Chapitre 4 : Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada 2012 – Intégration du sexe et du genre dans les interventions en santé
Chapitre 4 : Intégration du sexe et du genre dans les interventions en santé
- Première section : Le sexe et le genre dans les interventions en santé publique
- Deuxième section : L’influence du sexe et du genre sur certains résultats en matière de santé
- Troisième section : Le sexe, le genre et les déterminants socioéconomiques
- Résumé
Le présent chapitre détaille les interventions générales ou ciblées (recherche, politiques, programmes, ou mesures) qui ont été mises de l’avant au Canada ou ailleurs dans le but de s’attaquer à certains problèmes de santé ou facteurs de risque, et dont l’élaboration ou l’exécution tient compte du sexe et du genre. Nous verrons ainsi l’incidence qu’ont sur la santé ces travaux de recherche, ces politiques ou ces programmes qui prennent en considération le sexe et le genre.
Les exemples de travaux de recherche, de politiques et de programmes qui tiennent compte du sexe et du genre et qui sont présentés dans les encadrés et dans le texte ne constituent pas une synthèse de toutes les questions de santé qui touchent la population. Ils visent plutôt à compléter — et non à passer en revue — les problèmes de santé et les facteurs de risque cernés au chapitre 3 et à examiner le vaste éventail de déterminants de la santé. Ces interventions ont attiré notre attention pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :
- elles s’attaquent à une lacune ou à une inégalité sur le plan de la santé;
- elles illustrent les différences entre les expériences de vie et les résultats;
- elles s’accompagnent de mesures d’efficacité;
- elles concernent une région en particulier, un segment de la population ou un problème qui peut survenir à différentes étapes de la vie.
La présentation d’une approche ciblée ne signifie pas que le problème, ou sa gravité, est unique à un groupe de population. Par exemple, la description d’un problème de santé ou d’une intervention qui concerne les hommes ne veut pas dire que le problème ou l’intervention est exclusif aux hommes. Il s’agit plutôt d’un exemple de la façon dont le Canada, en tant que société, considère les notions de sexe et de genre et les intègre dans ses interventions en santé.
Le présent chapitre comporte trois sections.
- Dans la première, on explique pourquoi la considération du sexe et du genre a une incidence importante sur les résultats en matière de santé, les travaux de recherche et les pratiques en santé publique.
- Dans la deuxième section, on examine comment le sexe et le genre sont liés à certains résultats de santé physique, mentale et sexuelle.
- Enfin, la troisième section montre comment le sexe et le genre influent sur les déterminants socioéconomiques de la santé et contribuent aux inégalités en santé. Une prise en compte adéquate des déterminants de la santé peut avoir des effets bénéfiques sur la santé et le bien-être.
Première section : Le sexe et le genre dans les interventions en santé publique
Il est important de tenir compte du sexe et du genre au moment d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques, des programmes et des pratiques de manière à obtenir les meilleurs résultats possible sur la santé. Pour ce faire, il faut notamment mettre en place des mesures qui favorisent le lien entre le sexe et le genre ainsi qu’entre le vaste éventail de déterminants de la santé. Une approche fondée sur le sexe et le genre fait partie des interventions planifiées systématiquement qui sont conformes à l’approche axée sur la santé de la populationNote de bas de page 13, Note de bas de page 218.
Intégrer le sexe et le genre dans la recherche sur la santé
Le sexe et le genre sont pris en compte dans la recherche sur la santé pour de nombreuses raisons, y compris scientifiques, méthodologiques et éthiquesNote de bas de page 219, Note de bas de page 260, Note de bas de page 324-Note de bas de page 327. Toutefois, des problèmes subsistent. Ils peuvent résulter d’une méconnaissance de la signification réelle du sexe et du genre et de la distinction qui existe entre ces deux concepts, ou encore des différences dans la façon dont les secteurs de recherche intègrent ces concepts à leurs travaux. D’ailleurs, de nombreuses administrations mettent au point des normes de recherche et formulent des recommandations quant à la méthode à utiliser pour combler ces lacunesNote de bas de page 216, Note de bas de page 219, Note de bas de page 326-Note de bas de page 330.
Traditionnellement, la recherche en santé était réalisée exclusivement sur des hommes présentant des caractéristiques culturelles et ethniques précises. Les données qui en résultaient étaient ensuite extrapolées à l’ensemble de la populationNote de bas de page 216. Les femmes étaient systématiquement exclues de la recherche afin d’éviter tout problème de grossesse ou d’allaitement pouvant survenir notamment au moment des essais cliniquesNote de bas de page 216, Note de bas de page 331. Par la suite, la recherche a montré que le sexe avait une influence considérable sur la santé, tant sur le plan physiologique et chimique que sur la façon de réagir à la maladie, à la douleur et aux traitementsNote de bas de page 216, Note de bas de page 219, Note de bas de page 328, Note de bas de page 331. Le fait d’omettre le sexe dans la recherche a compromis la validité des résultats et l’applicabilité des programmes. Grâce aux mouvements des femmes, les chercheurs ont commencé à établir des distinctions entre les hommes et les femmes, par exemple, en ventilant les données en fonction du sexe, en considérant les femmes dans les pratiques cliniques et en intégrant les questions d’ordre social comme les rôles sexuels et l’apprentissage social de ces rôlesNote de bas de page 233. Par la suite, le concept de genre a évolué, ce qui a permis d’établir une distinction entre le sexe et le genre et ainsi de reconnaître que ces deux concepts distincts influent sur la santé des hommes et des femmesNote de bas de page 233. Depuis que nous avons compris que la recherche fondée sur le sexe et le genre améliorait non seulement les résultats de santé des femmes mais aussi ceux de la population en général, un changement en profondeur s’est opéré dans les perceptions, et cette pratique est de plus en plus reconnue dans tous les secteurs de recherche (voir l’encadré intitulé « Tenir compte du sexe et du genre dans la recherche »)Note de bas de page 217, Note de bas de page 233, Note de bas de page 328.
Le Canada travaille à recueillir de nouvelles données sur les indicateurs qui témoignent de problèmes de santé chez les femmes (par exemple, le cancer, les troubles musculosquelettiques, la maladie mentale et la violence). Depuis que Santé Canada a lancé en 1999 son plan d’action intitulé La surveillance de la santé des femmes, des initiatives telles que le Rapport de surveillance de la santé des femmes (2003) ont confirmé la nécessité de se doter d’indicateurs fondés sur le sexe et le genreNote de bas de page 253, Note de bas de page 332, Note de bas de page 333. Le plan d’action insistait, en effet, sur l’importance de cibler les priorités pour les indicateurs en se basant sur les lacunes observées dans la surveillance de la santé des femmesNote de bas de page 332, Note de bas de page 333. De plus, le plan considérait comme primordial d’évaluer la santé des femmes parce que, dans la majeure partie de nos connaissances, on ne trouvait que de rares données sur le sujetNote de bas de page 253, Note de bas de page 333. Par ailleurs, malgré les progrès réalisés, il n’existe toujours pas d’indicateurs détaillés de la santé des hommes et des groupes trans. Pourtant, les données sur l’état de santé, y compris celles liées au sexe et au genre, peuvent conduire à l’élaboration de résultats comparables et diversifiésNote de bas de page 334.
Dans le cadre d’une recherche menée sous le thème A Profile of Women’s Health in Manitoba, le Centre d’excellence pour la santé des femmes — région des Prairies a examiné en détail plus de 140 indicateurs de la santé des femmes du Manitoba, y compris l’état de santé, le recours aux soins, les influences socioéconomiques, l’efficacité du système de santé et les habitudes de vieNote de bas de page 335. Cet examen est reconnu pour son analyse comparative fondée sur le genre et inclut, dans la mesure du possible, des facteurs de diversité comme le lieu de résidence, l’origine ethnique et la cultureNote de bas de page 335, Note de bas de page 336. Un examen du même genre, le Rapport sur la santé des femmes en Ontario, a utilisé une analyse comparative fondée sur le genre pour évaluer la santé et les déterminants de la santé des femmes de la province. Dans ce rapport, on jette un regard sur le bien-être physique, social, émotionnel, culturel et spirituel des femmes en examinant les données démographiques, les indicateurs de la morbidité, la santé reproductive et les comportements par rapport à la santé. On fournit également de l’information sur certains sous-groupes de la population, comme les mères seules, les femmes aînées, les immigrantes, les femmes des minorités visibles, les femmes autochtones et celles vivant en milieu rural et nordiqueNote de bas de page 337.
L’Enquête sur les comportements liés à la santé des enfants d’âge scolaire (ECSEAS) est un exemple de recherche qui inclut, de façon générale, les facteurs liés au sexe et au genre ainsi que les expériences vécues par les adolescents et les adolescentes afin de mieux comprendre leur état de santé mentale et physique et les interactions avec les déterminants de la santéNote de bas de page 338. Le Canada est l’un des 43 pays à recueillir des données tous les quatre ans sur la santé, le bien-être, le milieu social et les comportements en matière de santé des garçons et des filles de 11, 13 et 15 ansNote de bas de page 338-Note de bas de page 340. Ces âges sont importants, car c’est à cette période que les jeunes acquièrent de plus en plus d’autonomie, ce qui aura une incidence déterminante sur leur santé et leurs comportements par rapport à celle-ciNote de bas de page 340. Les données recueillies permettent d’établir des comparaisons transnationales, d’observer les tendances et d’examiner en profondeur des sujets précisNote de bas de page 340. Les résultats obtenus font ensuite l’objet d’une analyse et d’un examen en fonction du genre, qui ne se limitent pas aux différences entre les filles et les garçons et vont jusqu’à inclure des composantes sous‑jacentes. Par exemple, le rapport intitulé La santé des jeunes Canadiens : un accent sur la santé mentale, qui a été publié récemment, porte sur les questions de santé mentale, l’influence du sexe et du genre, l’appréciation que les jeunes ont de leur corps et de la vie en général, les rapports sociaux, la toxicomanie et le rendement scolaireNote de bas de page 338. Le rapport examine aussi des facteurs comme les relations avec les parents et les pairs ainsi que les pressions associées à la conformité culturelle et socialeNote de bas de page 340. S’appuyant sur les conclusions tirées à l’échelle internationale de l’ECSEAS, l’Organisation mondiale de la Santé a recommandé aux États membres de reconnaître l’importance des programmes d’intervention qui tiennent compte du sexe et du genreNote de bas de page 341.
Pendant longtemps, les chercheurs canadiens ont critiqué les programmes et les services de nature générique et ont mis en lumière les problèmes que suscitent au quotidien les approches « sans distinction de genre »Note de bas de page 216, Note de bas de page 217, Note de bas de page 233, Note de bas de page 328.
Le Canada s’est donc engagé à tenir compte du sexe et du genre lorsque les données suggéraient que cette lacune dans la recherche, les politiques et les programmes risquait d’engendrer des écarts ou des inégalités. En ratifiant la Déclaration de Beijing, le Canada a convenu d’inclure une dimension d’équité entre les sexes dans ses politiques et ses programmes, chaque fois que cela s’avérait pertinentNote de bas de page 217, Note de bas de page 342. Par conséquent, les organismes du portefeuille fédéral de la Santé utilisent l’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre (ACFSG) pour élaborer, mettre en œuvre et évaluer les travaux de recherche, les politiques et les programmes. En particulier, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont établi des lignes directrices afin qu’il soit précisé, dans toutes les demandes de proposition, la manière dont le sexe et le genre seront intégrés aux travaux de recherche sur la santé (y compris dans les essais cliniques, les services de santé et les facteurs sociaux)Note de bas de page 23, Note de bas de page 343. Ces lignes directrices aident à déterminer dans quels cas et comment le sexe ou le genre peuvent influencer les méthodes et les démarches de recherche, les hypothèses ainsi que les questions d’éthiqueNote de bas de page 343. De plus, les IRSC ont créé l’Institut de la santé des femmes et des hommes, le seul institut responsable du financement de la recherche en santé axé sur l’étude du lien entre le sexe, le genre et la santéNote de bas de page 23. Les IRSC et d’autres partenaires du portefeuille fédéral de la Santé (notamment l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada) sont déterminés à faire bon usage de l’ACFSG (voir l’encadré intitulé « Politique en matière d’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre du portefeuille de la Santé »).
Politique en matière d’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre du portefeuille de la Santé
L’engagement du Canada à l’égard de l’ACFSG remonte à la fin des années 1980 et au début des années 1990. À cette époque, des données ont révélé des lacunes attribuables à l’absence de prise en compte du sexe et du genre dans la recherche, les politiques et les programmes. Parallèlement, des efforts étaient déployés pour parvenir à l’égalité entre les sexes, conformément à des engagements constitutionnels. En 1995, lors de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes organisée par les Nations Unies, le gouvernement du Canada a ratifié la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, s’engageant ainsi à accorder une place importante à l’égalité et à l’analyse comparative entre les sexesNote de bas de page 217, Note de bas de page 342, Note de bas de page 344. Les ministères ont donc convenu d’intégrer une dimension d’équité à l’ensemble des politiques et des programmes, chaque fois que cela s’avérait pertinentNote de bas de page 342. En 2009, la vérificatrice générale du Canada a signalé des progrès mitigés dans l’application de l’analyse comparative entre les sexes, en raison principalement du manque de formation, de connaissances et de directives concernant la façon de passer de la théorie à la pratiqueNote de bas de page 345.
Les organismes fédéraux du portefeuille de la Santé ont alors adopté une politique de l’ACFSG applicable à l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des travaux de recherche, des politiques et des programmesNote de bas de page 220. Cette politique remplace La politique de Santé Canada en matière d’analyse comparative entre les sexes (2000) et s’adresse à l’ensemble des organismes du portefeuille de la Santé (c’est-à-dire Santé Canada, l’Agence de la santé publique du Canada, les IRSC, le Conseil de contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses et le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés)Note de bas de page 220. On y traite des trois aspects suivants :
- une vaste compréhension des variations dans l’état de santé, les expériences liées à la santé et à la maladie, l’utilisation des services de santé et l’interaction avec le système de santé;
- l’élaboration de principes scientifiques éprouvés et de données probantes fiables qui s’intéressent aux différences dans le domaine de la santé liées au sexe et au genre entre les hommes et les femmes, les garçons et les filles;
- la mise en œuvre de la recherche, de politiques et de programmes rigoureux et efficaces qui traitent des différences liées au sexe et au genre en santé entre les hommes et les femmes, les garçons et les fillesNote de bas de page 220.
La Politique en matière d’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre du portefeuille de la Santé repose sur cinq grands principes : la responsabilité de générer des changements; l’amélioration continue à partir des expériences passées, des leçons retenues et des pratiques exemplaires; l’adoption d’une approche intégrée de sorte que l’analyse comparative fasse naturellement partie des activités; l’atteinte d’une représentation égale des hommes et des femmes dans les politiques et les programmes; une responsabilité partagée entre les membres de la direction (qui sont tenus d’encadrer l’utilisation de l’ACFSG) et les employés (qui doivent en intégrer les principes dans le cadre de leurs fonctions)Note de bas de page 220. Depuis, différents documents ont été mis au point, notamment le Guide concernant les notions de genre, sexe et recherche en santé, produit par les IRSC, et la Politique en matière d’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre. De plus, I’Analyse comparative fondée sur le sexe et le genre chez les Autochtones, un document de vaste portée, tient compte des perspectives des Autochtones en matière de sexe et de genreNote de bas de page 346, Note de bas de page 347. Même si les évaluations en cours permettront de déterminer l’efficacité de ces programmes à intégrer l’ACFSG, il est généralement reconnu que cette intégration au moment d’élaborer, de mettre en œuvre et d’évaluer les programmes favorise l’égalité entre les sexes, permet une mise en œuvre plus efficace des programmes et assure la rigueur de la rechercheNote de bas de page 220, Note de bas de page 334, Note de bas de page 346.
Afin de brosser un portrait complet de la santé de la population, il faut une approche axée sur la santé de la population qui mise sur la surveillance continue des indicateurs de la santé (variables qui permettent d’évaluer l’état de santé d’une population et les facteurs qui influent sur la santé) et sur l’analyse des principales tendances observéesNote de bas de page 11, Note de bas de page 239. Pour que la recherche soit efficace, il faut également comprendre les facteurs qui influencent les résultats en matière de santé et enrichir nos connaissances en la matièreNote de bas de page 239. Trop souvent, les données sont insuffisantes, peu documentées ou regroupées d’une façon qui masque les différences liées au sexe ou qui ne tient pas compte de facteurs importants tels que l’âge, l’origine ethnique et le statut socioéconomique. Dans certains secteurs, on dispose de données ventilées selon le sexe qui montrent les différences observées, mais les rares analyses ne permettent pas de les comprendre ni d’expliquer les raisons pour lesquelles ces différences existent. Le fait de reconnaître et de promouvoir la diversité peut aider à améliorer les processus décisionnels, notamment en favorisant les programmes qui répondent aux besoins des personnes les plus à risque et en évitant d’aggraver les lacunes en santéNote de bas de page 333, Note de bas de page 334. Les travaux de recherche qui utilisent l’ACFSG aident à mieux comprendre les liens complexes entre les déterminants de la santé, les comportements et les résultats de santé, et permettent également d’expliquer pourquoi ces différences existent et comment les éliminerNote de bas de page 333.
Les outils qui intègrent aux indicateurs de la santé le sexe, le genre et d’autres facteurs de diversité conduisent l’analyse comparative à un tout autre niveau. Par exemple, la Table ronde sur la santé des femmes et des filles autochtones (2005) a souligné la nécessité d’une analyse comparative fondée sur le genre pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits. Cette analyse visait à examiner certains facteurs précis selon une perspective autochtone, mais aussi selon une approche axée sur le sexe et le genre. Elle explorait les fondements historiques et culturels des Premières Nations, des Métis et des Inuits et mettait en évidence les différences qui existent au sein de la population autochtone et entre les groupes qui la composent (voir l’encadré intitulé « Utilisation de l’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre chez les Autochtones »)Note de bas de page 346, Note de bas de page 347. La stratégie Our Voices a d’abord évolué pour mieux intégrer les questions de santé des femmes autochtones, puis est devenue une approche fondée sur le sexe et le genre pouvant être utilisée pour le traitement des données et l’élaboration des programmesNote de bas de page 346, Note de bas de page 347.
Utilisation de l’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre chez les Autochtones
Our Voices : Analyse comparative fondée sur le sexe et le genre pour les Premières Nations, les Métis et les Inuits
Our Voices est une trousse d’analyse comparative fondée sur le sexe et le genre destinée aux Autochtones. Cette trousse, offerte en ligne, comprend des sources de données, des rapports, des études et des exemples culturellement appropriés et adaptés à la santé des Métis, des Inuits et des Premières Nations. Les renseignements sont regroupés en fonction de questions ciblées portant sur l’état de santé, les déterminants de la santé et les services de santé. Les organisations, les gouvernements, les chercheurs, les responsables de la santé et les membres du public peuvent recevoir de la formation et des renseignements sur la façon d’utiliser l’ACFSG pour parvenir à une meilleure analyse des problèmes de santé. Le but est d’accroître la sensibilisation et les aptitudes, d’améliorer l’accès aux soins et de mieux orienter les politiques liées à la santé des femmes autochtones afin de réduire l’écart entre l’état de santé des Métisses, des Inuites et des femmes des Premières Nations et celui des autres femmes au CanadaNote de bas de page 347.
Assemblée des Premières Nations : Cadre d’analyse comparative selon le sexe
En 2010, le Conseil des femmes de l’Assemblée des Premières Nations a créé la Stratégie de mise en œuvre de l’analyse comparative selon le sexe. L’objectif était de consolider les aptitudes et d’offrir de la formation dans toutes les régions et communautés des Premières Nations de manière à promouvoir l’égalité entre les sexes, un des objectifs du Millénaire des Nations Unies pour le développement. La stratégie est axée sur la mise en œuvre, l’évaluation et la surveillance afin de favoriser une utilisation plus efficace de l’analyse comparative fondée sur le genre. Cette approche est particulièrement utile dans la lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles autochtonesNote de bas de page 348.
Association des femmes autochtones du Canada : Analyse comparative fondée sur le genre et adaptée à la culture
Même si les premiers cadres d’analyse comparative fondée sur le genre dénotaient une équité entre les hommes et les femmes au point de vue des conséquences et des résultats, ils n’étaient pas tout à fait adaptés aux circonstances et aux besoins de toutes les populations sur les plans social et culturelNote de bas de page 349, Note de bas de page 350. La colonisation et le rôle prédominant des hommes ont eu un effet disproportionné sur la santé des populations autochtones, ce qui s’est traduit par la violence, la maladie et les facteurs socioéconomiques comme la pauvreté, le sous-emploi et les problèmes de logementNote de bas de page 349, Note de bas de page 350. Une analyse comparative fondée sur le genre et adaptée à la culture aide à comprendre comment les rôles de genre ont évolué chez les Autochtones et quelles sont les mesures qui s’imposent. L’Association des femmes autochtones du Canada a mis au point le Protocole d’application culturellement pertinent selon les sexes, qui vise à intégrer aux processus politiques un cadre de responsabilisation ainsi que des perspectives culturelles et fondées sur le genreNote de bas de page 349, Note de bas de page 350. Le Protocole comporte trois volets : la participation équitable, la communication équilibrée et l’égalité des résultats. Pour chaque volet, des mesures ont été établies afin d’évaluer le rendement des initiatives proposées, d’explorer leur potentiel en tant que pratiques exemplaires et de déterminer les leçons qu’on peut en tirer. La réussite est mesurée en fonction des progrès accomplis, des changements observés dans les comportements envers le genre, particulièrement à l’endroit des femmes, et de la responsabilité à l’égard des résultats à long termeNote de bas de page 351.
Pauktuutit Inuit Women of Canada : Outil d’analyse des déterminants de la santé fondé sur le genre
En 2007, Pauktuutit Inuit Women of Canada a entrepris de mettre au point un outil d’analyse comparative fondé sur le genre destiné spécifiquement aux Inuits. Le projet comportait deux volets. Le premier visait à créer un cadre d’analyse comparative fondé sur le genre et adapté à la culture. Le second avait pour but d’établir des indicateurs de santé adaptés à la culture des femmes inuitesNote de bas de page 352, Note de bas de page 353. En 2008-2009, Pauktuutit a utilisé cet outil pour montrer les différences qui existent entre les femmes et les hommes inuits sur le plan de la sécurité alimentaire et pour évaluer comment les changements apportés au programme Nutrition Nord Canada (anciennement le programme Aliments-poste, qui subventionne l’envoi d’aliments nutritifs aux communautés nordiques isolées) pouvaient influer sur les populations inuites vivant dans le Nord. Pauktuutit a pu mettre à l’essai son outil d’analyse, recueillir de l’information précieuse sur les besoins des Inuits et cerner les défis uniques des hommes et des femmes en matière de sécurité alimentaireNote de bas de page 352, Note de bas de page 354.
Intégrer le sexe et le genre dans les pratiques de santé publique
La prise en considération du sexe et du genre dans les interventions en santé publique ne se limite pas à évaluer les résultats de santé des hommes et des femmes. Une approche fondée sur le sexe et le genre s’oppose aux idées reçues voulant que les hommes, les femmes ainsi que les jeunes et les adultes trans présentent les mêmes résultats de santé et vivent les mêmes expériences des pratiques adoptées pour résoudre les problèmes de santéNote de bas de page 233. Elle met également en doute la tendance à s’attarder aux différences au lieu d’essayer de comprendre les facteurs qui les sous-tendent. Cette approche incite les planificateurs et les praticiens à déterminer comment ces différences se répercutent au sein des programmes, à examiner la façon dont ces questions sont définies, abordées et communiquées, à considérer la manière dont l’information est recueillie (comment et par qui) et à évaluer dans quelle mesure ces interventions peuvent combler des besoins diversifiésNote de bas de page 218, Note de bas de page 233.
Par exemple, la vaccination contre le virus du papillome humain (VPH) est une pratique de santé publique largement reconnue où une approche fondée sur le sexe et le genre pourrait révéler des perspectives différentes sur le plan de la maladie, des résultats et des interventions (voir l’encadré intitulé « Appliquer une perspective axée sur le sexe et le genre à un problème de santé publique : l’exemple du VPH »). Cet exemple vise à montrer l’incidence d’une approche qui tient compte du sexe et du genre, mais ne constitue pas une évaluation du programme comme tel.
Appliquer une perspective axée sur le sexe et le genre à un problème de santé publique : l’exemple du VPH
La prise en considération du sexe et du genre peut avoir une influence sur la pratique et la compréhension de la santé publique. La lutte contre le VPH montre les différences de perspectives qui peuvent se révéler lorsque le sexe et le genre sont pris en compte. Alors que toute l’attention se portait sur le virus, son lien avec le cancer du col de l’utérus et la nécessité d’en réduire les risques par la vaccination, le VPH était également lié à d’autres formes de cancers chez les hommes. Il existe plus d’une centaine de souches du VPH qui peuvent s’attaquer à de nombreuses parties du corps et qui entraînent des conséquences différentes chez les hommes et les femmesNote de bas de page 173, Note de bas de page 218, Note de bas de page 355. De plus, les hommes jouent un rôle dans la transmission de la maladieNote de bas de page 218.
Les taux croissants de VPH, en particulier chez les jeunes femmes, et le risque de cancer du col de l’utérus ont conduit à la mise au point d’un vaccin devant être administré aux jeunes femmes (de 9 à 26 ans) selon les besoins et les calendriers de vaccination des provinces et des territoires. Au Canada, l’immunisation est une responsabilité que se partagent les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriauxNote de bas de page 355. Le gouvernement fédéral réglemente et supervise les vaccins, tandis que les provinces et les territoires financent et gèrent les programmes de vaccinationNote de bas de page 213. En 2008, l’ensemble des provinces et des territoires avait ajouté le vaccin contre le VPH au calendrier de vaccination des jeunes fillesNote de bas de page 355. Le vaccin est maintenant utilisé pour prévenir l’infection au VPH et ses éventuels effets à long terme, en particulier le cancer du col de l’utérusNote de bas de page 355.
La prise en considération du sexe et du genre dans le cadre des pratiques de prévention du VPH permet de révéler des perspectives différentes. Par exemple :
- de plus en plus de femmes de 20 ans et plus (qui n’ont pas été vaccinées ou n’ont jamais subi de test) reçoivent un diagnostic de VPH à la suite d’un test Pap ou d’un dépistage prénatal;
- des études ont révélé un taux élevé de VPH chez les hommes hétérosexuels et un taux élevé de transmission du VPH aux partenaires féminins par des hommes présentant des condylomes génitaux;
- les hommes qui ont des relations sexuelles avec d’autres hommes affichent également un risque de cancers attribuables au VPH (comme les cancers de la gorge et de l’anus);
- les personnes aux prises avec un déficit immunitaire sont à risque de contracter le VPHNote de bas de page 218, Note de bas de page 355.
Le programme de vaccination initial ne tenait pas compte de tous les risques auxquels s’exposaient les personnes en dehors du groupe cible (les filles et les femmes de 9 à 26 ans), y compris les femmes plus âgées, pas plus que du rôle des hommes dans la transmission du VPH ni de la nécessité de protéger les garçons et les hommes contre le VPH et les cancers qui en résultentNote de bas de page 355, Note de bas de page 356. Cependant, une perspective axée sur le sexe et le genre tiendrait compte de ces facteurs. Certains praticiens peuvent se demander pourquoi la vaccination n’est réservée qu’aux filles, comment sont gérés les risques à long terme chez les garçons et pourquoi les jeunes filles doivent assumer la responsabilité de prévenir la transmission du virusNote de bas de page 355, Note de bas de page 356. La prise en considération du sexe et du genre suggère que les pratiques de santé publique doivent répondre aux besoins diversifiés des filles, des femmes plus âgées et des hommes en ce qui a trait au VPH, tout en continuant de promouvoir la réduction des risques généraux pour la santéNote de bas de page 356. Toutefois, une telle perspective ne signifie pas que cette pratique est la plus rentable ni la plus efficace pour réduire les risques, pas plus qu’elle rend inutiles les processus de dépistage en cours pour tous individus.
Au début de 2012, le Comité consultatif national de l’immunisation a recommandé que le vaccin contre le VPH soit administré à tous les garçons et les hommes de 9 à 26 ans et à toutes les filles et les femmes de 9 à 45 ansNote de bas de page 355. Il sera nécessaire de procéder à des évaluations pour mesurer l’incidence de ces interventions sur les hommes, les femmes et les autres segments de la populationNote de bas de page 355. Il faudra aussi recueillir et analyser d’autres données, comparer les résultats avec les mesures de référence, évaluer l’efficacité et chiffrer les répercussions à long terme, comme la prévalence des cancers associés au VPHNote de bas de page 355.
L’approche générique traditionnelle fait abstraction de la diversité aussi bien des individus que du vaste éventail des déterminants de la santé. Bien qu’il soit plus facile d’examiner séparément les répercussions sur les filles et les femmes et celles sur les garçons et les hommes, et d’adapter les programmes en conséquence, cette méthode établit une classification binaire homme-femme au lieu de présenter un continuum masculin-féminin. De plus, les normes fondées sur le genre (par exemple, les attentes, les rôles et les comportements) et l’éventail des pratiques sociales et culturelles qu’elles suscitent influent directement sur la santé et le bien‑être des filles, des garçons, des femmes et des hommesNote de bas de page 228. Ces attentes peuvent avoir une incidence directe sur les attitudes envers les interventions en santé, comme la prévention, le soutien et le traitement, mais aussi sur les pratiques sociales, notamment sur les relations avec son partenaire, ses enfants et son milieu de travailNote de bas de page 216, Note de bas de page 217, Note de bas de page 228.
Lorsqu’on recueille de l’information sur les hommes et les femmes, en supposant que cette information représente bien le sexe biologique ou la distinction entre masculin et féminin, on fait abstraction de certains aspects de l’identité ou de la biologie qu’il importe de considérer dans les sous‑groupes de population. Les personnes qui se désignent comme trans (transgenres, transsexuelles, en transition) ne constituent pas un groupe homogène. En cochant la case « autre », un choix souvent offert dans les sondages, elles perpétuent une sorte d’invisibilité et d’identité floueNote de bas de page 229.
Selon une récente analyse américaine des tendances répertoriées dans les ouvrages médicaux de 1950 à 2007, les minorités sexuelles et de genre étaient généralement invisibles ou exclues des études, ce qui révèle que, bien souvent, les professionnels de la santé ne reconnaissent pas les besoins particuliers de cette populationNote de bas de page 357. En supposant la neutralité du genre, on pourrait exacerber les disparités sur le plan de la santé, puisque les programmes qui font abstraction du sexe et des autres facteurs socioéconomiques contribuent à l’inefficacité des interventions et à l’obtention d’effets non désirés (et néfastes)Note de bas de page 233. Bien que les continuums des sexes et des genres soient pris en considération tout au long du présent chapitre, ils sont souvent absents des travaux de recherche, des politiques et des programmes, et le défi est d’autant plus grand lorsqu’il est question de la santé des groupes trans.
Les interrelations entre le sexe, le genre et le vaste éventail des déterminants de la santé doivent être intégrées aux pratiques courantes de santé publiqueNote de bas de page 15, Note de bas de page 20, Note de bas de page 25, Note de bas de page 233, Note de bas de page 333. Le travail à accomplir est loin d’être simple (en particulier en ce qui a trait à l’application et à la diffusion des résultats de la recherche fondée sur le sexe et le genre), puisque ces questions sont complexes et difficiles à évaluer et à communiquerNote de bas de page 333. Néanmoins, la gestion efficace des inégalités fondées sur le sexe et le genre peut représenter une économie pour les services de santé et contribuer à améliorer les soins offerts aux collectivitésNote de bas de page 216, Note de bas de page 333. En outre, il est contraire à l’éthique d’exclure le sexe et le genre des recherches, des politiques et des programmesNote de bas de page 233. La suite de ce chapitre présente des approches et des interventions efficaces ou prometteuses qui examinent l’influence du sexe et du genre sur les résultats en matière de santé et les déterminants sociaux de la santé.
Deuxième section : L’influence du sexe et du genre sur certains résultats en matière de santé
Sexe, genre et santé physique
La prévention et la gestion des maladies chroniques doivent tenir compte des différences entre les hommes, les femmes, les garçons et les filles afin d’éliminer ou de réduire au mieux les résultats de santé néfastes. Comme il a été mentionné dans les chapitres précédents, les interventions qui mettent l’accent sur la prévention et qui favorisent un mode de vie sain (comportements et choix santé) peuvent contribuer à réduire les facteurs de risque associés à certains résultats de santé néfastesNote de bas de page 184, Note de bas de page 358-Note de bas de page 360. Il y a possibilité d’influencer positivement la santé à divers moments, et ce, tout au long de la vie. Certaines approches tiennent compte de l’influence du sexe et du genre et considèrent aussi les besoins uniques dans leur conception et leur exécution.
Promouvoir un poids santé
L’embonpoint et l’obésité représentent un important défi de santé publique qui repose sur un grand nombre de facteursNote de bas de page 193, Note de bas de page 361, Note de bas de page 362. Les problèmes de poids peuvent favoriser le développement de nombreuses maladies chroniques plus tard dans la vieNote de bas de page 193, Note de bas de page 361-Note de bas de page 363. En général, les personnes sédentaires qui adoptent de mauvaises habitudes alimentaires sont plus sujettes à l’excès de poids et sont donc plus susceptibles de présenter des résultats de santé néfastes tout au long de la vieNote de bas de page 361, Note de bas de page 362. L’Organisation mondiale de la Santé a élaboré des stratégies axées sur l’alimentation, l’activité physique et la santéNote de bas de page 364. Elle recommande d’adopter de vastes approches intersectorielles misant sur plusieurs facteurs (notamment l’éducation) et de mettre en place des interventions qui tiennent compte du contexte, de la culture et des rôles fondés sur le genreNote de bas de page 364.
En Alberta, une étude a été réalisée dans le but de déterminer si le sexe et le genre devaient être pris en considération au moment d’élaborer et de mettre en œuvre des interventions visant à aider les jeunes à atteindre ou maintenir un poids santéNote de bas de page 363. L’étude a révélé que les interventions devaient effectivement tenir compte du sexe et du genre étant donné que les garçons et les filles en préadolescence avaient des comportements, des habitudes alimentaires et des degrés d’activité physique distincts. La compréhension des différences associées au sexe, au genre et à d’autres facteurs (comme la culture et le lieu géographique) est importante pour savoir comment inciter les jeunes à adopter un mode de vie sain (voir l’encadré intitulé « Programme Healthy Dads, Healthy Kids »)Note de bas de page 363. L’étude rappelle également le besoin de prendre en considération le sexe et le genre afin de tirer le maximum des interventions en santéNote de bas de page 363.
Le Canada a élaboré récemment des stratégies de lutte contre l’obésité, mais en aucun cas l’accent n’est mis sur le sexe et le genre. Or, la prise en compte des différences entre les genres permettrait d’améliorer l’efficacité des programmes de promotion de la santé, notamment en misant sur l’activité physique chez les filles et la saine alimentation chez les garçonsNote de bas de page 363, Note de bas de page 365, Note de bas de page 366. Pour être efficaces, les programmes de contrôle du poids doivent également tenir compte des besoins des minorités visibles, des minorités sexuelles et des populations des régions rurales et éloignées.
Pour répondre aux préoccupations que les problèmes de poids suscitent de plus en plus en Australie, l’Université de Newcastle (Nouvelle-Galles du Sud) a lancé en 2008‑2009 le programme Healthy Dads, Healthy Kids afin d’aider les pères atteints d’embonpoint à perdre du poids et à promouvoir des comportements sains chez leurs enfantsNote de bas de page 367-Note de bas de page 369. Ce programme axé sur la famille visait à recruter des hommes atteints d’embonpoint et d’obésité et ayant des enfants de 5 à 12 ansNote de bas de page 368-Note de bas de page 370. L’évaluation réalisée six mois après le début du programme d’essai a révélé que 85 % des pères avaient perdu plus de 5 % de leur masse corporelle, réduit leur tour de taille, diminué leur tension artérielle, augmenté leur niveau d’activité physique, abaissé leur apport en calories et amélioré leur alimentation en généralNote de bas de page 368-Note de bas de page 371. Leurs enfants avaient également augmenté leur niveau d’activité physique, diminué leur fréquence cardiaque au repos et réduit leur apport en caloriesNote de bas de page 368-Note de bas de page 370. En raison de son succès, le programme a été adopté par d’autres collectivités de l’AustralieNote de bas de page 370, Note de bas de page 372, Note de bas de page 373.
Les examens systématiques et les méta‑analyses ont révélé que les programmes de santé en milieu scolaire contribuent à promouvoir un poids santéNote de bas de page 374, Note de bas de page 375. En effet, les études ont montré l’importance des programmes qui sont adaptés en fonction du sexe et qui intègrent une perspective axée sur le genre. En général, les filles s’épanouissent mieux dans un milieu d’apprentissage qui favorise l’observation, les jeux de rôle, les jeux cognitifs et la transition; les garçons, quant à eux, sont plus motivés à apprendre lorsque les programmes sont offerts dans un environnement qui cadre avec leurs champs d’intérêtNote de bas de page 376. Certaines recherches canadiennes ont fait la synthèse des pratiques exemplaires ayant conduit à la mise au point des techniques les plus appropriées pour évaluer l’obésité de l’enfant et les maladies chroniques connexesNote de bas de page 377. Ces recherches tenaient compte de l’efficacité des programmes, de la façon dont ils avaient été élaborés, des résultats d’évaluation ainsi que de leur incidence sur la santé de la population en général et de certains autres segments de la population. Les résultats ont montré que les interventions n’étaient pas suffisamment adaptées aux besoins de sous-groupes d’enfants et de jeunes, en particulier des jeunes hommes, et ce, même si, à long terme, l’obésité est reconnue pour augmenter le risque de maladies chroniques chez l’hommeNote de bas de page 377.
Les programmes en milieu scolaire ont donné de bons résultats sur le plan de l’activité physique, mais les avantages se sont surtout fait sentir à court terme. On gagnerait à mettre au point des programmes efficaces qui abordent et encouragent le maintien d’un poids santéNote de bas de page 377. Le cadre de l’approche globale de la santé en milieu scolaire propose aux élèves une approche qui favorise la réussite scolaire et la santé à l’écoleNote de bas de page 378. Le Consortium conjoint pour les écoles en santé, un partenariat pancanadien réunissant les ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux de la Santé et de l’Éducation, soutient et encourage les interrelations qui existent entre l’apprentissage et la santéNote de bas de page 378, Note de bas de page 379. C’est pourquoi il intervient auprès de plusieurs secteurs et administrations afin de mettre en commun les renseignements, les expériences, les pratiques exemplaires et les ressources, de réduire le double emploi, de créer des partenariats et de mener des travaux de recherche approfondis dans les domaines prometteursNote de bas de page 379. Les examens systématiques des approches globales de la santé en milieu scolaire ont révélé que les interventions multifactorielles, en particulier celles proposant des changements au sein du milieu scolaire, se révélaient efficaces pour promouvoir l’adoption de saines habitudes alimentaires et la pratique de l’activité physiqueNote de bas de page 380. La recherche a aussi démontré l’importance de tenir compte de l’âge et du sexe, sachant que les programmes qui appliquent l’approche globale de la santé en milieu scolaire ont donné de meilleurs résultats chez les filles et les élèves plus âgésNote de bas de page 380.
En faisant abstraction du genre des répondants, les statistiques sur l’activité physique et le taux de maladies chroniques peuvent cacher les motivations profondes à l’exercice physique et fausser la réelle efficacité des programmes, même dans les cas où les hommes et les femmes s’adonnent à des activités similairesNote de bas de page 219. Par conséquent, il est important que les interventions soient gérées en tenant compte des contextes sociaux au sein desquels le genre exerce une influence sur l’activité physique. De plus, chaque politique ou programme devrait être assorti d’une évaluation en fonction du genre afin d’en mesurer l’incidence sur les hommes, les femmes, les garçons et les filles.
Les stéréotypes associés au sexe et au genre influencent les perceptions concernant l’activité physique et la question de la performance. En effet, la pratique d’un sport et d’une activité physique tout au long de la vie est souvent conditionnée par ces stéréotypes. De façon générale, les filles préfèrent les activités « féminines » (comme le patinage artistique) plutôt que les sports de contact (comme le hockey), qui sont habituellement plus populaires auprès des garçons. De même, les femmes plus âgées sont généralement moins attirées par l’entraînement avec poids et haltères, qu’elles considèrent comme une activité masculineNote de bas de page 381. Les « discussions de vestiaire » peuvent également conduire à des comportements et des propos sexistes, particulièrement aux dépens des garçons qui excellent moins bien dans les sports et les activités physiques. Par ailleurs, les filles fortes et actives qui présentent des qualités ou des compétences souvent associées aux garçons peuvent être victimes de stigmatisation, être traitées de « garçons manqués » ou entendre des allusions sur la soi-disant ambiguïté de leur orientation sexuelleNote de bas de page 381.
Les cours d’éducation physique et les sports d’équipe doivent se dérouler dans un environnement sécuritaire, accueillant et respectueux. Or, la participation aux sports, l’accès aux vestiaires et le manque d’intimité pour se changer sont souvent des sources de stress pour les jeunesNote de bas de page 223. C’est pourquoi la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants a préparé un guide pour aider les éducateurs à appuyer les jeunes transgenres et transsexuels qui, comme leurs pairs hétérosexuels, devraient pouvoir participer aux cours d’éducation physique, aux sports récréatifs et aux sports de compétitionNote de bas de page 223. Les politiques et les procédures devraient promouvoir l’esprit d’ouverture, sans égard à l’identité ou à l’expression de genre, et favoriser un environnement exempt de discrimination et de harcèlementNote de bas de page 382. Les écoles peuvent créer un tel environnement en sensibilisant le personnel, les entraîneurs et les parents de sorte que les jeunes transgenres et transsexuels se sentent mieux compris et mieux appuyésNote de bas de page 383.
Dans certaines collectivités au Canada, des programmes de sensibilisation sont offerts aux filles et aux femmes afin de les encourager à pratiquer un sport. Par exemple, l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique (ACAFS) a mis sur pied plusieurs activités destinées à promouvoir le sport auprès des filles et des femmes ainsi qu’à éliminer les stéréotypes et l’homophobie (voir l’encadré intitulé « Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique »). En 2009, Patrimoine canadien a aussi adopté une politique intitulée Mobilisation active : Politique concernant le sport pour les femmes et les filles. Cette politique vise à offrir aux filles et aux femmes des possibilités de faire une carrière nationale ou internationale en tant qu’athlètes, entraîneuses, officielles ou dirigeantes techniques du sport, et à encourager les organismes sportifs à leur offrir une expérience de qualité et un soutien équitableNote de bas de page 384, Note de bas de page 385. Elle a également pour objectif de créer un milieu sportif qui est propice à la participation des filles et des femmes et qui favorise la poursuite de l’activité physique tout au long de la vieNote de bas de page 386. Cette nouvelle politique sera soumise à une évaluation cinq ans après sa mise en œuvreNote de bas de page 386.
Un autre élément à considérer est la différence de capacité physique entre les sexes, qui fait que les hommes semblent être plus forts et plus endurants que les femmesNote de bas de page 387. Par exemple, dans les sports d’endurance, les blessures à la cheville et au genou sont plus fréquentes chez les athlètes féminines en raison de la constitution de leurs muscles et de leurs tendonsNote de bas de page 388-Note de bas de page 393. Toutefois, bien que la physiologie joue un rôle important dans ces cas particuliers, il reste que les jeunes hommes ont généralement accès en bas âge à des soins et des entraînements plus appropriésNote de bas de page 390-Note de bas de page 393. Les femmes qui s’adonnent à des sports et à des activités physiques doivent surmonter les stéréotypes liés au genre et aux rôles et trouver des installations communautaires qui leur sont accessiblesNote de bas de page 387.
Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique
Depuis plus de 30 ans, l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique (ACAFS) met sur pied des programmes nationaux destinés à promouvoir un mode de vie sain et actif auprès des filles et des femmes, tout au long de leur vie. L’ACAFS a été fondée dans le but d’aider les femmes à atteindre l’équité dans la pratique du sport et de l’activité physique. Elle s’efforce de créer des environnements où les filles et les femmes ont des chances égales de prendre part à des activités sportives et récréatives et d’être des leadersNote de bas de page 384, Note de bas de page 385. Elle a également élaboré un large éventail de documents et d’activités, notamment un manuel intitulé Vers l’égalité des sexes pour les femmes dans le sport et un guide stratégique suggérant des façons de mettre la recherche à contributionNote de bas de page 384. Au départ, l’ACAFS encourageait les filles à défier la barrière des genres dans les sports grâce à des programmes tels que Filles@jeu et Girls Playing on Boys’ Teams. Plus récemment, elle fait la promotion de modes de vie sains auprès des femmes de 55 ans et plus (Sport for More) et auprès des mères (Mères en mouvement)Note de bas de page 394-Note de bas de page 396. Par ailleurs, grâce à des programmes tels que Bouger en toute liberté, l’Association encourage les filles de 9 à 18 ans à choisir le sport et l’activité physique plutôt que le tabagisme, tandis que le programme En mouvement! a élargi sa portée afin de répondre aux besoins des filles et des jeunes femmes autochtones ou nouvellement arrivées dans un quartierNote de bas de page 397, Note de bas de page 398. Aujourd’hui encore, l’ACAFS continue de créer des partenariats et de trouver de nouvelles occasions de favoriser le sport et l’activité physique chez les filles et les femmes canadiennesNote de bas de page 385.
La Stratégie d’innovation de l’Agence de la santé publique du Canada illustre comment intégrer l’ACFSG et les questions d’équité en santé dans les programmes et les pratiquesNote de bas de page 399, Note de bas de page 400. En 2011, dans le cadre de la première phase de cette stratégie, qui portait sur l’atteinte du poids santé dans les collectivités du Canada, 37 projets ont été évalués dans le but de déterminer leur efficacité à intégrer le sexe, le genre et les questions d’équitéNote de bas de page 400. À la suite de cette analyse, l’Agence a tenté d’améliorer ses pratiques afin d’encourager les organisations à accorder une plus grande importance à ces facteurs au moment d’élaborer, de mettre en œuvre et d’évaluer leurs interventions. Ces améliorations ont servi de balises lors de la demande de soumissions subséquente.
- L’évaluation des propositions portait en partie sur la façon dont l’équité en santé ainsi que les facteurs et les rôles associés au sexe, au genre et à la sexualité étaient intégrés aux étapes de mise en œuvre, d’adaptation et d’évaluation des interventions proposées.
- Les documents d’invitation à soumissionner étaient conçus de façon à aider les organisations à définir ces éléments d’intervention, notamment :
- en présentant les différences qui existent entre les genres dans les résultats d’obésité et en décrivant les attentes et les rôles sociaux susceptibles d’influer sur le poids santé des hommes et des femmes (par exemple, les moyens financiers, la personne chargée de l’épicerie, le partage des responsabilités liées aux enfants et l’incidence que cette répartition des tâches peut avoir sur l’activité physique et les habitudes alimentaires des enfants et de l’adulte responsable);
- en décrivant des façons d’adapter l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des interventions en fonction du genreNote de bas de page 400.
Promouvoir la santé cardiovasculaire
Pour bien cerner l’influence du sexe et du genre sur la santé, il est nécessaire de remettre en question les hypothèses et les pratiques traditionnelles. Ces hypothèses relatives au sexe, au genre et à la santé ont une influence sur la perception du risque ainsi que sur les modes de vie individuels et collectifs. Par exemple, le fait que les femmes ont une meilleure espérance de vie et sont moins sujettes aux cardiopathies que les hommes (voir le chapitre 1 pour les données) ne signifie pas pour autant qu’elles sont à l’abri des maladies cardiaquesNote de bas de page 242. Jusqu’ici, les approches visant à promouvoir la santé cardiovasculaire mettaient l’accent sur les hommes, ce qui a eu une incidence sur le dépistage et le traitement de la maladie chez les femmesNote de bas de page 242.
La recherche en santé n’a presque jamais pris en considération le sexe et le genre dans la prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement ou la gestion des problèmes de santéNote de bas de page 242. La santé cardiovasculaire est un exemple type de recherche qui intègre globalement les modèles et les normes associés aux hommes, mais qui ne s’adresse pas aux femmes ni d’ailleurs à tous les hommesNote de bas de page 242, Note de bas de page 401-Note de bas de page 403. La recherche montre que le sexe, par exemple, agit sur la nature des symptômes et le dépistage de la maladie, tandis que le genre peut influencer l’accès aux soins et même la réaction des professionnels de la santé à l’égard des symptômesNote de bas de page 242. Les interactions entre le sexe, le genre et le vaste éventail de déterminants de la santé peuvent avoir une incidence sur l’état de santé, sur les réactions du système de santé ainsi que sur les résultats en matière de santé à court et à long termeNote de bas de page 18, Note de bas de page 242.
Les perceptions concernant les maladies cardiovasculaires ont eu un effet sur la santé des femmes, étant donné que ces dernières étaient sous‑représentées dans la recherche, le traitement et dans les mesures de préventionNote de bas de page 77, Note de bas de page 242, Note de bas de page 402, Note de bas de page 403. Ce n’est que tout récemment que les maladies cardiovasculaires apparaissent comme l’une des principales causes de maladie et de mortalité chez les femmes canadiennesNote de bas de page 404. Auparavant, elles étaient considérées comme des « maladies d’homme » et ne préoccupaient que 13 % des femmes (dont 15 % des femmes de plus de 35 ans)Note de bas de page 405. Pour changer cette perception, les organismes en santé cardiovasculaire ont commencé à cibler les femmes dans leurs programmes de sensibilisation, de marketing social et de promotion de la santéNote de bas de page 406, Note de bas de page 407. En 2008, la Fondation des maladies du cœur du Canada a lancé la campagne Le cœur tel qu’elles afin d’inciter les femmes à prendre soin de leur santé, à changer leurs habitudes, à reconnaître les symptômes d’une crise cardiaque et d’un accident vasculaire cérébral, et à obtenir un traitement précoce (voir l’encadré intitulé « Le cœur tel qu’elles : une campagne de sensibilisation destinée aux femmes »)Note de bas de page 406, Note de bas de page 407.
Le cœur tel qu’elles : une campagne de sensibilisation destinée aux femmes
Une vaste campagne de santé publique, Le cœur tel qu’elles, a été créée dans le but de sensibiliser les femmes aux risques de cardiopathie et d’accident vasculaire cérébral et de les encourager à réduire les facteurs de risque. S’inspirant du succès qu’a connu la campagne du National Heart Lung and Blood Institute des États‑Unis, le Canada a lancé en 2008 sa propre campagne nationale par l’entremise de la Fondation des maladies du cœur du CanadaNote de bas de page 406, Note de bas de page 407. À cette époque, il était évident qu’il fallait aborder la question. En effet, le profil des maladies du cœur au Canada avait changé, car celles‑ci frappaient à un plus jeune âge et touchaient de plus en plus de femmes et de multiples groupes ethniquesNote de bas de page 407. Les femmes canadiennes ne comprenaient souvent pas la portée des facteurs de risque, souvent liés entre eux, comme une tension artérielle élevée, un haut taux de cholestérol sanguin, des antécédents familiaux de cardiopathies ainsi que d’autres facteurs. C’est pourquoi Le cœur tel qu’elles adopte une approche à plusieurs volets qui comprend des histoires vécues, des documents éducatifs, des ressources en ligne, des trousses d’information communautaires, des messages d’intérêt public, des programmes médiatiques et promotionnels ainsi que le recours aux médias sociauxNote de bas de page 407. La robe rouge est le symbole officiel de la campagne Le cœur tel qu’elles. Chaque année, au mois de mars, le symbole de la robe rouge prend vie à l’occasion du chic défilé de mode Le cœur tel qu’elles. Il s’agit du plus prestigieux événement médiatique de la campagne et, pour l’occasion, des célébrités canadiennes utilisent leur notoriété pour faire connaître les risques de cardiopathie et d’accident vasculaire cérébral chez les femmesNote de bas de page 407.
L’évaluation de la campagne a révélé de bons résultats. En effet, la population est désormais plus consciente que les cardiopathies et les accidents vasculaires cérébraux constituent un problème de santé fréquent chez les femmes (32 %) et la première cause de décès (59 %) chez les Canadiennes de plus de 35 ansNote de bas de page 405. Avant le début de la campagne, seulement 33 % de la population savait que les cardiopathies et les accidents vasculaires cérébraux constituaient une cause importante de mortalitéNote de bas de page 405.
Sexe, genre, santé mentale et bien‑être
Chacun des rapports annuels de l’administrateur en chef de la santé publique souligne l’importance de la santé mentale et du bien‑être et rappelle le besoin d’appuyer les Canadiens, leurs familles et leurs collectivités. Une approche axée sur le sexe et le genre peut aider à mieux comprendre comment les déterminants de la santé peuvent contribuer à améliorer la santé mentale et le bien-être de la populationNote de bas de page 408.
Les politiques et les stratégies commencent à reconnaître l’influence du vaste éventail de déterminants de la santé sur la santé mentale. En 2006, dans un rapport intitulé De l’ombre à la lumière : La transformation des services concernant la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soulignait la pertinence du vaste éventail de déterminants de la santé, notamment le sexe et le genre, pour assurer une bonne santé mentaleNote de bas de page 409. Il recommandait d’ailleurs que soit créé, avec l’appui des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, un organisme canadien responsable de la santé mentale. C’est ainsi qu’a vu le jour, en 2007, la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC)Note de bas de page 409, Note de bas de page 410. Le cadre stratégique de la CSMC met en évidence la nécessité d’une approche axée sur la santé de la population et rappelle l’importance de promouvoir la résilience et la littératie en santé mentaleNote de bas de page 411. Comme le genre et les déterminants socioéconomiques sont des facteurs interdépendants, cette approche devrait être utile aussi bien aux hommes qu’aux femmes, pour autant qu’elle soit adaptée à leurs besoins. Toutefois, ce cadre a fait l’objet de critiques, puisqu’il ne présente pas précisément de mesures de prévention, d’intervention ou de réactions du système de santé fondées sur le sexe et le genreNote de bas de page 270, Note de bas de page 412.
En 2012, la CSMC a lancé la première stratégie canadienne de promotion de la santé mentale, en se basant en partie sur les témoignages de Canadiens aux prises avec une maladie ou un trouble mental ou sur les témoignages de membres de leur familleNote de bas de page 413. La stratégie définit six orientations stratégiques, soit la promotion et la prévention; le rétablissement et les droits; l’accès aux services; les disparités et la diversité; les Inuits, les Métis et les Premières Nations; et, enfin, le leadership et la collaboration. Le genre et la sexualité sont considérés comme des domaines prioritaires pour aborder la question des disparités et de la diversitéNote de bas de page 413. Il s’agit d’examiner en quoi le genre peut avoir une influence sur la vulnérabilité et comment les besoins propres au genre peuvent être pris en compte dans les mesures de prévention et d’intervention précoce. Le fait d’aborder les conséquences de la stigmatisation et de la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre peut également avoir une incidence sur la santé mentale et sur la capacité de répondre à ces besoinsNote de bas de page 413. En matière de sexe et de genre, la stratégie de promotion de la santé mentale recommande ce qui suit :
- améliorer la compréhension à l’égard du genre et de l’orientation sexuelle;
- offrir des services de santé mentale qui tiennent compte du genre et de l’orientation sexuelle;
- s’attaquer aux facteurs de risque graves pour la santé mentale des femmes (par exemple, la pauvreté, le rôle d’aidante et la violence familiale);
- aider les organisations qui œuvrent auprès des lesbiennes, des gais, des bisexuels, des transsexuels et des personnes en questionnement à lutter contre la stigmatisation et améliorer le soutien offert aux communautésNote de bas de page 413.
Les lignes qui suivent présentent des exemples de l’influence que peuvent avoir le sexe et le genre sur la santé mentale. Ces exemples ont été choisis en fonction de plusieurs facteurs, notamment : la prévalence ou la fréquence du problème; le faible niveau de sensibilisation, la stigmatisation et les questions nécessitant une plus grande attention; les questions qui touchent de nombreuses populations mais d’une façon différente.
Il existe un lien direct entre, d’une part, la fréquence et la gravité de ces facteurs et, d’autre part, la fréquence et la gravité des troubles de santé mentaleNote de bas de page 268, Note de bas de page 278. Généralement, l’état de santé mentale d’une personne résulte d’événements marquants dans sa vie : avoir un enfant, perdre un être cher (en raison d’un décès ou d’une séparation), vivre dans la pauvreté ou subir de mauvais traitementsNote de bas de page 268, Note de bas de page 278. La recherche montre qu’il existe de nombreux facteurs de protection contre les problèmes de santé mentale (comme la dépression), notamment la résilience, l’estime de soi, la capacité d’adaptation et le sentiment de contrôle; l’accès aux ressources et aux services et la capacité de prendre des décisions éclairées en la matière; et enfin un environnement sécurisant, c’est-à-dire la famille, les amis et les prestataires de soins et de services sociauxNote de bas de page 414. Favoriser une bonne santé mentale, aujourd’hui et à l’avenir, exige de recueillir des données sur les causes de la maladie et sur la façon d’en atténuer les conséquences; de promouvoir la santé mentale et le bien‑être tout au long de la vie; de donner aux fournisseurs de soins des moyens de cerner et de traiter les problèmes de santé mentale, mais aussi d’agir sur les facteurs qui ont une incidence sur ces problèmesNote de bas de page 414, Note de bas de page 415.
S’attaquer à la dépression : l’exemple de la procréation et de la santé mentale
Il est généralement reconnu que les rôles fondés sur le genre, les expériences et les facteurs de risque liés à des événements marquants de la vie (comme la violence conjugale, le faible statut socioéconomique et leurs conséquences) contribuent aux problèmes de santé mentale qui frappent les femmes de manière disproportionnéeNote de bas de page 268. La surreprésentation des femmes dans les statistiques sur la dépression et l’anxiété rappelle qu’on peut faire davantage pour s’attaquer aux facteurs individuels, notamment en réduisant le stress, en se penchant sur les facteurs de risque et en favorisant la résilience chez les filles et les femmesNote de bas de page 268, Note de bas de page 411, Note de bas de page 416. Bien qu’il existe de nombreux facteurs sous‑jacents qui influencent la santé mentale et le bien‑être des femmes, on s’attardera plus particulièrement sur la santé reproductive et la dépression, notamment la dépression postnatale (DPN). Évidemment, l’accent sera mis sur les femmes, mais la discussion soulève des questions à propos de la situation des hommes et d’autres segments de la population lorsqu’ils deviennent parents (par exemple, la diminution du statut socioéconomique).
La gestion des processus de reproduction ou d’autres événements de la vie (par exemple, le syndrome prémenstruel, l’accouchement, l’infertilité, la ménopause et la détresse sexuelle) peut avoir une influence sur la santé mentale. Bien que les femmes canadiennes soient nombreuses (jusqu’à 80 %) à présenter de légers changements d’humeur après un accouchement, la DPN survient dans 10 % à 15 % des casNote de bas de page 276, Note de bas de page 278, Note de bas de page 417, Note de bas de page 418. En fait, il est probable que ces taux soient sous‑estimés étant donné que la DPN est souvent stigmatisée et sous-diagnostiquéeNote de bas de page 417. Bien que les causes exactes ne soient pas clairement établies, la recherche a permis de cerner de nombreux facteurs contributifs (par exemple, les changements hormonaux, le stress, les conflits avec le conjoint, les soins du nouveau‑né, la faible estime de soi et le manque de soutien social) qui font en sorte que certains groupes de la population courent un plus grand risqueNote de bas de page 68, Note de bas de page 276, Note de bas de page 278, Note de bas de page 419-Note de bas de page 421. À long terme, les femmes qui ont fait une DPN sont plus sujettes à la dépression plus tard dans la vieNote de bas de page 417, Note de bas de page 419. Par ailleurs, la DPN peut nuire indirectement à la relation entre la mère et son bébéNote de bas de page 417, Note de bas de page 419, Note de bas de page 420. Pour la combattre et en atténuer les risques, on doit examiner les facteurs biologiques et socioéconomiques et parvenir à une compréhension fine de leurs interactions et interrelationsNote de bas de page 422. De nombreuses études n’ont pas réussi à tirer des conclusions claires quant à l’efficacité des mesures de prévention. Il y a toutefois possibilité d’intervenir afin de diminuer, de gérer et d’atténuer les effets de la DPN sur les familles.
Le Saskatoon Postpartum Depression Support Program est un programme de bien‑être communautaire qui vient en aide aux mères atteintes de DPNNote de bas de page 423, Note de bas de page 424. Une évaluation a révélé que plusieurs aspects du programme et d’autres programmes du genre connaissaient un certain succès, en particulier auprès des femmes qui ont eu un deuxième enfant (la dépression est sous-diagnostiquée après la première grossesse et, généralement, les femmes demandent de l’aide pour les grossesses subséquentes)Note de bas de page 418, Note de bas de page 421, Note de bas de page 424. Dans l’ensemble, la plupart des femmes bénéficiaient des discussions de groupe et des services de soutien par les pairs. D’autres ont toutefois fait valoir qu’il y aurait intérêt à rendre ces programmes plus pertinents sur les plans social et culturel (en les adaptant, par exemple, aux femmes plus âgées ou aux femmes autochtones)Note de bas de page 417, Note de bas de page 418, Note de bas de page 424, Note de bas de page 425.
Mother Reach London & Middlesex (Ontario) informe et appuie les femmes — et leur famille — qui présentent ou sont susceptibles de présenter des troubles de l’humeur ou des troubles d’anxiété avant ou après l’accouchementNote de bas de page 426. Le programme de halte-garderie hebdomadaire permet aux femmes d’obtenir du soutien éducatif et de tisser des liens avec d’autres mères aux prises avec les mêmes difficultés. Le programme Father Reach est également offert dans la collectivité. Grâce à des ententes de collaboration, les familles ont accès à des professionnels de la santé mentale et d’autres spécialistes en counseling. L’équipe de la Mother Reach Coalition se compose de membres de la collectivité et de professionnels du comté de London et Middlesex qui ont pour mission de sensibiliser le public et les professionnels aux troubles de l’humeur et aux troubles d’anxiété qui surviennent avant et après l’accouchementNote de bas de page 426. Le programme Mother Reach est offert au Merrymount Family Support and Crisis Centre. Ce centre propose également un éventail de ressources et de services de soutien éducationnel, une clinique dirigée par une infirmière praticienne, des services de consultation en santé mentale, un service de garde de relève en cas d’urgence et divers groupes de soutien et d’éducation familialeNote de bas de page 426. Les examens systématiques ont révélé que les milieux et les programmes qui offrent aux nouveaux parents des traitements et du soutien personnalisés sont propices à améliorer le bien-être de la mère et les soins prodigués à l’enfantNote de bas de page 417, Note de bas de page 418, Note de bas de page 424, Note de bas de page 427, Note de bas de page 428.
L’étude des effets de la dépression maternelle exige une meilleure compréhension des interactions complexes entre la santé mentale et une série d’autres facteurs. Les résultats des méta-analyses n’ont pas réussi à déterminer si les facteurs socioéconomiques peuvent entraîner une prédisposition à la DPNNote de bas de page 279, Note de bas de page 429. Toutefois, la plupart des études sont de portée limitée, car elles visent des populations de même situation démographique (par exemple, des personnes blanches, hétérosexuelles et dont le statut socioéconomique est relativement élevé)Note de bas de page 279, Note de bas de page 429. Il serait essentiel d’étudier les effets modérateurs que les facteurs psychosociaux, culturels et spirituels peuvent avoir sur la dépressionNote de bas de page 279. Les valeurs et les pratiques communautaires, familiales et traditionnelles peuvent être une source de soutien et de protection pour les mères et leurs enfants. Par contre, certaines mères peuvent observer des pratiques traditionnelles et culturelles qui sous-estiment la maladie et peuvent avoir une influence sur l’obtention d’un traitementNote de bas de page 430.
Il peut être difficile pour certains segments de la population, en particulier pour les nouvelles immigrantes, d’obtenir des soins adéquats et équitablesNote de bas de page 279, Note de bas de page 280, Note de bas de page 430. Étant donné la complexité des questions psychosociales en jeu, il serait nécessaire d’adopter une stratégie d’intervention générale afin de mieux répondre aux problèmes de santé des immigrantes. Une telle stratégie devrait présenter les caractéristiques suivantes :
- reconnaître le stress associé aux responsabilités et politiques relatives à l’immigration;
- offrir des services sociaux et communautaires adéquats qui tiennent compte du vaste éventail de déterminants sociaux de la santé;
- proposer des stratégies de prévention adaptées aux réalités culturelles;
- fournir un accès équitable à des services adaptés sur le plan culturel;
- renforcer les capacités des collectivités marginalisées;
- offrir des interventions personnalisées qui présentent un intérêt sur le plan culturelNote de bas de page 430.
Au Canada, les chercheurs et les cliniciens jouent un rôle important dans l’avancement et le transfert des connaissances liées à la procréation et à la santé mentale. En effet, depuis les années 1980, les chercheurs canadiens montrent la voie à des organismes comme la North American Society for Psychosocial Obstetrics and Gynecology, la Marce Society (troubles mentaux postnataux) et l’International Association for Women’s Mental Health. En 1993, ils ont travaillé à la rédaction du premier livre sur le sujet, intitulé Psychological Aspects of Women’s Health Care: The Interface Between Psychiatry and Obstetrics and Gynecology, dont les éditions subséquentes ont été traduites en plusieurs langues et sont utilisées pour la formation de cliniciens partout dans le mondeNote de bas de page 431.
D’autres efforts ont été déployés par des centres de recherche du Canada afin d’accroître les connaissances en santé mentale dans un contexte de recherche fondé sur le genreNote de bas de page 422. Par exemple, à l’Université Simon Fraser de la Colombie‑Britannique, le Centre for the Study of Gender, Social Inequities and Mental Health réunit des chercheurs et des représentants d’organismes communautaires venus du Canada, des États‑Unis, du Royaume‑Uni et de l’Australie pour élaborer des politiques et des programmes qui établissent des liens entre le genre, les inégalités sociales, la santé mentale et les interventions considérées comme pertinentesNote de bas de page 432-Note de bas de page 434. L’avancement des connaissances, l’échange d’information, la formation et le perfectionnement des compétences se poursuivent dans cinq domaines prioritaires : la réforme de la santé mentale et de la politique; le rétablissement et l’hébergement; la santé mentale et reproductive; la violence, la santé mentale et la toxicomanie; le système de justice pénale, la santé mentale et la toxicomanieNote de bas de page 432, Note de bas de page 434.
La façon dont les hommes entrevoient leur paternité ou assument leur nouveau rôle de père, la dépression paternelle, le stress associé à la grossesse de leur conjointe et l’influence qu’ils exercent sur la santé mentale des femmes représentent autant de facteurs qui retiennent de plus en plus l’intérêt dans les travaux de recherche, les politiques et les programmesNote de bas de page 417, Note de bas de page 435-Note de bas de page 438. Les recherches ont montré que les symptômes de dépression chez les hommes, qui se manifestent pendant ou après la naissance de l’enfant, sont aussi des problèmes importantsNote de bas de page 270, Note de bas de page 438. En particulier, on a établi que la dépression des hommes avant et après la naissance de leur enfant était généralement en corrélation avec la dépression de leur conjointe, les relations difficiles entre parents et le faible soutien socialNote de bas de page 438. On a également remarqué que l’aggravation de la dépression chez l’un des conjoints pouvait accroître celle de l’autreNote de bas de page 438. Bien que la dépression chez les nouveaux pères attire l’attention des médias, le problème est souvent détecté tardivement, car les outils de diagnostic actuels ne permettent pas de cerner de manière adéquate les symptômes propres aux hommes. Les échelles d’évaluation, comme l’échelle de dépression postnatale d’Édimbourg, l’inventaire de dépression de Beck, le questionnaire sur l’état de santé et l’échelle de dépistage de la DPN, sont couramment utilisées pour établir un diagnostic chez les femmes. Même si ces outils fonctionnent relativement bien pour les deux sexes, la recherche estime que certaines modifications devraient être apportées afin de mieux refléter les critères symptomatologiques des hommesNote de bas de page 439-Note de bas de page 444. Les rares recherches sur la dépression paternelle s’intéressent principalement aux pères mariés, de race blanche et de classe moyenne. Des travaux supplémentaires doivent être menés, mais cette fois sur la situation des pères dans différents contextes culturels et socioéconomiquesNote de bas de page 442, Note de bas de page 444. L’étude de la dépression et de l’anxiété chez les nouveaux parents doit être adaptée aux besoins de certains segments de la population, comme les minorités sexuelles. D’autres efforts doivent également être consentis pour mieux définir et examiner la santé mentale et reproductive des hommes ainsi que le rôle que ces derniers jouent dans la santé mentale et reproductive des femmes.
Prévenir le suicide : la lutte contre le suicide chez les hommes
Récemment, certains programmes et travaux de recherche ont révélé que les hommes sont prédisposés à divers problèmes de santé mentale, en particulier à la dépressionNote de bas de page 270, Note de bas de page 445. Les maladies mentales sont souvent sous‑diagnostiquées et sous‑déclarées chez les hommes, et leurs problèmes de santé mentale sont souvent considérés comme une « crise silencieuse », ce qui laisse croire que, sur ce plan, l’écart entre les sexes n’est peut‑être pas aussi grand que ce qu’on croitNote de bas de page 270. Les différences de résultats et de diagnostics entre les hommes et les femmes peuvent être d’ordre biologique, mais elles peuvent aussi dépendre de la manière dont ces problèmes sont définis sur le plan social et culturel et de la façon dont les symptômes se manifestent et sont vécusNote de bas de page 68. En outre, l’accent mis sur les symptômes physiques et le recours à des mécanismes d’adaptation (comme la consommation de substances nocives) peuvent être des façons de cacher la maladie ou de tenter de l’oublierNote de bas de page 68.
Dans le domaine de la santé publique, le suicide constitue un exemple de paradoxe entre les sexes. Quatre suicides sur cinq sont commis par des hommes, mais les tentatives de suicide et les taux de dépression déclarés sont plus élevés chez les femmesNote de bas de page 68, Note de bas de page 269, Note de bas de page 270, Note de bas de page 274, Note de bas de page 446. Par conséquent, les mesures de prévention contre le suicide se heurtent à quelques difficultés, étant donné que les taux de suicide et d’idées suicidaires diffèrent d’un sexe à l’autreNote de bas de page 447. Une approche fondée sur le sexe et le genre fait ressortir les différences observées dans les expériences vécues, les comportements adoptés et les rôles sociaux, et met en évidence les préjugés contenus dans les outils de diagnostic.
Bien que la dépression clinique puisse conduire au suicide, les recherches épidémiologiques et cliniques montrent que la prévalence de la dépression est en corrélation inverse avec la fréquence du suicideNote de bas de page 448. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte dans la lutte contre le suicide chez les hommes, y compris le fait qu’ils sont moins susceptibles de réclamer de l’aide et des soins. Les hommes sont incapables de révéler ce qu’ils perçoivent comme une faiblesse. Puisque les symptômes ne sont pas identiques chez les hommes et les femmes, la maladie n’est pas non plus diagnostiquée ni traitée de la même façon. Les hommes sont également nombreux à s’infliger des blessures de manière décisive et violenteNote de bas de page 447 ou à utiliser la toxicomanie comme une forme d’automédication de la dépression ou de l’anxiétéNote de bas de page 68, Note de bas de page 448.
Le suicide chez les hommes plus âgés est préoccupant, et il faudrait faire davantage pour cibler cette population à risqueNote de bas de page 25, Note de bas de page 68, Note de bas de page 87. En 2006, la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées a élaboré des lignes directrices nationales qui mettent l’accent sur certains problèmes de santé mentale auxquels s’exposent les aînés au Canada. Les Lignes directrices nationales : Évaluation du risque suicidaire et prévention du suicide examinent le problème du suicide chez les aînés selon certains contextes sociaux et culturels et s’intéressent tout particulièrement aux comportements associés au sexe et au genre ainsi qu’au rôle de la culture en tant que facteur de risqueNote de bas de page 449. La Coalition canadienne s’est inspirée de ces lignes directrices pour élaborer une trousse de prévention du suicide en fin de vie destinée aux fournisseurs de soins, aux médecins, au personnel infirmier, aux travailleurs de première ligne et aux professionnels de la santé mentale. Cette trousse peut également être utilisée dans le cadre des programmes d’éducation en santéNote de bas de page 450.
Le suicide est généralement plus fréquent chez les hommes plus jeunes et, en particulier, chez les hommes des minorités sexuellesNote de bas de page 25, Note de bas de page 68, Note de bas de page 451. En 2011, un examen des cas et des risques de suicide chez les minorités sexuelles et de genre a été réalisé aux États-Unis. Cet examen a révélé qu’il y avait trop peu de recherches sur les comportements suicidaires au sein de cette population et sur la nécessité et l’efficacité des politiques de santé publique, des stratégies de prévention et des interventions cibléesNote de bas de page 286. Il a également indiqué que, de façon générale, il n’existe aucune façon reconnue ou fiable de mesurer le taux de suicide au sein des populations des minorités sexuelles et de genre. Les recherches internationales ont toutefois établi des liens entre le statut de minorité sexuelle et de genre et les taux élevés d’idées suicidaires et de tentatives de suicideNote de bas de page 286, Note de bas de page 452. Elles ont également fait des associations entre les troubles mentaux et les tentatives de suicide au sein de ces populationsNote de bas de page 286. Bien que les troubles mentaux représentent le principal facteur de risque, le rapport mentionne d’autres facteurs explicatifs, notamment la stigmatisation sociale, les préjugés et la discrimination dont les minorités sexuelles et de genre font l’objet, tant sur le plan individuel (rejet de la famille et des amis, harcèlement, intimidation et violence physique) que sur le plan institutionnel (lois et politiques restrictives)Note de bas de page 286.
Certaines administrations ont intégré à leur stratégie de prévention du suicide des initiatives de portée générale et des initiatives ciblées. En particulier, le gouvernement du Nouveau‑Brunswick se distingue sur ce plan grâce à sa stratégie générale de prévention du suicide, qui définit et cible avec précision les personnes les plus à risqueNote de bas de page 453. Le programme mise avant tout sur les ressources communautaires et sur le fait que les partenaires locaux sont les mieux placés pour répondre aux besoins de la collectivité grâce à l’engagement communautaire, l’éducation continue et la collaboration interorganisationnelleNote de bas de page 453, Note de bas de page 454. Pour sa part, le gouvernement australien estime que, si le taux global de suicide a chuté au pays au cours des dix dernières années, il le doit en partie à sa stratégie de prévention du suicideNote de bas de page 455. En effet, le cadre de travail LIFE (Living is for Everyone) part du principe que tous les Australiens ont un rôle à jouer dans la prévention du suicide, que ce soit au moyen d’interventions vastes ou cibléesNote de bas de page 455. Il précise également que, pour être efficaces, les interventions doivent tenir compte du sexe et du genre et inclure, dans le cas des hommes, les éléments suivants :
- concevoir des stratégies et des mesures pratiques orientées vers l’action qui proposent une formation axée sur les aptitudes et la capacité d’adaptation, offrent des possibilités d’améliorer les compétences professionnelles et parentales, favorisent l’esprit d’ouverture et la gestion du stress et de la colère et fournissent aux hommes retraités des occasions de socialiser;
- offrir des programmes et des services conviviaux et pertinents dans un milieu sécuritaire et approprié;
- proposer des services qui sollicitent la participation active des hommes à risque, lesquels sont généralement réticents à se confier volontairement, mais discutent plus ouvertement de leurs problèmes si le sujet est abordé par une autre personne;
- offrir de la formation aux prestataires de services locaux et fournir des programmes et des services aux endroits fréquentés par les hommes : lieux de travail, pubs, clubs sportifs et clubs sociaux;
- mieux cerner et satisfaire les besoins des hommes et valoriser leur rôle dans la collectivité;
- présenter les aspects positifs de la santé et du bien‑être, sachant que les hommes se préoccupent davantage de santé que de maladie;
- réunir des hommes animés par un même désir de soutien social pour lutter contre la solitude;
- promouvoir le dépistage des troubles mentauxNote de bas de page 456.
La prise en considération du sexe, du genre et de la diversité peut aider à comprendre certaines questions de santé, notamment le suicide chez les hommesNote de bas de page 273. On sait que le taux de suicide est particulièrement élevé dans certains segments de la population, y compris les hommes autochtones et les hommes vivant dans les collectivités éloignéesNote de bas de page 457-Note de bas de page 459. Le programme Men at Risk traite des problèmes de dépression et du suicide chez les hommes qui vivent dans les régions éloignées de l’Alberta, notamment pour travailler dans les secteurs pétroliers, forestiers ou agricoles, et qui se retrouvent loin de leur famille et de leur collectivitéNote de bas de page 448, Note de bas de page 460. Des examens systématiques ont montré qu’il existe de nombreuses approches efficaces pouvant s’intégrer aux programmes de prévention du suicideNote de bas de page 461. Le programme Men at Risk utilise des pratiques exemplaires de prévention du suicide, de soutien en santé mentale et de consultation. Il se sert de messages de professionnels de la santé mentale ainsi que de déclarations, d’histoires et de témoignages émouvants de personnes ayant survécu à une tentative de suicide. Ce programme ne banalise ni ne glorifie les comportements suicidaires. Il s’annonce prometteur dans la mesure où il traite des pressions et des défis uniques que connaissent les hommes placés dans cette situation particulière ou travaillant dans des secteurs d’activité inusitésNote de bas de page 448.
Au cours des dernières décennies, les changements sociaux ont rendu plus difficile la communication entre les hommes et les autres membres de la collectivité, y compris les autres hommesNote de bas de page 462. Les changements dans les relations interpersonnelles et dans les milieux du travail (emplois dans des régions isolées ou éloignées, emplois non traditionnels, perspectives d’emploi peu encourageantes et faible espoir d’une retraite en santé) ont fait en sorte que les hommes se sentent parfois isolés, déprimés, seuls, dévalorisés et dépassés par les responsabilités familiales et ont l’impression de ne pas pleinement se réaliser. De tels sentiments augmentent les risques de maladie mentale, y compris les risques de suicide. Les recherches montrent que les groupes de soutien pour hommes sont bénéfiques pour la santé. En effet, il a été démontré que le programme Men’s Sheds de l’Australie contribuait à améliorer l’état de santé et de bien‑être des hommes et, en particulier, celui des hommes plus âgés ou vivant dans des régions peu peuplées (voir l’encadré intitulé « Programme Men’s Sheds de l’Australie »)Note de bas de page 462. Ces programmes abordent les disparités relatives à la formation continue, à l’éducation aux adultes et au réseautage social, et mettent l’accent sur les endroits que les hommes ont l’habitude de fréquenter et sur leurs besoins particuliers en matière d’apprentissageNote de bas de page 462.
Le programme Men’s Sheds de l’Australie est un mouvement communautaire mis sur pied dans le but d’offrir aux hommes des services de soutien. Le titre du programme fait référence au hangar de l’arrière‑cour où les hommes, traditionnellement, pratiquaient l’artisanat et socialisaient. Les hommes qui participent au programme tissent des liens en partageant des intérêts communs, tout en apprenant ou en transmettant de nouvelles compétences (par exemple, la cuisine, la menuiserie, la mécanique, la gestion du poids)Note de bas de page 462. Plus important encore, le programme traite des problèmes de santé et des facteurs de risque chez les hommes. Il part du principe que la santé repose sur une multitude de facteurs, comme le fait de se sentir bien, de tenir un rôle reconnu et valorisé dans la communauté, d’entretenir des amitiés, de se garder physiquement et mentalement actifs et de jouir d’une sécurité financière et sociale. Le programme est axé sur plusieurs déterminants de la santé, notamment la création de milieux favorables, le perfectionnement des compétences personnelles et l’action communautaireNote de bas de page 462-Note de bas de page 464. Il montre aux participants qu’ils sont responsables de leur santé et qu’ils ont un rôle à jouer dans la collectivité en proposant des projets de soutien communautaire financièrement viables (par exemple, la mise en place de structures communautaires)Note de bas de page 462. L’estime de soi et le sentiment d’appartenance s’accroissent à mesure que les liens se resserrent entre les participantsNote de bas de page 462. Les hommes acquièrent de nouvelles connaissances en santé grâce à des discussions plus officielles sur des sujets comme la dépression, le cancer de la prostate et les saines habitudes de vie. Certains participants à risque ont d’ailleurs indiqué être moins tourmentés par des idées suicidairesNote de bas de page 462.
Afin d’éviter de mettre à l’écart les hommes isolés sur le plan géographique, le programme a mis sur pied un grand forum virtuel sur lequel les gens échangent des conseils ou des objets (grâce à un babillard achats/échanges) et discutent de leurs projets de rénovation ou de bricolage, de leur passe-temps, de leur mode de vie, de leur famille, de leurs relations sociales, de leur santé mentale et des sports qu’ils pratiquentNote de bas de page 463, Note de bas de page 465. Dans les collectivités autochtones australiennes, le programme se veut également un lieu de guérison, de spiritualité et d’apprentissage culturel. Enfin, le programme offre aux hommes qui présentent un problème de santé ou une incapacité la possibilité d’échanger, d’acquérir de nouvelles compétences et de sortir de l’isolementNote de bas de page 462.
Plus de 1 000 hangars sont inscrits auprès de l’Australian Men’s Shed Association et du programme Men’s Sheds de l’Australie, qui est en pleine expansion. Le programme bénéficie d’un important soutien communautaire et est financé en partie par le gouvernement de l’Australie, car il offre aux hommes la possibilité de socialiser, d’acquérir des compétences pratiques et d’améliorer leur état de santé et de bien-êtreNote de bas de page 466. On a également conçu des documents et aménagé de nouvelles structures pour les groupes aux besoins particuliers, comme les personnes qui ont une déficience physique, les personnes atteintes de troubles mentaux et les personnes sans emploiNote de bas de page 466-Note de bas de page 468. Des programmes de ce genre existent maintenant en Nouvelle-Zélande, en Angleterre, en Irlande et au CanadaNote de bas de page 466. À Winnipeg, la Mensheds Manitoba inc. administre un organisme semblable, qui est dirigé par les pairs dans une atmosphère de camaraderie « entre hommes »Note de bas de page 469. La Mensheds Manitoba inc. s’efforce de réduire l’isolement social, la solitude et la dépression chez les hommes retraités en encourageant les membres à demeurer actifs au sein de leur communautéNote de bas de page 469.
La réticence de certaines personnes à admettre un problème, à se faire aider et à obtenir un diagnostic peut nuire à la réussite des mesures de prévention du suicide. La décision de demander de l’aide est souvent prise en situation de crise et non au cours du développement de la maladie. Les hommes peuvent hésiter à demander de l’aide en raison de leur conception traditionnelle de la masculinité, par crainte d’être perçus comme un être faible, par peur de ne pas maîtriser la situation, par manque de connaissances ou encore parce que leurs symptômes sont masqués par la consommation et l’abus de substances nocivesNote de bas de page 448, Note de bas de page 470. Les programmes de prévention du suicide doivent remettre en question la conception même de la masculinité et la réticence qu’éprouvent les hommes à avouer leurs besoins ou à demander de l’aide. Les stratégies de marketing social peuvent être adaptées aux hommes atteints de troubles de santé mentale afin de mieux les informer et de les encourager à se faire aiderNote de bas de page 448, Note de bas de page 470. De même, les praticiens en santé mentale et les outils de diagnostic pour les hommes doivent prendre en considération les facteurs qui suscitent cette réticence à consulterNote de bas de page 470. Un examen des pratiques en santé mentale a révélé que les hommes seraient plus enclins à demander de l’aide si les programmes étaient adaptés aux hommes qui tiennent des rôles masculins traditionnels. Les méthodes de consultation traditionnelles, qui consistent à discuter du problème, se sont révélées moins efficaces que les interventions structurées. Par exemple, la thérapie comportementale cognitive encourage les personnes à délaisser les mécanismes d’adaptation traditionnels et d’adopter plutôt des comportements adaptatifs qui leur permettent de remplacer les normes néfastes (comme le fait de ne pas extérioriser les pensées négatives) par des processus d’adaptation plus efficacesNote de bas de page 448, Note de bas de page 470. Par ailleurs, les vastes campagnes médiatiques qui remettent en question les normes masculines traditionnelles doivent être menées de façon intensive et cibler les populations à risqueNote de bas de page 448, Note de bas de page 470.
Réduire la stigmatisation liée à la santé mentale et accroître l’accès aux soins
La stigmatisation, quelle qu’en soit la cause (problème de santé, appartenance culturelle, genre, orientation sexuelle) touche de nombreuses personnes et se manifeste dans différents contextes. La stigmatisation de la maladie mentale résulte de la mauvaise compréhension d’une réalité, ce qui conduit aux préjugés et à la discrimination. Par conséquent, de nombreuses personnes vivant avec une maladie mentale ou un problème de santé mentale ont connu la stigmatisationNote de bas de page 471. Celle-ci peut avoir des répercussions négatives sur la capacité d’une personne à se développer de façon holistique, à socialiser, à fréquenter l’école, à occuper un emploi, à participer à des activités de bénévolat ainsi qu’à obtenir des soins ou des traitementsNote de bas de page 471-Note de bas de page 473.
La sexualité et le genre constituent des concepts sociaux qui peuvent être utilisés pour assigner des rangs dans une hiérarchie et peuvent ainsi empêcher certaines personnes d’occuper des postes d’autorité ou des postes de direction au sein de groupes précisNote de bas de page 217, Note de bas de page 474. Le statut peut engendrer d’autres formes d’inégalité, comme la valeur accordée aux symptômes et aux résultats de santé, ou influencer la façon dont une personne interagit avec les professionnels de la santé. Puisque la stigmatisation peut intervenir dans de nombreuses occasions, la recherche et les programmes doivent tenir compte d’un large éventail de résultatsNote de bas de page 217, Note de bas de page 471. Une évaluation complète des répercussions de la stigmatisation nécessite la prise en compte des nombreuses circonstances qui ont pu y contribuerNote de bas de page 474.
Plusieurs approches semblent prometteuses pour éliminer la stigmatisation associée à la santé mentale. L’éducation précoce (qui cible d’abord les écoles primaires, puis les écoles secondaires) et la sensibilisation aux troubles mentaux peuvent provoquer une remise en question des idées fausses et ainsi réduire la stigmatisationNote de bas de page 471, Note de bas de page 475. Informer les enfants et les jeunes sur la maladie mentale peut promouvoir l’empathie et la tolérance avant qu’ils n’adoptent des attitudes négativesNote de bas de page 471. D’ailleurs, il a été démontré que les interventions axées sur l’éducation précoce étaient plus efficaces pour réduire la stigmatisation que les mesures de sensibilisation à grande échelleNote de bas de page 471. Des programmes comme Racines de l’empathie (présenté dans le Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada, 2009) permettent de réduire sensiblement les agressions chez les enfants d’âge scolaire, de la maternelle à la huitième année, en améliorant les compétences sociales et affectives et en favorisant l’empathieNote de bas de page 476, Note de bas de page 477. Parallèlement, une meilleure connaissance de la discrimination (peu importe la maladie, le statut social, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’origine ethnique ou l’âge de la personne qui en fait l’objet) peut donner lieu à des pratiques équitables pouvant être appliquées dans d’autres sphères d’activité (par exemple, en milieu de travail), et ce, tout au long de la vie.
Une étude américaine a révélé que les rôles fondés sur le genre pouvaient atténuer la stigmatisationNote de bas de page 478. Par exemple, les stéréotypes sur la toxicomanie, la violence et l’agressivité sont généralement associés au genre. Les résultats de l’étude démontraient de façon systématique que les personnes qui présentaient des symptômes de maladie mentale atypiques en ce qui a trait au genre (c’est‑à‑dire des symptômes auxquels on ne s’attend pas chez les personnes de ce sexe) suscitaient des réactions positives, attiraient des marques de sympathie et recevaient un meilleur appui. Par contre, les personnes qui présentaient des symptômes typiques associés à leur genre étaient davantage exposées à des réactions négatives, les gens leur attribuant une part de blâme et de responsabilité et remettant en doute l’authenticité de leur maladie mentaleNote de bas de page 478. La divergence des scénarios typiques associés au genre peut être perçue comme une cause de la maladie. Alors que cette étude portait uniquement sur les perceptions du grand public, il serait pertinent de mieux connaître les perceptions que les praticiens en santé mentale et d’autres fournisseurs de soins se font des troubles mentaux en relation avec le sexe et le genreNote de bas de page 478.
Les travaux de recherche et les programmes tardent à reconnaître la façon dont les normes masculines et la stigmatisation influencent les soins et les traitements. Bien que la maladie mentale présente d’importantes différences en fonction du sexe et du genre (fonctionnement, structure et chimie du cerveau), la recherche doit également examiner l’influence des pressions sociales et des facteurs environnementaux. Les hommes ignorent habituellement leurs symptômes, accentuant la rupture entre les symptômes physiques et les symptômes mentaux. Par exemple, chez les hommes, les maux de tête et les problèmes de digestion sont rarement associés à la maladie mentale, au contraire des femmes qui présenteraient ces mêmes symptômes. Les points de vue traditionnels sur la masculinité ont souvent eu pour effet de cacher les problèmes de santé mentale. Les perceptions des rôles et des responsabilités qui reviennent aux hommes (rôle de protecteur et de pourvoyeur) se fondent sur des idéaux de force et de stoïcisme. La stigmatisation sociale des hommes qui ont recours aux services de santé mentale est justement attribuable à cette conception traditionnelle de la masculinité. Par conséquent, les hommes ne montrent pas de signe ou sont réticents à discuter de leurs propres facteurs de risque. Ils ont généralement une faible littératie en santé mentale et peuvent masquer leurs problèmes par des stratégies d’adaptation ou des comportements à risque (comme la violence et la consommation des substances nocives)Note de bas de page 448, Note de bas de page 470, Note de bas de page 479, Note de bas de page 480.
Une approche axée sur la santé de la population est nécessaire pour traiter des facteurs de risque fondés sur le genre et pour améliorer la mise en œuvre des politiques et des programmes de santé mentale et l’accès à ceux-ciNote de bas de page 13, Note de bas de page 481. Si on élargissait cette approche pour y inclure les déterminants sociaux de la santé, l’ACFSG portant sur la discrimination de genre ainsi que les politiques et les programmes pourraient être plus efficacesNote de bas de page 217. Dans l’ensemble, plusieurs types d’intervention visent à encourager les hommes à consulter : l’éducation collective (discussions et sensibilisation), les services (services de santé et services sociaux), l’approche communautaire (sensibilisation, matériel éducatif et informatif) et l’approche coordonnée (combinaison des trois autres types d’intervention)Note de bas de page 228. D’ailleurs, les évaluations ont révélé que ces interventions s’annonçaient prometteuses pour provoquer un changement d’attitude à l’égard de la santé sexuelle et des programmes d’engagement paternel (qui favorisent les liens entre père et enfants) et pour combattre l’agressivité et la violence. Elles offrent également le potentiel de faire évoluer les mentalités, comme en font foi l’utilisation croissante de la contraception, le recours accru aux programmes de santé sexuelle et reproductive, l’amélioration de la communication entre conjoints et la diminution de la violence conjugale autodéclarée (physique, sexuelle et psychologique)Note de bas de page 228. Les résultats s’avèrent concluants à court terme, mais c’est souvent le cas des interventions limitées dans le tempsNote de bas de page 228.
À la suite de consultations avec les communautés, le Northern Health de la Colombie‑Britannique a mis en lumière les principaux concepts à prendre en considération au moment de promouvoir et de mettre en œuvre des programmes de santé à l’intention des hommes. Ces concepts sont les suivants :
- favoriser et accroître les travaux de recherche sur la santé des hommes, leurs facteurs de risque, leur accès aux services de santé et la prestation de soins;
- consulter les hommes afin de comprendre leur environnement de travail et leur milieu de vie;
- soutenir les programmes qui mettent en pratique les connaissances tirées des travaux de recherche;
- créer des milieux favorables en véhiculant des messages clairs et pertinents et en encourageant les hommes à s’informer et à discuter de la santé selon leurs propres termes;
- travailler à partir de structures et de réseaux établis (par exemple, les programmes de sécurité au travail);
- mettre l’accent sur l’amélioration des programmes de santé et de services sociaux destinés aux hommes à risque et en favoriser l’accès;
- mettre en place et offrir des services de sensibilisation novateurs qui favorisent la participation des hommes à l’élaboration de programmes répondant à leurs besoins (par exemple, Men’s Night Out)Note de bas de page 446, Note de bas de page 482.
Le Centre for Advancement of Men’s Health et le Centre for Rural and Regional Health Education de l’Australie utilisent le modèle du Men’s Awareness Network (MAN) comme outil de prévention des maladies et de promotion de la santé afin d’offrir aux hommes et aux jeunes hommes un meilleur accès au système de santé. Le concept du modèle MAN résulte de la nécessité d’aborder les comportements liés à la santé qui sont considérés comme traditionnellement masculins, mais il reconnaît également l’hétérogénéité des hommes et l’importance d’adapter les programmesNote de bas de page 483. Cette approche, fondée sur des données probantes, vise à favoriser les interventions communautaires susceptibles de répondre aux besoins de santé des hommes. Elle est appliquée en milieu rural et en milieu urbain, dans les endroits que les hommes fréquentent et où les omnipraticiens et les autres professionnels de la santé peuvent les rencontrer pour discuter de ces questions. Par exemple, les programmes de santé en milieu de travail sont souvent utilisés pour aborder les questions liées à la sécurité, à la gestion du stress et aux relations. En tant que complément au modèle MAN, le programme Lifeskills est adapté aux besoins et aux problèmes particuliers des adolescentsNote de bas de page 483-Note de bas de page 485. Le programme Men’s Night Out met aussi en application le modèle MAN en intégrant à ses mesures de promotion de la santé des sujets susceptibles d’intéresser les hommes. Par exemple, on y organise des rencontres dans des lieux autorisés où des conférenciers (comme des vedettes sportives ou de la télévision) viennent discuter de sujets aussi variés que les maladies chroniques, le rôle parental et l’accès ou le recours au système de santéNote de bas de page 483. De nombreux organismes de santé de l’Australie et du Canada ont adopté le programme Men’s Health Night du modèle MAN, permettant ainsi à un large public d’échanger plus ouvertement sur la santé des hommes (on estime que plus de 80 000 hommes ont participé au programme Men’s Health Night depuis sa mise en œuvre), ce qui a engendré une augmentation du nombre de visites chez le médecinNote de bas de page 483, Note de bas de page 486. En combinant le programme Men’s Night Out et les examens cliniques, le modèle MAN a connu quelques succès dans les collectivités rurales et les collectivités autochtones éloignées de l’AustralieNote de bas de page 483. Enfin, la Colombie‑Britannique a aussi adhéré au concept; en effet, des programmes de santé en milieu de travail, des soirées Men’s Health Nights et des séances Lifeskills ont été offerts dans certains établissements d’enseignement postsecondaire de la provinceNote de bas de page 483.
Sensibiliser la population au fait que les hommes sont prédisposés à la dépression est une tendance qui s’affirme de plus en plus et qui promet de réduire la stigmatisation liée à la santé mentale. Un nombre croissant d’activités de promotion et de groupes de réseautage mettent l’accent sur les hommes et leur sensibilisation à la santé mentale, ce qui aide à rompre le silence sur ce sujet. Selon une étude menée en Australie, certains médecins et patients ont utilisé une liste de questions conçue expressément pour aider les hommes à surmonter leur réticence et à rehausser leur niveau de littératie en santé mentale; ils ont ainsi aidé 60 % des patients à discuter avec un médecin des questions liées à leur santéNote de bas de page 270.
Par ailleurs, les chercheurs s’intéressent de plus en plus aux mesures de prévention en milieu de travail afin d’améliorer l’état de santé et de bien-être des travailleurs et, parallèlement, de réduire le fardeau lié à l’absentéisme et à la perte de productivité. Toutefois, les employeurs jugent souvent cet investissement excessifNote de bas de page 470, Note de bas de page 487. La CSMC, en collaboration avec d’autres partenaires, travaille à établir une Norme canadienne nationale sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail en vue d’aider les organisations à améliorer de façon concrète la santé et la sécurité psychologiques de leurs employésNote de bas de page 488-Note de bas de page 490.
Le Canada fait des progrès dans la lutte contre la stigmatisation associée à la santé mentale, tant à l’échelle nationale qu’internationale, grâce à l’élaboration d’initiatives de recherche, à la formation professionnelle sur le sujet, à l’échange d’information ainsi qu’au recensement et à l’évaluation des programmes de lutte contre la stigmatisation.
- En 2009, la CSMC a lancé une initiative décennale contre la stigmatisation et la discrimination appelée Changer les mentalités. Il s’agit du plus vaste effort visant systématiquement à réduire la stigmatisation de la maladie mentale au Canada, et la CSMC collaborera avec des collectivités, des intervenants et des groupes à risqueNote de bas de page 473. Les évaluations initiales de certains programmes menés dans le cadre de cette initiative sont en cours. Toutefois, l’Interior Health Authority de la Colombie-Britannique a procédé elle-même à une évaluation de son programme en recourant à la formation antistigmatisation du Réseau local d’intégration des services de santé du Centre de l’Ontario. L’évaluation a entre autres révélé que les séances de formation induisaient chez les participants des changements d’attitude au point de vue de la responsabilité sociale, de la divulgation, de l’autostigmatisation, des préjugés et de la dévalorisation. Les résultats positifs encourageront l’utilisation de cette formation à titre de ressource pour la prestation et l’élaboration de futurs programmesNote de bas de page 491.
- Une initiative de recherche sur la lutte contre la stigmatisation a été créée à l’Université Queen’s (Kingston, Ontario) en vue d’élaborer des programmes de sensibilisationNote de bas de page 492.
- En 2012, le Canada a tenu une conférence internationale réunissant 700 chercheurs, professionnels de la santé mentale, décideurs et personnes ayant une expérience de la maladie mentale, en provenance de plus de 28 pays. Le message qui ressort de la conférence est que tout le monde a un rôle à jouer pour éliminer la stigmatisation qui empêche certaines personnes d’obtenir les soins dont elles ont besoinNote de bas de page 493, Note de bas de page 494.
- Une Canadienne préside la section de la stigmatisation et de la santé mentale de l’Association mondiale de psychiatrie. Le Canada participe également à des activités visant à réduire la stigmatisation et la discrimination et à améliorer l’inclusion et l’accès des personnes vivant avec une maladie mentale (et de leur famille)Note de bas de page 495.
- La Société pour les troubles de l’humeur du Canada et ses partenaires ont lancé une nouvelle initiative visant à offrir aux médecins un programme agréé de formation médicale continue en ligne. Au moyen d’une approche fondée sur le contact, élaborée à partir des meilleures données probantes, ce programme vise à changer les attitudes et les comportements à l’égard des personnes atteintes d’une maladie mentaleNote de bas de page 496.
Sexe, genre, relations saines et santé sexuelle
Une sexualité saine suppose l’acquisition de connaissances, de compétences et de comportements favorables à une bonne santé sexuelle et reproductive ainsi qu’à des expériences sexuelles et reproductives positives tout au long de la vieNote de bas de page 497-Note de bas de page 499. Vivre une sexualité saine, c’est aussi avoir des options pour éviter les conséquences non désirées (comme une infection transmissible sexuellement [ITS] ou une grossesse imprévue)Note de bas de page 500. Le développement et le maintien d’une sexualité saine exigent souvent un certain nombre de décisions et de relations complexes.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, la santé sexuelle requiert « une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles qui soient sources de plaisir et sans risque, libres de toute coercition, discrimination ou violenceNote de bas de page 501 ». La présente section examine cinq domaines essentiels à une expérience sexuelle positive, respectueuse, agréable et sécuritaire :
- établir des relations saines;
- communiquer : sexualisation et relations saines;
- s’attaquer aux stéréotypes liés à la santé sexuelle et fondés sur le sexe et le genre;
- recourir à une éducation approfondie sur la santé sexuelle;
- s’attaquer aux risques pour la santé sexuelle.
Établir des relations saines
Toutes les relations saines (celles que l’on entretient avec sa famille, ses partenaires et ses pairs) permettent d’accroître la résilience et de réduire les risques de développer certains problèmes de santéNote de bas de page 502-Note de bas de page 504. Les interventions qui favorisent les relations saines doivent être menées en bas âge de sorte que les jeunes hommes et les jeunes femmes mesurent la valeur et l’importance du respect, de l’égalité et de l’harmonie dans les relationsNote de bas de page 505. Le Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada, 2011 a souligné l’importance d’établir des relations saines à l’adolescence, car c’est à cette période que les jeunes s’engagent davantage auprès de leurs pairs, qu’ils connaissent leurs premières relations sexuelles et qu’ils sont susceptibles de devenir eux-mêmes parentsNote de bas de page 20. Les relations amoureuses sont particulièrement importantes pour un passage réussi vers l’âge adulte. Ainsi, le fait d’entretenir des rapports sains et respectueux au cours de cette période de la vie aura des effets positifs sur les relations actuelles et futuresNote de bas de page 506. Même si la violence dans les relations amoureuses peut survenir à tout âge, les jeunes et les jeunes adultes sont plus susceptibles d’en être victimes. Ce sont généralement des jeunes femmes qui font un signalement à la policeNote de bas de page 507. Pour être efficaces, les programmes qui ciblent les jeunes à risque doivent aborder toute une gramme d’expériences individuelles et tenir compte de facteurs tels que le genre, la culture et l’orientation sexuelle. Le Youth Relationships Project et le programme RESOLVE Alberta, par exemple, ont connu un certain succès dans la lutte contre la violence relationnelle en mettant l’accent sur les enjeux qui sont influencés par les rôles fondés sur le genreNote de bas de page 508-Note de bas de page 510. Les collectivités et les écoles jouent également un rôle important en mettant en place des interventions qui visent à aider les jeunes à établir des relations saines, y compris sur le plan sexuel, ou en donnant une plus large portée aux mesures existantes. Les programmes scolaires comme VIRAJ et PASSAJ offrent à tous les élèves québécois des programmes généraux fondés sur le genre (voir l’encadré intitulé « Lutte contre la violence chez les jeunes »)Note de bas de page 511.
VIRAJ, un programme de prévention de la violence dans les relations amoureuses chez les jeunes (Québec)
Le programme VIRAJ a été mis sur pied dans le but de prévenir la violence dans les fréquentations et de promouvoir des relations égalitaires entre les jeunes québécois de 14 et 15 ans. Le programme VIRAJ comprend deux séances de discussion de 75 minutes au sujet des comportements violents dans les relations amoureuses. Au cours de ces séances, les situations sont illustrées par des exemples et l’accent est mis sur les droits des partenairesNote de bas de page 511-Note de bas de page 513. Traditionnellement, les victimes sont des filles, et les agresseurs, des garçons, mais le programme montre également que l’inverse se produitNote de bas de page 511-Note de bas de page 514. Le programme VIRAJ est offert depuis 1994, et les évaluations ont montré qu’il permettait d’améliorer les connaissances au sujet de la violence dans les fréquentations à court terme (un mois) et à moyen terme (quatre mois)Note de bas de page 188, Note de bas de page 511, Note de bas de page 515. À l’issue des séances, les participants, et en particulier les adolescentes, percevaient différemment la violence dans les relations amoureusesNote de bas de page 515. S’inspirant du succès remporté par le programme VIRAJ, le programme PASSAJ a été mis sur pied à l’intention des jeunes de 16 et 17 ansNote de bas de page 511. Reprenant essentiellement les mêmes composantes et activités que celles du programme VIRAJ, il porte sur la violence et l’abus de pouvoir dans les relations amoureuses; il comporte également un volet sur le harcèlement sexuel en milieu de travail et en milieu scolaireNote de bas de page 511, Note de bas de page 516.
Outrage (Terre‑Neuve–et–Labrador)
En 2006, le gouvernement de Terre‑Neuve–et–Labrador a mis sur pied une initiative de prévention de la violence, étalée sur six ans, pour lutter contre la violence faite aux personnes les plus à risque — les femmes, les enfants, les jeunes, les aînés, les personnes ayant une déficience, les femmes et les enfants autochtones ainsi que les adultes jugés vulnérables en raison de leur origine ethnique, de leur orientation sexuelle ou de leur situation économiqueNote de bas de page 517, Note de bas de page 518. Dans le cadre de cette initiative, une campagne de prévention de la violence chez les jeunes a été lancée en 2006, sous le nom de OutrageNL. Élaborée grâce à la participation de jeunes de 13 à 18 ans, cette campagne de marketing social utilise divers médias comme des affiches, des sites Web et des publicités télévisées, l’une mettant en scène une jeune femme et l’autre, un jeune homme, qui sont tous deux victimes de violence. Le site Web www.outrageNL.ca offre de l’information utile aux personnes de nature violente. Il offre également des renseignements sur la façon de reconnaître la violence et de prendre des mesures pour la combattreNote de bas de page 519, Note de bas de page 520.
La capacité de reconnaître et de changer une relation malsaine, en particulier si elle se vit sous la menace d’une forme quelconque de violence, constitue un élément important pour établir une relation saine. Pour avoir des relations saines, il peut aussi être nécessaire de remettre en question certains stéréotypes nuisibles fondés sur le genre et de partager le pouvoir dans les relations intimesNote de bas de page 521, Note de bas de page 522. Par exemple, dans le cadre des relations hétérosexuelles, le stéréotype veut que les femmes soient responsables de la contraceptionNote de bas de page 253. L’imposition d’un pouvoir inéquitable et injuste dans les relations peut avoir une incidence directe sur les décisions en matière de contraception (par exemple, le refus d’utiliser un condom)Note de bas de page 522. Les stéréotypes fondés sur le genre et le déséquilibre des pouvoirs peuvent également contribuer à la violence dans les relations. Les interventions qui parviennent, dans une certaine mesure, à prévenir la violence dans les relations intimes sont celles qui fournissent des outils pour assurer la sécurité des victimes et des victimes potentielles et qui abordent la violence dans un contexte plus vaste d’égalité, de droits et de responsabilités (voir l’encadré intitulé « Pour des relations saines — Men for Change »)Note de bas de page 523, Note de bas de page 524. Les relations saines qui tiennent compte des préoccupations des minorités sexuelles et de genre peuvent également remettre en question la compréhension hétéronormative des relations (c’est-à-dire le fait de considérer l’hétérosexualité comme étant l’orientation sexuelle normale ou à privilégier) et offrir la possibilité d’aborder, dans le cadre de l’éducation sexuelle, les relations saines chez les jeunes et les adultes appartenant à une minorité sexuelle ou de genreNote de bas de page 525.
Il y a plus de 18 ans, Men for Change, un groupe communautaire établi à Halifax (Nouvelle-Écosse), a conçu le programme Pour des relations saines afin de promouvoir l’égalité des sexes et de mettre fin à la violence en améliorant les connaissances et les compétences et en favorisant une évolution des mentalités. Men for Change a été créé à la suite du massacre de 14 étudiantes en génie à l’École Polytechnique de Montréal en 1989. Le programme Pour des relations saines fournit du soutien aux jeunes de la 7e à la 9e année au moment où ils apprennent à établir et à maintenir de saines relationsNote de bas de page 526. Cette approche se divise en trois volets : la lutte contre les agressions; l’égalité entre les sexes et la sensibilisation aux médias; l’établissement de relations saines. Le programme destiné aux élèves de la 7e année traite des agressions, du stress, de la déception, du rejet et de l’acquisition de compétences en communication et en gestion des conflits. Le programme s’adressant aux élèves de la 8e année s’attaque aux stéréotypes fondés sur le genre, évoque la pression des pairs et la violence et remet en question les messages négatifs véhiculés par les médias populaires. Le programme de 9e année traite expressément des relations saines. Il est axé sur les compétences en communication et souligne l’importance de l’équitéNote de bas de page 526, Note de bas de page 527. Les participants ont eux-mêmes rapporté une diminution marquée des cas de violence physique et des comportements passifs-agressifs ainsi qu’une réduction du nombre d’incidents chez les filles pendant la deuxième année du programme et chez les garçons pendant la troisième annéeNote de bas de page 526, Note de bas de page 528. Par ailleurs, les élèves du programme se disent plus sensibilisés à la violence physique et psychologique et ont changé significativement leur attitude par rapport aux mauvais traitements et à la violence dans les fréquentations. Les garçons aussi bien que les filles manifestent une plus grande intolérance à la violenceNote de bas de page 526, Note de bas de page 528. Les participants au programme sont aussi moins portés à considérer la violence à la télévision comme étant réelle et sont plus conscientisés aux stéréotypes fondés sur le genre et à l’influence des publicités télévisées. De plus, les jeunes hommes ont déclaré qu’ils étaient mieux en mesure de reconnaître les stéréotypes fondés sur le genre et qu’ils avaient modifié leur comportement en conséquenceNote de bas de page 526, Note de bas de page 528. Ce programme est désormais utilisé par les écoles, les refuges pour femmes, les bureaux d’aide sociale, les organismes de santé et les centres de consultation partout au Canada et aux États‑UnisNote de bas de page 529.
De façon générale, les femmes sont plus souvent victimes de violence conjugale que les hommes, et les taux sont plus élevés dans certains groupes de population, y compris chez les femmes autochtonesNote de bas de page 530. Les expériences intergénérationnelles, la pauvreté, la toxicomanie, la perte de l’identité culturelle et les mauvaises compétences relationnelles sont autant de facteurs qui peuvent mener à des relations violentesNote de bas de page 531-Note de bas de page 533. Le manque de sensibilisation, l’emplacement géographique, la méconnaissance ou l’inefficacité perçue d’un programme et la complexité des relations entre la victime, l’agresseur, la famille et les membres de la collectivité peuvent nuire à l’accès aux services et aux soinsNote de bas de page 531, Note de bas de page 532.
Les personnes qui ont affirmé être gaies ou lesbiennes étaient au moins deux fois plus nombreuses que les hétérosexuels à déclarer avoir été victimes de violence conjugale, alors que les répondants qui se disaient bisexuels étaient quatre fois plus nombreux que les hétérosexuels à faire état de violence conjugaleNote de bas de page 534. Près des trois quarts des victimes de violence dans le cadre d’une relation homosexuelle étaient des hommes gaisNote de bas de page 535. Cependant, les réseaux de soutien pour les hommes et les femmes homosexuels qui sont victimes de violence conjugale peuvent être limités en raison de la stigmatisation sociale et de l’isolementNote de bas de page 536.
Pour s’attaquer au problème de violence conjugale, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a lancé un plan d’action, le NWT Action Plan on Family Violence 2003-2008, afin de sensibiliser les gens à la violence familiale, en particulier envers les femmes et les enfants des Territoires du Nord-OuestNote de bas de page 537. Le plan s’est poursuivi pour une deuxième phase, le NWT Family Violence Action Plan: Phase II (2007-2012), qui comprend des travaux de recherche mais aussi l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme pilote destiné aux hommes qui font usage de violence dans leurs relationsNote de bas de page 537, Note de bas de page 538. Même si le plan n’a pas encore fait l’objet d’une évaluation officielle, les améliorations observées au point de vue de la sensibilisation et de la collaboration intersectorielle représentent une étape importante vers l’atteinte des objectifs prévusNote de bas de page 538.
Communiquer : sexualisation et relations saines
La façon dont la sexualité est représentée et décrite peut influencer la perception qu’on se fait des relations avec les autres. Les médias de la culture populaire, tels que la télévision, le cinéma, les vidéoclips et les paroles de chanson, les jeux vidéo et les revues, exposent les jeunes à des images et des représentations irréalistes du corps. La sexualisation des hommes et des femmes a augmenté de façon importante au cours des dernières décennies, en particulier depuis l’arrivée d’InternetNote de bas de page 539-Note de bas de page 543. Et ces messages s’imposent en bas âge : les enfants et les adolescents sont mis en présence de thèmes sexualisés et se sentent pressés de ressembler à des adultes et d’agir comme tels. Par exemple, les vêtements, les jeux vidéo, les poupées et les figurines montrent des images corporelles irréalistes et sexualiséesNote de bas de page 539-Note de bas de page 541, Note de bas de page 543.
Selon l’American Psychological Association Task Force on the Sexualization of Girls, il y a sexualisation des hommes, des femmes, des garçons et des filles lorsque :
- la valeur d’une personne est uniquement basée sur son attrait ou son comportement sexuel, en excluant toute autre caractéristique;
- la personne ne peut se défaire de l’idée que ce qui est séduisant est nécessairement attirant sexuellement;
- la personne apparaît comme un objet sexuel (c’est-à-dire une chose à utiliser à des fins sexuelles) et non comme un être capable de faire des choix et d’agir de façon indépendante;
- la sexualité est imposée à une personne de manière inappropriéeNote de bas de page 539.
Les garçons et les filles sont constamment exposés à des images sexualisées de jeunes hommes et, plus souvent, de jeunes femmes, que ce soit dans Internet, à la télévision, à la radio ou dans les médias imprimésNote de bas de page 539-Note de bas de page 542, Note de bas de page 544. Les filles et les jeunes femmes peuvent alors s’imaginer que ces images leur confèrent du pouvoir. Par conséquent, la représentation de la femme-objet peut les inciter à mettre en valeur leurs attraits sexuels au détriment de leurs autres qualités ou activitésNote de bas de page 540, Note de bas de page 541, Note de bas de page 543, Note de bas de page 545. De nombreuses études ont démontré que la sexualisation renforce le statut d’infériorité chez la femme et conduit les filles et les femmes à éprouver des sentiments d’insatisfactionNote de bas de page 539-Note de bas de page 541, Note de bas de page 545. Les filles qui sont exposées à maintes reprises à des représentations culturelles trop sexualisées peuvent se sentir moins en confiance et moins à l’aise avec leur corps et développer des problèmes liés à leur image corporelle et à leur image de soi, comme la gêne, la honte et l’anxiétéNote de bas de page 540, Note de bas de page 541. En outre, une exposition répétée à des images irréalistes de jeunes hommes à la silhouette en V, présentant de larges épaules, une taille fine, des bras puissants et une poitrine musclée, peut entacher l’image de soi des jeunes garçons et nuire à leur développement physiqueNote de bas de page 541, Note de bas de page 544.
La sexualisation des hommes et des femmes peut nuire au développement cognitif et émotionnel et compromettre la santé mentale et physique en favorisant l’apparition de troubles de l’alimentation, en réduisant l’estime de soi et en conduisant à la dépressionNote de bas de page 539, Note de bas de page 540, Note de bas de page 543, Note de bas de page 545. Elle peut également avoir une incidence plus grande sur les relations interpersonnelles. Cette vision réductionniste de la beauté masculine et féminine, combinée à d’autres facteurs sociaux, peut exacerber les expériences personnelles et sociales de sexisme, de harcèlement sexuel et de violence sexuelleNote de bas de page 540, Note de bas de page 544.
Les gens peuvent apprendre à reconnaître, à remettre en question et, au bout du compte, à modifier les effets négatifs que perpétuent les représentations sexualisées et stéréotypées. Les États-Unis ont mis sur pied un groupe de travail, le National Task Force on Girls and Women in the Media, chargé d’établir une série de mesures et d’objectifs pour promouvoir des images positives et saines de filles et de femmes dans les médias, et ce, dans les buts suivants :
- soutenir l’éducation, en fonction de l’âge, sur les effets négatifs de la sexualisation des jeunes filles, des adolescentes et des adultes;
- encourager la présence d’images saines, équilibrées et positives de filles et de femmes dans les médias;
- améliorer l’estime de soi et la confiance des jeunes filles de sorte qu’elles soient à même d’ignorer les messages qui les sexualisent et qui les présentent comme des objetsNote de bas de page 546, Note de bas de page 547.
Ces mesures de contrôle adoptées aux États-Unis pourraient être bénéfiques au Canada, puisque la télévision américaine est accessible dans beaucoup de foyers canadiens. Il existe de vastes programmes qui s’efforcent de limiter l’exposition des jeunes à certains contenus (y compris les publicités) qui sont diffusés à la radio et à la télévision et sont régis par des codes d’éthique et de conduite rigoureux. Le Conseil canadien des normes de la radiotélévision exige que les diffuseurs canadiens soient attentifs aux stéréotypes sur les rôles sexuels, qu’ils évitent l’exploitation sexuelle et reflètent l’égalité intellectuelle et émotionnelle des deux sexesNote de bas de page 548-Note de bas de page 550. Au Québec, les règlements interdisent aux chaînes de télévision francophone de diffuser des messages publicitaires s’adressant aux enfants de moins de 13 ansNote de bas de page 551. Cependant, ils n’ont aucun effet sur les transmissions extérieures à la province. Il est ainsi difficile d’évaluer l’efficacité des mesures de contrôle, même les plus strictes, dans la mesure où ces influences peuvent provenir de l’extérieur de la province ou du pays.
S’attaquer aux stéréotypes liés à la santé sexuelle et fondés sur le sexe et le genre
Dans le discours sexuel, c’est-à-dire le langage utilisé pour parler de santé sexuelle, il est rarement question du plaisir sexuel et de la reproductionNote de bas de page 552. Les femmes, en particulier, apprennent à réagir aux conséquences potentiellement négatives de la sexualité (comme une ITS ou une grossesse imprévue). Par conséquent, au lieu de mettre l’accent sur le plaisir et les aspects positifs des rapports sexuels, les interventions en santé publique cherchent plutôt des façons d’améliorer les techniques de négociation de manière à éviter les mauvaises expériences sexuelles ou les conséquences non désiréesNote de bas de page 552. Le discours sexuel et l’éducation sur la santé sexuelle se concentrent surtout sur les relations hétérosexuellesNote de bas de page 552. Lorsqu’on aborde les relations non hétérosexuelles, on cible presque exclusivement des couples gais et on présente généralement le caractère pathologique de la relation ou son lien avec la propagation des ITS et du VIHNote de bas de page 552.
Diverses interventions ont été conçues dans le but de prévenir les conséquences négatives de l’intimité sexuelle, et bon nombre d’entre elles s’adressent aux jeunes. Bien que ces programmes connaissent un succès mitigé, plusieurs semblent prometteurs.
- Les programmes d’éducation en milieu scolaire qui abordent la grossesse à l’adolescence et la prévention des ITS ont été efficacesNote de bas de page 553. Les programmes les plus susceptibles de modifier favorablement les comportements sont ceux qui portent à la fois sur les risques inhérents à la sexualité, les facteurs de protection et d’autres facteurs non sexuelsNote de bas de page 553. Les évaluations indiquent que les adolescents qui ont reçu une éducation sexuelle approfondie courent moins de risques de contracter une ITS ou de vivre une grossesse imprévue. Ils ont également tendance à repousser leurs premières relations sexuelles, comparativement à ceux qui ont eu droit à une éducation axée uniquement sur l’abstinence ou qui n’ont reçu aucune éducation sexuelleNote de bas de page 553, Note de bas de page 554.
- Des programmes d’éducation permettent aux parents et aux membres de la communauté qui sont proches des jeunes d’acquérir de nouvelles compétences et connaissances en matière de santé sexuelle et de les transmettre à leur tour aux jeunes de la collectivitéNote de bas de page 553, Note de bas de page 555.
- Les programmes qui donnent aux jeunes un accès aux services de santé adaptés à la diversité (lieu de résidence, âge, genre, orientation sexuelle et culture) sont plus efficaces.
- Les programmes qui incluent les adolescents et les jeunes hommes dans les initiatives de santé sexuelle et qui favorisent la discussion ouverte sur le sujet fonctionnent bienNote de bas de page 556, Note de bas de page 557. Trop souvent, les programmes de prévention n’abordent pas l’éducation sexuelle des garçons et ne tiennent pas compte de leurs connaissances à l’égard de la contraception et de la négociation. Cette question est d’autant plus cruciale que, traditionnellement, il était plus difficile pour les jeunes femmes de négocier des relations sexuelles sans risque, et ce, même si elles en connaissaient les conséquencesNote de bas de page 556-Note de bas de page 558.
- Les programmes qui améliorent les perspectives de vie des jeunes (en les aidant à contrer l’ennui et en appuyant leurs perspectives d’avenir) peuvent contribuer à réduire les comportements sexuels à risqueNote de bas de page 558, Note de bas de page 559.
- La santé sexuelle est une partie importante de la vie, et les programmes de santé sexuelle peuvent profiter aux personnes de tout âge. Les programmes communautaires qui offrent du soutien, de la formation et du matériel didactique aux parents et aux adultes qui travaillent auprès des jeunes peuvent être efficacesNote de bas de page 559. L’éducation sexuelle approfondie peut également générer de bons résultats lorsqu’elle est combinée à d’autres programmes qui donnent accès à des services cliniques, des services de consultation et des services sociaux à tous les membres de la collectivité, peu importe leur âgeNote de bas de page 559.
Pour être efficaces, les programmes de prévention doivent tenir compte de différentes opinions et perceptions. C’est pourquoi il faudrait mener de plus amples recherches afin de mieux comprendre les perceptions et les expériences des jeunes femmes concernant les grossesses précoces, les habitudes de contraception et l’accès aux servicesNote de bas de page 560. Par ailleurs, il existe très peu d’information sur les jeunes hommes et les perceptions qu’ils ont des femmes, de la grossesse et de leur rôle au sein de la famille. De nouveaux programmes de prévention destinés aux hommes pourraient aider à améliorer les compétences, le niveau de compréhension et les relations personnellesNote de bas de page 558.
Les campagnes qui portent sur la santé sexuelle tendent à cibler les jeunes, mais aucun programme ni aucune stratégie ne s’adresse aux aînés de telle sorte que leur sexualité tend à sombrer dans le gouffre culturel et générationnelNote de bas de page 180, Note de bas de page 182, Note de bas de page 561-Note de bas de page 563. Les perceptions négatives entourant la sexualité des adultes plus âgés persistent, tout comme le risque de mal connaître le sujet ou de l’aborder de façon inadéquate. Même si le taux d’ITS (et de VIH/sida) augmente chez les groupes plus âgés, les mesures de prévention conçues expressément pour eux se font raresNote de bas de page 180-Note de bas de page 182, Note de bas de page 562-Note de bas de page 565. Les baby-boomers veufs ou divorcés entreprennent de nouvelles relations sans nécessairement avoir acquis les plus récentes connaissances relatives à la santé sexuelleNote de bas de page 182, Note de bas de page 183, Note de bas de page 561, Note de bas de page 562. La stigmatisation, la gêne et la discrimination peuvent être des obstacles supplémentaires qui empêchent des personnes plus âgées (en particulier les femmes) de discuter de santé sexuelle avec leur professionnel de la santéNote de bas de page 180, Note de bas de page 182, Note de bas de page 183, Note de bas de page 562. Selon une étude américaine, la majorité des femmes sont d’avis que les médecins devraient interroger leurs patients plus âgés sur leur vie sexuelle, mais près de la moitié d’entre elles n’avaient jamais parlé de sexualité avec leur médecin et encore moins de dépistage du VIH ou d’une ITSNote de bas de page 180, Note de bas de page 181, Note de bas de page 183. Les médecins généralistes ont affirmé être réticents à parler de sexualité et d’ITS avec leurs patients plus âgés (en particulier avec les femmes), et les fournisseurs de soins ont soulevé les mêmes préoccupationsNote de bas de page 181-Note de bas de page 183, Note de bas de page 562, Note de bas de page 564, Note de bas de page 565. Même les chercheurs ignorent souvent ce segment de la population (par exemple, les aînés ne sont généralement pas inclus dans les essais cliniques sur la réduction des risques d’ITS)Note de bas de page 564, Note de bas de page 565.
Les campagnes de marketing social peuvent aider à changer l’image négative entourant la santé sexuelle, l’âge et le genreNote de bas de page 566. Seniors a GOGO est un exemple de programme canadien qui favorise la sensibilisation et aide à combattre les stéréotypes liés à l’âge, au genre, à la diversité et à la sexualité (voir l’encadré intitulé « Sensibilisation à l’âge, au genre et à la santé sexuelle »). Les progrès ont conduit à la mise en place d’une formation de sensibilisation à la sexualité et à l’âge à l’intention des professionnels de la santé de l’AlbertaNote de bas de page 567.
En 2007, le Calgary Sexual Health Centre (Alberta), le Seniors Action Group (Calgary, Alberta) et le Foundation Lab (Calgary, Alberta) se sont associés pour former Seniors a GOGO, un programme qui favorise la sensibilisation à la sexualité des adultes de plus de 50 ans et met l’accent sur l’incidence croissante des ITS et du VIHNote de bas de page 563, Note de bas de page 565, Note de bas de page 567-Note de bas de page 569. Les premières évaluations ont révélé que les stratégies d’éducation et de prévention ne suffisaient pas à réduire les ITS et que le programme devait porter son attention sur les comportements par rapport à la sexualité, la culture ainsi que les pratiques générationnelles et traditionnelles qui font obstacle à l’adoption de saines pratiques sexuellesNote de bas de page 563, Note de bas de page 565, Note de bas de page 567. En conséquence, Seniors a GOGO a été modifié de manière à étudier les différentes conceptions de la santé sexuelle selon les générations et les expériences vécues par les personnes âgées au cours de leur vie. Le programme encourage une saine sexualité en insistant sur le fait qu’il n’y a pas de limite d’âge pour avoir des rapports sexuelsNote de bas de page 563, Note de bas de page 567. Dans le cadre d’une série de monologues, des personnes âgées invitent le public à échanger sur le vieillissement et la sexualité d’hommes et de femmes qui, peu importe leur âge, leur genre et leur orientation sexuelle, éprouvent le besoin d’être aimés, appréciés, admirés et d’entretenir des relations intimes et sainesNote de bas de page 565, Note de bas de page 569-Note de bas de page 573.
Misant sur le succès de Seniors a GOGO, le Calgary Sexual Health Centre a conçu des programmes de formation professionnelle en collaboration avec l’Université de Calgary (Alberta), l’Université Mount Royal (Calgary, Alberta) et plusieurs organismes à but non lucratif (tels que les centres de services familiaux et les établissements de soins de longue durée)Note de bas de page 567. Ces programmes de formation encouragent les étudiants en soins infirmiers et d’autres fournisseurs de soins à intégrer la question de la sexualité dans leur travail avec les aînés. On s’est servi du succès de ce programme pour offrir des programmes semblables en Colombie‑Britannique, en Saskatchewan et en Nouvelle‑ÉcosseNote de bas de page 567.
Les concepts traditionnels fondés sur le genre sont axés sur la « performance » ou sur le « manque d’intérêt », en se basant sur les hypothèses liées à une « fonction » et au but que celle-ci doit permettre d’atteindreNote de bas de page 182. Les discussions concernant la santé sexuelle des hommes plus âgés sont souvent axées sur l’amélioration de la performanceNote de bas de page 182. La mise en marché et la commercialisation de médicaments contre la dysfonction érectile (comme le sildénafil) ont attiré l’attention sur la sexualité des aînés et sur l’importance de la performance, de la réceptivité et de la capacité sexuelles. Les études sur les médicaments visant à améliorer la performance sexuelle semblent perpétuer les stéréotypes concernant la sexualité féminineNote de bas de page 182, Note de bas de page 574. Par exemple, on présente souvent les aspects négatifs de la santé sexuelle des femmes, comme la faible libido, les maladies chroniques et la violence sexuelleNote de bas de page 182. Des études suggèrent d’ailleurs que la prévalence de la dysfonction sexuelle chez la femme pourrait être surestimée, étant donné que les mesures de diagnostic utilisées sont les mêmes pour les deux sexesNote de bas de page 574. Il serait donc important de favoriser les approches qui tiennent compte du genre si on veut aborder les problèmes de santé (comme la dysfonction sexuelle) dans le contexte du vaste éventail déterminants de la santéNote de bas de page 574. Même s’il apparaît évident que ces questions doivent être élucidées, rares sont les interventions qui portent à la fois sur la saine sexualité, le bien-être et le vieillissement.
Recourir à une éducation approfondie sur la santé sexuelle
Une éducation approfondie sur la santé sexuelle permet d’accroître les connaissances, la compréhension, la connaissance de soi, la motivation et les habiletés nécessaires à une bonne santé sexuelleNote de bas de page 559, Note de bas de page 575. Pour être efficace, l’éducation sur la santé sexuelle doit prendre en considération les expériences vécues en fonction du genreNote de bas de page 559. L’éducation et les services qui diffusent des messages positifs sur la santé sexuelle allant au-delà du cadre hétéronormatif sont plus susceptibles de toucher un large public sans stigmatiser les sous-populations vulnérables aux résultats négatifs en matière de santé sexuelle.
L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) recommande que l’éducation sur la santé sexuelle soit abordée dès l’enfance et qu’elle se poursuive tout au long de l’adolescence. Le guide scientifique en deux volumes publié en 2009, International Technical Guidance on Sexuality Education: An Evidence-Informed Approach for Schools, Teachers, and Health Educators, explique de façon détaillée les raisons de fournir une éducation approfondie sur la santé sexuelle, détermine les caractéristiques des programmes efficaces de santé sexuelle, fondées sur des données probantes, et décrit comment intégrer les principaux sujets liés à l’éducation sexuelle ainsi que les objectifs d’apprentissage aux programmes conçus pour les enfants et les jeunesNote de bas de page 576, Note de bas de page 577. Ce guide scientifique reconnaît la diversité de la population en prenant en considération les minorités sexuelles et de genre. Il souligne également l’importance des interventions comportementales pour la promotion d’une santé sexuelle positive et rappelle la nécessité de mener une action concertée auprès des citoyens, des groupes et des collectivitésNote de bas de page 576, Note de bas de page 577.
Selon les Lignes directrices canadiennes pour l’éducation en matière de santé sexuelle, les programmes d’éducation sont plus efficaces s’ils s’adressent à un vaste public, puisqu’ils permettent à la fois d’apporter des améliorations concrètes (en favorisant, par exemple, le respect de soi et d’autrui, l’estime de soi, les relations sexuelles sans exploitation et la prise de décisions éclairées en matière de procréation) et d’éviter les conséquences négatives (comme les ITS, le VIH ou la coercition sexuelle)Note de bas de page 559. Par contre, en milieu scolaire, les programmes d’éducation sur la santé sexuelle conçus en fonction du groupe d’âge constituent une stratégie de santé publique efficace et rentable qui contribue à réduire, à long terme, les risques de grossesses imprévues, de VIH/sida et d’autres ITSNote de bas de page 578. Cependant, des obstacles continuent de compromettre l’efficacité des programmes d’éducation sur la santé sexuelle. Parmi eux, les problèmes d’ordre structurel, comme le temps consacré à l’enseignement, l’accessibilité du matériel pédagogique et l’indisposition des élèves, des enseignants, des familles et de la collectivitéNote de bas de page 575. Les questions liées au genre, à l’orientation sexuelle et à la culture représentent des obstacles additionnelsNote de bas de page 575. En effet, les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et en questionnement (LGBTQ) qui ont participé au Toronto Teen Survey ont indiqué, par exemple, que les principaux sujets qui les concernent étaient absents des cours d’éducation sur la santé sexuelleNote de bas de page 318, Note de bas de page 579. Les travaux de recherche qui portent sur les besoins des minorités sexuelles confirment pourtant la complexité de leur identité, de leurs comportements et de leurs attirances. Ils montrent aussi que leur sexualité est complexe, diversifiée et hétérogèneNote de bas de page 580, Note de bas de page 581.
Les travaux de recherche et les interventions qui s’intéressent aux adolescents appartenant à une minorité sexuelle ou de genre sont très limités comparativement aux approches hétéronormatives à la sexualité. D’autres efforts devraient être déployés afin de mettre au point des méthodes fiables et objectives qui permettraient de conceptualiser et d’évaluer l’orientation sexuelle et l’identité de genre dès les premières étapes du développement humain et de les aborder comme des notions complexes et hétérogènes sur les plans biologique, physiologique, psychologique, social et culturel (voir l’encadré intitulé « Abattre les obstacles : les jeunes minorités sexuelles et l’éducation »)Note de bas de page 582-Note de bas de page 585.
Abattre les obstacles : les jeunes minorités sexuelles et l’éducation
Programme éducatif de l’Australie : Pride & Prejudice
Le programme éducatif de l’Australie Pride & Prejudice, élaboré par la région sanitaire de Victoria, se présente sous la forme d’une trousse éducative appropriée et adaptable aux écoles secondairesNote de bas de page 586, Note de bas de page 587. Les enseignants se disaient préoccupés par l’homophobie et la stigmatisation associées à la diversité sexuelle. Même s’ils comprenaient la position des élèves des minorités sexuelles, leur formation n’était pas suffisante pour les guider adéquatementNote de bas de page 586, Note de bas de page 587. Le programme forme le personnel des écoles et offre des activités en classe qui favorisent la négociation et l’ouverture à la diversité sexuelle dans le cadre de l’enseignement au quotidienNote de bas de page 586, Note de bas de page 587. Des évaluations ont montré qu’après six semaines l’attitude des élèves envers les minorités sexuelles s’était améliorée, en particulier chez les garçons, qui, comparativement aux filles, avaient des attitudes moins positives avant de participer au programmeNote de bas de page 586, Note de bas de page 587. Les faits anecdotiques laissent entendre que le programme a également favorisé la discussion ouverte, la tolérance et le sens de l’engagement du personnelNote de bas de page 586, Note de bas de page 587.
Programme CampOUT! de la Colombie-Britannique
CampOUT! est un programme d’intervention pour les LGBTQ de 14 à 21 ans de la Colombie‑Britannique. Il s’agit d’un programme social, éducatif et de santé conçu pour améliorer la santé et réduire le risque de contracter le VIHNote de bas de page 588-Note de bas de page 591. Ce programme permet d’offrir aux jeunes des minorités sexuelles la chance de participer à une expérience de camping unique faisant appel à des approches sociales et éducatives susceptibles de les aider, eux et leurs pairs hétérosexuels, à garder la santé. CampOUT! fait la promotion de normes sociales sans restriction afin d’assurer aux jeunes une vie saine et épanouie, pendant et après leur expérience au campNote de bas de page 588-Note de bas de page 591. On leur transmet des compétences en leadership afin d’accroître le potentiel de chacun et de susciter un changement social par rapport à l’homophobie et à l’hétérosexisme. Pour assurer cette cohésion et cette transformation de la société, il est demandé aux participants, aux dirigeants et aux commanditaires de s’engager à lutter contre la stigmatisation liée à la sexualité des jeunesNote de bas de page 592. CampOUT! semble être une initiative prometteuse pour s’attaquer aux normes sociales et provoquer des changements institutionnels et structurels propres à contrer l’homophobie et l’hétérosexismeNote de bas de page 589.
S’attaquer aux risques pour la santé sexuelle
La lutte contre les ITS requiert une approche à volets multiples. En effet, l’examen systématique des programmes de prévention des infections d’ITS et du VIH a mis en lumière quatre façons de réduire les comportements sexuels à risque :
- cibler les comportements qu’il est possible d’adopter ou de modifier, puisque de telles interventions contribuent à réduire, à court et à long terme, les comportements sexuels à risque ainsi que les taux d’ITS et de VIHNote de bas de page 593, Note de bas de page 594;
- adapter les programmes aux populations en fonction de leur diversité ethnique et culturelle, leur âge, leur niveau de développement, leurs risques comportementaux, leur orientation sexuelle et leur identité de genreNote de bas de page 593, Note de bas de page 594;
- adapter les théories cognitives et de l’apprentissage qui misent sur la sensibilisation, l’autoefficacité et le renforcement des aptitudes personnelles afin d’aider les jeunes à faire des choix responsables, à acquérir de nouvelles compétences et à mieux communiquer avec leurs partenaires de sorte qu’ils soient en mesure d’exprimer clairement leur intention d’adopter des pratiques sexuelles sécuritairesNote de bas de page 594;
- aborder des questions autres que les risques associés à la sexualité, notamment le vaste éventail de déterminants de la santéNote de bas de page 594.
Les interventions qui s’adressent à l’ensemble de la population et les campagnes de marketing social font partie intégrante d’une approche axée sur la santé de la population, mais elles ne s’attaquent pas précisément aux questions associées au sexe et au genreNote de bas de page 595. Bien sûr, la plupart des adultes canadiens ont été exposés à des campagnes de prévention pour une sexualité sécuritaire. Cependant, les programmes comme « no glove, no love », bien qu’ils soient mémorables, sont considérés comme normatifs dans la mesure où leur message est trop loin de la réalité et de ce qui conduit aux comportements sexuels à risqueNote de bas de page 595. Les examens systématiques montrent que, même si les messages de ce genre s’inscrivent dans la mémoire populaire, dans les faits, leur influence sur les comportements (c’est-à‑dire la pratique d’une sexualité sécuritaire) reste limitéeNote de bas de page 596. Bien que ces programmes aident à établir des normes sociales générales, ils n’atteignent pas toujours les personnes aux prises avec des contraintes pouvant nuire à la pratique d’une sexualité sécuritaire, y compris les LGBTQ, les personnes dont la culture décourage l’activité sexuelle et les personnes qui vivent une relation marquée par la violence, l’agressivité ou le déséquilibre des pouvoirsNote de bas de page 313. Les interventions ciblées seraient probablement plus efficaces si elles se consacraient à modifier les comportements tout en éliminant les obstacles situationnels ou fondés sur le genreNote de bas de page 595.
L’adoption de comportements sexuels plus sécuritaires peut aussi dépendre de l’accès aux soins et de la capacité à aborder le sujet avec un professionnel de la santé. L’ACFSG a montré que l’accès aux soins de santé sexuelle pouvait différer selon le sexe et pouvait également dépendre de facteurs tels que l’orientation sexuelle et la cultureNote de bas de page 313. Chez les hommes, ces obstacles peuvent être le fait d’une inquiétude par rapport à leur virilité ou de la crainte que suscitent le prélèvement d’échantillons et les examens médicauxNote de bas de page 313, Note de bas de page 317. Chez les hommes et les femmes, et en particulier chez les jeunes, les minorités sexuelles et les personnes vivant dans une petite collectivité, les principaux obstacles à l’accès aux soins étaient la crainte du non-respect de la confidentialité, les heures d’ouverture des cliniques, l’homophobie et les pratiques hétéronormativesNote de bas de page 313. Les mesures de prévention du VIH/sida ont fait la preuve que l’intégration du sexe et du genre peut améliorer les politiques et les programmes de santé publique en s’intéressant à tous les groupes de la population et non seulement à ceux considérés comme à risqueNote de bas de page 217. Depuis la découverte des premiers cas de VIH, les investissements dans la prévention, la gestion et les soins destinés aux populations à risque (par exemple, les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes et les utilisateurs de drogues injectables) ont permis, dans une certaine mesure, de réduire les taux d’infectionNote de bas de page 217. Cependant, les tendances en matière d’infection indiquent que certains segments de la population (par exemple, les femmes) représentent une proportion croissante des Canadiens déclarés positifs au VIHNote de bas de page 175, Note de bas de page 176, Note de bas de page 217. La prise en considération du sexe, du genre et d’autres variables telles que l’âge, l’origine ethnique, les facteurs socioéconomiques et les facteurs de risque (les contacts hétérosexuels et les drogues injectables) a joué un rôle particulièrement important dans la compréhension des nouveaux cas d’infectionNote de bas de page 175, Note de bas de page 597. Ainsi, l’ACFSG permet de mieux comprendre en quoi les responsabilités et les rôles fondés sur le genre peuvent avoir une incidence sur la portée des programmes, des services et des mesures de prévention du VIH/sidaNote de bas de page 598.
D’autres obstacles peuvent empêcher certains groupes de la population d’accéder à des services de santé sexuelle. Les répondants LGBTQ au Toronto Teen Survey ont déclaré avoir de la difficulté à avoir accès à des services de santé sexuelleNote de bas de page 318, Note de bas de page 579. Les adultes LGBTQ préfèrent ne pas discuter de leurs pratiques sexuelles avec leur médecin ou leur professionnel de la santé, souvent par crainte que le lien de confiance soit brisé ou que leur médecin ne les accepte plus comme patients, surtout dans les régions où les services sont limitésNote de bas de page 321, Note de bas de page 599-Note de bas de page 602. L’organisation de campagnes ciblées et l’ouverture de nouveaux points de service pourraient faire partie de la solutionNote de bas de page 318. Par ailleurs, il serait important que les professionnels de la santé soient mieux renseignés sur les inégalités et les problèmes de santé qui se posent aux minorités sexuelles et de genre en raison de facteurs sociaux (comme la famille, l’école, la violence de rue) ou de facteurs médicaux (par exemple, les connaissances limitées des jeunes en matière d’ITS et la possible méconnaissance, partialité, homophobie ou transphobie des professionnels de la santé)Note de bas de page 603-Note de bas de page 606. Certains programmes ont pris les choses en main en offrant des services de santé directement sur les lieux de travail (voir l’encadré intitulé « Accroître l’accès aux soins de santé sexuelle : l’Immigrant Women’s Health Clinic »).
Accroître l’accès aux soins de santé sexuelle : l’Immigrant Women’s Health Clinic
L’Immigrant Women’s Health Centre est une clinique privée de santé sexuelle située à Toronto (Ontario) qui a pour mandat de renseigner les femmes sur la santé sexuelle, de leur offrir des services cliniques et des services de consultation et de promouvoir l’éducation et la sensibilisation axées sur la culture. Les services du centre tiennent compte de la culture, sont offerts dans 14 langues et sont gérés par une équipe médicale entièrement composée de femmesNote de bas de page 607, Note de bas de page 608. Les patientes peuvent aussi obtenir, gratuitement ou à peu de frais, des services de dépistage et de traitement des ITS, des tests de grossesse, des conseils sur la planification des naissances, des vaccins contre l’hépatite B, des tests de Pap et des moyens de contraceptionNote de bas de page 608. Une clinique de santé mobile, affiliée au centre, fait également des interventions à domicile ou en milieu de travail afin de tenir compte des contraintes professionnelles et des responsabilités familiales des femmesNote de bas de page 608. Les employeurs peuvent également demander à la clinique mobile d’offrir des soins et des traitements en milieu de travail dans le but de réduire le nombre d’absences pour des raisons médicales (maladies ou consultations)Note de bas de page 608, Note de bas de page 609. Selon les résultats des études de suivi, ces cliniques ciblées ont aidé à améliorer l’accessibilité des services de santé sexuelle et ont permis à un plus grand nombre d’immigrantes de recevoir des soins. La clinique donne d’importantes leçons sur la façon de répondre aux besoins de cette population souvent « invisible », tout en tenant compte des situations et expériences liées à l’immigration, au pays d’origine et aux relations avec la famille et les autres citoyens. Ce modèle de prestation de services pourrait être appliqué aux personnes qui ont un accès limité aux services de santé sexuelle en raison de facteurs socioéconomiques ou géographiquesNote de bas de page 610.
La stigmatisation associée à certains sujets en matière de santé sexuelle, en particulier les ITS, est un obstacle important au dépistage, au diagnostic précoce, aux soins et à l’accès à un traitement et à du soutien pour les personnes de tous les âges, de tous les genres et de toutes les orientations sexuellesNote de bas de page 317. Bien qu’il soit utile de fournir aux jeunes des renseignements généraux sur les risques d’ITS ou de VIH, les messages adaptés en fonction du genre, de la culture, de l’âge et de l’orientation sexuelle sont importants chez les populations à risque. L’innovation et la créativité sont nécessaires pour mieux répondre aux besoins de la population canadienne sur le plan de la santé sexuelle. Le gouvernement de l’Ontario a publié un document sur les pratiques optimales en gestion de cas, localisation des contacts et contrôle des infectionsNote de bas de page 611. Ce document recommande l’utilisation des réseaux sociaux, des campagnes de marketing social et des tests de dépistage pour gérer les ITS et les effets à long terme des maladies et de l’infertilitéNote de bas de page 611. Le Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique a conçu récemment un programme de santé sexuelle en ligne, comprenant des services de dépistage des ITS et du VIH. Ce programme s’ajoutera aux services offerts en clinique afin de promouvoir le dépistage des ITS et du VIHNote de bas de page 612.
Les comportements sexuels à risque ne se limitent pas aux jeunes CanadiensNote de bas de page 559. En effet, le taux déclaré d’ITS a augmenté chez les 40 à 59 ans, et en particulier chez les hommesNote de bas de page 169-Note de bas de page 171, Note de bas de page 183, Note de bas de page 253, Note de bas de page 561. Par conséquent, les programmes d’éducation sur la santé sexuelle doivent tenir compte de l’évolution des tendances sociales et des pratiques sexuelles des adultes plus âgés. En 2010, le Royaume‑Uni a été le premier pays à lancer une campagne nationale sur la santé sexuelle à l’intention des personnes de plus de 50 ansNote de bas de page 613. Ce programme s’adressait aux adultes célibataires, ou ayant des fréquentations, et qui n’avaient pas nécessairement pris conscience que les pratiques sexuelles sécuritaires les concernaient eux aussiNote de bas de page 613. Le groupe cible était clairement représenté sur les affiches pour maximiser les chances qu’il se sente interpellé. Dans le cadre de cette campagne, la Family Planning Agency du Royaume-Uni a conçu un guide portant spécifiquement sur la santé et les questions sociales liées aux ITS et à la sexualité afin d’encourager les adultes plus âgés à s’interroger sur leurs anciennes et leurs nouvelles relationsNote de bas de page 614.
Troisième section : Le sexe, le genre et les déterminants socioéconomiques
Le fait de considérer le sexe et le genre en fonction de certains résultats de santé ne montre qu’une partie de la vaste réalité, car de nombreux facteurs, souvent cumulatifs, influent directement ou indirectement sur la santé d’une personne tout au long de la vie. Dans bien des cas, le fait d’examiner les déterminants socioéconomiques selon le sexe et le genre peut aussi avoir des effets. La présente section porte principalement sur la façon dont le sexe et le genre influencent l’emploi et l’éducation. Les exemples de déterminants socioéconomiques présentés dans cette section ont été choisis en raison de leur influence sur d’autres facteurs, notamment le revenu, les questions liées au travail (le stress, par exemple) et l’environnement social, mais aussi parce qu’ils sont susceptibles de donner de bons résultats par le fait qu’ils tiennent compte de l’influence du sexe et du genre dans les interventions.
Travail et emploi : santé et stéréotypes
Il arrive souvent que les hommes et les femmes occupent différents types d’emploiNote de bas de page 615. L’emploi et les conditions de travail, de même que les résultats qu’ils engendrent (notamment le revenu), constituent des déterminants de la santé. Dans ses formes diverses, le travail (formel ou informel, rémunéré ou non rémunéré) peut influencer la richesse individuelle et le statut social d’une personneNote de bas de page 616. Deux facteurs doivent toutefois être pris en considération : les conditions d’emploi (comme le salaire, le nombre d’heures travaillées, les possibilités de prendre congé, les assurances et les avantages sociaux) et la nature du travail (notamment les tâches et les responsabilités assumées)Note de bas de page 617.
L’incidence du genre sur la façon dont les problèmes de santé au travail sont vécus, exprimés, définis et pris en charge peut aider à cerner les facteurs de risque tant chez les hommes que chez les femmesNote de bas de page 618. Les stéréotypes fondés sur le sexe et le genre peuvent augmenter les risques pour la santé des hommes et des femmesNote de bas de page 616. Par exemple, les emplois traditionnellement associés aux femmes (et surtout occupés par elles) sont habituellement plus répétitifs et demandent de l’agilité, de la dextérité, de la rapidité et de la concentration. À l’opposé, les emplois réservés aux hommes sont souvent exigeants sur le plan physiqueNote de bas de page 617, Note de bas de page 619-Note de bas de page 621. Les risques de blessures et de maladies peuvent être influencés par des facteurs biologiques, mais aussi par l’ancienneté, le statut social, l’âge, la nature des tâches, les aptitudes techniques et les expériences de vie en dehors du milieu de travailNote de bas de page 616, Note de bas de page 617. Malgré ces différences, on dispose de très peu de renseignements sur les emplois des hommes et des femmes ainsi que leurs effets à long terme sur la santé en fonction du sexe et du genre. Le travail et les risques qu’il pose pour la santé peuvent donner lieu à des hypothèses qui renforcent certains stéréotypes de genre, comme « qui fait quoi » ainsi que la valeur du travail et les risques qui lui sont associés (par exemple, le stéréotype voulant que le travail des femmes soit souvent moins « risqué » que celui des hommes)Note de bas de page 616. Bien que la plupart des accidents du travail surviennent chez les hommes, les femmes courent aussi des risques, particulièrement lorsqu’elles occupent un emploi sous-évalué en raison des stéréotypesNote de bas de page 108, Note de bas de page 616. Dans les cas où les hommes et les femmes effectuent le même travail, les tâches, l’approche utilisée et les risques peuvent différer selon le type d’emploi et sont souvent influencés par le genre. Ainsi, pour un même poste, les femmes et les hommes se voient attribuer les tâches « légères » (comme l’époussetage, le nettoyage à la vadrouille, l’approvisionnement) et les « gros travaux » (par exemple, le cirage, le lavage, le nettoyage à de grandes hauteurs). En outre, l’équipement de travail et les vêtements de protection sont généralement conçus pour les hommes, donc pas nécessairement adaptés au corps ou à la musculature d’une femme moyenneNote de bas de page 617, Note de bas de page 619, Note de bas de page 621.
Les hypothèses concernant le travail des femmes ont faussé la collecte de données à un point tel que les indicateurs ne sont pas pertinents et que les risques peuvent être réattribuésNote de bas de page 616, Note de bas de page 618. On observe, par exemple, que les femmes sont moins susceptibles de recevoir un soutien en cas d’incapacité. De 1993 à 2005, près du tiers (29 %) des femmes qui se sont absentées du travail en raison de blessures n’ont reçu aucun revenu de compensationNote de bas de page 622. La santé en milieu de travail est souvent négligée, et cette réalité est encore plus marquée chez les nouveaux immigrantsNote de bas de page 622. Il arrive souvent que les programmes et les normes de santé et sécurité au travail entretiennent certains préjugés fondés sur le sexe et le genre, comme en témoignent les exigences et l’équipement, qui sont souvent pensés en fonction des caractéristiques physiques des hommes et des risques habituellement associés à leur travailNote de bas de page 616.
Pour pouvoir cerner les blessures, les maladies et les douleurs associées au travail et en faire un suivi, il faut mettre en place un programme de santé et sécurité qui surveille les activités. L’absence d’un tel programme, combinée à d’autres facteurs (par exemple, le refus de l’employé ou de l’employeur de signaler un problème), fait en sorte que les questions de santé en milieu de travail ne sont pas rapportées ou ne le sont qu’en partie. Les travailleurs peuvent se heurter à divers obstacles lorsque vient le temps de porter ces problèmes à l’attention de leur employeur. Par exemple, la sensation de douleur et d’inconfort peut être perçue comme normale pour certains types d’emploi. Ou encore, des rapports de pouvoir inégaux peuvent susciter chez certains la peur d’être blâmés pour une blessure subie ou la crainte de perdre leur emploi, une partie de leur salaire ou le respect de leurs collèguesNote de bas de page 620. Les faits montrent que les accidents et les maladies associés au travail sont plus souvent sous-estimés et sous-diagnostiqués chez les femmes que chez les hommesNote de bas de page 616. Souvent, les femmes se voient refuser leurs demandes d’indemnisation parce que le travail qu’elles effectuent est soi-disant « sécuritaire »Note de bas de page 616. D’importantes différences existent également entre les hommes et les femmes en matière de traitement et de réadaptationNote de bas de page 616. En effet, après une blessure, les hommes sont plus susceptibles de se voir offrir de la formation, un nouvel emploi et du soutien à domicile. Les femmes, elles, reçoivent des prestations de réadaptation sur une plus courte période que les hommes; par contre, on leur accorde généralement du soutien en cas de maladies liées au stress ou de troubles musculosquelettiquesNote de bas de page 616. Du côté des hommes, on s’est très peu penché sur les maladies mentales, sur l’exposition aux risques et encore moins sur les problèmes de santé reproductive, généralement perçus comme étant exclusifs aux femmesNote de bas de page 616. En outre, les responsabilités et les tâches sont vues différemment selon le genre, ce qui peut conduire à des cas de harcèlement, de stress ou de refus d’avancement, tout particulièrement dans les domaines où il existe depuis toujours des stéréotypes fondés sur le genreNote de bas de page 616, Note de bas de page 623.
Il est difficile d’éliminer les stéréotypes fondés sur le genre, surtout dans les emplois où les rôles sont historiquement attribués aux hommes ou aux femmes, comme les infirmières, les agentes de bord, les travailleurs de la construction et les soudeursNote de bas de page 620. Par exemple, les infirmiers sont plus susceptibles de soulever des charges lourdes et de s’acquitter des tâches physiques qu’exige la professionNote de bas de page 617, Note de bas de page 624, Note de bas de page 625. Toutefois, cette exigence les expose à de plus grands risques. D’ailleurs, 46 % des infirmiers ont été agressés physiquement par un patient, comparativement à 33 % des infirmièresNote de bas de page 626. Cette différence fondée sur le genre s’explique, entre autres, par le fait que les infirmiers sont plus souvent responsables des patients violents et que les normes sociales considèrent les hommes comme étant plus solides sur les plans physique et émotionnel et plus enclins à protéger leurs collèguesNote de bas de page 626, Note de bas de page 627. La plupart des infirmiers et infirmières (60 %, avec un plus haut pourcentage d’hommes que de femmes) considèrent leur travail comme très exigeant sur le plan physiqueNote de bas de page 626, Note de bas de page 628. C’est pourquoi, dans ce domaine en particulier, les plans de prévention des blessures doivent tenir compte du sexe, du genre et du rôle qu’ils jouent dans la manière dont les blessures se produisent et sont gérées. Une vaste analyse comparative des expériences vécues en milieu de travail en fonction du genre est nécessaire pour favoriser la conciliation vie personnelle et vie professionnelle dans la mesure où on souhaite maintenir et augmenter les effectifs infirmiers (de sorte que les hommes constituent 10 % du personnel infirmier au Canada, tel que le recommande Vers 2020)Note de bas de page 629. Pour cela, il faudrait s’attaquer aux stéréotypes fondés sur le genre dans les secteurs de la formation, de la promotion et de la pratique.
La lutte contre les stéréotypes et les préjugés fondés sur le genre est nécessaire pour attirer et maintenir en poste les travailleurs dans les secteurs non traditionnelsNote de bas de page 627. Les interventions en milieu de travail doivent tenir compte des réalités du travail, y compris les risques, l’emplacement et le rôle joué par les facteurs de confusion (comme l’environnement et les hypothèses). Afin d’éviter l’isolement des personnes dont le travail s’écarte de la norme, il faudrait proposer aux groupes peu nombreux une approche adaptée, lorsque cela est approprié. Par exemple, bien que le secteur des soins infirmiers soit majoritairement composé de femmes, les hommes constituent une minorité appréciable et s’exposent à un niveau de risque différent qui devrait être pris en compte au moyen d’une intervention cibléeNote de bas de page 628.
Genre et travail informel : soutien aux aidants
De nombreux Canadiens exécutent de façon informelle un travail non rémunéré, y compris ceux qu’on appelle les aidants naturels. Ces personnes intègrent à leurs activités quotidiennes l’éducation des enfants et le soutien aux aînésNote de bas de page 630, Note de bas de page 631. En 2006, plus de femmes que d’hommes (56 % et 43 % respectivement) ont fourni des soins informels, quelle qu’en soit la forme. D’ailleurs, le nombre d’heures que les femmes consacrent à ces soins (23 millions d’heures au total) représente plus du double de celui des hommesNote de bas de page 230, Note de bas de page 231. Certains facteurs sociaux, notamment les rôles culturels, les normes sociales et le statut d’emploi, contribuent à la perception que les soins constituent une tâche féminine. Selon les données des enquêtes canadiennes, il existe une parité entre les hommes et les femmes dans la prestation des soins aux membres âgés de la familleNote de bas de page 632. Toutefois, le type de soins diffère selon les rôles et les attentes fondés sur le genre. Habituellement, les hommes s’occupent de l’entretien et des travaux extérieurs, tandis que les femmes offrent des soins plus personnels et réalisent des tâches à l’intérieur du foyerNote de bas de page 230, Note de bas de page 231, Note de bas de page 437, Note de bas de page 632, Note de bas de page 633.
Bien que la plupart des aidants indiquent qu’ils se débrouillent très bien ou généralement bien et trouvent ce rôle gratifiant, la santé et la situation sociale de certains d’entre eux sont parfois compromisesNote de bas de page 230, Note de bas de page 231, Note de bas de page 632, Note de bas de page 634, Note de bas de page 635. La prestation de soins peut avoir des répercussions négatives chez les personnes occupant un emploi rémunéré (particulièrement celles qui prennent soin d’un membre de la famille), car leurs responsabilités peuvent les empêcher de travailler à l’extérieur de la maison ou les obliger à réduire ou à modifier leurs heures de travailNote de bas de page 230, Note de bas de page 231, Note de bas de page 634. Les aidants peuvent également assumer des dépenses non remboursables, se sentir isolés et connaître des ennuis de santéNote de bas de page 230, Note de bas de page 231, Note de bas de page 634. Les femmes, en particulier, sont plus susceptibles de signaler des problèmes de santé attribuables aux soins qu’elles prodiguent. Elles doivent également apporter des changements dans leur emploi (par exemple, modifier leur horaire ou leur régime de travail) afin de pouvoir continuer à offrir des soinsNote de bas de page 230, Note de bas de page 231, Note de bas de page 634, Note de bas de page 635. Bon nombre de femmes signalent également ressentir une forme de stress typiquement associé à la « génération sandwich », car elles doivent s’occuper à la fois des enfants et des membres âgés de leur familleNote de bas de page 636. Un des facteurs qui augmentent les effets indésirables de la prestation de soins est l’intensité avec laquelle les gens assument leurs responsabilités. Les personnes qui consacrent moins de dix heures de soins par semaine subissent moins de contrecoups sur le plan de la participation au marché du travailNote de bas de page 230, Note de bas de page 231, Note de bas de page 637.
Dans l’ensemble, la proportion d’hommes aidants connaît une augmentation. En effet, les hommes sont plus nombreux qu’auparavant à prendre soin de leur conjointe ou de leur conjoint atteint de démence ou d’un autre problème de santé mentale. Cependant, leur accès au soutien communautaire et aux services sociaux est généralement plus restreint, et la recherche sur les programmes de soutien aux hommes aidants se fait rare en raison du peu de reconnaissance qu’on leur attribueNote de bas de page 634. Les hommes ayant un conjoint du même sexe estimaient que l’offre de soutien était particulièrement déficiente en raison du manque d’avantages sociaux, de la stigmatisation associée à certaines maladies (notamment le VIH et les troubles de santé mentale) et de l’accès restreint aux prestations qui, le plus souvent, sont réservées aux femmes ou aux couples hétérosexuelsNote de bas de page 638.
Le soutien aux aidants est complexe, car les besoins varient selon les individus et les situations. Répondre à ces besoins nécessite l’intervention de nombreux joueurs, comme les gouvernements, les employeurs, les collectivités et les citoyens. Au Canada, plusieurs programmes appuient les aidants en leur offrant, par exemple, un soutien communautaire ou financier (rémunération, allègements fiscaux et politiques de travail)Note de bas de page 639. En effet, certaines politiques de travail, telles que les congés rémunérés prolongés et flexibles qui favorisent la prestation de soins, contribueraient à créer un juste équilibre entre le travail et les responsabilités d’aidant. Au Canada, l’assurance-emploi et les prestations de compassion permettent d’offrir un soutien financier aux aidants qui doivent s’absenter de leur travail pour prendre soin d’un membre de la famille ou d’un ami gravement maladeNote de bas de page 639, Note de bas de page 640. Le gouvernement fédéral offre aussi toute une gamme de mesures de soutien, y compris le crédit d’impôt aux aidants naturels, le crédit d’impôt pour personnes à charge admissibles, le crédit d’impôt pour personnes à charge ayant une déficience et le transfert du montant inutilisé du crédit d’impôt pour personnes handicapées. Ces mesures tiennent compte de la capacité réduite des aidants naturels à générer un revenu suffisant et, par conséquent, à payer leurs impôts en raison du soutien qu’ils fournissent à une personne à chargeNote de bas de page 639, Note de bas de page 641-Note de bas de page 645. L’allègement fiscal pour un conjoint à charge est aussi assuré par le crédit d’impôt pour conjointNote de bas de page 646. Grâce au crédit d’impôt pour frais médicaux, les aidants naturels peuvent réclamer jusqu’à 10 000 $ en dépenses médicales admissibles au nom d’un parent à chargeNote de bas de page 647, Note de bas de page 648. Par ailleurs, certains employeurs offrent un large éventail de modalités de travail flexible aux employés qui doivent s’occuper d’un membre de la famille ou qui ont des responsabilités à titre d’aidants naturels (par exemple, le télétravail, les horaires flexibles, les centres de soins de jour pour adultes en milieu de travail) afin de les aider à trouver un équilibre entre leurs responsabilités familiales et professionnellesNote de bas de page 649. Ces options de travail flexible peuvent être mutuellement avantageuses, puisqu’elles permettent de réduire les coûts associés à l’absentéisme, au taux élevé de maladie parmi les aidants naturels ou à la perte d’employés compétentsNote de bas de page 650.
D’après les résultats d’une méta-analyse, les mesures de soutien aux aidants se révèlent efficaces, mais leur succès repose sur une série de facteurs, y compris le genre, l’origine ethnique et les conditions du programme (comme la durée et le lieu)Note de bas de page 651, Note de bas de page 652. Toutefois, ce type d’intervention touche spécifiquement les aidants et a peu d’effets à grande échelle. Les interventions les plus efficaces sont celles adaptées aux besoins précis des aidants naturels de personnes atteintes de démenceNote de bas de page 651, Note de bas de page 653. Selon d’autres études, le fait de tenir compte du genre, des rôles qui lui sont associés et de l’influence qu’il exerce sur le stress et les stratégies d’adaptation permet de réduire efficacement le fardeau des aidants qui sont sujets au stress et ont de la difficulté à s’adapterNote de bas de page 653. Bien que des mécanismes soient en place pour soutenir les aidants, on omet souvent de tenir compte des besoins liés aux rôles de l’aidant naturel et du bénéficiaire en fonction du genre (répercussions, fardeau et résultats). Le genre influe sur les grands déterminants de la santé et peut avoir des effets durables.
Considération du sexe et du genre dans l’éducation
L’éducation est un déterminant sous-jacent qui peut avoir des répercussions futures sur certains résultats de santé. Comme c’est le cas d’autres déterminants sociaux, le sexe et le genre ont un effet sur la façon dont on aborde et met à profit l’éducation reçue et ont, par conséquent, des effets positifs sur la santé à long termeNote de bas de page 12.
Les jeunes hommes et les jeunes femmes abandonnent leurs études pour différentes raisons. Souvent, les jeunes hommes quittent l’école pour travailler et les jeunes femmes, pour vivre leur grossesse ou prendre soin de leur enfantNote de bas de page 654. Toutefois, malgré le fait que le taux d’abandon des études secondaires continue d’augmenter, une plus grande proportion de jeunes hommes retournent aux études et les terminent avec succèsNote de bas de page 91, Note de bas de page 655. Par conséquent, il est important que les interventions tiennent compte du rôle du sexe et du genre si l’on veut convaincre les jeunes de rester à l’école et de poursuivre leur formation ou leurs études postsecondaires.
Malgré les réussites du système d’éducation, on ignore toujours pourquoi les garçons réussissent moins bien que les filles à l’écoleNote de bas de page 654. Selon une étude du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), qui a été menée auprès d’un vaste échantillon international de jeunes de 15 ans, les jeunes filles ont généralement beaucoup mieux réussi les tests de lecture que les garçons, et ce, dans tous les pays participantsNote de bas de page 654. Les jeunes garçons ont obtenu des résultats légèrement supérieurs en mathématiques et en sciences, mais les différences de résultats pour ces matières étaient beaucoup moins grandes que celles enregistrées en lectureNote de bas de page 654.
Pour examiner le rendement scolaire selon une perspective axée sur le sexe et le genre, il faut considérer un ensemble d’éléments : l’absence de préjugés de genre dans les critères utilisés pour mesurer la réussite; les facteurs qui favorisent la participation en classe, les pratiques pédagogiques et la pertinence des activités en fonction du genre et de la diversité; les rôles et les attentes après l’obtention du diplôme selon le genre; les perceptions concernant la réussite; les méthodes d’enseignement et leur pertinence selon les styles d’apprentissage des deux sexes, les comportements et les modes de gestion. À divers degrés, tous ces éléments ont été évoqués pour expliquer les différences de rendement et de résultats. Afin d’éliminer ces disparités, il faut prendre en compte le sexe, le genre et une série d’autres facteursNote de bas de page 654, Note de bas de page 656. Les interventions générales s’adressent spécifiquement à des groupes homogènes de filles et de garçons, mais elles risquent de négliger la question de la diversité. Par exemple, les résultats scolaires des garçons peuvent être influencés par la culture. En effet, les nouveaux immigrants obtiennent de meilleures notes que les garçons et les filles du même âge issus de la population généraleNote de bas de page 657.
Par ailleurs, les méthodes traditionnelles d’enseignement ne sont peut-être pas adaptées à certains enfantsNote de bas de page 656. Selon les données disponibles, les écoles qui intègrent l’activité physique à leur routine quotidienne sont plus à même de répondre aux besoins de tous les élèves, particulièrement aux besoins des enfants qui sont facilement distraits. Les programmes d’activité physique offrent l’occasion de se sentir en bonne santé et de dépenser de l’énergie et permettent de réorienter les activités qui sont particulièrement efficaces pour améliorer le rendement scolaire des garçons. Les facteurs sociaux jouent également un rôle importantNote de bas de page 656. La pression que subissent les garçons et les filles pour répondre aux attentes de performance de leurs pairs, de leurs parents ou de leurs enseignants peut, en effet, avoir une incidence sur leur comportement et leur attitude à l’école et à l’égard de leurs pairs, ce qui se traduit, chez les garçons, par un manque d’intérêt pour les études et, chez les filles, par une volonté de réussir.
Parallèlement, le fait de vivre dans des ménages défavorisés (par exemple, faible revenu et faible niveau de scolarité) peut représenter un facteur de motivationNote de bas de page 656, Note de bas de page 658. Les filles sont plus aptes à surmonter l’adversité que les garçons. Le rendement scolaire des garçons est généralement influencé par le manque de soutien et de ressources. Par ailleurs, chez certaines filles, les attentes parentales élevées à l’égard du rendement scolaire suscitent des résultats positifs, tandis que, pour d’autres, des messages répétés d’échec produisent l’effet contraireNote de bas de page 658. Celles dont les familles ne tiennent pas en haute estime la formation scolaire auront aussi tendance à moins bien réussirNote de bas de page 656. La perception selon laquelle il est normal que les garçons soient turbulents et obtiennent de piètres résultats scolaires (« les garçons seront toujours des garçons ») engendre également des stéréotypes négatifs qui nuisent à leur réussite et à leur intérêt pour l’écoleNote de bas de page 656. Tous les enfants ont besoin, à la maison, de solides modèles de comportement afin de réussir leur vie scolaire et sociale. Chez les garçons en particulier, les modèles masculins peuvent influer positivement sur leur rendementNote de bas de page 656.
Soutien aux pères
Il ne faut pas sous-estimer le rôle des pères dans l’éducation des enfants et dans l’établissement de saines relationsNote de bas de page 659, Note de bas de page 660. Les pères qui participent de façon positive ont un effet bénéfique sur le bien-être cognitif, émotionnel, relationnel et physique des enfantsNote de bas de page 659-Note de bas de page 661. Les personnes qui s’identifient comme pères, peu importe leur sexe, leur genre ou leur orientation sexuelle, jouent un rôle essentiel dans la vie de leurs enfants, de leur famille et de leur communauté en généralNote de bas de page 660, Note de bas de page 662, Note de bas de page 663. Plus particulièrement, les garçons qui profitent d’une relation solide avec leur père, ou un mentor de sexe masculin, réussissent mieux à l’école et dans leurs relations avec les autresNote de bas de page 656. En général, les perceptions à l’égard de la paternité et de la masculinité changent au même rythme que les rôles et les responsabilités au sein de la société et de la famille. Être un bon père équivalait autrefois à être un bon travailleur et un bon pourvoyeur. Toutefois, les pères qui participent directement à l’éducation de leurs enfants considèrent désormais qu’être un bon père, c’est être un bon modèle de comportementNote de bas de page 659, Note de bas de page 661.
Au fil du temps, plusieurs raisons ont été évoquées pour expliquer le faible niveau de participation des pères, y compris le rôle parental limité ou perturbé, les politiques défavorables au bien-être des enfants (comme les pensionnats), les modèles d’emploi (par exemple, le manque de soutien pour les pères), les normes sociales (comme le fait que les hommes ne sont pas les principaux prestataires de soins) et les problèmes de garde d’enfantsNote de bas de page 659, Note de bas de page 660, Note de bas de page 662.
Les expériences de nombreux Autochtones montrent l’importance du rôle des pères. L’arrivée des pensionnats a perturbé les rapports parents-enfants dans bon nombre de familles métisses, inuites et des Premières Nations. Les conséquences se sont fait sentir sur les pratiques culturelles, linguistiques, spirituelles et familiales, transmises de génération en génération, ce qui a nui à la santé et au bien-être des AutochtonesNote de bas de page 154, Note de bas de page 662. Chez les Premières Nations, un enfant sur six a au moins un parent qui a fréquenté un pensionnat, et près de 60 % des enfants ont au moins un grand-parent qui a été pensionnaireNote de bas de page 154. Par conséquent, de nombreux hommes autochtones ayant survécu aux pensionnats de première ou de deuxième génération n’ont aucun modèle de comportement dont ils pourraient s’inspirer pour apprendre à être un bon père, à communiquer, à donner de l’affection ou à s’adapter. Les collectivités ne sont pas non plus en mesure d’offrir aux hommes le soutien et les ressources dont ils ont besoin pour acquérir les connaissances et les compétences nécessaires et ainsi compenser l’absence de liens familiauxNote de bas de page 662, Note de bas de page 664. Pour contrer ces effets, des programmes de compétences parentales prometteurs sont en cours d’élaboration chez les Autochtones. Ces programmes incluent des pratiques et des aspects traditionnels propres à la spiritualité autochtone (par exemple, les tambours et la danse traditionnels, les cérémonies de guérison, la chasse et la pêche) qui favorisent la participation des pères ainsi que leur intégration et celle de leurs enfants dans les traditions culturelles (voir l’encadré intitulé « Soutien aux pères autochtones »)Note de bas de page 662.
Soutien aux pères autochtones
Dans les communautés métisses, inuites et des Premières Nations, ainsi que dans les communautés éloignées, il existe des programmes prometteurs qui visent à favoriser la participation et l’intégration des parents à la culture traditionnelle, en plus de les aider à adopter des pratiques parentales saines et à développer leur capacité d’adaptation. Quatre exemples différents tirés de divers territoires et provinces témoignent d’une vaste gamme de stratégies permettant de combiner les connaissances traditionnelles, de renforcer les aptitudes à la vie quotidienne et d’apporter du soutien aux enfants qui sont aux prises avec des problèmes de santé.
Au Yukon, le programme traditionnel sur l’art d’être parent (Traditional Parenting Program) a été créé en 1995 dans le but d’enseigner des compétences parentales et d’améliorer la santé et le bien-être des Autochtones par l’intermédiaire du savoir traditionnel des aînésNote de bas de page 665. Grâce à une série d’ateliers et de programmes axés sur les pères, les parents reçoivent une formation pratique adaptée à leur culture. Ce programme intègre des savoir-faire contemporains mais aussi des pratiques parentales générales, des traditions culturelles (comme l’utilisation de filets de pêche et de collets, la cueillette de baies, la couture et le tannage des peaux) et des pratiques axées sur les traditions orales, la narration d’histoires, la spiritualité et l’intégration de la famille élargieNote de bas de page 664.
Nēâh Kee Papa (Je suis ton père) est un programme mis sur pied par la Fédération des Métis du Manitoba qui reconnaît le fait qu’il existe moins de programmes à l’intention des pères que des mèresNote de bas de page 666. Offert gratuitement à tous les participants masculins (et à leurs conjointes) depuis 1999, ce programme appuie la participation active des pères dans la vie des enfants. Il vise à leur donner les moyens d’offrir à leurs enfants un soutien émotionnel positif, d’améliorer leurs compétences parentales et d’entretenir de saines relations familialesNote de bas de page 664, Note de bas de page 665. Le programme comporte plusieurs composantes thématiques axées sur des questions sociales et des questions de santé : la préparation au rôle de père et l’importance de ce rôle; les stratégies parentales préventives; les aptitudes à la vie quotidienne; la saine sexualité; la famille et la loi; les droits des enfants; la communication efficace et la maîtrise de la colère; la préparation au marché du travail; et les pratiques familialesNote de bas de page 664-Note de bas de page 666. La séance « Famille d’origine » permet aux participants de mieux comprendre comment les événements survenus pendant leur enfance influent aujourd’hui sur leur vie d’adulte.
Le programme Cercle de soutien de la Colombie-Britannique offre, en tout temps, des stratégies conviviales axées sur le rôle des pères et s’adresse aux familles et aux personnes aux prises avec l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtaleNote de bas de page 664, Note de bas de page 667. Ce programme, offert par l’intermédiaire du Dze L K’ant Friendship Centre Society, met de l’avant des stratégies parentales proactives qui traitent des aptitudes à la vie quotidienne, comme l’élaboration d’un budget, la planification des repas et les loisirsNote de bas de page 667. Le programme Cercle de soutien privilégie le soutien individuel pour susciter la participation des pères. Il vise à faire tomber les barrières de la stigmatisation et de l’isolement, et ce, par la diffusion de messages d’encouragement, le soutien aux mères, l’acquisition d’aptitudes à la vie quotidienne et l’organisation d’activités saines pour les enfantsNote de bas de page 664.
Le programme Pères et fils au cœur du territoire de la Société Ilisaqsivik (Nunavut) porte sur les changements sociaux qui modifient l’image des hommes, de la masculinité et de la paternité. Les croyances et les représentations traditionnelles de l’homme et de la masculinité dans certaines communautés inuites ont été bouleversées par d’importants changements sociaux et culturels (comme les influences et les répercussions de l’économie capitaliste et salariale, la nouvelle technologie, l’établissement en communautés, les religions occidentales, le système de justice et de gouvernance). Ces changements ont entraîné une certaine confusion dans la définition de leur identité et ont suscité divers problèmes, comme la faible estime de soi, la dépression, la toxicomanie, la violence, le suicide et la perte de modèles masculinsNote de bas de page 664. Le programme Pères et fils au cœur du territoire fait la promotion du bien-être mental, spirituel et physique en mettant l’accent sur l’Inuit Quajimajatuqangit, c’est-à-dire les connaissances ancestrales associées aux valeurs sociales traditionnelles des Inuits. Ces traditions sont enseignées dans le cadre d’activités comme la chasse, les voyages, le travail avec les chiens, le camping et la relation intime avec la terreNote de bas de page 664. Les fils de la communauté (y compris les jeunes à risque et les jeunes hommes) sont accompagnés par des pères et des aînés dans le cadre de voyages au cours desquels on leur transmet des aptitudes et des valeurs, on leur enseigne la langue traditionnelle et on leur raconte des histoires traditionnellesNote de bas de page 664. Le fait de donner aux jeunes hommes (ainsi qu’aux hommes plus âgés) des occasions de participer à des activités traditionnelles peut les aider à développer leur sens des responsabilités et à améliorer leur santé et leur bien‑être. On estime que ces avantages individuels profiteront ensuite à la communautéNote de bas de page 664. D’ailleurs, à leur retour, les groupes partagent avec le reste de la communauté tout ce qui a été recueilli au cours de leur voyage, comme les poissons et autres alimentsNote de bas de page 664.
Il est important d’aborder la question de la paternité dans toute sa diversité. De nouvelles initiatives prometteuses, comme la Young and Potential Fathers Initiative (YPF) de Toronto, portent sur les cycles des facteurs socioéconomiques, l’absence de ressources, le manque de modèles de comportement pour les jeunes et les pères racialisés dans les quartiers défavorisésNote de bas de page 668, Note de bas de page 669. Ce type de programme permet de diriger les jeunes pères vers un large éventail de services de santé et de services sociaux (notamment des services d’emploi, d’aide à la gestion financière, de compétences parentales et d’aide juridique) et leur offre des lieux appropriés pour interagir avec leurs enfants, d’autres pères et des mentorsNote de bas de page 669, Note de bas de page 670.
Dans la société, l’idée qu’on se fait de l’engagement des pères évolue au fil du temps. Depuis les années 1970, les pères canadiens participent de plus en plus aux activités et à la vie de leurs enfants. Cette nouvelle réalité dépend de nombreux facteurs, y compris le retour des mères sur le marché du travail, une plus grande égalité des sexes, la nécessité pour les hommes d’offrir un soutien social et une aide pratique à leur conjointe et le désir des pères d’être plus présents dans la vie de leurs enfantsNote de bas de page 671. De plus, le Canada, en tant que société, a amélioré au fil des années son soutien à la recherche et aux programmes axés sur la paternité. Les interventions qui ciblent les pères continuent d’évoluer et de reconnaître l’importance du rôle qu’ils jouent dans la santé et le bien-être des Canadiens (voir l’encadré intitulé « Reconnaître l’engagement des pères »)Note de bas de page 671.
Le Canada a fait beaucoup de progrès pour reconnaître l’importance de l’engagement des pères auprès de leurs enfants et pour améliorer les connaissances et les pratiques dans ce domaine. Depuis les années 1990, les interventions axées sur l’engagement des pères (les réseaux de soutien, les programmes et les travaux de recherche) ont connu une croissance marquéeNote de bas de page 671. Le groupe québécois ProsPère, le plus ancien groupe de recherche canadien sur l’engagement des pères, a vu le jour en 1994 dans deux communautés vulnérables du Québec. Il visait à évaluer et à promouvoir l’engagement des pères comme facteur de protection contre la violence faite aux enfants. Au départ, le travail se résumait à une recherche active afin d’évaluer le soutien communautaire apporté aux pères de jeunes enfants dans quatre communautés de la région de Montréal. Le groupe de recherche a ensuite élargi son champ d’activité en s’intéressant aux pères dans les populations vulnérables, à l’importance du rôle paternel dans le développement de l’enfant et au transfert du savoirNote de bas de page 671, Note de bas de page 672.
En Ontario, l’initiative pour l’engagement paternel — réseau ontarien (IEP-RO) a été lancée en 1997 sous la forme d’un vaste programme de collaboration et de partenariat destiné à promouvoir l’engagement paternel et l’inclusion des pères dans les services communautairesNote de bas de page 673. Les responsables utilisaient et utilisent encore une approche axée sur la santé de la population, qui reconnaît l’importance des facteurs individuels et collectifs et met à contribution toutes les personnes et institutions qui interviennent dans la vie des pères (par exemple, les pères, les mères, le secteur privé, les décideurs et les médias)Note de bas de page 671, Note de bas de page 673. Les réalisations de l’IEP‑RO couvrent plusieurs volets : l’accroissement des connaissances; la conception de dépliants, d’affiches didactiques et d’autres documents de marketing social; la promotion des programmes d’engagement paternel à l’échelle communautaire, provinciale et nationale; l’établissement de réseaux du savoir; le soutien aux pères et la sensibilisation. Des programmes de formation professionnelle sont également offerts dans le cadre du Programme d’action communautaire pour les enfants (PACE) et du Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP). Ces programmes sont aussi accessibles dans les Centres de la petite enfance de l’Ontario et dans les unités de santé publique de l’OntarioNote de bas de page 673-Note de bas de page 675. La Colombie-Britannique et l’Alberta ont créé des réseaux semblables, appelés Father Involvement — BC Network et Alberta Father Involvement Initiative, dans le but d’offrir aux citoyens des renseignements, des ressources et de la formation sur l’engagement paternelNote de bas de page 676.
La Father Involvement Research Alliance (FIRA) est née, en 2002, d’une initiative de partenariat national entre des chercheurs, des praticiens, des décideurs et des pèresNote de bas de page 670, Note de bas de page 677. Ses objectifs sont les suivants : préparer des programmes de recherche; élaborer, lancer et mener à terme des projets de recherche; établir des méthodes d’échange des connaissances; promouvoir des stratégies fondées sur des données probantes; favoriser la participation d’un large éventail de personnes, d’organisations et d’institutions; rapprocher les pères, les mères et les enfants canadiens pour discuter de leurs problèmes et de leurs besoinsNote de bas de page 677. Un document universitaire intitulé Father Involvement in Canada: Contested Terrain devrait être publié à la fin de 2012.
D’autres initiatives, notamment On Fathers’ Ground et National Project on Fund on Fathers, aident les organisations à intervenir auprès des pères. Le projet de suivi intitulé Mon père est important parce que… a permis de réaliser un sondage national sur les programmes communautaires d’engagement paternel et a conduit à la création de la Trousse à outils pour les pères. Cette trousse a été conçue pour appuyer les programmes d’engagement paternel et pour cerner les pratiques exemplaires et les leçons à retenir des programmes qui existent déjà au CanadaNote de bas de page 660, Note de bas de page 678, Note de bas de page 679.
On a observé, au cours de la dernière décennie, un accroissement important de l’intérêt du milieu universitaire pour l’engagement paternel, des efforts visant à faire en sorte que les programmes et les services destinés aux familles soient plus ouverts et plus favorables à l’engagement des pères ainsi que du niveau de connaissances sur les expériences des pères en tant que parents et sur la façon de les appuyer. Toutefois, il est possible d’en faire davantage pour s’assurer que ce nouveau savoir est transmis aux professionnels et aux décideurs qui souhaitent soutenir les familles et favoriser le développement sain de l’enfantNote de bas de page 680.
Résumé
Il est important de tenir compte du sexe et du genre dans les interventions en santé publique. Le présent chapitre a mis en évidence des travaux de recherche, des politiques et des programmes, généraux ou ciblés, qui montrent l’influence du sexe et du genre sur les déterminants socioéconomiques et les résultats de santé. Il serait nécessaire de mettre au point des approches qui vont au-delà des perceptions habituelles basées sur la dichotomie homme-femme et qui abordent, par exemple, les normes fondées sur le genre, les identités de genre, les schémas de masculinité et de féminité ainsi que la diversité sexuelle et de genre.
Le Canada a déployé de réels efforts pour intégrer le sexe et le genre dans la recherche et les pratiques de santé publique, mais de nombreux problèmes subsistent. La première section de ce chapitre a confirmé l’intérêt de tenir compte du sexe et du genre dans les interventions en santé publique. Certains exemples, comme le cas du VPH, ont montré que l’approche axée sur le sexe et le genre ouvre la voie à de nombreuses interventions propres à améliorer la santé et le bien-être de la population. Dans la deuxième section, certains résultats observés sur le plan de la santé physique, mentale et sexuelle ont permis de mettre en lumière les secteurs où l’approche fondée sur le sexe et le genre pourrait être appliquée et où la diversification des sous-populations est également importante. On a aussi présenté des exemples où l’intégration du sexe et du genre a donné lieu à des messages efficaces sur les pratiques sexuelles sécuritaires et a confirmé la pertinence de considérer d’autres facteurs, notamment l’âge, la culture et l’orientation sexuelle. La troisième section considérait le rôle que jouent le sexe et le genre sur les déterminants de la santé et la façon dont les politiques et les programmes peuvent réduire les inégalités socioéconomiques et ainsi contribuer à une meilleure santé. Les programmes de soutien parental offrent l’occasion d’améliorer l’état de santé et de bien-être des enfants et des parents.
La voie à suivre pour prendre en compte et intégrer le sexe et le genre dans les futures interventions en santé publique sera difficile à mesure que celles-ci évolueront pour atteindre les objectifs suivants :
- montrer que le sexe et le genre influent sur la santé et le bien-être de tous;
- remettre en question les hypothèses et les stéréotypes concernant la maladie, le sexe et le genre (sachant que l’adoption d’une approche axée sur le sexe et le genre ne se résume pas à intégrer une composante pour les femmes);
- adopter des programmes qui tiennent compte du sexe, du genre et d’autres facteurs de diversité afin d’éliminer les obstacles et de réduire la stigmatisation;
- accroître les compétences, recueillir des données plus pertinentes et intégrer le sexe, le genre et la diversité dans l’élaboration et l’évaluation des programmes.
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