Discours-programme du ministre de la Défense nationale Bill Blair à la Conférence sur la sécurité et la défense de l’Institut de la CAD à Ottawa

Discours

Le 7 mars 2024

Bonjour tout le monde.

Tout d’abord, permettez-moi de saluer et de remercier Youri Cormier et les représentants de l’Institut de la Conférence des associations de la défense, ainsi que leur président, le général Guy Thibault. Je vous remercie d’organiser ce dialogue important année après année. Je tiens également à dire à quel point il est difficile, et ce n’est pas la première fois que je dois succéder au général Thibault au micro, de relever le défi de prendre la parole, mais c’est toujours un privilège, Monsieur.

De plus, je vous remercie, tous autant que vous êtes, d’être présents aujourd’hui – membres du Sénat, de la Chambre des communes et des Forces armées canadiennes, invités de marque du monde entier – et, si vous me le permettez, j’aimerais également souhaiter chaleureusement la bienvenue à mon homologue letton et bon ami, le ministre de la Défense Andris Sprūds, qui est venu de Riga pour se joindre à nous. Sa présence ici témoigne de l’importance des relations qui se sont tissées entre le Canada et la Lettonie dans le cadre de nos engagements envers l’OTAN dans ce pays.

Je voudrais également profiter de l’occasion pour saluer le chef d’état-major de la défense, le général Wayne Eyre. Général, c’est l’occasion de vous remercier, et j’espère que j’aurai de nombreuses autres occasions de vous remercier de votre travail au service de ce pays depuis des décennies.

Collègues et amis, comme vous le savez tous et comme votre rapport d’hier soir vous le révèle, nous vivons une période de grands défis et d’incertitude. Il suffit de penser à la guerre en Ukraine, au conflit au Moyen-Orient ou aux tensions dans la région indo-pacifique, ou encore aux nouvelles menaces qui pèsent sur notre souveraineté dans l'Arctique, aux progrès technologiques rapides et aux changements climatiques. Dans notre monde interconnecté, tous ces défis ont une incidence directe sur le Canada et la population canadienne, ainsi que sur notre sécurité nationale, notre prospérité et notre mode de vie. En raison du fait que certains acteurs mondiaux cherchent à remettre en cause les règles internationales que nous avons mises en place, le Canada augmente et doit augmenter ses investissements dans la sécurité et la défense.

Permettez-moi de reconnaître que nous avons beaucoup travaillé; cependant, nous avons encore beaucoup à faire. Nous augmentons nos contributions dans le cadre de nos alliances internationales; nous redoublons d’efforts pour protéger l’ordre international fondé sur les règles qui nous a permis de rester en sécurité pendant près de 80 ans. Nous avons lu récemment dans la presse, et je tiens à remercier Murray Brewster pour son reportage d’hier, des articles attirant l’attention des Canadiennes et des Canadiens sur l’état de préparation des Forces armées canadiennes.

Comme l’a déclaré le général, l’ancien amiral Mark Norman, il s’agit d’une situation qui a évolué en ce sens pendant des décennies. Je ne vois vraiment pas l’intérêt de passer beaucoup de temps à essayer de comprendre comment nous en sommes arrivés là. Nous devons nous concentrer sur ce qui doit être fait et nous mettre au travail. Nous avons beaucoup de travail à faire, et c’est ce dont je voudrais vous parler brièvement aujourd’hui.

Commençons par la guerre en Ukraine. Je viens de me rendre à Kiev avec le premier ministre Trudeau et la vice-première ministre Freeland pour marquer les deux ans de l’invasion à grande échelle de ce pays ordonnée par Poutine. J’ai eu l’occasion de voir de près les ravages causés par les forces russes. Nous avons rencontré des troupes ukrainiennes qui ont courageusement défendu l’aéroport Hostomel aux premières heures de la guerre, ce qui constitue l’un des premiers grands échecs stratégiques de la Russie ainsi qu’un signe de ce qui est à venir. J’ai eu la chance d’être le témoin direct de l’esprit inébranlable du peuple ukrainien, qui continue à se battre pour sa patrie, sa liberté et son avenir, qui, en toute franchise, est aussi le nôtre.

Le Canada a soutenu ses amis ukrainiens dès le premier jour, en collaboration avec plus de 50 alliés et partenaires. Lors de son passage à Kiev, le premier ministre a signé un accord historique de coopération en matière de sécurité avec l’Ukraine. Cet accord définit notre soutien à long terme à l’Ukraine dans la défense de sa souveraineté et de son intégrité territoriale, dans la protection de son peuple et dans l’aide à la reconstruction de son économie et à la création d’un avenir stable et sûr pour ce pays. On prévoit dans cet accord une aide financière militaire de plus de 3 milliards de dollars rien que pour cette année. Depuis le début de la guerre, le Canada a versé plus de 4 milliards de dollars sous forme d’aide militaire, ce qui comprend des chars, des véhicules blindés, des munitions et des drones.

Nous aidons également l’Ukraine à protéger ses systèmes contre toute activité cybernétique malveillante et nous échangeons des renseignements essentiels. Je suis très fier que nous ayons formé des membres de l’armée ukrainienne – du personnel de soins de santé de combat et des sapeurs en Pologne, de nouvelles recrues au Royaume-Uni, des officiers subalternes en Lettonie, et bien d’autres encore. En fait, depuis 2015, nous avons formé plus de 40 000 membres de l’armée ukrainienne dans le cadre de l’opération UNIFIER. Nous avons tout enseigné – de la capacité de survie au combat aux tactiques de patrouille ou encore au déminage. En début de semaine, j’ai eu l’occasion et le privilège de me rendre à la BFC Edmonton pour y rencontrer les troupes canadiennes qui ont formé les Ukrainiens aux techniques de déminage qui permettent de sauver des vies.

Nous devons continuer, car le combat de l’Ukraine pour la liberté est un combat pour la démocratie en soi. Lorsque des despotes comme Vladimir Poutine envahissent leurs voisins à leur guise, ils compromettent les règles internationales qui assurent notre sécurité depuis plus de 80 ans et menacent la souveraineté et la sécurité de tous les pays. La communauté internationale ne doit pas tolérer cette situation, et je tiens à vous assurer que le Canada ne la tolérera pas. Nous soutiendrons l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra.

Sur cette note, aujourd’hui, et parce que je suis un politicien, je vais faire quelques annonces. Je vous annonce une nouvelle initiative qui permettra aux innovateurs canadiens d’élaborer des solutions qui aideront l’Ukraine à aller de l’avant et à déminer ses champs de mines. Dans le cadre du programme IDEeS du MDN, nous lançons le défi aux innovateurs canadiens en anglais, en français et en ukrainien. Les candidats retenus pourraient recevoir jusqu’à un million de dollars pour mettre au point leurs concepts. Notre objectif est de trouver des solutions qui pourront être présentées aux experts militaires canadiens et ukrainiens dès l’année prochaine. Ce projet permettra de financer les meilleurs concepts susceptibles de sauver des vies ukrainiennes et de protéger des équipements militaires ukrainiens essentiels.

Je vous ferai également savoir que lorsque je me suis rendu en Ukraine et que le général et moi-même avons eu l’occasion de rencontrer le ministre de la Défense stratégique, celui-ci nous a confié que les Ukrainiens avaient beaucoup appris en matière de combat contre les Russes au cours des deux dernières années et qu’ils étaient prêts à nous faire profiter de leurs connaissances. Je pense qu’il s’agit là d’une occasion à saisir non seulement pour nos forces armées, mais aussi pour l’industrie canadienne. En effet, la nature de la guerre a évolué de manière très importante sur les champs de bataille ukrainiens, et nous avons l’occasion de retenir les leçons de cette expérience pour les appliquer à notre propre avenir.

Outre l’expertise en matière de déminage que les Ukrainiens ont reçue de notre part, ils nous ont également fait savoir très clairement qu’ils avaient besoin de munitions d’artillerie. Ils en ont besoin maintenant et ils en ont besoin à long terme. Nous avons fait don à l’Ukraine de dizaines de milliers de munitions d’artillerie 155 mm conformes à la norme de l’OTAN. Toutefois, l’Ukraine a besoin de beaucoup plus de munitions et, très franchement, le Canada et les Forces armées canadiennes en ont aussi besoin. C’est pourquoi j’annonce aujourd’hui que nous investissons 4,4 millions de dollars auprès de General Dynamics – Produits de défense et Systèmes tactiques et d’IMT Defence. Ce financement permettra à ces fabricants canadiens d’élaborer des plans détaillés pour moderniser la production et augmenter la capacité de production de munitions de calibre 155 mm.

Cette planification facilitera les prochaines étapes. Nous avons déjà investi pour augmenter la production d’artillerie et de munitions au Canada, mais comme je l’ai admis, il reste encore beaucoup de travail à faire. Je tiens à assurer à la population canadienne que nous travaillons actuellement avec l’industrie pour trouver des moyens d’augmenter considérablement la production de ces munitions au Canada. J’espère que nous aurons beaucoup plus à dire à ce sujet dans un avenir très proche, parce que nous devons accroître notre capacité à nous défendre, à soutenir nos alliés et à approvisionner en armes nos amis ukrainiens.

Notre appui à l’Ukraine nous permet également de protéger le flanc oriental de l’OTAN, comme je l’ai indiqué plus tôt en présentant mon ami letton. Nous sommes fiers de diriger le groupement tactique de la présence avancée renforcée de l’OTAN en Lettonie. Nous faisons plus que doubler notre présence militaire en Lettonie pour atteindre la taille d’une brigade complète, avec jusqu’à 2 200 militaires en déploiement continu d’ici à 2026. Nous nous efforçons de faire en sorte que ces troupes disposent de l’équipement dont elles ont besoin. Le Canada a déjà envoyé 15 chars Leopard 2 en Lettonie et, à partir de cet été, nous commencerons également à envoyer des hélicoptères.

L’année dernière, lors de cette conférence, ma prédécesseure, la ministre Anand, a annoncé que le Canada utiliserait les besoins opérationnels urgents pour acquérir des équipements supplémentaires pour nos forces lettones.

Nous avons besoin de nouvelles armes antichars, de capacités de défense aérienne et d’équipements de lutte contre les drones. Aujourd’hui, je peux vous dire que tous ces contrats ont été signés et que la livraison de ces armements essentiels et indispensables à nos troupes en Lettonie commencera dans le courant de l’année. Il s’agit là d’un exemple d’approvisionnement en matière de défense réalisé différemment. C’est aussi un exemple d’approvisionnement en matière de défense bien géré.

Nous apportons également notre expertise en matière de cybernétique à nos alliés de l’OTAN, notamment en Lettonie, où nous avons affecté du personnel militaire et civil pour aider à protéger les réseaux essentiels dans ce pays. En fait, un rapport publié par le British House of Commons Intelligence and Security Committee indique que le Canada est, avec le Royaume‑Uni, je cite, « en tête de peloton en matière de cybersécurité ».

À l’occasion du 75e anniversaire de l’OTAN, l’engagement du Canada à l’égard de l’alliance est solide et ne cessera de se renforcer. Comme le premier ministre s’y est engagé à Vilnius l’année dernière, nous devons faire plus et nous le ferons.

Permettez-moi d’évoquer brièvement la situation dans la région indo-pacifique, qui constitue une autre priorité pour le Canada. En tant que pays bordé par le Pacifique, le Canada reconnaît que la région indo-pacifique est cruciale pour sa sécurité et sa prospérité. Six de nos principaux partenaires commerciaux se trouvent dans cette région. C’est pourquoi nous resserrons nos liens avec nombre d’entre eux. Dans le cadre de sa stratégie indo-pacifique, le Canada déploie un plus grand nombre de navires et de personnels dans la région. L’année dernière, pour la première fois depuis des décennies, nous avons déployé trois navires de guerre dans la région indo-pacifique. Nous avons traversé le détroit de Taïwan. Nous continuerons à le faire et à en faire plus.

Nous ne ménageons pas nos efforts pour renforcer nos relations de défense avec des partenaires aux vues similaires. C’est pourquoi, en septembre dernier, le Canada et l’ANASE ont lancé leur partenariat stratégique. C’est également la raison pour laquelle nous avons signé un protocole d’entente sur la coopération en matière de défense avec les Philippines en janvier.

L’Indo-Pacifique est indispensable à notre avenir; c’est pourquoi le Canada doit faire davantage pour maintenir une présence persistante afin de pouvoir travailler avec ses partenaires et alliés au renforcement des règles et des normes qui assurent la sécurité des nations de l’Indo-Pacifique.

Ce travail dans le monde n’est pas possible si nous ne sommes pas forts chez nous, au Canada, et si nous ne sommes pas en sécurité en Amérique du Nord. Néanmoins, nous devons être lucides quant aux défis auxquels nous sommes confrontés. L’Arctique se réchauffe quatre fois plus vite que la moyenne mondiale. L’accessibilité de cette région s’accroît, ce qui signifie que la géographie ne nous offre plus la sécurité sur laquelle nous comptions autrefois. Nous savons que la Russie et la Chine nourrissent des ambitions dans l’Arctique, ce qui a des répercussions majeures sur la sécurité du Canada. Il nous incombe de relever ce défi.

Dans le cadre du plan canadien de modernisation du NORAD, nous investissons près de 40 milliards de dollars pour moderniser nos capacités au sein du NORAD au cours des 20 prochaines années. Cette modernisation sera absolument essentielle pour notre sécurité nationale. Elle renforcera l’alliance extraordinaire que le Canada et les États-Unis partagent; une alliance qui ne ressemble à aucune autre dans le monde. Nos investissements dans le NORAD prennent forme et nous allons construire un nouveau radar au-dessus de l’horizon arctique qui améliorera considérablement notre détection des menaces. Nous moderniserons nos infrastructures dans des endroits comme Alert, Inuvik, Yellowknife et Goose Bay, en consultation avec nos partenaires autochtones et nordiques. Et là où c’est possible, nous investirons dans des aérodromes, des routes et des infrastructures qui auront pour priorité de satisfaire les besoins de nos forces armées et de bénéficier aux communautés du Nord.

Au-delà de la modernisation des capacités du NORAD, j’ai annoncé en novembre que le Canada allait acheter jusqu’à 16 aéronefs P-8 Poseidon, ce qui représente un investissement de près de 10,4 milliards de dollars. Il s’agit d’aéronefs multimissions ultramodernes qui renforcent la capacité du Canada à assurer la surveillance maritime et terrestre au pays ainsi qu’à soutenir nos alliés. Ces aéronefs font partie des principales acquisitions en matière de défense en cours au Canada. Et comme je l’ai dit, nous avons encore beaucoup à faire.

En ce qui concerne la Force aérienne - je suis heureux de voir le général Kenny ici ce matin - nous avons été en mesure d’achever l’acquisition d’une nouvelle flotte de 88 chasseurs de cinquième génération F‑35. Leur livraison prend du temps; mais ces chasseurs seront livrés et intégrés dans notre Force aérienne. Nous investissons également dans de nouveaux aéronefs de ravitaillement et de transport et nous avons commencé la livraison de neuf de ces aéronefs dans un avenir immédiat. Comme je l’ai mentionné, nous avons, par ailleurs, conclu un contrat pour l’acquisition de P-8 et de 11 nouveaux drones. Ces investissements vont donner à notre Force aérienne les capacités dont elle a besoin pour remplir la mission que nous lui confions.

En même temps, je dois aussi admettre qu’il faut du temps pour fournir cet équipement. Nous devrons veiller à assurer la maintenance de notre flotte actuelle d’aéronefs afin de pouvoir continuer à accomplir les missions qui nous sont demandées. Nous réalisons de nouveaux investissements importants dans la Marine. Nous aurons 15 nouveaux navires de combat de surface canadiens, des navires de patrouille extracôtiers et de l’Arctique dans lesquels nous investissons; toutefois, nous sommes également confrontés à un énorme défi parce qu’il faut du temps pour livrer ces nouvelles plateformes importantes. Nous devons donc investir dans le soutien et la maintenance de notre flotte actuelle de navires de classe Halifax. Nous investissons également dans les véhicules blindés d’appui tactique et dans la technologie LC4ISR pour l’Armée canadienne. Il nous reste encore beaucoup à faire.

Ces capacités nous permettront de projeter notre puissance plus loin, plus rapidement et plus longtemps. Grâce à elles, il sera encore plus coûteux pour tout agresseur de remettre en cause notre souveraineté dans le Nord. Enfin, ces capacités permettront au Canada de mieux protéger l’Arctique, de patrouiller le long de nos côtes et de renforcer notre sécurité nationale.

Les dépenses en matière de défense du Canada vont en fait doubler, passant d’environ 18 milliards de dollars par an à plus de 40 milliards de dollars par an entre 2016 et 2026-27. Dans un monde aussi dangereux que le nôtre, compte tenu des nouvelles menaces auxquelles nous sommes confrontés, nous savons que nous devons faire beaucoup plus. Et je tiens à assurer à toutes les personnes présentes dans cette salle que nous ferons plus. De l’émergence des drones à l’importance accrue de la défense aérienne, sans oublier la nécessité de disposer de radars de pointe pour défendre notre continent, nous savons que beaucoup de choses ont changé au cours des dernières années.

Pour faire face au retour de la guerre terrestre à grande échelle et contribuer à l’OTAN, le Canada a besoin de plus de munitions d’artillerie, des moyens industriels pour les produire et de capacités de frappe de précision à longue portée. Il est urgent que le Canada et tous les pays de l’OTAN augmentent leur capacité de production. Pas seulement pour les obus d’artillerie, mais pour l’ensemble de la production militaire. En effet, la production est dissuasive, et une base industrielle de défense plus solide nous rendra plus forts et moins vulnérables à la coercition. Général, je comprends très bien que l’on qualifie certains de lobbyistes et d’hommes d’affaires. Je ne suis pas du tout d’accord.

En ce qui concerne notre nouvelle mise à jour de la Politique de défense, je considère qu’il ne s’agit pas seulement de politique militaire et de politique étrangère, mais aussi de politique industrielle, car manifestement, nos partenaires de l’industrie ont besoin de la clarté et de la certitude que cette mise à jour leur apportera. Nos partenaires de l’industrie doivent savoir dans quelle direction le Canada s’oriente. Ils doivent savoir quelles industries et quels produits ils devront produire pour appuyer notre mission de défense au Canada. Or, nous devons leur fournir cette certitude.

Pour relever les nouveaux défis qui pèsent sur notre sécurité dans l’Arctique, nous allons avoir besoin de capacités de surveillance sous-marine permanente et d’un solide réseau d’infrastructures arctiques qui nous permettra de projeter notre puissance dans notre région et d’y maintenir une présence importante. J’ai discuté avec des habitants du Nord, et lorsque nous parlons de souveraineté dans l’Arctique, ils affirment que le survol épisodique d’un avion ou même le passage d’un navire au large de la côte n’est pas suffisant. Ils nous indiquent que nous avons besoin d’une présence permanente et que nous devons investir dans les infrastructures ainsi que dans notre sécurité. Si nous ne défendons pas notre souveraineté dans le Grand Nord, ce n’est plus notre souveraineté. C’est donc notre obligation. C’est notre engagement. Je tiens à vous dire à tous que nous savons que nous devons faire plus et que nous ferons plus.

Pour gérer la fréquence et l’ampleur des catastrophes naturelles, j’ai été le ministre responsable de faire appel au général Eyre à de nombreuses reprises et de demander à l’armée de venir en aide à la population canadienne en cas d’urgence. Je suis conscient que ces interventions ont une incidence considérable sur notre personnel, sur sa formation et sur son état de préparation. Malgré tout, nous savons que lorsque les Canadiennes et Canadiens sont dans le besoin, les Forces armées canadiennes répondent toujours à l’appel.

Notre Force aérienne aura besoin de capacités d’aviation tactique modernes, et nous réalisons ces investissements. Il faudra du temps pour fournir ces capacités, mais lorsque celles-ci seront livrées, notre Force aérienne sera et restera l’une des meilleures au monde.

Mes notes indiquent maintenant que nous publierons bientôt la mise à jour de la Politique de défense du Canada. Aucun d’entre vous ne veut m’entendre dire bientôt. Je ne veux pas vous dire bientôt. Ce que je peux vous dire, c’est que nous avons travaillé avec acharnement. Le général Eyre, son équipe de commandement et moi-même avons expliqué ce dont les Forces armées canadiennes ont besoin, ce dont le Canada a besoin pour remplir ses obligations envers ses partenaires de l’alliance et, surtout, pour défendre son propre pays. Nous publierons bientôt cette mise à jour de la Politique de défense. Je n’ai pas de date à vous communiquer, mais je comprends l’urgence de le faire. J’en ressens l’urgence. Nous ressentons tous cette urgence. Nous avons besoin de cette clarté, de cette certitude, tout comme nos partenaires de l’industrie, les Canadiennes et Canadiens, ainsi que nos alliés.

L’année dernière, nous avons lancé des consultations pour recueillir des commentaires, et j’ai rencontré beaucoup d’entre vous pour connaître votre avis et vos suggestions. Nous savons ce qu’il faut faire. Nous vous avons entendus haut et fort. Nous savons que notre Politique de défense mise à jour doit apporter à l’industrie de défense canadienne la certitude et la clarté dont elle a besoin pour satisfaire les besoins de nos forces armées. En effet, la mise en place d’une base industrielle de défense nationale robuste et en mesure de s’adapter contribuera à assurer la sécurité de la population canadienne. La résilience fait de nous une cible plus difficile. Elle nous rend moins vulnérables à la coercition. Lorsque nous donnons cette certitude à l’industrie, celle-ci est là pour aider, pour aider nos partenaires de l’industrie, parce que nous sommes tous concernés par la même chose. Nous renforcerons donc la cybersécurité de nos partenaires, nous les aiderons à faire preuve de résilience et nous exploiterons ensemble les technologies émergentes. En ce qui a trait aux technologies émergentes, l’intelligence artificielle va transformer la façon dont nous définissons le Canada et sa population. Elle crée déjà de nouvelles possibilités, de nouvelles capacités et de nouveaux risques. Par conséquent, nous ne pouvons pas nous permettre de prendre du retard.

C’est pourquoi nous lançons aujourd’hui notre nouvelle stratégie en matière d’IA pour la Défense nationale et les Forces armées canadiennes. Cette stratégie vise à orienter la façon dont nous utilisons l’intelligence artificielle dans l’ensemble de la défense, de manière à ce que nous soyons davantage en mesure d’utiliser l’IA d’ici 2030. Cette stratégie nous aidera à utiliser les données et les ressources de manière plus efficace et permettra à la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes de collaborer plus étroitement avec l’écosystème d’innovation florissant du Canada et de veiller à ce que nous utilisions l’IA de manière responsable, éthique et sécuritaire. Comme l’IA continue de se perfectionner à un rythme rapide, il est impératif que nous demeurions pleinement opérationnels et interopérables avec nos partenaires de l’industrie, nos alliés et nos partenaires de la défense de partout dans le monde. C’est ce que cette stratégie vise à permettre.

J’aimerais aborder un sujet qui, à mes yeux, est peut-être le besoin le plus urgent des Forces armées canadiennes. Il s’agit de nos gens. Nous investissons dans la modernisation des capacités de nos forces armées. Nous sommes là pour travailler avec nos partenaires de l’industrie afin d’obtenir la certitude nécessaire pour appuyer nos troupes, et notre priorité doit toujours être les personnes, hommes et femmes, qui servent en uniforme. Rien de tout ce travail n’est possible sans eux. C’est pourquoi nous devons investir dans de nouveaux logements pour nos troupes. Nous avons accordé une augmentation de salaire à nos gens. Nous prenons des mesures concrètes pour mettre en place une institution plus diversifiée, plus inclusive et plus solidaire, qui puisse attirer et retenir les talents de tous les segments de la société canadienne.

En définitive, les Forces armées canadiennes doivent croître. Il nous manque beaucoup de personnel, près de 16 000 personnes au dernier décompte, tant dans la Force régulière que dans la Réserve. Lors de mes conversations avec les représentants des Forces armées canadiennes, ceux-ci m’ont expliqué tous les efforts qu’ils déploient et nous ont demandé d’être patients. Malheureusement, nous ne pouvons pas être patients. Il y a urgence. Nous devons changer la façon dont nous recrutons et maintenons en poste nos militaires. C’est pourquoi j’ai demandé à nos chefs militaires d’examiner attentivement la possibilité d’assouplir les conditions d’admissibilité au recrutement et d’abolir les exigences en matière de santé lorsqu’elles ne sont pas significatives ou pertinentes. Enfin, je propose de créer une période probatoire pour l’enrôlement des nouveaux militaires, en particulier des résidents permanents, et de simplifier le processus d’habilitation de sécurité.

Nous avons connu une situation remarquable lorsque nous avons annoncé l’année dernière que nous allions permettre aux résidents permanents du Canada de s’enrôler dans les Forces armées canadiennes. Près de 16 000 personnes ont présenté leur candidature.  Un an plus tard, moins de 100 d’entre elles ont été enrôlées dans les Forces armées canadiennes. Franchement, c’est inacceptable. C’est une occasion perdue, et nous ne pouvons pas nous permettre de perdre ces occasions. Nous allons donc devoir faire le travail nécessaire pour changer. Nous devons maintenir nos normes élevées, et je n’ai nullement l’intention de compromettre les normes remarquables des Forces armées canadiennes qui ont conduit à l’excellence à laquelle nous sommes en droit de nous attendre.

Or, nous savons aussi que beaucoup trop de personnes veulent s’enrôler dans nos forces armées, mais qu’elles sont refusées ou qu’elles passent des années dans le processus d’enrôlement. Si vous n’êtes pas le premier à les appeler pour leur proposer un emploi, ces personnes iront voir ailleurs. Nous devons donc trouver un moyen d’être les premiers. Nous devons faire mieux. Nous devons être plus souples et plus créatifs que les autres. Je suis toutefois convaincu que les dirigeants des Forces armées canadiennes ont la capacité d’innover, de faire preuve de souplesse et de mener à bien leur mission. Comme Churchill l’a dit un jour, parfois il ne suffit pas de faire de son mieux, il faut faire ce qui est nécessaire. Je suis persuadé que les Forces armées canadiennes feront ce qu’il faut.

Nous avons fait des progrès considérables au Canada pour donner aux militaires ce dont ils ont besoin. Sur une période de dix ans, nous avons presque doublé le budget du ministère de la Défense nationale. Nous nous procurons rapidement certaines capacités essentielles dont nos troupes ont besoin et nous commençons à investir dans des plateformes éprouvées qui renforceront notre interopérabilité avec nos alliés. Cela dit, comme je l’ai répété probablement trop souvent dans ce discours, je ne me fais pas d’illusions. Nous avons beaucoup de travail devant nous. Nous allons devoir investir dans de nouvelles capacités pour notre armée. Nous allons devoir donner à nos partenaires de l’industrie la certitude qu’ils doivent satisfaire nos besoins. Nous allons devoir jeter un regard neuf sur le recrutement et le maintien en poste ainsi que mettre en œuvre de nouvelles mesures innovantes qui combleront réellement les lacunes. Nous devons également investir et assurer la maintenance des équipements dont nous disposons. Aucun d’entre nous n’a été satisfait d’apprendre que plus de la moitié de nos véhicules, plus de la moitié de nos avions et plus de la moitié de nos navires ne sont pas en état de fonctionner parce qu’ils ont besoin de pièces de rechange et de réparations.

Nous allons donc devoir faire mieux. Nous allons devoir assurer la maintenance de nos avions ainsi que de nos navires. Mais avant tout, nous allons devoir doter nos forces armées de l’équipement nécessaire pour qu’elles puissent accomplir le travail que nous leur demandons d’accomplir presque chaque jour. Nous voulons que nos forces armées puissent continuer à travailler pendant que nous investissons dans de nouveaux équipements pour l’avenir. Nous devons être là pour nos gens en uniforme. Ceux-ci ont levé la main pour servir le Canada. Ils font partie des meilleurs de notre pays, et nous devons être là pour eux.

Nous sommes à un moment charnière de notre histoire. Le contexte mondial de la sécurité évolue rapidement et de nouvelles menaces apparaissent. Face à un avenir empreint de risques et d’incertitudes, le Canada doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour défendre son pays et les règles qui ont assuré sa sécurité et celle d’autres pays dans le monde. Nous n’avons pas d’autre choix que de remplir cette mission et nous le ferons. Avec nos alliés, nos partenaires, notre industrie de la défense et vous tous, je suis convaincu que nous pouvons renforcer notre défense collective, faire respecter notre démocratie et protéger notre mode de vie contre quiconque cherche à le remettre en cause. C’est ce que les Canadiennes et Canadiens attendent de nous. C’est notre responsabilité collective, et nous ne devons pas faillir à notre devoir.

Merci beaucoup.

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