Entreposage et exposition en plein air : Mesures correctives – Notes de l'Institut canadien de conservation (ICC) 15/9

(Format PDF, 2.70 Mo)

La Note de l'ICC 15/9 fait partie de la quinzième série des Notes de l'ICC (Matériaux modernes et collections industrielles)

Introduction

Après avoir repéré les parties vulnérables d'un artéfact industriel et déterminé les causes de détérioration (consultez le 15/8 des Notes de l'ICC : Entreposage et exposition en plein air : Principes de base), il faut prendre des mesures d'intervention et veiller à l'entretien régulier.

Le site

L'emplacement et l'orientation d'un artéfact extérieur peuvent avoir une incidence sur son taux de détérioration. Dans la mesure du possible, placer l'artéfact dans un endroit bien drainé, à distance des arbres en surplomb. Limiter les heures d'exposition à la lumière directe du soleil en plaçant l'objet de façon à ce qu'il se trouve à l'ombre de bâtiments ou d'arbres adjacents pendant au moins une partie de la journée. Pour des raisons de sécurité publique, placer l'artéfact de façon à ce que le personnel travaillant à l'intérieur des bâtiments muséaux puisse le voir.

Protection contre l'eau

Dans la plupart des aires d'exposition extérieures, la protection des artéfacts contre l'eau est la principale priorité. Voici les mesures recommandées :

  1. Bloquer les points d'entrée de l'eau;
  2. Éliminer les débris absorbants, les contaminants et l'eau stagnante;
  3. Protéger les matériaux contre l'humidité à l'aide d'une des barrières suivantes :
    • Revêtements
    • Supports
    • Couvertures

1. Bloquer les points d'entrée de l'eau

Les coupe bise et matériaux de calfeutrage et les pièces en caoutchouc comme les joints d'étanchéité des fenêtres ont une durée de vie utile limitée. Quand ils commencent à se détériorer, ils ne remplissent plus leur fonction d'origine, qui est de protéger contre l'humidité. Il faut alors les remplacer, dans la mesure du possible par de nouveaux matériaux (consultez le 15/7 des Notes de l'ICC : Pièces de caoutchouc des objets industriels), en conservant des échantillons des matériaux originaux pour consultation ultérieure.

Installer des protections non absorbantes sur les ouvertures telles que les tuyaux d'échappement, les cheminées et les orifices de ventilation. Pour bloquer les grandes ouvertures (comme les fenêtres et les portes), utiliser des feuilles de contreplaqué extérieur, recouvert de peinture-émail extérieure sur les faces et les bords. Sceller tous les joints avec un produit de calfeutrage extérieur. Boucher les petites ouvertures avec des bondons de caoutchouc ou de liège. Réparer les fuites dans les toitures et autour des fenêtres et des portes avec un produit de calfeutrage extérieur et des coupe-bise. Se rappeler que tous ces matériaux ont une durée d'efficacité limitée. Il faut les enlever et les remplacer régulièrement, vraisemblablement tous les cinq ans, en fonction des conditions ambiantes et des taux de détérioration.

2. Éliminer les matériaux absorbants, les contaminants et l'eau stagnante

Le fait de garder l'artéfact propre et au sec vous permettra d'en améliorer l'apparence comme objet d'exposition et vous aidera à en assurer la survie à long terme. Éliminer régulièrement les accumulations de poussières, les déjections d'oiseaux, le sel de voirie et les débris organiques. Ramasser les ordures tous les jours. Si possible, utiliser une raclette en caoutchouc, des chiffons ou une éponge pour éliminer les plaques d'eau sur les surfaces horizontales, en accordant une attention particulière aux zones en retrait. Ces zones deviennent des bassins où peuvent s'accumuler l'eau et les débris (consultez la section « Revêtements »).

Les cabines et habitacles de nombreux véhicules abritent des installations en matériaux organiques (du canevas, du cuir et du feutre, par exemple). Si possible, il faut enlever ces éléments de l'artéfact, les étiqueter et les entreposer à l'intérieur d'un bâtiment muséal. Des répliques sacrifiables de ces éléments peuvent être installées dans les artéfacts exposés. On peut ainsi assurer la survie de pièces vulnérables et rares, qu'on pourra utiliser plus tard pour des études et du travail de reproduction.

3. Protéger les matériaux contre l'humidité

Revêtements

Enduire les surfaces de métal nu d'un produit anticorrosion (les produits commerciaux changent constamment; communiquer avec l'Institut canadien de conservation pour connaître les dernières recommandations), de la cire chaude ou d'une couche d'apprêt et de peinture. Enduire les pièces mobiles d'une huile à viscosité élevée ou de graisse (consultez le 15/5 des Notes de l'ICC : Graissage des objets industriels). Enlever les vieux revêtements chaque année à l'aide d'essences minérales et appliquer une nouvelle couche, en accordant une attention spéciale aux surfaces horizontales, aux bords et aux creux, où l'eau s'accumule. Vérifier l'état de la peinture et, au besoin, peindre à nouveau les surfaces nues ou pelées.

Supports

Dans la mesure du possible, poser les objets équipés de roues ou de patins en acier sur un support en bois, une surface de gravier grossier ou un bloc de béton pour éviter tout contact direct avec le sol. Ces mesures protègent les objets en question contre les remontées d'humidité et permettent d'éviter qu'ils ne s'enfoncent dans le sol. Les éléments partiellement enterrés pourrissent ou se corrodent très rapidementà la jonction de l'air et du sol.

Les supports en bois peuvent être faits de simples pièces de bois ou de sections de traverses de chemin de fer recyclées. Les pièces en bois traité sous pression ou créosoté auront une durée de vie utile plus longue que celles en bois non traité. Prévoir la rotation périodique des supports (à intervalles de quelques années), car ils peuvent s'enfoncer lentement dans le sol sous le poids constant de l'artéfact.

Un lit de gravier grossier ou de pierre concassée facilite l'écoulement de l'eau et empêche la croissance de plantes. Toutefois, le gravier meuble sur lequel les visiteurs marchent finit par s'étendre sur l'herbe adjacente, rendant difficile la coupe du gazon. Pour résoudre ce problème, installer des bordures de séparation autour de la surface de gravier.

Si les fonds le permettent, mieux vaut déposer les artéfacts sur un bloc de béton armé. Recourir aux services d'un entrepreneur expérimenté pour réaliser ce travail. Préciser que l'installation doit permettre l'écoulement de l'eau et reposer sur un lit de gravier, et demander l'application d'un matériau d'étanchéité hydrofuge sur toutes les surfaces exposées. Veiller à ce que le bloc puisse supporter le poids du véhicule exposé.

Dans certaines situations, surtout lorsqu'il y a des roues de voiture en bois ou des pneus en caoutchouc, il est nécessaire de soulever le véhicule pour le poser sur des blocs. On empêche ainsi que le poids repose sur les roues et les pneus, et on élimine le risque d'un déplacement imprévu du véhicule. Utiliser des pilotis de bois, des caissons constitués de madriers (mesurant quatre par six pouces) ou des blocs de béton (de scorie). Placer un matériau de calage, comme une feuille de caoutchouc d'une épaisseur de 12,7 mm (0,5 pouce) entre les blocs de béton et l'artéfact afin d'éviter tout dommage. Choisir des points qui permettent de distribuer le poids uniformément sur les supports. Pour la plupart des véhicules, ces points se situent sous les essieux ou aux points de levage sur le châssis.

Pendant la période de croissance, couper le gazon et les mauvaises herbes qui entourent l'artéfact au moins une fois par semaine et enlever toute chute d'herbes autour des artéfacts. Les végétaux et les débris organiques constituent une source d'humidité nuisible.

Couvertures

Un moyen de protéger un artéfact de l'eau et des contaminants est de le couvrir d'une bâche. Le principal inconvénient des bâches tient au fait qu'elles gênent l'observation des objets exposés. Elles nuisent également à la surveillance de l'état des artéfacts qu'elles couvrent.

Le meilleur type de couverture est une bâche de polyéthylène tissé, faite d'un matériau résistant et indéchirable (« antidéchirure »), qui résiste à la moisissure et au rayonnement ultraviolet. On peut s'en procurer à fini argenté opaque qui garde l'objet au frais en bloquant et en réfléchissant la lumière du soleil. Choisir des bâches à bordures et à coins renforcés, à coutures scellées à la chaleur et à oeillets en aluminium ou en laiton. Dans la mesure du possible, acheter des bâches dotées de pochettes pleine longueur, cousues le long des bordures. Des fers d'angle peuvent être insérés dans ces pochettes pour lester la bâche et la garder en place, même par vents forts.

Les bâches peuvent retenir l'eau condensée produite par un taux élevé d'humidité ou encore par l'humidité provenant du sol. Le plastique imperméable empêche l'humidité de s'évaporer, si bien qu'elle se condense à l'intérieur de l'aire close, à la surface intérieure du plastique ou sur l'artéfact lui même. Pour cette raison, il est important d'isoler l'objet du sol sur lequel il repose et d'assurer une certaine circulation de l'air. Il est conseillé d'ériger une structure de bois ou de métal au dessus de l'artéfact pour supporter la bâche. On évite ainsi tout contact direct entre l'artéfact et la bâche et on permet à l'air de circuler dans l'espace clos. Veiller à ce que la structure ait un toit incliné qui ne retient pas l'eau et la neige. Si la bâche ne va pas jusqu'au sol de chaque côté, veiller à ce qu'il y ait un excédent d'au moins 2 mètres (environ 6 pieds) pour assurer une protection contre la pluie.

Dans tous les cas, fixer la bâche en place fermement à l'aide de câbles de polypropylène et de lests pour l'empêcher de claquer au vent.

Se rappeler que les bâches sont principalement conçues pour l'entreposage saisonnier à court terme. Comme la lumière directe du soleil s'attaque aux matériaux synthétiques, il faudra peut-être remplacer les bâches après 8 à 12 mois d'utilisation à l'extérieur – et prévoir cette dépense au budget.

Protection contre l'exposition directe au soleil

La meilleure protection contre la lumière du soleil est l'ombre offerte par un bâtiment adjacent, une bâche (consultez ci dessus) ou quelque autre barrière opaque placée à l'intérieur de l'artéfact ou sur l'artéfact.

Les verrières d'aéronef et les vitres d'automobiles et d'autres véhicules comprenant un habitacle clos peuvent être protégées à l'aide de divers matériaux : stores de polyester à revêtement d'aluminium (en vente dans les magasins de pièces d'automobile); feuilles d'aluminium sur support en carton; ou simples feuilles de carton ondulé. S'il n'est pas possible de laisser les protections en place de façon permanente, il faut à tout le moins les installer au moment où le site est fermé aux visiteurs.

Les stores ou rideaux empêchent la lumière de pénétrer à l'intérieur de véhicules comme les wagons et ils sont appropriés sur le plan historique. Il est hautement recommandé d'utiliser des répliques. S'il faut utiliser les stores ou rideaux d'origine, les protéger contre la décoloration en ajoutant un revêtement de tissu neuf sur leur face extérieure.

Comme pour les bâches, les matériaux utilisés pour bloquer la lumière ont pour principal inconvénient de gêner l'observation et la surveillance des objets exposés.

Protection contre les insectes, les oiseaux et les rongeurs

Comme nous l'avons mentionné auparavant, les artéfacts ayant des espaces clos pour les conducteurs et les passagers contiennent souvent des matériaux organiques, qui constituent des lieux de nidification attrayants pour les insectes, les oiseaux et les rongeurs. La meilleure stratégie est de bloquer tous les points d'entrée possibles.

Bon nombre des mesures prises pour bloquer l'entrée de l'eau sont aussi efficaces contre les ravageurs, par exemple obturer les petites ouvertures, s'assurer que les joints d'étanchéité en caoutchouc autour des luminaires extérieurs sont en bon état et rendre étanches les bords des portes, des fenêtres et des trappes d'accès.

Conclusion

L'entreposage et l'exposition de collections industrielles à l'extérieur requièrent une intervention proactive et l'utilisation de matériaux qui peuvent altérer l'apparence des artéfacts. Les exigences associées à l'entretien et à la surveillance mobilisent également le personnel et taxent les ressources du musée ou du site d'interprétation. On peut éviter beaucoup de travail, de dépenses et de dommages permanents en transportant les artéfacts à l'intérieur. Tel devrait être le but ultime.


Par George Prytulak

Texte également publié en version anglaise.
Copies are also available in English.

© Ministre, Travaux publics et Services
gouvernementaux Canada,
Nº de cat. : NM95-57/15-9-2010F
ISSN : 1191-7237


Détails de la page

Date de modification :