Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – la trifluraline
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La concentration maximale acceptable (CMA) de trifluraline dans l'eau potable est de 0,045 mg/L (45 µg/L).
La trifluraline (treflan) est un herbicide à base de dinitroaniline vendu en grande quantité (plus de 1 million de kilogrammes d'ingrédient actif en 1986) pour la destruction en pré-émergence des mauvaises herbes gazonnées et des dicotylédones dans les cultures céréalières et légumières.Note de bas de page 1 La trifluraline est pratiquement insoluble dans l'eau, sa solubilité étant de 0,2 à 0,4 mg/L à 25°C.Note de bas de page 2 Elle est légèrement volatile, sa pression de vapeur s'élevant à 0,006 Pa à 20°C et sa constante de Henry étant de 4,0 Pa.m3/mol.Note de bas de page 3 Sa demi-vie par évaporation à partir des surfaces de sol humides ou des eaux peu profondes varie de quelques heures à 50 heures.Note de bas de page 4 La trifluraline présente un logarithme du coefficient de partage octanol-eau modéré, soit de 3,Note de bas de page 3 et un facteur de bioconcentration qui va jusqu'à 1 000 chez les organismes aquatiques, dans des conditions d'exposition constante.Note de bas de page 5 La photodécomposition, la volatilisation et la dégradation microbienne sont les principaux processus responsables de l'élimination de la trifluraline dans les eaux de surface; chaque processus a une demi-vie qui varie de quelques jours à quelques semaines.Note de bas de page 4 Note de bas de page 6 Note de bas de page 7 Toutefois, la trifluraline est modérément persistante dans le sol pendant une période qui peut aller jusqu'à une saison complète après l'application.Note de bas de page 8 Note de bas de page 9 Bien qu'elle se fixe fortement dans les sols à forte teneur en matières organiques,Note de bas de page 2 Note de bas de page 4 Note de bas de page 10 seule une proportion allant jusqu'à 10 pour cent est adsorbée dans les sols sableux à faible teneur en matières organiques.Note de bas de page 11 À cause de la solubilité limitée de la trifluraline et du fait qu'elle est fortement adsorbée dans le sol, l'Environmental Protection Agency des É.-U. (EPA) considère qu'il est improbable qu'elle soit entraînée par lixiviation jusqu'aux eaux souterraines, mais en raison de son utilisation répandue, elle lui a accordé une priorité supérieure à zéro comme produit pouvant faire l'objet d'une surveillance (catégorie C au lieu de D).Note de bas de page 10
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En 1987, on a décelé des concentrations à l'état de traces (de l'ordre du nanogramme par litre) de triflura-line dans plusieurs réseaux municipaux de distribution d'eau potable situés en Saskatchewan.Note de bas de page 12 On n'a pas décelé de trifluraline dans les sources d'approvision-nement en eau potable de 77 municipalités situées au Manitoba ou en Alberta (limites de détection : de 0,05 à 0,5 µg/L).Note de bas de page 13 Note de bas de page 14 Une concentration de trifluraline de 41 µg/L a été décelée dans un puits sur les 91 qui avaient fait l'objet d'une enquête en 1984 dans le sud de l'Ontario.Note de bas de page 15 De la trifluraline a été décelée à l'occasion, en concentrations à l'état de traces (inférieures à 1 µg/L) dans des eaux superficielles au Manitoba.Note de bas de page 13 On n'a pas décelé de trifluraline (limite de détection : 0,1 µg/L) lors d'un échantillonnage de l'eau d'irrigation ayant duré huit semaines, effectué dans le sud de la Saskatchewan.Note de bas de page 16 En se basant sur une concentration de 0,05 µg/L (ou la moitié de la limite de détection habituelle de 0,1 µg/L), on a estimé à 0,08 µg/jour, ou à 1 × 10-6 mg/kg p.c. par jour dans l'eau potable, l'exposition médiane des Canadiens.
Au Canada, on n'a pas décelé de trifluraline lors d'une enquête réalisée à l'échelle nationale et portant sur 120 aliments (limite de détection : 4 ppb).Note de bas de page 17 Aux États-Unis, on n'a pas décelé de trifluraline après analyse de plus de 27 000 échantillons de nourriture représentant 27 cultures (limite de détection : 10 ppb).Note de bas de page 2 Note de bas de page 18 On estime à 0,0271 mg/jour, ou à 0,00039 mg/kg p.c. par jour pour un adulte, l'apport théorique maximal de trifluraline par voie alimentaire en se basant sur la supposition selon laquelle la concentration résiduelle maximale permise de 0,1 mg/kg serait présente dans tout le blé, les pois, les haricots, les tomates et les navets consommés.Note de bas de page 19 Note de bas de page 20 On s'attend toutefois à ce que les concentrations de résidus et les apports soient beaucoup plus faibles.
On peut surveiller les concentrations de trifluraline dans l'eau par extraction avec un solvant comme le dichlorométhane et quantification par chromatographie en phase gazeuse avec détection par capture d'électrons. La confirmation de l'identification se fait par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse.Note de bas de page 16 Note de bas de page 21 Avec cette méthode, la limite de détection était de 0,05 µg/L dans le cas d'une enquête réalisée au ManitobaNote de bas de page 13 et de 0,1 µg/L dans le cas d'une enquête réalisée en Saskatchewan.Note de bas de page 16 L'EPA des États-Unis a signalé que la trifluraline était éliminée à 100 pour cent par traitement traditionnel avec de l'alun, par sédimentation et filtration. De plus, elle peut être éliminée de l'eau potable par osmose inversée, passage sur granules de charbon actif et épuration à l'air.Note de bas de page 21
L'absorption de trifluraline par le tube digestif dépend de la dose : elle est d'environ 20 pour cent chez des rats à qui l'on a administré une dose orale de 100 mg/kg p.c.Note de bas de page 22 et de presque 90 pour cent dans le cas d'une dose orale de 1 mg/kg p.c.Note de bas de page 23 Après l'adminis-tration d'une dose orale de 1 mg/kg p.c. à des rats, on a constaté l'élimination de 87 pour cent de la trifluraline en l'espace de 60 heures, 47 pour cent dans les fèces et 40 pour cent dans l'urine. La plus grande partie de la trifluraline était métabolisée suivant plusieurs mécanismes en 17 métabolites, alors qu'environ 10 pour cent était éliminée sous forme intacte dans les fèces. Il ne restait que 2,1 pour cent de trifluraline dans les tissus des rats après 96 heures, la concentration la plus élevée (0,22 ppm) ayant été mesurée dans le foie et les concentrations les plus faibles (0,1 ppm ou moins) ayant été mesurées dans les reins, le gras, les poumons, la rate, les intestins et l'estomac.Note de bas de page 23 La toxicité aiguë par voie orale de la trifluraline est faible. Parmi les principaux effets de l'ingestion chronique, on compte la réduction du poids corporel, l'augmentation du poids du foie et des manifestations de néphrotoxicité, notamment une glomérulonéphrite et des calculs rénaux.
Dans le cadre d'une étude effectuée en 1984, quatre groupes de beagles (six par sexe par groupe) ont reçu pendant un an dans leur alimentation des doses de trifluraline de 0, 30, 150 ou 750 ppm, ce qui équivaut à 0, 1, 4,8 et 25 mg/kg p.c. par jour. L'examen histopatho-logique n'a révélé aucun effet systémique ou organo-toxique attribuable à l'ingestion de ces doses. À la dose la plus élevée, on a constaté les effets suivants : diarrhée, vomissement, réduction du gain pondéral et augmentation du poids du foie et de la rate, ainsi que des changements dans la chimie du sérum (fraction lipidique et fraction protéinique).Note de bas de page 21 Note de bas de page 24 Note de bas de page 25 La dose sans effet nocif observé (DSENO) était de 4,8 mg/kg p.c. par jour dans le cas de cette étude.Note de bas de page 24 Note de bas de page 25 On a testé la trifluraline dans le cadre de six études alimentaires de longue durée (deux ans), quatre portant sur des rats et deux sur des souris. Dans les deux premiers dosages biologiques réalisés au début des années 1960 chez des rats Harlan et Cox, on n'a observé aucun effet tumorigène lié au traitement. Ces essais ne sont toutefois pas conformes aux normes actuelles à cause des limites méthodologiques et de problèmes de contamination.Note de bas de page 2 Note de bas de page 21 Dans une étude réalisée par le National Cancer Institute (NCI) portant sur des rats Osborne-Mendel et sur des souris B6C3F1 à qui l'on a administré de la trifluraline de qualité technique (qui, on l'a montré ultérieurement, était contaminée avec 84 à 86 ppm de dipropylnitrosamine [NDPA]) par voie alimentaire, on n'a noté aucun effet tumorigène chez les rats des deux sexes ni chez les souris mâles, mais des carcinomes hépatocellulaires et des adénomes alvéolaires/bronchiolaires ont été observés chez des souris femelles.Note de bas de page 21 Note de bas de page 26 Toutefois, ces effets pourraient être liés à la contamination de la trifluraline par la nitrosa-mine puisque de nombreuses nitrosamines se sont révélées tumorigènes chez la souris.Note de bas de page 26 Dans une étude effectuée en 1980 par le déposant, on a administré par voie alimentaire de la trifluraline purifiée dont la contamination par la NDPA était de moins de 0,01 ppm à des rats F344 (60 par sexe par groupe) et à des souris B6C3F1 (80 par sexe par groupe). Parmi les effets non tumorigènes observés chez les deux sexes, chez le rat, on comptait une réduction du poids des reins, du coeur, du thymus, du pancréas et de l'organisme, une teneur accrue en azote uréique du sang, une hypertrophie du foie et des testicules, une glomérulonéphrose et la formation de calculs rénaux; la DSENO était de 813 ppm, soit approximativement de 41 mg/kg p.c. Des effets analogues, mais moins prononcés, ont été observés chez la souris. Il n'y avait aucun signe d'oncogénicité chez les rates ou chez la souris mâle et femelle, contrairement à ce qu'ont révélé les études effectuées par le NCI. Chez les rats mâles, on a observé des augmentations importantes liées à la dose des tumeurs bénignes et malignes dans l'épithélium urinaire transitionnel des reins et de la vessie. Les incidences combinées des tumeurs bénignes et malignes chez les rats mâles étaient de 0/60, 3/60, 6/60 et 7/60 pour des doses de 0, 41, 163 et 315 mg/kg p.c.Note de bas de page 18 Note de bas de page 21 Le déposant a invoqué que les tumeurs rénales étaient spécifiques aux rats F344 qui étaient sujets aux néphropathies chroniques, à la glomérulonéphrose et aux calculs rénaux. Dans le cadre d'une étude subséquente de 90 jours portant sur des mâles de cette souche, on a montré l'apparition de changements mineurs de la fonction rénale, réversibles après une période de récupération de six semaines.Note de bas de page 24 Note de bas de page 25 L'Organisation mondiale de la santé (OMS) était d'accord avec le déposant pour dire que le dosage biologique n'avait pas permis de mettre en évidence des effets oncogènes liés à la trifluraline.Note de bas de page 23 La trifluraline ne s'est pas révélée mutagène, avec ou sans activation métabolique, dans un certain nombre de tests microbiens portant sur divers organismes, notamment lors de tests d'Ames effectués chez Salmonella typhimurium.Note de bas de page 22 Note de bas de page 27 Note de bas de page 28 On a également obtenu des résultats négatifs pour un essai de létalité dominante effectué chez Drosophila, sur un systèmeNote de bas de page 21 de lymphomes de souris in vitro et pour plusieurs essais effectués in vivo chez des mammifères, notamment un essai de létalité dominante et un test d'anomalies chromosomiques effectués chez la souris (études non publiées citées dans un document d'information de l'OMS préparé pour la référence 24). Un test visant à déceler des anomalies chromosomiques, effectué in vitro sur des cultures de lymphocytes humains, a donné des résultats positifs,Note de bas de page 29 de même que plusieurs essais effectués in vivo sur de la moelle osseuse de souris, avec des concentrations élevées, alors que ce n'était pas le cas avec des concentrations faibles (1/100e 30,31 de la DL50).
On ne sait pas avec certitude si la trifluraline utilisée pour ces tests était très contaminée avec de la nitrosamine.
La trifluraline n'a pas provoqué d'effets tératogènes chez le rat, le chien ni sur le lapin, à des doses allant jusqu'à 1 000 mg/kg p.c.Note de bas de page 2 Note de bas de page 21 Note de bas de page 24 Des manifestations d'embryotoxicité, notamment une cardiomégalie, des côtes ondulées, une réduction du poids corporel et une augmentation du nombre d'avortons apparaissaient aux doses maternelles supérieures à 10 et à 20 mg/kg p.c., chez le rat et le chien, respectivement.Note de bas de page 2 Note de bas de page 21 Note de bas de page 24 On a observé des effets sur la reproduction, notamment une diminution du nombre de petits par portée et un accrois-sement des cas d'avortements spontanés et de morts-nés, chez des lapines ayant reçu une dose supérieure à 225 mg/kg p.c. par gavage du 6e au 18e jour de la gestationNote de bas de page 21 Note de bas de page 24 et à une dose supérieure à 200 ppm introduite dans les aliments (10 mg/kg p.c.) dans le cadre d'études de la reproduction étalées sur deux, trois et quatre générations de rats.Note de bas de page 5 Note de bas de page 11 Note de bas de page 21 Note de bas de page 24 Note de bas de page 25
En se basant sur une évaluation faite par la Direction des aliments du ministère de la Santé et du Bien-être social, on a établi l'apport quotidien négligeable (AQN) comme suit :Note de bas de page 25
AQN = [4,8 mg/kg p.c. par jour] / 1000 = 0.0048 mg/kg p.c. par jour
où :
- 4,8 mg/kg p.c. par jour est la dose sans effet nocif observé fixée dans le cadre d'une étude alimentaire de un an effectuée chez le chien au cours de laquelle on a noté des changements du poids du foie et de la rate ainsi que des changements dans la chimie du sérum (fraction lipidique et fraction protéinique)Note de bas de page 25
- 1 000 est le facteur d'incertitude (multiplié par 10 pour la variation interspécifique; multiplié par 10 pour la variation intraspécifique; et multiplié par 10 pour les limites de la base de données).
La concentration maximale acceptable (CMA) a été calculée à partir de cet AQN, comme suit :
CMA = [0.0048 mg/kg bw per day × 70 kg bw × 0.20] / 1.5 L/d ≈ 0.045 mg/L
- 0,0048 mg/kg p.c. par jour est l'AQN, tel que calculé ci-dessus
- 70 kg est le poids corporel moyen d'un adulte
- 0,20 est la proportion de l'apport quotidien total considéré arbitraire-ment comme étant ingéré dans l'eau potable (la concentration maximale théorique des résidus dans les aliments canadiens est actuellement inférieure à 10 pour cent de l'AQN; l'attribution de 80 pour cent de l'apport à d'autres sources permettrait de tenir compte d'apports supplémentaires provenant de la nourriture si des limites de tolérance devaient être fixées à l'avenir)
- 1,5 L/jour est la consommation moyenne quotidienne d'eau potable d'un adulte.
La CMA est établie à partir d'un effet non-cancer. Toutefois, parce qu'une augmentation liée à la dose du nombre de tumeurs de l'épithélium des cellules transitionnelles des reins et de la vessie chez un sexe d'une espèce de rongeur, après l'administration par voie alimentaire de trifluraline, a été observée dans une seule étudeNote de bas de page 18 et parce que le composé de structure analogue éthylfluraline est considéré comme étant cancérogène chez les animaux, on a calculéNote de bas de page 32 les risques de cancer potentiel durant une vie résultant de l'exposition à la trifluraline pour vérifier que la CMA offre une protection suffisante.
Le risque maximal de cancer potentiel pour toute une vie résultant de l'ingestion de 1 µg/L de trifluraline dans l'eau potable a été estimé par la méthode d'extrapolation linéaire robuste comme étant de 4,5 ×10-7, si l'on se base sur l'incidence combinée des tumeurs bénignes et malignes des reins et de la vessie urinaire. On estime donc à 2,0 × 10-5 le risque pour la durée d'une vie après exposition à de l'eau potable contenant de la trifluraline, soit 45 µg/L. Ce risque est donc légèment au-dessus de la valeur considérée essentiellement négligeable ».
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