Opération Gallant

Nom de l'opération internationale :  Commissions internationales de surveillance et de contrôle (CISC)

Dates de l'opération internationale :   1973/01/29 – 1975/04/30

Organisme responsable :   « Accord sur la cessation de la guerre et le rétablissement de la paix au Vietnam »

Nom de la région : Asie

Lieu :   Vietnam

Nom de l'opération canadienne : Opération GALLANT

Dates de l'opération canadienne : 1973/01/29 – 1973/07/31

Mandat de la mission :  

Fournir une équipe neutre pour vérifier et surveiller le respect des conditions de l’Accord de paix de Paris.

Notes sur la mission :  

Dans les Accords de Genève signés en juillet 1954, on prévoyait la création d'un État vietnamien unique, mais en raison de désaccords concernant le processus d'élection cette année-là, on a assisté à la création de facto de deux États distincts, soit la République du Vietnam (Sud-Vietnam), appuyée par les États-Unis, et la République démocratique du Vietnam (Nord-Vietnam), soutenue par l'Union soviétique. Presque immédiatement, les groupes communistes et populistes dans le Sud, appuyés par le régime du Nord, ont entamé une campagne de guérilla visant à réunifier le pays par la force, sous l'autorité d'Hanoï. Cette insurrection s’est amplifiée jusqu’à ce qu'une véritable guerre se déclare en 1965, lorsque les États Unis (avec l’appui de quelques alliés) et le Nord Vietnam ont commencé à s’affronter ouvertement sur une grande échelle. En 1972, le gouvernement révolutionnaire provisoire du Sud Vietnam (Viêt cong) et l’armée nord vietnamienne contrôlaient un territoire de plus en plus étendu dans le Sud tandis que le gouvernement sud vietnamien perdait progressivement la mainmise sur le reste du pays. Les États Unis désiraient donc ardemment négocier un accord de paix qui leur permettrait de retirer « honorablement » leurs troupes du Sud Est asiatique. Ainsi, le 27 janvier 1973, après plusieurs années de pourparlers épisodiques, les États Unis, la République démocratique du Vietnam (Nord-Vietnam), la République du Vietnam (Sud-Vietnam) ainsi que le gouvernement révolutionnaire provisoire du Sud Vietnam (Viêt cong) ont conclu à Paris l'« Accord sur la cessation de la guerre et le rétablissement de la paix au Vietnam ». Celui-ci prévoyait l’établissement d’une commission militaire mixte (CMM) composée de représentants des quatre parties signataires, afin de surveiller la mise en œuvre de l'Accord et de régler les litiges en découlant. Il établissait aussi la Commission internationale de contrôle et de surveillance (CICS), un organe neutre ayant pour rôle d’examiner les litiges et de superviser certains aspects de l’Accord.

Au cours d’une deuxième conférence internationale tenue à Paris du 26 février au 2 mars 1973, on a établi les mécanismes de rapport de la CICS et fixé ses règles de fonctionnement. Le Canada, la Hongrie, l’Indonésie et la Pologne, soit les quatre pays chargés de former cette Commission, ont pris part aux négociations et ratifié l’accord le 2 mars.

La CICS, dotée d’un effectif de 1 160 personnes, siégeait à Saigon, remplaçant en fait l’ancienne Commission internationale de surveillance et de contrôle (CISC). Elle a mis sur pied sept équipes pour superviser les échanges de prisonniers de guerre et de détenus civils, trois équipes responsables des opérations régionales et cinq équipes s’occupant d’autres tâches, en fonction des impératifs. De plus, 7 états-majors régionaux dans l’ensemble du Sud Vietnam allaient surveiller les activités de 40 équipes sur le terrain, chacune d’elles composées de représentants des quatre pays membres de la CICS. Ces équipes détenant le statut diplomatique devaient être libres de circuler à leur guise pour exercer leurs fonctions. Douze d’entre elles s’occuperaient d’inspecter des points d’entrée désignés au Sud Vietnam pour prévenir l’importation en contrebande de matériel de guerre interdit, tandis que deux autres se tiendraient disponibles pour faire des inspections à un point d’entrée choisi par le gouvernement sud-vietnamien. Chaque équipe de la CICS collaborait avec une équipe militaire mixte faisant partie de la CMM. Les équipes de la CICS devaient fournir aux équipes militaires mixtes des comptes rendus impartiaux sur les incidents.

Concrètement, les fonctions de la CICS consistaient à faciliter les échanges de militaires et de civils capturés ou détenus et à surveiller l’infiltration au Sud Vietnam de matériel de guerre interdit. La Commission devait aussi surveiller toutes les violations du cessez le feu que constataient ses observateurs ou qui lui étaient signalées par l'une des parties à l’entente ou par l’équipe militaire mixte, et mener enquête sur ces incidents. Un autre rôle, auquel toutefois le Canada n’a pas eu l’occasion de participer, était la surveillance des élections ouvertes à tous les partis qui devaient avoir lieu au Sud Vietnam.

Au cours des 60 premiers jours, les sept équipes concernées se sont rendues à divers endroits dans le Nord-Vietnam et le Sud-Vietnam pour superviser la libération de plus de 32 000 prisonniers de guerre. La remise en liberté des détenus civils posait plus de problèmes, car les gouvernements du Nord et du Sud voulaient tous deux en retirer un maximum d’avantages, tant sur le plan politique que sur celui de la propagande. Résultat, seul un faible pourcentage des détenus a été réellement relâché. Et quand il s’agissait de surveiller l’entrée en contrebande de matériel interdit, les autorités sud vietnamiennes coopéraient, mais pas le Viêt cong, d’où l’impossibilité pour la CICS d’accomplir ses tâches de manière juste et équitable. Il en allait de même pour son rôle de surveillance du cessez le feu : durant les six premiers mois, il y a eu au moins 18 000 violations signalées ayant entraîné 76 000 victimes, soit à peine 4 000 de moins que le total enregistré au cours des six derniers mois de véritables combats.

La CICS a enquêté sur 1 081 plaintes pendant la période de participation du Canada. Bien que 95 p. 100 de ces plaintes aient été déposées par le Sud Vietnam, un petit nombre d’entre elles seulement ont fait l’objet d’une enquête, à cause de cette même règle d’unanimité décisionnelle qui avait entravé la Commission : trop souvent, les représentants polonais ou hongrois concluaient que les coupables de la violation étaient plutôt les Sud Vietnamiens et qu’il n’y avait donc pas lieu de mener enquête ni de faire rapport. Bref, la Commission n’a rédigé qu’un petit nombre de rapports. Les commissions militaires mixtes étaient elles aussi peu efficaces, car lorsque des questions étaient soulevées, les manigances politiques les empêchaient de parvenir à une quelconque décision quant à l’interprétation des clauses de l’Accord de Paris.

L’Opération canadienne

Le Canada ayant participé aux travaux de la CISC Vietnam de 1954 jusqu’à sa dissolution en 1973, les autorités canadiennes, complètement désillusionnées tant par sa structure que par ses mécanismes de fonctionnement, doutaient que la CICS soit davantage en mesure d’assurer une paix et une stabilité durables. Par conséquent, même s’il a accepté de fournir des observateurs à la CICS pour une période initiale de 60 jours, le gouvernement canadien a insisté pour conserver un droit de retrait au cas où le travail de la Commission lui paraîtrait inefficace. La contribution canadienne à la CICS se composait de 240 militaires et de 50 représentants du ministère des Affaires étrangères.

Le gouvernement canadien ayant suivi le déroulement des négociations à Paris, il était prêt à agir au moment de la signature de l’Accord le 27 janvier. Les autorités des FC avaient commencé à planifier l’opération Gallant dès décembre 1972, et un détachement précurseur de deux personnes est arrivé à Saïgon quelques jours seulement avant le contingent canadien officiel lui même le 29 janvier. (Ce contingent était dirigé par Michel Gauvin, chef de la délégation canadienne et ambassadeur au Vietnam, ainsi que le Major général Duncan McAlpine, commandant des Forces canadiennes.) Tout ce personnel a été transporté par des appareils Hercules du 436e Escadron à partir de Trenton.

En fait, le Canada avait réagi si rapidement que les plans opérationnels de la CICS n’étaient pas encore prêts à l’arrivée du contingent; néanmoins, on a bientôt amené ses membres à leurs lieux d’affectation respectifs. Certains endroits n’étant accessibles que par la voie des airs, le 27 février, les autorités ont passé un contrat avec Air America Inc., une entreprise affiliée de façon notoire à l'Agence centrale de renseignement américaine (CIA) qui fonctionnait à présent sous le nom de « ICCS Air Services ». Toutefois, le refus du Viêt cong de clarifier les règles de survol du territoire sous son contrôle a empêché le réapprovisionnement de certains lieux d’affectation pendant plusieurs semaines ou davantage. Ainsi, des membres de l’équipe CICS à An Loc ont dû se débrouiller par eux mêmes durant 75 jours.

Il y a eu des victimes. Un hélicoptère de la CICS a été abattu le 7 avril au-dessus du territoire Viêt cong et les neuf passagers à bord ont péri. Il s'agissait du Capitaine canadien C.E. Laviolette, de deux Hongrois, d'un Indonésien, de deux officiers de liaison viêt cong et des trois membres d’équipage. Après cet incident, tous les vols de la CICS ont été temporairement interdits. Puis, le 28 juin, deux officiers canadiens, les capitaines Ian Patten et Fletcher Thomson, ont été enlevés par les viêtcongs juste à l’est de Saïgon. Heureusement, grâce à d’habiles négociations, les autorités ont fini par obtenir leur libération au bout de 17 jours.

Sur le plan opérationnel, les conditions étaient pénibles, et les munitions explosives non explosées constituaient un danger constant, autant que les pièges laissés sur le terrain une fois les combats terminés. Pour leur part, bien que coupables de nuire à une grande partie du travail de la CICS, les viêtcongs s’efforçaient en général de rendre aussi agréables que possible les conditions de vie aux postes de surveillance dont certains, surtout ceux situés près des anciennes bases américaines, étaient très bien équipés. Par conséquent, on a appliqué une politique de rotation consistant à affecter alternativement les équipes CICS dans les centres bien équipés et ceux aux conditions de vie plus difficiles.

Bien que convaincu dès le premier mois que la CICS était tout aussi impuissante que la CISC, le gouvernement canadien a décidé de maintenir sa participation deux mois de plus que la période annoncée initialement; mais faute de perspectives d’amélioration, il a finalement annoncé son intention de retirer son contingent le 31 juillet 1973. À cette date, deux Boeing 707 du 437e Escadron sont venus chercher à Saigon l’ensemble du contingent canadien rattaché à la CICS, tandis qu’un appareil Hercules du 436 e Escadron rapportait les bagages et le reste de l’équipement. Les Canadiens ont été remplacés par des Iraniens jusqu’à la dissolution de la CICS entraînée par la chute du gouvernement sud vietnamien le 30 avril 1975.

Le Canada a maintenu un navire près du Vietnam de mai à juillet 1973, sous le nom d’opération WESTPLOY. Et même s’ils n’étaient pas rattachés à la CICS, le NCSM Terra Nova et le NCSM Kootenay se tenaient sur place au cas où il aurait fallu évacuer d’urgence le contingent canadien.

 

 

Des Canadiens survolent la base navale de Saigon à bord d’un hélicoptère de la CICS.

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