Recommandations au sujet de la qualité des eaux utilisées à des fins récréatives au Canada : Agents pathogènes microbiologiques et dangers biologiques : Autres dangers biologique

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3.0 Autres dangers biologiques

La présente section fournit des conseils sur les autres organismes pouvant avoir une incidence sur la valeur récréative des eaux naturelles, en nuisant à la santé ou au confort des usagers ou en faisant obstacle à la jouissance des lieux en rendant ces derniers dangereux, désagréables d’un point de vue esthétique ou autrement inutilisables. Ces organismes sont des espèces libres qui sont présentes naturellement dans les eaux récréatives. Les autorités responsables de la gestion des eaux récréatives et le grand public devraient être tenus au courant des risques possibles que posent ces organismes, ainsi que des mesures qui peuvent être prises pour limiter les risques d’exposition. Cette liste ne se veut pas exhaustive; il revient aux autorités responsables de fournir au besoin des informations sur d’autres organismes importants sur le plan régional ou local.

3.1 Schistosomes à l’origine de la dermatite du baigneur

La dermatite du baigneur (dermatite schistosomiale ou dermatite cercarienne) est causée chez l’être humain par une réaction à la pénétration cutanée de plathelminthes parasites ou « schistosomes » qui appartiennent à la famille des Schistosomatidae et qui peuvent infecter certaines espèces d’oiseaux et de rongeurs aquatiques (Manitoba Water Stewardship, 2007). Les espèces connues responsables de la dermatite du baigneur comprennent les membres des genres Austrobilharzia,Trichobilharzia, Dendritobilharzia, Gigantobilharzia et Schistosomatium (Levesque et coll., 2002; CDC, 2004a; Gordy et coll., 2018). Il convient d’établir une distinction entre cette dermatite et la schistosomiase humaine, une infection beaucoup plus grave causée par des espèces du genre Schistosoma qui ne s’observe d’ordinaire que dans les régions tropicales (OMS, 2003).

Les schistosomes à l’origine de la dermatite du baigneur ont un cycle biologique à deux hôtes : un hôte définitif (oiseau ou rongeur aquatique) et un hôte intermédiaire (certaines espèces d’escargots d’eau). Ce sont les escargots d’eau qui produisent la forme du parasite (c.-à-d. le cercaire) pouvant infecter les humains. Une fois qu’un escargot est infecté (p. ex. à la fin du printemps par des oiseaux aquatiques migrateurs), il faut généralement jusqu’à 1,5 mois pour que les cercaires émergent. La température de l’eau peut avoir un effet sur la libération de cercaires matures par les escargots infectés, les concentrations étant plus fortes dans les eaux plus chaudes (Verbrugge et coll., 2004). Des eaux plus chaudes et le cycle biologique du parasite expliqueraient en partie pourquoi les cas d’infection sont plus fréquents en été. L’été est également une période où les activités récréatives augmentent au Canada, ce qui accroît l’exposition éventuelle à ce parasite. On trouve des cercaires dans les endroits où les populations d’escargots sont denses. D’après des données sur les éclosions, ces populations se trouvent habituellement en eau peu profonde le long du rivage, particulièrement aux endroits où les plantes aquatiques sont nombreuses (Levesque et coll., 2002; Leighton et coll., 2004; Verbrugge et coll., 2004). En outre, les vents du large peuvent diriger les cercaires vers les rivages dépourvus d’escargots (Rudko et coll., 2018; Sckrabulis et coll., 2020).

Les humains sont des hôtes accidentels (ou hôtes cul-de-sac) de ces parasites. Les cercaires qui viennent en contact avec des humains pénètrent dans la couche externe de la peau, mais ils meurent rapidement, car ils ne peuvent plus continuer à se développer. La présence des cercaires sous la peau provoque une réaction allergique (c.-à-d. une dermatite schistosomiale). Les baigneurs ressentent d’abord un picotement, des démangeaisons ou une sensation de brûlure. De petits boutons rougeâtres apparaissent d’ordinaire dans les 12 heures qui suivent l’infection; ces boutons peuvent ensuite se transformer en cloques ou en éruptions cutanées accompagnées d’une sensation de démangeaison encore plus forte. Les effets de la dermatite du baigneur peuvent se faire sentir peu après la baignade, et même en quelques minutes dans certains cas. L’infection est spontanément résolutive et dure habituellement deux à cinq jours, mais les symptômes peuvent toutefois persister jusqu’à deux semaines. La dermatite du baigneur n’est pas contagieuse. Toutefois, comme elle est causée par une réaction allergique, les personnes atteintes peuvent devenir plus sensibles aux infections subséquentes. Dans ces cas-là, les symptômes deviennent plus intenses et se manifestent plus rapidement (British Columbia Ministry of Health, 2018). La sensibilité peut varier considérablement d’une personne à l’autre; certaines réagissent fortement alors que d’autres ne montrent aucun signe d’infection. On recommande aux personnes qui présentent une réaction grave de consulter un professionnel de la santé pour recevoir un traitement médical. Les traitements proposés pour soulager les démangeaisons comprennent le recours à des bains de sel d’Epsom, de bicarbonate de sodium ou de farine d’avoine colloïdal et l’application de compresses froides, ainsi que l’utilisation de médicaments antiprurigineux comme les crèmes à base de corticostéroïdes ou les lotions à la calamine, et la prise d’antihistaminiques (Manitoba Water Stewardship, 2007; British Columbia Ministry of Health, 2018). On recommande aux personnes atteintes de ne pas se gratter pour éviter tout risque de surinfection bactérienne (CDC, 2004b).

Dans la plupart des eaux récréatives du Canada, on considère que le risque de dermatite du baigneur lié aux loisirs aquatiques est faible. Une recension des épisodes de dermatite du baigneur signalés au Canada a révélé très peu de cas documentés (seulement 280) sur une période de plus de 60 ans, et indique que seulement une ou deux éclosions se produisent tous les dix ans (Gordy et coll., 2018). Toutefois, ces infections ne sont souvent pas déclarées puisque les symptômes sont habituellement bénins et que les personnes atteintes ne jugent pas opportun de consulter un médecin. Pour mieux saisir l’ampleur de la sous-déclaration et évaluer l’incidence réelle de la dermatite du baigneur, Gordy et coll. (2018) ont créé un questionnaire facultatif en ligne, qui était accessible partout au pays de 2013 à 2017. L’enquête a permis de recenser 3 882 cas de dermatite du baigneur pendant les cinq étés où le site Web était actif. Les cas signalés sont survenus dans toutes les provinces canadiennes, sauf l’Île-du-Prince-Édouard. Ce travail confirme que, bien que le risque de contracter la dermatite du baigneur soit faible par rapport au nombre de personnes qui pratiquent des activités récréatives chaque année, les utilisateurs des eaux récréatives doivent être sensibilisés aux risques potentiels dans les zones touchées.

3.1.1 Gestion des risques sanitaires liés aux schistosomes

On considère que les schistosomes responsables de la dermatite du baigneur sont présents à l’état naturel dans les eaux de surface canadiennes. Ils ne sont pas liés à la pollution fécale; leur présence n’est donc pas décelée par les analyses standard de la qualité de l’eau pour les indicateurs recommandés de contamination fécale. La présence de ces organismes dans les eaux naturelles dépend d’un certain nombre de facteurs biologiques et environnementaux. Il est donc très difficile de prédire où et quand la dermatite du baigneur risque de devenir un problème. Certaines régions peuvent signaler un problème alors qu’elles en étaient auparavant exemptes. De même, les régions où la dermatite du baigneur a été signalée ne demeureront pas nécessairement un problème. La propagation des parasites responsables de la dermatite du baigneur nécessite la présence en nombres suffisants des hôtes principaux et secondaires.

On recommande, en vue de réduire le risque d’exposition humaine à ces schistosomes dans les eaux récréatives, une stratégie de gestion combinant à la fois des mesures visant à contrôler la gravité du danger pour la qualité de l’eau et des mesures pour limiter l’exposition durant les périodes ou dans les régions dont on pense qu’elles présentent des risques accrus. Pour aider à contrôler la présence de schistosomes, il est notamment recommandé d’éviter de nourrir les oiseaux aquatiques et, dans la mesure du possible, d’enlever les déchets organiques qui se trouvent dans le principal habitat des escargots.

Il convient d’afficher des avis dans les zones de loisirs aquatiques où des cas de dermatite du baigneur ont été signalés pour informer clairement le public du risque d’exposition. Un avis d’interdiction de baignade pourrait également être publié, à la discrétion de l’autorité responsable. Pour en savoir plus sur l’affichage de renseignements dans les zones de loisirs aquatiques, consulter le document Comprendre et gérer les risques dans les eaux récréatives (Santé Canada, en cours de publication-d).

Une autre approche de réduction des risques consiste à distribuer du matériel informatif décrivant les mesures que chacun peut prendre pour éviter tout risque d’exposition ou, le cas échéant, réduire la gravité des symptômes d’une infection. Les conseils fournis dans les documents de communication destinés au grand public pourraient inclure les éléments suivants :

3.2 Plantes vasculaires aquatiques et algues

Les plantes vasculaires aquatiques (macrophytes) et les algues peuvent nuire à l’utilisation des eaux à des fins récréatives. Il est difficile d’estimer l’ampleur de la nuisance que peuvent causer ces organismes, que ce soit sur le plan de leur degré d’interférence avec les activités récréatives, ou sur le plan des risques potentiels pour la santé des usagers des eaux récréatives.

La présence de ces organismes peut poser un risque pour la sécurité des usagers. Les baigneurs risquent de s’empêtrer dans les feuilles des plantes aquatiques. Les amas végétaux peuvent empêcher les gens de voir le fond de l’eau et les dangers sous-marins, et empêcher les surveillants d’apercevoir les baigneurs en difficulté. Les algues qui s’agrippent aux rochers et aux autres substrats (c’est-à-dire le périphyton) peuvent les rendre glissants et provoquer des immersions non voulues dans l’eau ou des blessures.

La croissance excessive de plantes et d’algues peut également entraîner des problèmes d’ordre esthétique dans les zones de loisirs aquatiques. Les macrophytes peuvent atteindre de fortes densités et rendre les zones peu profondes, près des rives, impropres à toute activité récréative (Priyadarshi, 2005). Les amas et tapis végétaux qui se délogent peuvent s’échouer sur les rives, où leur décomposition peut conduire à une pollution des plages. En plus d’être inesthétiques, ces amas peuvent également nuire à la jouissance des lieux en produisant des odeurs désagréables et en limitant l’accès à la rive. On a par ailleurs avancé qu’ils pourraient poser un risque pour la santé en attirant des animaux indésirables et en fournissant un milieu propice à la reproduction de diverses espèces d’insectes et de bactéries (Whitman et coll., 2003). Les organismes les plus nuisibles de ce point de vue sont les espèces d’algues vertes du genre Cladophora (Priyadarshi, 2005). On a recensé de nombreux cas de plages ou de rivages souillés par des masses pourrissantes et nauséabondes de ces algues. Les tapis de Cladophora peuvent aussi servir d’habitat secondaire à des bactéries qui risquent d’altérer la qualité de l’eau dans les zones de baignade touchées (Whitman et coll., 2003; Ishii et coll., 2006; Englebert et coll., 2008; Verhougstraete et coll., 2010) et à des bactéries associées à la mortalité massive d’oiseaux (botulisme aviaire) (Lan Chun et coll., 2015). Les proliférations d’autres espèces d’algues non toxiques peuvent également causer des problèmes esthétiques et être confondues avec des proliférations de cyanobactéries. Celles-ci constituent un problème de santé publique, car elles peuvent contenir des cyanotoxines, et le contact avec des matières cyanobactériennes peut causer une irritation cutanée et des troubles gastro-intestinaux. On trouvera de plus amples renseignements sur les cyanobactéries dans le document Recommandations au sujet de la qualité des eaux utilisées à des fins récréatives au CanadaLes cyanobactéries et leurs toxines (Santé Canada, 2022b).

L’excès de nutriments dans l’eau peut stimuler la croissance des plantes et des algues; on donne à ce phénomène le nom d’eutrophisation. Ces nutriments peuvent provenir de sources diverses, y compris les eaux de ruissellement des terres agricoles, les eaux usées domestiques et les effluents industriels, qui contribuent tous aux apports en phosphore et en azote dans les écosystèmes aquatiques et qui peuvent mener à l’eutrophisation. La détérioration de la qualité de l’eau découlant de l’eutrophisation peut réduire les possibilités d’activités récréatives (Chambers et coll., 2001; Watson et coll., 2017). Des recommandations pour la qualité de l’eau au Canada ont été élaborées pour le phosphore et l’azote, en vue de protéger le milieu aquatique contre l’accumulation de ces nutriments et leurs effets sur les organismes aquatiques (CCME, 1999).

3.2.1 Gestion des risques sanitaires

Il est déconseillé de se livrer à des activités récréatives dans les régions où les plantes aquatiques et les algues sont présentes en quantités telles que les autorités responsables estiment qu’elles présentent un risque potentiel pour la santé ou la sécurité des usagers des eaux récréatives. On recommande de procéder à une enquête relative à la sécurité et à l'hygiène du milieu au début de chaque saison de baignade, afin de déterminer les dangers possibles pour la sécurité qui pourraient se présenter dans une zone d’eaux récréatives donnée. En cas de problème, des avis peuvent être affichés pour rappeler au public que ces végétaux peuvent nuire à la visibilité des baigneurs et présenter un risque pour la sécurité des baigneurs qui s’y empêtrent. On trouvera de plus amples informations sur l’affichage de tels avis dans le document Comprendre et gérer les risques dans les eaux récréatives (Santé Canada, en cours de publication-d).

Le recours à des méthodes plus efficaces de nettoyage des rives pour éliminer les masses de plantes et d’algues échouées constitue une autre façon de réduire les risques pour les usagers des eaux récréatives. Les mesures de gestion qui consistent à tenter d’éliminer ces organismes des eaux naturelles sont déconseillées. En effet, ces mesures nuisent au milieu aquatique et elles sont en général peu efficaces tant d’un point de vue pratique (les plantes repoussent rapidement) que d’un point de vue économique (beaucoup d’heures de travail rémunéré). Bon nombre de plantes aquatiques et d’algues offrent également un habitat important pour les poissons et les autres biotes aquatiques. Le recours à des produits antiparasitaires n’est pas non plus recommandé, puisque ces produits risquent de devenir un danger pour les usagers des eaux récréatives lorsqu’ils ne sont pas utilisés correctement. En outre, l’application de pesticides pourrait provoquer la libération de toxines cyanobactériennes si des cyanobactéries productrices de toxines sont présentes. La détermination des principales sources d’apports nutritifs dans le bassin versant et l’élaboration de stratégies de réduction de ces apports constituent par ailleurs des mesures de gestion à plus long terme pouvant réduire l’incidence de ces organismes.

3.3 Autres organismes

De nombreux autres organismes peuvent nuire à l’utilisation sûre et agréable des eaux récréatives au Canada. Par exemple, sur certaines plages côtières, les méduses peuvent infliger des piqûres douloureuses et potentiellement graves aux usagers des eaux récréatives qui entrent en contact avec elles. Par ailleurs, les zones infestées de sangsues sont à éviter. Enfin, les baigneurs peuvent se blesser en marchant sur des oursins et sur des coquilles de moules. Comme la présence de ces organismes est souvent limitée à des zones ou à des régions particulières, on recommande que, le cas échéant, les autorités responsables fournissent aux usagers des eaux récréatives les renseignements utiles à leur sujet. Il peut, par exemple, s’agir d’informer les gens sur les risques que peuvent poser ces organismes, ou de mesures permettant de réduire les risques d’exposition.

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