Exposé de politique fondé sur des données probantes – Utilisation des déterminants du vieillissement en bonne santé pour guider le choix des prescriptions sociales pour les aînés
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Publié par : L'Agence de la santé publique du Canada
Date de publication : septembre 2024
ISSN: 2368-7398
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Beth Mansell, M.S.P.Note de rattachement des auteurs 1; Anne Summach, M. Sc. inf.Note de rattachement des auteurs 2; Samantha Molen, M. Serv. soc.Note de rattachement des auteurs 3; Tammy O’Rourke, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 4
https://doi.org/10.24095/hpcdp.44.9.05f
Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.
Attribution suggérée
Exposé de politique par Mansell B et al. dans la Revue PSPMC mis à disposition selon les termes de la licence internationale Creative Commons Attribution 4.0
Rattachement des auteurs
Correspondance
Beth Mansell, Healthy Aging Alberta, Centraide de la région de Calgary, 105 12 Ave SE, Calgary (Alberta) T2G 1A1; tél. : 780-913-9027; courriel : beth.mansell@healthyagingalberta.ca
Citation proposée
Mansell B, Summach A, Molen S, O’Rourke T. Utilisation des déterminants du vieillissement en bonne santé pour guider le choix des prescriptions sociales pour les aînés. Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada. 2024;44(9):428-435. https://doi.org/10.24095/hpcdp.44.9.05f
Résumé
L’âge de la population canadienne augmente, ce qui nécessite l’utilisation de méthodes et d’outils innovants pour évaluer les besoins des aînés et cerner les pratiques efficaces en matière de prescription sociale et de soins de santé. En Alberta, un organisme communautaire de services aux aînés a entrepris d’élaborer et de tester l’indice des ressources pour un vieillissement en bonne santé (Healthy Aging Asset Index, HAAI), un outil d’évaluation et un guide de prescription sociale utilisable par divers de professionnels au sein de la collectivité. L’outil a été élaboré pour l’évaluation du degré de complexité médicale des cas et pour la pratique du travail social. Il respecte les déterminants du vieillissement en bonne santé du Cadre du vieillissement en bonne santé (Healthy Aging Framework) de l’Alberta, lui-même fondé sur les déterminants du vieillissement en bonne santé de l’Organisation mondiale de la santé. Les résultats du projet pilote montrent que les aînés ont présenté une amélioration de leurs capacités fonctionnelles en lien avec ces déterminants au fil du temps grâce au soutien qu’ils ont obtenu pour surmonter leurs vulnérabilités. L’adoption d’outils comme le HAAI peut favoriser la cohésion des services de soutien offerts aux aînés dans l’ensemble du continuum de soins et pourrait réduire la pression exercée sur le système de santé en permettant d’offrir certains soins au sein de la collectivité, améliorant ainsi la capacité des systèmes de santé et du gouvernement à répondre aux besoins des aînés du Canada.
Mots-clés : vieillissement en bonne santé, personnes âgées, aînés, santé communautaire, fragilité, orientation
Points saillants
- L’indice des ressources pour un vieillissement en bonne santé (HAAI) est un outil d’évaluation de la prescription sociale utilisable par divers professionnels de la collectivité.
- Utiliser les déterminants du vieillissement en bonne santé peut éclairer la pratique de la prescription sociale dans différents domaines.
- L’outil HAAI peut aider à offrir certains soins en milieu communautaire plutôt qu’au sein du système de santé, améliorant ainsi la capacité des systèmes de santé à fournir des soins.
- Des investissements supplémentaires sont nécessaires pour soutenir la mise en œuvre de l’outil HAAI et les parcours de prescription sociale au sein des organisations communautaires.
Introduction
L’âge de la population canadienne augmente, tout comme la nécessité de comprendre les facteurs qui ont une incidence sur la capacité des aînés à bien vieillir au sein de la collectivitéNote de bas de page 1. Les organisations doivent élaborer des programmes pour tenir compte de ces facteurs. En effet, la population mondiale vieillit plus vite que jamaisNote de bas de page 2, et la capacité des systèmes de santé à fournir des soins aux aînés est limitée. La fragilité est l’un des facteurs qui a une influence sur la capacité des aînés à bien vieillir au sein de la collectivité. Les aînés fragiles ont besoin de modèles de soins holistiques pour optimiser les résultats axés sur le patient et améliorer leur qualité de vieNote de bas de page 3. Malgré ce besoin, les recherches antérieures n’ont porté que sur la façon dont on pouvait effectuer le dépistage de la fragilité dans des contextes médicaux comme les soins primaires, les soins ambulatoires, les résidences‑services, les maisons de soins de longue durée, les milieux de soins actifs et les unités de soins intensifsNote de bas de page 3. Les organismes communautaires qui utilisent une approche fondée sur les points forts pour accroître la résilience des aînés sont particulièrement bien placés pour déceler la fragilité et y répondre par le biais de programmes de prescription sociale, et les nouvelles pratiques et politiques devraient être orientées vers des solutions communautaires pour lutter contre la fragilité dans des systèmes qui ne relèvent pas de la médecine.
En Alberta, plus d’un million de personnes seront âgées de 65 ans ou plus d’ici 2035Note de bas de page 4. Les aînés représentent actuellement moins d’un cinquième de la population du Canada, mais sont à l’origine de près de la moitié de l’ensemble des dépenses en soins de santéNote de bas de page 1. De nombreux aînés vivent avec un certain degré de fragilité. Or il existe un lien entre la fragilité et les maladies chroniques, en particulier lorsqu’on tient compte du statut socio-économique. Par exemple, en Ontario, la proportion de personnes atteintes de cinq maladies chroniques ou plus est de 11 % dans les groupes à faible fragilité, de 26 % dans les groupes à fragilité moyenne et de 44 % dans les groupes à fragilité élevéeNote de bas de page 5. Une fragilité accrue a été associée à un revenu inférieur à l’échelle du quartierNote de bas de page 5, et des travaux de recherche ont montré que les facteurs sociaux peuvent être un prédicteur d’hospitalisationNote de bas de page 6. Ces coûts et ces défis s’ajoutent à la pression exercée par la gestion des interventions post-COVID-19 au sein des systèmes de santé, notamment les longs temps d’attente pour les soins d’urgence et chirurgicaux, les difficultés à atteindre les objectifs de dépistage dans les milieux de soins primaires (tests de Pap, mammographies, dépistage du cancer de la prostate) et la fourniture de services de soins primaires en temps voulu pour des tâches simples, par exemple pour le renouvellement d’ordonnances.
Compte tenu des tendances démographiques marquées actuelles et de l’incapacité des systèmes de santé à répondre aux demandes de soins d’une population vieillissante, il est nécessaire de faire les choses différemment. Une des solutions potentielles consiste à déceler la fragilité à un stade précoce et à répondre aux besoins sociaux et non médicaux des aînés ailleurs que dans les cabinets de médecins et les milieux de soins primaires, en se fondant sur le principe du bon fournisseur au bon endroit et au bon moment, une approche que les planificateurs de systèmes ont adoptée pour améliorer l’efficience et l’efficacité des servicesNote de bas de page 7. Fournir des soins aux aînés vivant dans la collectivité et répondre à leurs besoins est une tâche complexe. Des ressources et des outils appropriés sont donc nécessaires pour atteindre cet objectif, d’autant plus que le nombre d’aînés vivant dans la collectivité augmente en raison des changements démographiques. Par ailleurs, la complexité d’un cas a été identifiée comme un facteur clé contribuant à une utilisation accrue des soins de santé et les méthodes permettant d’identifier les personnes ayant besoin d’une évaluation ciblée pour guider les interventions interdisciplinaires ont fait l’objet d’analyses dans la littératureNote de bas de page 8Note de bas de page 9Note de bas de page 10Note de bas de page 11Note de bas de page 12. La prescription sociale a été définie comme « un moyen par lequel des professionnels de confiance en milieu clinique ou communautaire déterminent qu’une personne a des besoins sociaux liés à la santé qui ne sont pas d’ordre médical, et par lequel ils adressent cette personne à des services et à un soutien non cliniques au sein de la collectivité, par l’élaboration conjointe d’une prescription sociale, c’est-à-dire une prescription non médicale pour améliorer la santé et le bien-être de la personne et renforcer ses liens avec la communauté »Note de bas de page 13,p.9[traduction]. L’évaluation de la complexité des cas et des risques connexes chez les aînés offre ainsi des opportunités de renforcer la résilience grâce à des options comme la prescription sociale et permet de contribuer à réduire les répercussions sur la santé en avalNote de bas de page 8.
Pour que la prescription sociale permette une orientation efficace des aînés vers un soutien et des services non cliniques, il est nécessaire de procéder à une évaluation globale conjointe (sociale et clinique), qui soit axée sur les forces, la résilience et le changement positif plutôt que sur les déficits et qui facilite l’intégration des services fournis par les organisations bénévoles et communautaires en collaboration avec les soins de santé primairesNote de bas de page 14. Or on manque d’outils d’évaluation répondant aux besoins d’évaluation sociale et clinique de cette population. Notre article porte sur l’élaboration d’un outil d’évaluation de ce type, l’indice des ressources pour un vieillissement en bonne santé (Healthy Aging Asset Index, outil HAAI dans la suite du texte), qui est fondé sur le cadre d’un vieillissement en bonne santé (Healthy Aging Framework, cadre HAF dans la suite du texte), et sur son utilisation potentielle par les organismes communautaires pour faciliter la prescription sociale et lutter contre la fragilité.
Élaboration de l’outil HAAI
L’outil HAAI a été élaboré pour faciliter une évaluation approfondie et exhaustive des facteurs de risque de déclin fonctionnel chez les aînés, dans un contexte ou aucune méthode claire n’indique comment intervenir auprès des membres de cette population lorsqu’ils présentent des besoins sociaux et de santé complexes. Idéalement, toute personne offrant des services aux aînés en milieu communautaire (où plus de 92 % des aînés vivent et ont des loisirsNote de bas de page 15) serait en mesure de déceler une fragilité et d’effectuer une évaluation du vieillissement en bonne santé. Une équipe interprofessionnelle a mis au point l’outil HAAI et a demandé une rétroaction à divers intervenants sur cet outil, qui utilise un langage simple pour favoriser une évaluation précoce et efficace ainsi que pour sélectionner les interventions cliniques et sociales nécessaires. Ces interventions s’intègrent au développement de plans d’action personnalisés pour assurer le vieillissement en bonne santé des aînés vivant dans la collectivité. Cette évaluation et ces interventions reposent sur un modèle de prescription sociale articulé à une approche holistique et anti-oppressive en matière de soins.
Cette approche part du principe que les problèmes de santé des aînés sont exacerbés par les conditions sociales dans lesquelles ils vivent et sur lesquelles ils n’ont aucune priseNote de bas de page 16. L’évaluation et la planification reposent également sur le principe selon lequel les aînés vivant dans la collectivité présentent différents niveaux de fragilité – certains sont « peu fragiles », beaucoup sont « modérément fragiles » et très peu sont « extrêmement fragiles », conformément aux catégories établies par l’échelle de fragilité clinique (Clinical Frailty Scale, CFS dans la suite du texte)Note de bas de page 17. Les plans individualisés permettent d’optimiser la prescription sociale en tenant compte du degré de complexité médicale et sociale des cas et en servant de fondement aux prescriptions cliniques et sociales, un type d’approche de prescription sociale intégrée qui n’est actuellement utilisée que de façon très limitée au Canada.
Nous avons réalisé une revue de la littérature sur la complexité des cas chez les aînés et chez d’autres populations mal desservies vivant dans la collectivité. Cette revue de la littérature scientifique et de la littérature grise a permis de recenser plusieurs outils qui prennent en compte des indicateurs de complexité au sein de la population. Aucun de ces outils ne met l’accent sur les points forts plutôt que sur les déficits et tous ces outils demeurent dépourvus de composantes d’évaluation sociale globale, deux éléments qui sont de plus en plus demandés dans la littératureNote de bas de page 18Note de bas de page 19. Les approches actuelles utilisées avec les aînés, en particulier les pratiques anti-oppressives et centrées sur la personne, sont axées sur les forces et mettent l’accent sur les potentialités, les aptitudes et les capacités des aînés. Ces forces peuvent être acquises au fil des années et optimisées au sein d’un réseau de soutien composé de membres de la famille, d’amis et de fournisseurs de soins. Le fait d’identifier et d’utiliser ce que les aînés apportent à la relation de soins favorise l’inclusion, la validation et l’autonomisationNote de bas de page 18.
S’inspirant d’un outil d’évaluation utilisé par un organisme à but non lucratif d’Edmonton, l’outil HAAI a été élaboré pour analyser la polypharmacie, les maladies chroniques concomitantes et l’établissement de liens avec le personnel médical ainsi que divers facteurs sociaux comme la sécurité, la stabilité économique et le logement. Comme le projet pilote d’utilisation de l’outil a eu lieu au tout début de la pandémie de COVID-19, il était essentiel qu’il puisse être utilisé à la fois en personne et dans le cadre d’un rendez-vous de télésanté, afin de faciliter le soutien continu aux aînés qui rencontrent des obstacles importants en matière d’accès aux soins de santé. En outre, l’outil devait être utilisable, compréhensible et fiable pour tous les évaluateurs des besoins sociaux et de santé. Le produit élaboré utilise un langage axé sur les forces, cible un éventail de déterminants de la santé, est facile à utiliser, intègre la prescription sociale et fournit un score quantitatif qui peut être intégré aux plans d’évaluation et de réévaluation.
L’outil HAAI intègre sept domaines qui s’alignent sur les déterminants du vieillissement en bonne santé du cadre HAFNote de bas de page 20. Le cadre HAF est un outil qu’on peut utiliser pour articuler, organiser et communiquer le travail des organismes de services aux aînés et qui se fonde sur les déterminants du vieillissement en bonne santé établis par l’Organisation mondiale de la santéNote de bas de page 21. Ces déterminants forment les domaines du cadre, chapeautant l’ensemble du travail. Ils se subdivisent en aires de service, puis en activités, résultats et impacts. Le cadre HAF peut être utilisé pour la planification stratégique, la définition des priorités, l’évaluation au sein des organismes et la coordination dans l’ensemble du secteur. Les déterminants du vieillissement en bonne santé jouent un rôle essentiel en ce qui concerne la façon dont les personnes font face à l’adversité, à des difficultés ou à des situations de vulnérabilité à mesure qu’elles vieillissentNote de bas de page 16. Les déterminants énumérés dans le cadre HAF ont été adaptés afin de créer les sept domaines de l’outil HAAI : santé physique, bien-être personnel, santé mentale, soutien social, environnement physique, sûreté et sécurité et enfin engagement social.
Le fait de structurer l’outil HAAI en fonction du cadre HAF de l’Alberta permet à un évaluateur de déterminer facilement dans quels domaines une personne bénéficierait d’une prescription sociale. Pour ce faire, on utilise une série de questions par déterminant, chaque déterminant étant évalué sur une échelle à quatre points. Par exemple, pour le déterminant associé à l’environnement physique, les questions portent sur le logement, la pauvreté et les transports : « Avez‑vous un endroit sûr où vivre, est-il abordable et voulez-vous continuer à y vivre? », « Est-il difficile de joindre les deux bouts chaque mois avec votre revenu actuel? » et « Comment vous rendez-vous normalement à vos rendez-vous ou comment faites-vous vos courses? ». En fonction des réponses, l’outil proposera diverses interventions comme de l’aide pour remplir une demande de logement abordable, de l’aide pour accéder à des prestations financières ou de l’aide pour trouver des options de transport. Les personnes ont rarement besoin d’une assistance dans tous les domaines, mais ont souvent besoin d’une intervention ciblée pour atteindre des objectifs précis comme un engagement social accru, des conditions de vie plus sûres, une meilleure sécurité financière ou une santé mentale stable.
Pour chaque déterminant, on calcule puis combine des scores par domaine. Un score de zéro dans un domaine est le signe d’un faible degré de complexité et d’une absence de preuve d’un besoin d’intervention. Les domaines pour lesquels un faible score a été enregistré au moyen de l’outil HAAI correspondent à des domaines de force et de résilience. Dans les domaines où le score est égal ou supérieur à un, un processus de prescription clinique et sociale est mis en œuvre pour intervenir à l’égard des facteurs contribuant à la vulnérabilité. Les domaines pour lesquels un score élevé a été enregistré correspondent à des zones de vulnérabilité. Les interventions cliniques et sociales suggérées visent à stabiliser la situation des aînés risquant de connaître une fragilité accrue dans la collectivité. Le score total HAAI quantifie la résilience globale de la personne ou sa situation en matière de ressources. Cette méthode est conforme aux lignes directrices en matière de notation utilisées par d’autres outils d’évaluation de la complexitéNote de bas de page 22.
Le fait de disposer d’un outil permettant une évaluation et une intervention directes est essentiel pour que le personnel non clinique puisse suivre le processus, le score HAAI fournissant des indications sur les types de prescriptions sociales envisageables pour renforcer la résilience dans des domaines particuliersNote de bas de page 19. Une approche qui optimise la participation de tous les professionnels et qui tient compte de tous les déterminants de la santé renforce la prestation de soins holistiques à l’intention des aînésNote de bas de page 23. En outre, les scores obtenus dans les différents domaines peuvent aider à hiérarchiser les besoins en vue d’assurer le bien-être global de la personne, sachant que les priorités de l’évaluateur peuvent ne pas correspondre à celles de l’aîné et qu’elles devront de ce fait être discutées de manière collaborative.
Les activités de prescription clinique s’harmonisent aux soins médicaux habituels et intègrent l’optimisation des prescriptions, l’établissement de liens avec les soins primaires, les mesures de soutien en santé mentale et physique, l’établissement de liens avec les soins paramédicaux et la prise en charge des maladies chroniques. Les activités de prescription sociale portent sur les besoins de l’individu qui ne sont pas immédiatement identifiables comme « cliniques » ou « liés à la santé », bien que ces facteurs sociaux aient des effets importants sur l’état de santé et le bien-être futurs de la personneNote de bas de page 23. Les évaluateurs collaborent avec chaque aîné pour créer un plan de ressources acceptable pour celui‑ci et correspondant à ses objectifs en matière de santé et de bien-être. Les prescriptions sociales les plus efficaces sont plus spécifiquement celles qui sont élaborées par des travailleurs intégrés dans la collectivité et qui sont en lien avec diverses ressources bénévoles, communautaires et socialesNote de bas de page 14.
Méthodologie du projet pilote HAAI
À l’automne 2019, un financement a été obtenu pour tester l’outil HAAI auprès d’aînés considérés comme modérément fragiles. Les aînés ont été évalués à l’aide de l’échelle de fragilité clinique (CFS, pour Clinical Frailty Scale)Note de bas de page 17 afin de sélectionner un groupe susceptible d’amélioration sur le plan de la qualité (personnes ayant obtenu un score se situant entre 4 et 6 à l’échelle CFS) pour lequel des évaluations supplémentaires avec le HAAI seraient effectuées. Les aînés ont été recrutés parmi les personnes ayant téléphoné à l’association des aînés : on les a invitées à remplir un questionnaire sur la fragilité adapté de l’échelle CFS afin de cerner lesquelles étaient peu fragiles ou modérément fragiles. On leur a demandé si elles accepteraient qu’un coordonnateur communautaire (agent de liaison) communique avec elles pour une évaluation supplémentaire à l’aide de l’outil HAAI. L’outil HAAI a été utilisé à titre d’évaluation gériatrique globale afin de déterminer les domaines de résilience et de vulnérabilité au sein de ce groupe d’aînés modérément fragiles. L’évaluation a été réalisée au moment de l’admission des participants au projet pilote, puis répétée à 3, 6 et 12 mois, afin de suivre l’évolution des scores au fil du temps.
Les aînés ayant été vus en personne ont également fait l’objet d’une évaluation reposant sur l’échelle de fragilité d’Edmonton (EFS)Note de bas de page 24 à titre de mesure comparative. Ces scores à l’EFS ont été utilisés afin de fournir, pour les personnes ayant fait l’objet d’un dépistage à l’aide de l’outil HAAI, un contexte en matière de fragilité établi à partir d’une échelle validéeNote de bas de page 24. Ces données sont demeurées peu nombreuses en raison de la pandémie de COVID-19, ce qui a compliqué l’établissement d’une validité convergente. Les processus formels relatifs à la validité du contenu et à la fiabilité interévaluateurs étaient en cours au moment de la rédaction de cet article. Lors du projet pilote, l’utilisation de l’outil par différents types de professionnels a permis d’obtenir des perspectives approfondies lors du développement itératif de l’outil et d’avoir une approche plus solide lors de l’implantation de l’outil à l’échelle de la collectivité et des services sociaux. Les travailleurs sociaux ont reçu une formation leur permettant d’effectuer l’évaluation à l’aide de l’échelle CFS et de l’outil HAAI par téléphone ou en personne auprès des aînés vivant dans la collectivité. Ils ont essentiellement agi à titre de coordonnateurs communautaires, un rôle qui est bien décrit dans la littérature sur la prescription socialeNote de bas de page 23. Ces coordonnateurs ont pris l’initiative de fournir un soutien à l’orientation, sous la direction du fournisseur de soins primaires de la personne aînée.
L’utilisation de l’outil HAAI a amené les coordonnateurs à recommander un nombre croissant d’interventions au fil du projet pilote afin de favoriser la création de ressources à l’intention des aînés. Cela a permis aux professionnels offrant des services non médicaux de proposer un large éventail d’interventions potentielles, ce qui a conduit à des discussions avec les aînés afin de leur permettre de sélectionner les soutiens les plus appropriés pour eux en matière de prévention et de moyens d’action. Cette pratique, facilitée par l’outil HAAI, repose sur le concept de prescription sociale, un système structuré d’orientation des personnes vers une gamme de services cliniques et non cliniques et de mise à profit du secteur communautaire pour répondre aux besoins des individus.
Résultats
À la fin du projet pilote de l’outil HAAI en 2022, nous avons réalisé une analyse statistique visant à mesurer les effets du programme et de l’outil sur le niveau de capacités fonctionnelles des participants. Nous avons pu recueillir des données sur 77 personnes de 50 ans et plus, pour quatre périodes de mesure allant de l’évaluation initiale au dernier suivi. L’outil HAAI a été utilisé 210 fois lors du projet pilote, les participants n’ayant pas tous effectué le nombre total d’évaluations de suivi. L’analyse statistique a mis en évidence la nécessité de normaliser la composition des catégories car, étant donné que les domaines des déterminants d’un vieillissement en bonne santé comprenaient initialement deux, trois ou quatre questions, il a été difficile de réaliser une analyse comparative entre les divers domaines. Lors de l’analyse des effets du programme HAAI et des prescriptions sociales mises en œuvre, les scores HAAI globaux ont montré une amélioration statistiquement significative après 12 mois, après ajustement pour l’âge et le sexe.
Il est cependant plus important de considérer les scores et l’amélioration correspondant à chaque domaine précis des déterminants d’un vieillissement en bonne santé, dans la mesure où les prescriptions sociales ciblent un domaine plutôt que le score HAAI dans son ensemble. Pour un résultat optimal, le score obtenu à l’aide de l’outil doit être le plus bas possible. Pour ce projet pilote, les scores les plus élevés ont été obtenus pour les domaines de la santé physique et de l’engagement social, ce qui a permis de conclure que ces domaines étaient les plus problématiques pour les participants. Les domaines les moins préoccupants pour la majorité des participants étaient la sûreté et sécurité ainsi que le bien-être personnel, un résultat qui est étayé par la littératureNote de bas de page 25.
Compte tenu du type de données et du nombre d’aînés ayant fait l’objet d’une évaluation, nous avons estimé qu’un modèle de régression ajusté en fonction des données de panel avec effets aléatoires était le plus approprié. Pour vérification, des modèles statistiques supplémentaires ont été exécutés à l’aide des analyses habituelles de régression par la méthode des moindres carrés ordinaires, de l’analyse de la variance (ANOVA) et des données de panel avec effets fixes. L’analyse de régression sur données de panel est plus appropriée que l’analyse de la variance (ANOVA) dans le cas présent, car elle permet de tenir compte des valeurs manquantes. Des effets aléatoires ont été utilisés plutôt que des effets fixes afin de vérifier si l’âge et le sexe du client étaient significatifs.
À l’évaluation à 12 mois, on a observé une réduction statistiquement significative du score HAAI des clients par rapport à leur score lors de l’évaluation initiale. Dans notre analyse, cette réduction correspond à une diminution de 4,1 points (IC à 95 % : 2,61 à 7,26; p < 0,001) du score total après ajustement pour l’âge et le sexe.
Les résultats de la régression pour le score global HAAI sont présentés ci-dessous (tableau 1). Le temps, l’âge et le sexe expliquent ensemble environ 20 % de la variation du score HAAI d’une personne et un peu moins de 12 % de la variation des scores HAAI entre individus. Par rapport à l’évaluation initiale, il n’y a pas eu de changement significatif dans le score global HAAI à 3 mois ou à 6 mois. Comparés aux femmes, les hommes ne présentaient pas de différence statistiquement significative pour le score HAAI. Par rapport aux aînés de 50 à 64 ans, les scores HAAI des aînés de 65 à 74 ans n’offraient pas de différence statistiquement significative alors que les scores des 75 ans et plus étaient nettement inférieurs (de 6,51 points; p < 0,01).
Variable | Santé mentale (sur 12) |
Bien-être personnel (sur 9) |
Environnement physique (sur 9) |
Santé physique (sur 12) |
Sûreté et sécurité (sur 6) |
Soutien social (sur 9) |
Engagement social (sur 9) |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Moment – évaluation initiale | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence |
Moment – à 3 mois | −0,0798 | −0,0987 | −0,3304 | 0,2025 | −0,3821Note de bas de page *** | 0,3407Note de bas de page * | 0,2264 |
Moment – à 6 mois | −0,0862 | −0,3292Note de bas de page * | −0,4923Note de bas de page ** | 0,1095 | −0,5625Note de bas de page *** | 0,2896 | 0,0515 |
Moment – à 12 mois | −0,4807Note de bas de page * | −0,4945Note de bas de page ** | −0,8170Note de bas de page *** | −0,4639 | −0,6382Note de bas de page *** | 0,0533 | −1,2147Note de bas de page *** |
Sexe – femme | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence |
Sexe – homme | −0,4678 | −0,0483 | 0,3332 | 0,1360 | 0,0708 | 0,3954 | 0,2673 |
Âge – 50 à 64 ans | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence | Valeur de référence |
Âge – 65 à 74 ans | −1,6795Note de bas de page ** | −0,1844 | −0,8233 | 0,4291 | −0,8358Note de bas de page ** | 0,2233 | −1,1505Note de bas de page * |
Âge – 75 ans et plus | −1,9816Note de bas de page *** | −0,2394 | −1,8825Note de bas de page *** | −0,4730 | −0,9145Note de bas de page ** | 0,0549 | −1,0425Note de bas de page * |
Constante | 3,5441Note de bas de page *** | 1,0098Note de bas de page *** | 3,1871Note de bas de page *** | 4,7363Note de bas de page *** | 1,6647Note de bas de page *** | 1,1038Note de bas de page *** | 4,1188Note de bas de page *** |
L’analyse des données du projet pilote a également mis en évidence les domaines pour lesquels les plus grandes améliorations ont été observées durant la période d’essai, révélant des améliorations statistiquement significatives immédiates des scores en matière de sûreté et de sécurité, des améliorations à 6 mois pour le bien-être personnel et l’environnement physique ainsi que des améliorations à 12 mois pour la santé mentale et l’engagement social. Les scores obtenus dans le domaine de la santé physique n’ont pas montré d’amélioration significative au cours du projet pilote d’un an (tableau 1). Les moins bons scores dans le domaine du soutien social sont difficiles à interpréter, mais sont peut être liés au fait que le projet a été lancé au début de la pandémie de COVID-19.
Contrairement aux outils traditionnels d’évaluation de la fragilité ou d’évaluation gériatrique, le projet pilote d’utilisation de l’outil HAAI a permis d’optimiser le rôle relationnel du coordonnateur communautaire, qui a permis que les interventions choisies concordent avec les objectifs et les ressources dont disposaient les aînés, plaçant ces derniers au centre du processus et aux commandes. L’utilisation d’approches modernes en travail social, comme l’accompagnement axé sur les solutions et l’entretien motivationnelNote de bas de page 26, permet de renforcer le rôle de l’outil HAAI non seulement en tant qu’instrument d’évaluation, mais aussi en tant qu’outil de collaboration favorisant l’établissement d’un partenariat actif avec les clients. L’outil HAAI va au-delà du modèle de résolution immédiate des problèmes (administration d’un traitement seulement) utilisé couramment dans la pratique actuelle du travail social de première ligne, et favorise plutôt une philosophie de la pratique qui encourage l’établissement de meilleures relations et un bien-être global et à long terme – une approche préventive préconisée par de nombreux professionnels du travail socialNote de bas de page 10. Les futures recherches viseront des mesures possibles quant à la manière dont l’outil HAAI influence la santé en général et quant aux répercussions de l’outil sur l’utilisation des ressources en santé. Le fait de combiner l’analyse avec d’autres mesures comme la durée du séjour lors d’une hospitalisation, la qualité de vie, le déplacement vers des établissements offrant des niveaux de soins plus élevés ou le nombre de visites aux urgences peut fournir des données pertinentes pour renforcer l’élargissement et le financement public des programmes de prescription sociale.
Options de politiques et de programmes
L’outil HAAI, qui a été élaboré et conçu pour être utilisé dans les secteurs de la santé et des services sociaux, améliore la capacité des systèmes de santé et communautaires à repérer les aînés ayant des besoins complexes et cherchant un soutien. Il permet également de définir clairement les options potentielles dont disposent les aînés pour résoudre ou aborder les problèmes qui pourraient, au fil du temps, contribuer à une fragilité accrue, à une augmentation des coûts pour la société et à un accroissement des pressions exercées sur le système. Les soins préventifs et communautaires constituent une priorité importante pour les gouvernements locaux, provinciaux et fédéraux.
Comme nous l’avons vu, la plupart des aînés (92 %) résident en logement privéNote de bas de page 15 et ont besoin d’avoir accès à un réseau de soutien communautaire qui permette le vieillissement chez soi. Les collectivités ont quant à elles besoin d’un financement adéquat pour ce réseau de soutien, ainsi que d’un coordonnateur communautaire ou d’un agent de liaison spécialisé pour réaliser des évaluations globales à l’aide de l’outil HAAI. Bien que les cliniciens en soins primaires soient conscients des effets des déterminants pour un vieillissement en bonne santé sur les aînés vivant dans la collectivité, ils ne sont pas en mesure de donner des conseils sur les ressources disponibles au sein de leur collectivité. Le succès du modèle de prescription sociale repose sur la connaissance de ressources communautaires en constante évolution, une expertise que l’on ne saurait exiger de la part des professionnels de la santé et que les travailleurs sociaux n’ont peut-être pas la capacité de maintenir. L’outil HAAI aide l’agent de liaison à acquérir et organiser ces connaissances. Il permet également de relier les domaines des déterminants d’un vieillissement en bonne santé à des bases de données de ressources, par exemple le service 211 d’information et d’orientation offert dans certaines provinces.
Le fait d’assurer un accès et une communication sans faille entre les cliniques médicales et les agents de liaison permettra aux cliniciens de procéder simplement à une orientation vers les structures de prescription sociale en place. L’outil HAAI, utilisé conjointement avec un mécanisme de dépistage comme l’échelle CFS, indiquera ensuite clairement la voie à suivre pour la prescription sociale et les interventions connexes à mettre en œuvre. Il est possible d’utiliser ces outils pour reconnaître et traiter la fragilité dans des systèmes qui ne relèvent pas de la médecine, sachant que la fragilité existe sur un continuum et qu’elle peut être atténuée par diverses interventions sociales et cliniques. Le processus de prescription sociale doit être clair, accessible et simple à évaluer, sinon il sera relégué au bas de la liste des priorités des cliniciens, malgré sa valeur.
L’optimisation des approches communautaires de soutien aux aînés est essentielle pour assurer la santé générale de notre société et faire en sorte que les soins restent abordables à long terme pour cette population. Le fait d’accorder de l’importance aux besoins sociaux comme un logement abordable, la sécurité financière et la sécurité alimentaire permettra aux aînés de vivre en meilleure santé et de réduire leur utilisation du système de santé. Cette action préventive (se concentrer sur les besoins sociaux) ne consistera pas à transférer le fardeau d’un système à l’autre, mais sera plus efficace et économique, puisque les personnes pourront plus facilement accéder aux ressources et au soutien qui répondent à leurs besoins avant de devoir faire appel au système de santé. Pour réussir cette transition du système de soins de santé vers le milieu communautaire, un financement public est indispensable afin de soutenir l’élaboration de modèles de prescription sociale et de veiller à ce que les outils et les processus s’appuient sur la recherche actuelle. On sait que l’outil HAAI améliore le processus d’évaluation et d’intervention, et son utilisation peut faire progresser davantage les approches de prescription sociale au sein de la collectivité. Pour promouvoir l’outil HAAI, il est essentiel que le secteur de la santé et le secteur des services communautaires aux aînés prônent davantage son utilisation et l’importance du rôle de l’agent de liaison, comme cela a été fait dans d’autres administrationsNote de bas de page 23.
L’outil HAAI permet également aux organisations communautaires d’évaluer l’efficacité des interventions à l’aide d’un cadre commun. Au cours du projet pilote de l’outil HAAI, les évaluations ont été répétées 3, 6 et 12 mois après l’admission dans le programme, ce qui a permis d’analyser les répercussions de la prescription sociale et clinique mise en œuvre au cours du processus. Ces informations sont utiles pour éclairer les décisions en matière de politiques et de programmes à tous les ordres de gouvernement. Par exemple, dans le cadre du projet pilote, les scores les plus élevés correspondaient au domaine de la santé physique, mais ils ne se sont pas améliorés de manière importante sur 12 mois. Cela pourrait signifier que les options d’intervention dans le domaine de la santé physique ne répondent pas aux besoins des individus, et qu’un financement supplémentaire dans ce secteur est nécessaire pour élaborer de nouveaux programmes et services. Idéalement, la mise en œuvre de l’outil auprès d’un groupe plus vaste fournirait des données plus solides sur lesquelles fonder l’analyse, ce qui permettrait de mieux comprendre les répercussions de la prescription sociale sur la trajectoire d’un vieillissement en bonne santé.
Obstacles à la mise en œuvre
L’utilisation des organismes de services communautaires aux aînés à titre de ressources dans un modèle de prescription sociale peut permettre d’éviter que les aînés aient besoin de niveaux de soins plus élevés entraînant des coûts supérieurs. Cependant, la transition du système de soins de santé vers le milieu communautaire suppose que les organismes de services communautaires aux aînés sont prêts, ce qui n’est pas forcément le cas : il est clair qu’il faut faire progresser la recherche, améliorer la collaboration intersectorielle et renforcer les capacités du système à cet égard. Une étude systématique portant sur les facteurs favorables et les obstacles à la mise en œuvre et à la fourniture d’un service de prescription sociale au Royaume-Uni a révélé que l’état de préparation des organisations était un facteur clé de la réussite d’un programme de prescription socialeNote de bas de page 27. Il faut que les organisations soient « prêtes à naviguer » et qu’une approche multisectorielle et collaborative de gestion de projet soit adoptéeNote de bas de page 27. En Alberta, le secteur des services aux aînés est relativement peu coordonné et les organismes se heurtent à des difficultés en raison de l’absence d’outils de collaboration, de processus d’orientation simplifiés, de leadership sectoriel et de cadres d’action communsNote de bas de page 28. Toutefois, les travaux en cours par le biais de Healthy Aging Alberta peuvent être mis à profit pour promouvoir l’adoption d’outils comme le HAAI.
Les capacités limitées des organismes de services communautaires aux aînés ont également pour effet de restreindre la mise en œuvre complète d’outils d’évaluation comme le HAAI. Le personnel de première ligne est surchargé de travail en raison de la demande croissante de services, car il ne dispose pas des fonds nécessaires pour le personnel et les programmes. Cette situation entraîne des difficultés en matière de recrutement et de maintien en poste du personnel et complique la mise en œuvre de processus systématiques de gestion du changement. Au Royaume-Uni, on a constaté qu’un personnel contractuel temporaire et une rotation du personnel sont des obstacles à la mise en œuvre de la prescription socialeNote de bas de page 27. Lorsque nous déplaçons les soins vers le milieu communautaire, il convient d’accorder une plus grande importance à ces rôles de première ligne, car ils facilitent les interventions sociales fondées sur les relations et peuvent accroître les effets positifs sur la santé et le bien-être des individus. Les programmes et le personnel des services communautaires aux aînés doivent être soutenus au même titre que les interventions cliniques fournies par des professionnels de la santé.
Il n’existe actuellement aucune approche systémique ou systématique de la prestation de services non médicaux dans la collectivité, incluant l’évaluation et l’intervention, qui vise à soutenir cette transition du système de soins de santé vers les soins en milieu communautaire. On a constaté que l’absence de consensus sur le meilleur outil d’évaluation de la fragilité était un obstacle à la mise en œuvre des évaluations de la fragilité en milieu clinique, bien que les outils soient adaptables à différents contextesNote de bas de page 29. Or une approche systémique est essentielle à la réussite et à la durabilité d’un modèle de prescription sociale – modèle où un agent de liaison crée des liens avec les services non médicaux nécessaires et aide les travailleurs sociaux à répondre aux besoins des aînés. La réalisation d’une évaluation avant la prescription sociale s’est révélée être l’un des trois éléments essentiels à l’obtention d’effets positifs sur la solitude, la santé et le bien-être des aînésNote de bas de page 30.
À l’heure actuelle, les travailleurs sociaux œuvrant dans le secteur des services médicaux et des services communautaires sont submergés par une charge de travail de plus en plus lourde et complexe. Pour surmonter cette difficulté, on doit, de manière systématique, assurer la formation des agents de liaison, mobiliser les organismes de services communautaires aux aînés et recruter activement des partenaires cliniques pour participer à des projets pilotes de prescription sociale progressifs. La démonstration de la validité de ce principe au sein des organismes communautaires locaux devrait conduire à une intégration plus complexe au sein des organisations de santé, ce qui conduira en retour à renforcer les effets du modèle sur la santé et les finances.
Conclusion
Le processus d’élaboration et de mise à l’essai d’un outil d’évaluation du vieillissement en bonne santé fondé sur les déterminants du vieillissement en bonne santé nous a donné des indications précieuses sur la façon dont la prescription sociale pourrait être rationalisée et utilisée au sein des organismes de services communautaires aux aînés. Les aînés vivant dans la collectivité ont souvent besoin d’un soutien ciblé, dans le but de favoriser des degrés plus élevés de fonctionnement pour un déterminant clé de la santé en particulier. À cet égard, l’outil HAAI guide non seulement l’évaluation du vieillissement, mais fournit également des prescriptions sociales potentielle afin d’aborder les domaines de vulnérabilité cernés par l’évaluation. L’utilisation cohérente d’un tel outil, dans les domaines de pratique et avec les différents professionnels fournissant des soins aux aînés, permettra de rationaliser l’évaluation, la prestation de services et la collecte de données. Idéalement, les données obtenues grâce à l’utilisation généralisée de l’outil HAAI soutiendront la prise de décision gouvernementale dans le secteur des services aux aînés, éclaireront les investissements dans les programmes et susciteront des approches novatrices de prestation des services.
Remerciements
Le projet pilote HAAI a bénéficié d’une subvention d’Excellence en santé Canada. Le projet a également été soutenu par le personnel de la Sage Seniors Association d’Edmonton en Alberta.
Conflits d’intérêts
Les auteures déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Contribution des auteures et avis
- BM : rédaction de la première version du manuscrit, administration du projet, relectures et révisions.
- AS : conception, méthodologie, administration du projet, relectures et révisions.
- SM : relectures et révisions.
- TO : conception, méthodologie, administration du projet, relectures et révisions.
Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteures; ils ne correspondent pas nécessairement à ceux du gouvernement du Canada.
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