Rapport d’inventaire de carbone noir du Canada 2024 : chapitre 3

Élaboration de l’inventaire de carbone noir

Comme mentionné dans l’introduction, l’inventaire de carbone noir (CN) est fondé sur l’Inventaire des émissions de polluants atmosphériques (IEPA) du Canada (Environnement et Changement climatique Canada [ECCC], 2024). Le présent chapitre fournit une vue d’ensemble de l’élaboration de l’inventaire de carbone noir. Pour consulter les détails de l’élaboration de l’Inventaire des émissions de polluants, voir le Chapitre 3 du rapport de l’IEPA (ECCC, 2024).

3.1 Aperçu de la méthodologie pour calculer les émissions de carbone noir

Le présent inventaire repose sur deux hypothèses importantes : le carbone noir est surtout émis sous forme de matières particulaires d’un diamètre inférieur ou égal à 2,5 microns (PM2,5) et seules les émissions de PM2,5 résultantes de la combustion contiennent une quantité significative de carbone noir. Par conséquent, pour les sources dont les émissions de CN ne sont pas directement calculées, les émissions sont basées sur la quantité de PM2,5 émise par les procédés de combustion et multipliée par les fractions de CN/PM2,5 propres à chaque type de source. Même si les émissions de PM2,5 provenant de sources autres que la combustion, comme la poussière soulevée par les véhicules sur des routes pavées ou non, ou bien par le vent et la machinerie dans les champs ou les mines à ciel ouvert, peuvent être des sources importantes de PM2,5, elles ne sont pas considérées comme des sources de carbone noir dans cet inventaire.

Dans le cas des moteurs diesel, par exemple, les taux d’émission de PM2,5 par unité d’énergie sont relativement élevés, et la proportion de carbone noir présente dans ces PM2,5 est également relativement élevée. Au Canada, ce sont les sources mobiles qui utilisent la plus grande partie du carburant diesel, incluant les applications hors route. Les autres sources de combustion dont les émissions de PM2,5 sont élevées comprennent les unités de combustion à combustible solide comme les chaudières à charbon et à bois ainsi que les foyers. En général, les sources industrielles sont dotées de dispositifs de réduction des émissions de PM2,5 par les chaudières, dont l’efficacité est souvent de l’ordre des 90. C’est pourquoi leurs émissions de PM2,5 sont inférieures à celles d’autres sources. Par contre, l’équipement de petite taille nettement différent utilisé pour la combustion de bois dans le secteur résidentiel (foyers, poêles à bois ou chaudières) n’est pas aussi efficace sur le plan de la réduction des émissions de PM2,5 que les unités de plus grande taille, malgré les différents types de combustibles et de méthodes de brûlage utilisés pour la combustion du bois de chauffage. Étant donné la faible efficacité, combinée avec l’absence de traitement des gaz de cheminée pour de nombreux appareils de chauffage au bois résidentiels existants, ces appareils sont de loin la plus grande source d’émissions de PM2,5 liées à la combustion au Canada. Néanmoins, les émissions de carbone noir produites par la combustion de bois dans le secteur résidentiel ne représentent qu’un peu plus du tiers des émissions découlant des sources mobiles en raison du faible rapport CN/PM2,5 des appareils de chauffage au bois par rapport aux moteurs diesel.

L’ensemble de données permettant de recenser les différents composants des PM2,5 émises par une source précise (p. ex. les émissions des moteurs diesel), dont le carbone noir et le carbone organique (CO), est communément appelé « profil de spéciation ». La plupart des profils de spéciation contiennent une fraction de carbone élémentaire; cette fraction est habituellement utilisée comme valeur de substitution permettant de quantifier les émissions de carbone noir. Le présent inventaire repose principalement sur la base de données SPECIATE de l’Environmental Protection Agency des États-Unis (U.S. EPA, 2022) pour le calcul des émissions de carbone noir à partir des données d’émissions de PM2,5 découlant de la combustion. Plusieurs profils de spéciation de PM2,5 sont propres aux procédés ou aux technologies de combustion (p. ex. les types d’appareils pour la combustion de bois dans le secteur résidentiel), à la classification des sous-secteurs (p. ex. béton prêt à l’emploi et produits en béton), au type de combustible (p. ex. diesel, essence, gaz naturel) ou à l’application (p. ex. utilisation du gaz naturel pour la production d’électricité).

Lorsqu’elles sont faciles à obtenir, les données sur les émissions de PM2,5 issues de la combustion sont directement combinées aux fractions CN/PM2,5 pour estimer les émissions de carbone noir. L’Annexe 2 présente toutes les fractions de CN/PM2,5 utilisées dans cet inventaire. Par exemple, les estimations des sources d’utilisation de combustibles dans le secteur de l’agriculture sont fondées sur le type de combustible et la quantité utilisée au Canada ainsi que les fractions CN/PM2,5 correspondantes.

Certaines données sur les activité ne précisent pas si les émissions de PM2,5 proviennent de sources de combustion ou de sources autres que la combustion. Dans ces cas, il reste difficile de distinguer les PM2,5 provenant de la combustion de celles d’autres sources en raison du manque de données sur les activités (p. ex. quantité de combustible brûlé) et sur la contribution des sources autres que la combustion (p. ex. poussière de pierre dans une mine). L’avis d’experts qui connaissent les activités pertinentes est alors pris en compte pour distinguer les PM2,5 produites par la combustion de celles produites par d’autres sources avant l’application des CN/PM2,5. Par exemple, les émissions de PM2,5 par les cheminées, telles que déclarées par les installations à l’Inventaire national des rejets de polluants;(INRP), forment la base de l’estimation des émissions de carbone noir. Pour chaque cheminée, le ou les coefficients de spéciation adéquats aux émissions de PM2,5 dues à la combustion (Annexe 2) ont été appliqués. Ensuite, les émissions à l’échelle des installations ont été additionnées pour constituer l’estimation des émissions à l’échelle des secteurs.

Dans le cas des sources qui n’ont pas d’exigences de déclarations des estimations de PM2,5 à l’INRP, les émissions de PM2,5 sont quantifiées à l’aide des données sur les activités (p. ex. statistiques de l’ensemble de données) et des coefficients d’émission. Aux fins du présent inventaire, les émissions découlant des secteurs de la Fabrication, de la Production d’électricité ainsi que des Minerais et industries minérales sont estimées à partir des données des installations. Les estimations pour l’Industrie pétrolière et gazière reposent sur les données déclarées par les installations combinées avec les résultats d’études indépendantes (EC, 2014 ; ECCC, 2017; Quadram Engineering ltée., 2019). Les émissions provenant de l’utilisation de combustibles – agriculture, construction et résidentiel (bois et autres) sont estimées d’après les données sur la consommation de combustibles et de l’information provenant de la technologie de combustion. Quant à l’utilisation de combustibles – commercial, elle est estimée à l’aide d’une combinaison de données fournies par les installations et d’autres sources. D’autres méthodologies notables sont utilisées pour estimer les émissions de carbone noir à l’échelle des secteurs:

3.2 Recalculs

À mesure que de nouvelles données et méthodes sont disponibles, les estimations d’émission figurant dans les versions antérieures de l’inventaire sont recalculées afin de fournir une tendance cohérente et comparable en matière d’émissions. Les recalculs ont lieu chaque année pour de nombreuses raisons, dont les suivantes :

De nouvelles informations sur les cheminées ont été déclarées par les installations en raison de la mise à jour des exigences de déclaration de l’INRP, comme le précise l’avis dans la Gazette du Canada pour 2022–2024Note de bas de page 1 . Certaines émissions sectorielles de 2013–2021 ont été recalculées sur la base de ces nouvelles informations sur les cheminées. C’est le cas principalement pour les secteurs relevant des catégories Minerais et industries minérales et Fabrication.

Le Tableau 3–1 présente les principales améliorations et mises à jour apportées aux méthodes d’estimation pour l’inventaire de cette année.

Les émissions totales de carbone noir et de PM2,5 ont été révisées pour toutes les années, tel que présenté à la Figure 3–1 et à la Figure 3–2. Dans l’ensemble, les recalculs des estimations pour la période 2013–2021 précédemment communiquées n’ont pas entraîné de modification significative au niveau des émissions. Les tendances entre 2013 et 2021 sont restées constantes pour la soumission précédente et la soumission actuelle (-30 % pour les émissions de carbone noir et environ -20 % pour les émissions de PM2,5). La différence entre les tendances d’émission de carbone noir et de PM2,5 est, comme indiqué ci-dessus, due au fait que certains secteurs n’utilisent pas les PM2,5 pour estimer les émissions.

Tableau 3–1 : Résumé des changements, du perfectionnement ou des améliorations méthodologiques

Minerais et industries minérales

Description

  • 1. Des recalculs ont été effectués dans le secteur de l'exploitation minière pour toutes les années grâce à une méthode révisée de calcul des émissions de carbone noir. Dans les années précédentes, les émissions de carbone noir pour le secteur de l'exploitation minière étaient calculées en fonction du profil de spéciation propre au secteur d'activité, alors que la nouvelle méthode se base sur l'utilisation de carburant dans l'industrie minière.
  • 2. Le secteur de l'Industrie de la fonte et de l'affinage des métaux non ferreux a été intégré à l'inventaire pour la présente soumission.

Impacts sur les émissions

  • 1. Les recalculs effectués pour le secteur de l'exploitation minière ont entraîné une augmentation des émissions de carbone noir estimées, variant entre 53 tonnes (11%) en 2017 et 487 tonnes (137%) en 2020.
  • 2. L'ajout du secteur de l'Industrie de la fonte et de l'affinage des métaux non ferreux a eu une incidence d'au moins 1,1 tonnes en 2020 et 2021 et d'au plus 6,6 tonnes en 2015.

Industrie pétrolière et gazière

Description

  • 3. Des recalculs ont été effectués pour toutes les années sur les émissions attribuées à la combustion de carburants en raison d'une mise à jour des données sur les activités (volumes de gaz combustible déclarés) pour la Saskatchewan. Des recalculs ont également été effectués sur les émissions de Torchage de 2013 à 2021 en raison de mises à jour de la méthodologie : les mesures atmosphériques de méthane provenant du secteur de l'Industrie pétrolière et gazière en amont ont été ajoutées aux estimations de GES pour la Colombie-Britannique, l'Alberta et la Saskatchewan. Cette mise a jour a entraîné des ajustements aux données sur les activités de Torchage, ce qui a eu une incidence sur les estimations pour le carbone noir et d'autres polluants. Des révisions supplémentaires en 2019 et 2020 ont résulté de la mise à jour d'émissions de PM2,5 déclarées par les installations.

Impact on Emissions

  • 3. Ces recalculs ont entraîné une révision à la baisse des émissions du secteur de l’Industrie pétrolière et gazière de 2013 à 2021, variant entre une diminution maximale de -92 tonnes en 2014 à -20 tonnes en 2021.

Transport et équipements mobiles - Transport hors route

Description

  • 4. Des recalculs ont été effectués dans le secteur du transport hors route pour toutes les années sur lesquelles portent le rapport en raison de données mises à jour sur le parc de véhicules à moteurs hors-route et sur les activités.
  • Impacts sur les émissions

  • 4. Les recalculs dans le secteur du transport hors route ont entraîné des diminutions, variant entre 31 tonnes (-0,24 %) en 2015 et 619 tonnes (-6,2 %) en 2020.

Figure 3-1 : Comparaison des tendances d’émissions de carbone noir (inventaire de 2024 par rapport à celui de 2023)

Figure 3-1 : Comparaison des tendances d’émissions de carbone noir (inventaire de 2024 par rapport à celui de 2023)
Description longue Figure 3-1

Figure 3-1 : Comparaison des tendances d’émissions de carbone noir (inventaire 2024 par rapport à celui de 2023)

La Figure 3-1 est un graphique linéaire comparant les tendances d’émissions de carbone noir (2013-2022) entre les inventaires de carbone noir de 2023 et de 2024. Les émissions de carbone noir ont suivi une tendance similaire pour les soumissions précédente et actuelle, diminuant globalement entre 2013 et 2022. Plus précisément, une diminution des émissions est observée de 2013 à 2016, suivie d'une légère augmentation jusqu'en 2018, puis d’une diminution jusqu’en 2022. Le tableau suivant présente les émissions de carbone noir en tonnes entre 2013 et 2022 pour les inventaires de 2023 et de 2024.

Figure 3-1: Comparaison des tendances d'émissions de carbone noir (inventaire de CN de 2024 par rapport à celui de 2023)

Carbone noir (tonnes) 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022
Inventaire de carbone noir 2023 36 987 35 259 33 686 30 660 31 119 31 180 29 792 26 436 25 999
Inventaire de carbone noir 2024 37 053 35 237 33 718 30 750 31 117 31 139 29 567 26 294 25 784 25 744

Figure 3-2 : Comparaison des tendances d’émissions de PM2,5 produites par combustion (inventaire de 2024 par rapport à celui de 2023)

Figure 3-2 : Comparaison des tendances d’émissions de PM2,5 produites par combustion (inventaire de 2024 par rapport à celui de 2023)
Description longue Figure 3-2

Figure 3-2 : Comparaison des tendances d’émissions de PM2,5 produites par combustion (inventaire de 2024 par rapport à celui de 2023)

La Figure 3-2 est un graphique linéaire comparant les tendances d’émissions de PM2,5 produites par combustion (2013-2022) entre les inventaires de carbone noir de 2023 et de 2024. Les émissions de PM2,5 ont suivi une tendance similaire pour les soumissions précédente et actuelle, diminuant globalement entre 2013 et 2022. Plus précisément, une diminution des émissions de PM2,5 produites par combustion est observée entre 2013 et 2017, suivie d’une légère augmentation jusqu’en 2018. Par la suite, les émissions ont diminué de nouveau jusqu’en 2021 et augmenté en 2022. Le tableau suivant présente les émissions de PM2,5 en tonnes entre 2013 et 2022 pour les inventaires de 2023 et de 2024.

Figure 3-2: Comparaison des tendances d'émissions de PM2.5 produites par combustion (inventaire de CN 2024 par rapport à celui de 2023)

PM2,5 produites par combustion (tonnes) 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022
Inventaire de carbone noir 2023 166 553 162 693 153 783 142 476 141 886 148 380 147 851 135 849 133 631
Inventaire de carbone noir 2024 168 609 165 080 156 501 145 337 143 565 149 277 148 154 136 948 133 865 137 572

3.3 Sources d’incertitudes

Une source importante d’incertitudes associée aux inventaires de carbone noir est les incohérences retrouvées entre les définitions et les mesures de carbone noir (Bond et al., 2013). En effet, les scientifiques suivent différentes méthodes pour mesurer les émissions de particules de carbone noir à la source et dans l’atmosphère. Par conséquent, les quantités mesurées ne sont pas rigoureusement comparables.

Bien qu’elle ne soit pas quantifiée, l’incertitude concernant les estimations de carbone noir dans le présent inventaire découle en partie de l’incertitude relative aux fractions CN/PM2,5. Il existe une grande variabilité sur le plan de la taille des échantillons de mesures utilisés pour calculer ces fractions; les mêmes fractions peuvent, par défaut, être appliquées à plusieurs technologies différentes. Par exemple, pour les carburants de turbomoteurs dans les avions à réaction, la fraction CN/PM2,5 du diesel est utilisée parce que leur fraction CN/PM2,5 est inconnue. De la même façon, une seule fraction CN/PM2,5 est appliquée à tous les appareils résidentiels de combustion du bois, à l’exception des chaudières à bois (Annexe 3, Tableau A3–1). L’amélioration des fractions CN/PM2,5 repose sur de nouvelles mesures. Il a fallu faire appel à des connaissances techniques et au jugement fondé sur des renseignements accessibles limités (comme les informations sur les cheminées des installations) pour attribuer une fraction à chaque secteur et type d’équipement, avec une précision variable.

L’incertitude est considérable lorsqu’il s’agit de déterminer la proportion des émissions de PM2,5 qui découle des émissions provenant de la combustion dans les sources industrielles. La principale source de données pour estimer les émissions de PM2,5 de nombreuses sources industrielles est l’INRP, auquel les émissions sont déclarées par les installations, par cheminée, ou comme une valeur globale de l’installation dans son ensemble, généralement sans distinction entre les émissions causées par la combustion et les autres types d’émissions.

3.4 Considérations relatives aux prochains rapports d’inventaire

À l’avenir, outre la couverture et l’exactitude des estimations d’émission, les aspects suivants seront améliorés :

Examiner et intégrer les nouvelles données sur les cheminées, collectées par l’INRP conformément aux exigences de déclaration mises à jour dans l’avis de la Gazette du Canada pour 2022–2024Note de bas de page 1 , pour d’autres secteurs dans les catégories de sources Minerais et industries minérales et Fabrication.

Références, Chapitre 3, Élaboration de l’inventaire du carbone noir

Bond TC, Doherty SJ, Fahey DW, Forster PM, Berntsen T, DeAngelo BJ, Flanner MG, Ghan S, Kärcher B, Koch D, et al. 2013. Bounding the role of black carbon in the climate system: a scientific assessment. Journal of Geophysical Research. 118(11): 5380-5552.

[EC] Environnement Canada. 2014. Technical report on Canada’s upstream oil and gas industry. Vols. 1–4. Calgary (AB) : Préparé par Clearstone Engineering Ltd.

[ECCC] Environnement et Changement climatique Canada. 2017. An inventory of GHG, CAC and other priority emissions by the Canadian oil sands industry: 2003 to 2015. Vols 1–3. Calgary (AB). Préparé par Clearstone Engineering Ltd.

[ECCC] Environnement et Changement climatique Canada. 2023. Rapport d’inventaire des émissions de polluants atmosphériques du Canada 1990-2022. Rapport du gouvernement du Canada en vertu de la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance présenté à la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (mars 2024).

Quadram Engineering Ltd. 2019. A black carbon inventory for gas flaring in Alberta’s upstream oil and gas sector. Rapport inédit. Préparé pour Environnement et Changement climatique Canada.

[U.S. EPA] Environmental Protection Agency des États-Unis. 2022. SPECIATE 5.2 (en anglais seulement). [consulté le 8 décembre 2023].

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