée d'exposition, mesures de protection individuelle) est essentielle pour éduquer les voyageurs(15, 16). B II
Une évaluation de la santé du voyageur doit être effectuée en priorité pour déterminer le risque de paludisme(21). B II
Une évaluation de la qualité et de l'accessibilité des installations médicales et de laboratoire doit être effectuée avant que des conseils ne soient dispensés au patient concernant le risque de paludisme(23). B II

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