Lignes directrices pour l'enregistrement d'un organisme de bienfaisance : satisfaire au critère du bienfait d'intérêt public

Énoncé de politique

Numéro de référence
CPS-024

Date d'entrée en vigueur
Le 10 mars 2006

1.0 À propos de ce document

La question du bienfait d'intérêt public est au coeur de chaque examen d'une demande d'enregistrement à titre d'organisme de bienfaisance en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Selon la loi actuelle, un organisme relève de la bienfaisance que s'il satisfait à la définition du terme « bienfaisance » établit par la common lawNote de bas de page 1 . Une partie de cette définition exige que pour qu'un organisme soit considéré comme organisme de bienfaisance, il doit avoir été établi dans le but de conférer un bienfait d'intérêt publicNote de bas de page 2 .

Au cours de la dernière décennie, la notion de « bienfait d'intérêt public » a fait l'objet d'une attention considérable et est devenue, dans certaines administrations, le facteur qui détermine ce qui constitue un organisme de bienfaisanceNote de bas de page 3 . Cependant, l'application du critère du bienfait d'intérêt public en vertu de la common law dans le cadre du régime actuel demeure problématique. Les tribunaux et les commentateurs juridiques ont souligné le manque de clarté et de certitude à cet égard, de même que les difficultés inhérentes à l'application des règles entourant le bienfait d'intérêt public. Dans le rapport qu'elle avait publié en 1996 sur son examen exhaustif du droit des organismes de bienfaisance, la Commission de réforme du droit de l'Ontario (CRDO) avait formulé des commentaires sur la confusion présente dans la jurisprudence concernant la signification et la portée de l'aspect « bienfait d'intérêt public » du critère de la common lawNote de bas de page 4 . Le rapport signale que le même libellé est utilisé dans le contexte de chacun des trois éléments à satisfaire pour relever de la bienfaisance : déterminer la fin de bienfaisance, déterminer si la fin est d'une utilité pratique (critère du bénéfice conféré) et déterminer ceux qui profiteront de la finNote de bas de page 5 .

Ce document clarifie le sens du terme « bienfait d'intérêt public » tel que nous le comprenons et l'appliquons lorsque nous déterminons si un organisme peut obtenir le statut d'organisme de bienfaisance en vertu de la Loi.

Même si ces lignes directrices portent principalement sur l'application du critère du bienfait d'intérêt public au cours du processus d'enregistrement, il ne faut pas oublier qu'un organisme doit avoir été établi pour conférer un bienfait d'intérêt public en tout temps pour qu'il soit considéré comme un organisme de bienfaisance.

2.0 Principes fondamentaux concernant les organismes de bienfaisance

Pour profiter des privilèges fiscaux spéciaux accordés aux organismes de bienfaisance en vertu de la Loi (le plus important étant la possibilité de remettre aux donateurs des reçus aux fins de l'impôtNote de bas de page 6 , les organismes de bienfaisance doivent être enregistrés auprès de l'ARC. Pour cela, un organisme doit remplir les exigences de la Loi, c'est-à-dire qu'il doit relever de la bienfaisance, en droit, et qu'il doit consacrer toutes ses ressources à des fins et à des activités de bienfaisance.

On détermine si un organisme qui fait une demande d'enregistrement relève de la bienfaisance uniquement s'il remplit deux exigences fondamentales issues de la common law :

1. ses fins doivent relever exclusivement et légalement de la bienfaisance

2. elle doit être établie pour conférer un bénéfice tangible au public dans son ensemble ou à une composante suffisante du publicNote de bas de page 7

Dans le cadre de la première exigence, les fins d'un organisme relèvent légalement de la bienfaisance uniquement si elles appartiennent à l'une des quatre catégories de fins de bienfaisance établies dans l'arrêt Commissioners for Special Purposes of Income Tax v. Pemsel (ci-après, Pemsel)Note de bas de page 8 ou si elles respectent l'esprit et l'intention du préambule de la Loi d'Elizabeth (le préambule). Par conséquent, pour relever de la bienfaisance aux fins de son enregistrement en vertu de la Loi, les fins d'un organisme doivent être assez semblables à d'autres fins qui ont déjà été reconnues, en droit, comme relevant de la bienfaisance.

Les catégories établies dans l'arrêt Pemsel sont les suivantes :

L'exigence de la présence d'un bénéfice conféré au public comporte plusieurs sous-exigences, qui sont énumérées ci-dessous et expliquées de façon plus détaillée plus loin :

Enfin, il y a d'autres facteurs dont l'existence empêche l'enregistrement à titre d'organisme de bienfaisance. Ceux-ci sont notamment :

Comme le critère du bienfait d'intérêt public est le sujet de ce document, celui-ci portera sur les éléments du concept juridique de la bienfaisance qui se rapportent au bienfait d'intérêt public. Malgré cela, le critère du bienfait d'intérêt public ne peut pas être appliqué hors du contexte général de la prise de décisions, parce qu'il est inextricablement lié à la question de savoir si l'organisme qui fait une demande d'enregistrement relève de la bienfaisance au sens de la loi. En fait, l'utilisation d'un libellé semblable pour la quatrième catégorie de fins de bienfaisance (fins profitant à la collectivité) et le critère plus large du bienfait d'intérêt public, qui s'applique à toutes les catégories, peuvent porter à une certaine confusion. Cependant, ils ne sont pas identiques. La quatrième catégorie de fins de bienfaisance établie dans l'arrêt Pemsel regroupe uniquement les fins identifiées comme profitant à la collectivité « que la loi considère comme étant des fins de bienfaisance ». Le critère plus large du bienfait d'intérêt public, qui est le sujet des présentes lignes directrices, porte essentiellement sur la question de savoir « à qui » profiteront les finsNote de bas de page 12 .

3.0 Critère du bienfait d'intérêt public

Il est bien établi en droit que tous les organismes qui veulent être enregistrés à titre d'organismes de bienfaisance en vertu de la Loi doivent s'assurer que leurs fins confèrent un bénéfice public. Cette exigence s'applique à toutes les catégories de fins de bienfaisance. Cependant, les organismes dont les fins visent le soulagement de la pauvreté font l'objet d'un examen un peu moins rigoureux de la deuxième partie du critère du bienfait d'intérêt public, soit la question de savoir à qui profitera les fins de l'organismeNote de bas de page 13 .

Le critère du bienfait d'intérêt public comporte deux volets, chaque volet s'appliquant de façon quelque peu différente aux quatre catégories de fins de bienfaisanceNote de bas de page 14 :

L'aspect « bienfait » du critère porte sur la question de savoir si la fin de bienfaisance faisant l'objet de l'examen vise à réaliser un bien universel qui n'est pas nuisible au public, c'est-à-dire une activité utile au plan social. L'aspect « public » consiste à examiner qui constitue le « public ». Cette notion de bienfait d'intérêt public a aussi été appelée le « caractère public » de la bienfaisance, c'est-à-dire que c'est le bien-être du public qui est recherché sans préoccupation à savoir si des avantages à des particuliers sont conférésNote de bas de page 16 .

Les deux volets sont interreliés. La réponse à la question de savoir si un groupe particulier constitue une composante suffisante du public dépend de la fin de bienfaisance envisagée, et pourrait changer conformémentNote de bas de page 17 .

Les sous-sections suivantes présentent le contexte du critère à deux volets du bienfait d'intérêt public et exposent les principaux critères qu'appliquent les examinateurs de l'ARC. Le sens et l'application du premier volet, le bénéfice conféré, sont exposés dans la sous-section 3.1. La sous-section 3.2 explique le sens et l'application du deuxième volet du critère, à savoir qui constitue « le public ».

3.1 Sens du terme « bénéfice conféré »

Il est difficile de déterminer si un organisme qui fait une demande d'enregistrement a suffisamment établi que ses activités profitent à l'ensemble de la collectivité (c'est-à-dire qu'il mène une activité utile au plan social), particulièrement lorsqu'un organisme d'un genre nouveau ou différent est proposé. En pareil cas, l'ARC n'enregistrera l'organisme que si ces fins nouvelles ou différentes sont, en droit, des fins de bienfaisance et si elles confèrent un bénéfice au public. Bien que difficile à satisfaire, le volet du « bénéfice conféré » est généralement plus simple à rencontrer que de démontrer qu'une fin nouvelle est une fin de bienfaisance. Nous concluons souvent que des organismes « profitent » à la collectivité, mais ne relèvent pas de la bienfaisance, pour un certain nombre de raisonsNote de bas de page 18 .

Les facteurs qui déterminent jusqu'à quel point la preuve du bénéfice conféré est nécessaire incluent les suivants : la nature de la fin de bienfaisance proposée et la catégorie à laquelle elle appartient; les conditions sociales et économiques de l'époque; la mesure dans laquelle le bénéfice conféré peut être quantifié; la présence d'une incidence nuisible de l'activité; et la relation qu'il y a entre la fin et les bénéficiaires visés.

3.1.1 Quand requiert-on une preuve?

La mesure dans laquelle un organisme qui fait une demande d'enregistrement doit satisfaire le premier volet du critère du bienfait d'intérêt public dépendra en grande partie de la catégorie à laquelle les fins proposées appartiennent. Lorsque les fins appartiennent aux trois premières catégories de fins de bienfaisance, on présume l'existence d'un bénéfice conféréNote de bas de page 19 . Cette présomption découle du fait que les fins qui appartiennent à ces catégories (soulagement de la pauvreté, avancement de l'éducation et avancement de la religion) ont traditionnellement été reconnues comme profitant à la collectivité. Cependant, cette présomption n'apparaît qu'une fois clairement établi que les fins appartiennent à ces catégories. Par exemple, on peut présumer qu'une fiducie visant l'avancement de l'éducation profite au public uniquement si elle satisfait d'abord en droit le critère la plaçant clairement dans cette catégorie de fins de bienfaisance. Dans le cas contraire, une preuve du bénéfice conféré sera requise. En outre, si l'organisme ne peut pas autrement établir que sa ou ses fins sont une ou des fins de bienfaisance, il ne sera pas reconnu comme organisme de bienfaisance en vertu de la Loi.

Cependant, la présomption peut être contestée. Par conséquent, lorsque la « preuve du contraire est faite »ote de bas de page 20 ou que le caractère de bienfaisance de l'organisme est mis en question, une preuve du bénéfice conféré sera alors requiseNote de bas de page 21 . Le fardeau de prouver l'existence d'un bienfait d'intérêt public incombe de nouveau à l'organisme qui fait la demande d'enregistrement.

Bien qu'il y ait une présomption semblable pour certaines fins qui appartiennent à la quatrième catégorie (principalement celles qui sont bien établies et dont le bénéfice conféré est clair, par exemple la prestation de services de soins de santé ou de services de secours aux personnes âgées)Note de bas de page 22 , il est autrement généralement admis que le volet du bénéfice conféré du critère doit être prouvé au moment de la demande.

L'examen des demandes qui se situent dans la quatrième catégorie pose un défi particulier à l'ARC. Les examinateurs déterminent largement s'il s'agit d'une fin de bienfaisance suivant la méthode de raisonnement par analogie. Si, après examen de faits semblables dans des cas antérieurs, une analogie peut être facilement trouvée avec une fin qui a précédemment été reconnue comme étant une fin de bienfaisance, l'aspect du bénéfice conféré du critère est alors effectivement établi. Dans la mesure où les fins ont déjà été reconnues comme des fins de bienfaisance sous cette catégorie, d'autres fins semblables ne seront généralement pas tenues de prouver la présence d'un bénéfice conféré, en raison du fait que les tribunaux ont déjà déterminé que de tels organismes conféraient un beneficeNote de bas de page 23 (par exemple les organismes établis pour fournir des soins de santé à la collectivité). C'est donc principalement dans les cas où des demandes d'enregistrement présente des situations avec des faits nouveaux, qui n'entrent pas dans l'une des fins déjà reconnues, sont soumises qu'il faudra fournir une preuve du bienfait d'intérêt public. (Voir section 3.3 ci-dessous pour une discussion sur le genre de preuve qui pourrait être requis pour établir l'existence d'un « bénéfice conféré »).

En pratique, si un organisme demandeur démontre que les fins de l'organisme appartiennent à l'une des trois premières catégories ou qu'il établit un lien avec une fin déjà reconnue appartenant à la quatrième catégorie, les examinateurs de l'ARC concluront probablement qu'un bienfait d'intérêt public existe. Mais si la demande renferme des renseignements qui semblent indiquer que ce n'est pas le casNote de bas de page 24 ou qui soulèvent des questions qui nécessitent une clarification, les examinateurs pourraient exiger une preuve du bénéfice conféré avant d'enregistrer l'organisme comme organisme de bienfaisanceNote de bas de page 25 .

En somme, prouver l'existence d'un bénéfice conféré dans le cadre du critère du bienfait d'intérêt public est, en fait, uniquement requis dans les cas suivants :

En pareil cas, les demandeurs doivent établir ce qui suitNote de bas de page 26 :

3.1.2 Exigences de base

En common law, le volet du bénéfice conféré du critère universel du bienfait d'intérêt public exige que la fin de bienfaisance procure un avantage tangible ou objectivement mesurable, au publicNote de bas de page 28 du fait qu'il faut être en mesure de le cerner et de le démontrerNote de bas de page 29 .

Les bénéfices intangibles sont également acceptables, mais seulement dans les cas où il existe un consensus général clair que l'avantage existeNote de bas de page 30 .

On retrouve généralement des bénéfices intangibles dans les fins de bienfaisance sous l'avancement de l'éducation, par exemple dans les galeries d'art et les musées ou dans la catégorie générale des fins visant l'amélioration mentale et morale de l'humanitéNote de bas de page 31 ou encore des fins visant la promotion de la santé morale ou spirituelle de la collectivitéNote de bas de page 32 . Les organismes de bienfaisance qui visent la protection des animaux sont généralement enregistrés sous la catégorie de la promotion de la moralité, parce qu'on croit qu'ils [TRADUCTION] « font la promotion de la moralité et freinent la tendance innée de l'homme à être cruel, et ainsi, profitent à l'humanité »Note de bas de page 33 .

Pour déterminer si cet aspect du volet du bénéfice conféré est satisfait, les examinateurs déterminent si l'avantage conféré est un résultat et une conséquence directs des activités de l'organisme et si, dans les circonstances, ce bénéfice peut être raisonnablement conféré. Dans la plupart des cas, le bénéfice doit être conféré directement, même si la jurisprudence accepte qu'il soit également possible de le conférer indirectement. Longtemps reconnus, en droit, comme relevant de la bienfaisance, la justification de l'octroi de l'enregistrement des organismes de protection des animaux repose uniquement sur le bénéfice qu'ils confèrent qui ne peut être caractérisé autrement que comme étant un bénéfice conféré indirectement : par exemple, on a jugé que les fins de bienfaisance profitant directement aux animaux confèrent un bénéfice à l'humanité au titre de la quatrième catégorieNote de bas de page 34 .

Le bénéfice conféré indirectement peut aussi être constaté dans les cas où l'avantage conféré à un segment de la collectivité peut aussi être conféré indirectement à l'ensemble de la collectivité : par exemple, la fourniture de logements à la parenté de patients en phase critique sera considérée comme une amélioration ou une aide indirecte apportée à l'hôpital et aux patientsNote de bas de page 35 . Pour bon nombre de fins de bienfaisance, il arrive assez souvent qu'elles confèrent directement un bénéfice à un groupe cible de bénéficiaires ainsi qu'un bénéfice général indirect au grand publicNote de bas de page 36 .

Parfois, le bénéfice conféré indirectement peut être vu comme étant trop éloigné de l'acte de bienfaisance, particulièrement lorsque le bénéfice conféré directement favorise des particuliers. Lorsqu'on examine cette question, il faut souvent établir un équilibre entre le bienfait d'intérêt privé et le bienfait d'intérêt public, le premier étant, règle générale, interdit (explication ci-dessous). Dans l'arrêt IRC v. Oldham Training and Enterprise CouncilNote de bas de page 37 , on a jugé que le soulagement du chômage dans les régions défavorisées conférait un bénéfice trop distant par rapport au bénéfice plus direct de promouvoir les intérêts des personnes exploitant une entreprise privéeNote de bas de page 38 .

Les fins de bienfaisance de certains organismes peuvent permettre de conférer un bénéfice au public tout en produisant un effet négatif. En pareil cas, le bienfait d'intérêt public qui découle de la fin de bienfaisance est généralement évalué par rapport au tort que l'activité proposée peut aussi causerNote de bas de page 39 . Pour déterminer s'il s'agit d'une fin de bienfaisance, on s'assure qu'elle procure un bénéfice conféré net important.

3.1.3 Variation du bienfait d'intérêt public au fil du temps

Ce qui a jadis été considéré comme bénéfice conféré par une fin de bienfaisance ne le sera pas nécessairement toujours. Ce qui confère un bienfait d'intérêt public est examiné à la lumière des normes prédominantes de l'époque et, par conséquent, la notion de ce qui constitue le bienfait d'intérêt public aux yeux des tribunaux peut varier au fil du temps. La reconnaissance ou le rejet antérieur d'un genre de bienfait d'intérêt public ne met pas fin à la question pour de bonNote de bas de page 40 .

Ce principe a été appliqué par la commission de surveillance des organismes de bienfaisanceNote de bas de page 41 dans le cas de la promotion des relations interraciales. Dans l'arrêt StrakoschNote de bas de page 42 , le tribunal avait jugé que la conciliation interraciale était une fin politique et qu'elle ne constituait donc pas une fin de bienfaisance. Les commissaires sont revenus sur leur position parce que le gouvernement avait depuis adopté des lois pour tenter de promouvoir de bonnes relations interraciales. Ils pouvaient donc considérer que les bienfaits pour le public qui en découlaient avaient été établis. Les tribunaux n'avaient dorénavant plus à rendre de décision sur cette questionNote de bas de page 43 .

La Commission de surveillance des organismes de bienfaisance est également revenue sur sa position concernant les clubs de tir du Royaume-Uni. Les clubs de tir civils du R.-U. avaient été reconnus comme organismes de bienfaisance par la Commission de surveillance des organismes de bienfaisance pendant de nombreuses années, les tribunaux ayant antérieurement déterminé que de tels organismes étaient analogues aux organismes établis pour la promotion de l'efficacité des forces armées. En 1993, la Commission de surveillance des organismes de bienfaisance a réexaminé la question et elle a conclu que de tels clubs ne pouvaient plus être reconnus comme des organismes de bienfaisance en cette fin de XXe siècle. Bien qu'en donnant aux gens l'occasion d'utiliser des armes à feu les aurait sans doute préparés à défendre la nation, les aptitudes actuellement requises par les forces armées étaient nettement différentes de celles qui étaient acquises dans des clubs de tir, ces derniers étant maintenant plus axés sur des activités récréatives ou sportives.

L'ARC peut, de façon semblable, examiner de nouvelles fins de bienfaisance lorsque la question de ce qui constitue des bénéfices conférés au public a été modifiée par suite de changements apportés à une loi ou une politique générale établie. Elle peut les examiner pourvu, bien sûr, que la nouvelle fin proposée est autrement une fin de bienfaisance, c'est-à-dire conforme à l'esprit et à l'intention du préambule. L'ARC a récemment révisé et clarifié, suivant un raisonnement semblable, sa politique pour les organismes qui visent l'élimination du racisme. Les organismes établis pour cette fin n'étaient auparavant enregistrés que si leurs fins se cadraient dans la catégorie de la promotion de l'éducation.

Dans un tel contexte, en plus de prendre en considération les récentes décisions judiciaires au Canada et dans d'autres pays, l'ARC examine les modifications législatives, les modifications de la politique générale établie, d'autres formes de soutien financier pour l'organisme (particulièrement le soutien d‘autorités locales ou municipales) et les changements dans les besoins de la collectivité.

3.2 Sens du terme « public »

Les organismes de bienfaisance sont tenus d'avoir un « caractère public ». En effet, selon le deuxième volet du critère du bienfait d'intérêt public, une fin de bienfaisance doit profiter à la collectivité (dans son ensemble) ou à une composante suffisante de la collectivitéNote de bas de page 44 . L'élément public est requis pour toutes les catégories de fins de bienfaisance, sauf pour les fins de soulagement de la pauvreté, où ce volet du critère est appliqué moins rigoureusement.

À l'inverse, une fin ne sera pas une fin de bienfaisance si elle procure des bienfaits d'intérêt privé. Un bienfait d'intérêt privé est conféré lorsque l'une des raisons de l'existence de l'organisme est de procurer des avantages particuliers à un groupe limité de personnes selon des critères qui ne sont pas pertinents à la fin de bienfaisance en question.

En common law, ce volet du critère, soit l'identification des bénéficiaires admissibles des activités de l'organisme de bienfaisance, est moins important pour la catégorie du soulagement de la pauvreté, quelque peu important pour la catégorie de l'avancement de la religion, mais essentiel pour la catégorie de l'avancement de l'éducation et pour la quatrième catégorie. Dans le cas de la première catégorie des organismes de bienfaisance, soit le soulagement de la pauvreté, un groupe de bénéficiaires étroitement défini a traditionnellement été admisNote de bas de page 45 .

Il est difficile de distinguer qui bénéficie des activités proposées entre le public dans son ensemble (ou une composante suffisante du public) et des individus. La loi n'est pas très claire sur la méthode à prendre pour conclure que ce volet du critère a été satisfait ou non, et dans quelles circonstances nous pourrions en arriver à une telle conclusion. Cependant, diverses règles ont été élaborées dans la jurisprudence au cours des années, et ces règles fournissent certaines indications de nature générale sur les mesures à prendre pour déterminer qui, selon la catégorie de fins de bienfaisance, pourrait en bénéficier. Nous expliquerons certaines de ces règles dans les sections suivantes avec une attention particulière sur notre interprétation de ces règles et sur leur application.

3.2.1 Qu'est-ce qui constitue une composante suffisante de la collectivité?

L'une des principales étapes du processus de détermination du statut d'organisme de bienfaisance consiste à déterminer qui profitera des fins de bienfaisance. Bien que la plupart des organismes qui demandent leur enregistrement à titre d'organismes de bienfaisance en vertu de la Loi offriront des services ou des programmes visant le grand public, il y en a d'autres qui seront établis aux fins d'offrir des services ou des programmes visant ou servant des groupes ou des catégories de personnes déterminées (par exemple les maisons d'hébergement pour femmes battues, les organismes s'occupant des personnes touchées par une maladie ou les services d'installation de réfugiés visant un groupe racial ou ethnique en particulier). Dans quelles circonstances l'ARC considérera-t-elle un tel groupe comme une « composante suffisante de la collectivité »?

Il est difficile de décrire avec précision ce qui constitue une composante suffisante de la collectivité. En outre, cette notion de composante suffisante semble laisser entendre un nombre assez considérable de bénéficiaires alors que, en fait, le nombre de bénéficiaires n'est pas un facteur important. Chaque cas doit faire l'objet d'une décision sur le fond. La jurisprudence a établi certaines règles et lignes directrices générales sur lesquelles les examinateurs s'appuient pour déterminer si un groupe constitue une composante suffisante de la collectivité.

Parmi ces règles générales, on peut mentionner les suivantes :

1. certaines catégories de personnes qui peuvent bénéficier des fins d'un organisme sont généralement acceptables en droit :

2. Le rapport entre la fin de bienfaisance poursuivie et une catégorie de bénéficiaires admissibles détermine s'il s'agit d'une composante suffisanteNote de bas de page 47 . Un groupe de bénéficiaires peut être suffisant pour une fin, mais pas pour une autre. Par exemple, un organisme de bienfaisance religieux pourrait bien limiter ses bénéficiaires à ceux qui adhèrent à la foi de cet organisme, alors que la même restriction ne pourrait pas s'appliquer à un organisme qui vise à aider les personnes handicapées

3. Les organismes qui confèrent un bienfait d'intérêt privé ne sont pas des organismes de bienfaisance. Un bienfait d'intérêt privé existe lorsque les bénéficiaires des services de l'organisme sont définis uniquement par un lien personnel, comme une relation familiale ou un emploi commun ou encore un autre lien qui ne se rapporte pas à la fin de l'organisme, comme la couleur des cheveux ou l'appartenance à un groupe non lié aux besoins auxquels l'organisme cherche à répondreNote de bas de page 48

4. En règle générale, limiter ou restreindre l'accès à un service ou à un programme violera le critère du bienfait d'intérêt public, à moins qu'il n'ait été démontré que cette limite ou restriction est pertinente à la réalisation de la fin de bienfaisance (par exemple, un organisme offrant des services de soins généraux de santé, mais voulant restreindre ces services à un groupe ethnique en particulier ne sera pas reconnu comme organisme de bienfaisance, à moins que la raison de cette restriction soit clairement justifiée). Voir section 3.2.2 ci-dessous pour un aperçu des genres de critères appliqués par les examinateurs pour déterminer si une restriction est justifiée

5. Même si le nombre possible de bénéficiaires (qui ne devrait pas être négligeable) est un facteur important, le simple fait que seulement un nombre limité de personnes puissent se prévaloir d'un bénéfice à un moment donné ne violera pas nécessairement le critère du bienfait d'intérêt public. Par exemple, les fiducies qui confèrent des prix à un seul musicien méritant chaque année quitte à ce que celui-ci ne soit pas le même d'année en année, relèvent de la bienfaisance

3.2.2 Restreindre les bénéfices à un groupe particulier de bénéficiaires ou privilégier ce groupe

La question à savoir ce qui constitue le public se pose le plus souvent dans le cas d'un organisme qui fait une demande d'enregistrement et qui impose des limites sur le groupe desservi par l'organisme, en raison, entre autres, de l'origine ethnique, du sexe, de la race, de l'âge, de l'orientation sexuelle et de la religion. Même si la restriction elle-même peut être directement conforme à la nature de la fin de bienfaisance, certains organismes désirent restreindre le bénéfice conféré à un seul groupe précis pour d'autres raisons. En outre, d'autres organismes désirent simplement conférer de façon privilégiée le bénéfice projeté à un groupe identifiable ou lui offrir de la même façon un service spécialisé. Tous les genres de restrictions peuvent potentiellement violer le critère du bienfait d'intérêt public, mais à différents degrés. Les organismes qui désirent carrément restreindre un bénéfice ou encore exclure des personnes des services ont un fardeau beaucoup plus lourd à prouver qu'un bienfait d'intérêt public est conféré que celui des organismes qui veulent seulement privilégier un groupe particulier, mais tout de même offrir le service au grand public.

Lorsqu'un organisme de bienfaisance propose de restreindre d'une façon ou d'une autre ses activités à certains bénéficiaires, la nature de la restriction doit être clairement liée au bénéfice proposé. La restriction est-elle pertinente à la réalisation de l'objectif de bienfaisance? Par exemple, une restriction imposée sur l'admissibilité qui est fondée sur la religion d'une personne lorsque l'objectif des activités de l'organisme n'est pas de nature religieuse (par exemple, l'établissement d'un musée des sciences) violera vraisemblablement le critère du bienfait d'intérêt public et empêchera le demandeur d'obtenir son enregistrement à titre d'organisme de bienfaisanceNote de bas de page 49 . À l'autre bout du continuum se trouvent les organismes dont les restrictions sont directement liées à la fin de bienfaisance ou en font partie, ce qui sera considéré comme acceptable. Un exemple de ce dernier scénario serait un organisme qui vise à aider les femmes atteintes du cancer des ovaires ou encore, un autre qui vise à aider les hommes qui souffrent du cancer de la prostate. Ces organismes, dont les fins se trouvent entre les deux extrémités du continuum, doivent démontrer pourquoi la restriction imposée sur les personnes qui profiteront directement est nécessaire par rapport à la fin de bienfaisance proposée.

Lorsqu'ils examinent le cas d'un demandeur qui propose de restreindre les bénéfices conférés à un certain groupe de la collectivité ou d'offrir de façon privilégiée le service à un groupe en particulier, mais sans en exclure le public dans son ensemble, les examinateurs tiendront généralement compte d'un ou de plusieurs des facteurs suivants à divers degrés d'importance (selon les circonstances) pour déterminer si la restriction est justifiable :

Exemples

  • Une preuve à l'appui du besoin de services distincts pour les hommes et pour les femmes dans les centres de réhabilitation pour toxicomanes sera suffisante pour appuyer une restriction favorisant des installations de réhabilitation séparées
     
  • Un organisme qui offre des services d'installation aux réfugiés, mais qui vise aussi une collectivité en particulier, offre ces services dans les langues de cette collectivité et cible certains problèmes propres à cette collectivité, peut relever de la bienfaisance, pourvu qu'une preuve suffisante du besoin soit établie

Dans certaines circonstances, l'ARC peut accepter des organismes dont les services sont ouverts et accessibles au grand public mais qui, compte tenu des services offerts, se voient desservir, d'un point de vue pratique, une collectivité plus petite. Même si les mêmes critères sont appliqués, il le sont de façon moins stricte, l'exigence première étant que les services n'excluent personne.

Exemple

Un organisme qui dessert les personnes âgées, mais dont les programmes visent les personnes qui ont une affinité naturelle, comme des personnes de la même orientation sexuelle ou de la même origine ethnique ou culturelle, peut relever de la bienfaisance si les services sont autrement offerts au grand public (Lignes directrices CG-026, Soulager les conditions attribuées à la vieillesse et l’enregistrement à titre d’organisme de bienfaisance).

Enfin, les organismes qui cherchent à restreindre la portée des bénéfices conférés doivent toujours s'assurer que les restrictions proposées ne sont pas illégales ou contraires à la politique générale. Les organismes qui imposent de telles restrictions ne peuvent pas conférer de bienfait d'intérêt public. Les organismes dont les fins sont discriminatoires ou fondées sur des notions de racisme peuvent, selon la nature de la fin discriminatoire, violer les normes de la Charte canadienne des droits et libertés. Elles pourraient également contrevenir aux divers régimes fédéral ou provinciaux de droits de la personne ou être contraires à la politique générale telle qu'exprimée dans ces régimes constitutionnels et législatifsNote de bas de page 50 .

3.2.3 Bienfait d'intérêt public et organismes

Les organismes établis en partie pour leurs membres qui offrent des programmes et (ou) procurent des avantages directement à leurs membres ne seront pas, règle générale, considérés, en droit, comme des organismes de bienfaisance parce qu'ils ne revêtent pas un caractère public suffisamment important.Note de bas de page 51 Les groupes de membres comprennent les associations professionnelles, les syndicats, les coopératives et les associations de locataires, pour n'en nommer que quelques-uns. En général, de tels groupes sont établis au profit direct de leurs membres, souvent dans un rôle de défense des intérêts, et par conséquent, ne relèvent pas de la bienfaisance en droit.

Cela ne signifie pas que tous les organismes comptant des membres ne seront pas considérés à titre d'organismes de bienfaisance. Il existe quelques exceptions :

L'ARC reconnaît comme organismes de bienfaisance les organismes qui offrent des services d'éducation, de thérapie de soutien ou de réhabilitation aux clients admissibles au moyen du modèle des groupes d'entraide, puisque le bénéfice conféré au grand public est évident. De tels groupes sont établis pour aider des personnes de la collectivité dans son ensemble à régler leurs problèmes ou leurs désavantages particuliers, y compris les problèmes associés à la discrimination, à l'exclusion sociale, à la violence familiale, aux familles dysfonctionnelles et à l'abus de l'alcool et de la drogue, pour n'en nommer que quelques-uns.

Exemples

  • Les groupes formés pour aider leurs membres à se réadapter par suite d'abus de l'alcool ou d'autres drogues seront reconnus comme organismes de bienfaisance par l'ARC
     
  • Les groupes qui aident les immigrants récents au Canada qui sont confrontés à l'isolement social afin de les aider à acquérir une confiance en soi, à leur fournir un soutien mutuel, à trouver des solutions à des problèmes communs et à les aider à acquérir des compétences leur permettant d'être des participants plus actifs dans la société, peuvent également être reconnus comme relevant de la bienfaisance par l'ARC

3.2.4 Bienfait d'intérêt privé : dans quelles mesures des individus peuvent-ils obtenir un bienfait d'intérêt privé?

Même si les organismes de bienfaisance ne peuvent pas être établis pour procurer des bienfaits d'intérêt privé, il arrive que ceux-ci surviennent lors de la poursuite d'objectifs de bienfaisance. Toutefois, un bienfait d'intérêt privé qui en découlerait ne doit pas l'emporter sur le bienfait d'intérêt public conféré par un organisme. Tout bénéfice conféré à une personne ou à un groupe de personnes doit découler directement de la poursuite des fins de l'organisme de bienfaisance (par exemple, le soulagement de la pauvreté) ou être accessoire à la poursuite de ces fins (par exemple, les programmes menés par les organismes de développement économique communautaire) en offrant des incitatifs visant à attirer les services sociaux et communautaires nécessaires à une région défavoriséeNote de bas de page 54 . Le bienfait d'intérêt privé n'est acceptable que comme une conséquence mineure et accessoire de la fin de bienfaisance.

Il est difficile d'évaluer les bienfaits d'intérêt public et d'intérêt privé. Il n'existe pas de critères quantitatifs pour mesurer un bienfait d'intérêt privé par rapport à un bienfait plus important conféré à l'ensemble de la collectivité.

On tient compte, en outre, des facteurs suivants :

Un bienfait d'intérêt privé est jugé acceptable lorsqu'il est conféré dans le cadre de la prestation d'un bénéfice de bienfaisance raisonnable à un bénéficiaire choisi de façon appropriée. Par exemple, lorsqu'une institution religieuse, qui est autrement un organisme de bienfaisance, mène des activités sociales au profit de ses membres ou de groupes de jeunes, de telles activités, bien qu'elles ne soient pas elles-mêmes des activités de bienfaisance, seront jugées acceptables parce qu'elles sont accessoires à la fin principale, l'avancement de la religion.

Les activités menées par l'organisme de bienfaisance qui ont pour résultat de conférer des bienfaits d'intérêt privé à des particuliers ou à des sociétés commerciales doivent être des activités qui autrement contribuent à faire avancer la fin de bienfaisance et ne font pas la promotion d'une fin collatéraleNote de bas de page 55 . Par exemple, dans le domaine du développement économique communautaire, une tension existe souvent entre la promotion de l'industrie et du commerce (qui est une fin de bienfaisance) d'une part et de la promotion et du soutien d'entreprises privées, d'une autre partNote de bas de page 56 .

Lorsqu'ils examinent les avantages conférés, les examinateurs veulent s'assurer que tout bienfait d'intérêt privé ne dépasse pas la limite de ce qui est nécessaire à la réalisation de la fin de bienfaisance.

3.2.5 L'imposition de frais touche-t-elle la question du bienfait d'intérêt public?

Bon nombre d'organismes de bienfaisance (par exemple, des musées, des organismes artistiques, et certaines institutions religieuses) exigent des frais pour leurs services. L'imposition de frais ne viole pas en soi le principe du bienfait d'intérêt public, même si, dans certaines circonstances, elle le pourrait. Des préoccupations surgissent lorsque l'imposition de frais est telle que l'effet engendré mène à l'exclusion de certains membres du public. Dans ces cas, on considère habituellement que l'organisme demandeur ne relève pas de la bienfaisance.

On tient compte de plusieurs facteurs pour déterminer si l'imposition de frais est incompatible avec le critère du bienfait d'intérêt public :

3.3 Preuve du bienfait d'intérêt public

La présence d'un bienfait d'intérêt public doit être démontrée par une preuve soumise par l'organisme qui fait une demande d'enregistrement. Il n'est pas suffisant pour un demandeur de simplement indiquer que, à son avis, un bienfait d'intérêt public découlera de ses finsNote de bas de page 57 . Les examinateurs peuvent examiner un large éventail de documents soumis à l'appui d'une demande d'enregistrement à titre d'organisme de bienfaisance. La nature et la portée de la preuve requise dépendront en grande partie de la fin que l'organisme cherche à faire reconnaître, de l'approche adoptée pour la réalisation de la fin et des restrictions imposées par l'organisme sur la catégorie de bénéficiaires visée. Lorsque les fins sont nouvelles ou qu'une restriction est imposée sur la catégorie de bénéficiaires, des éléments de preuve objectifs supplémentaires pourraient être requis.

Un organisme qui veut faire une demande d'enregistrement ferait mieux d'envisager d'appuyer sa demande de quelques-uns des renseignements suivants pour établir l'existence d'un bienfait d'intérêt public. Cependant, il ne doit pas oublier que le fait de soumettre de tels renseignements ne sera pas nécessairement suffisant pour démontrer qu'un bienfait d'intérêt public existe dans les circonstances :

Même si les initiatives législatives peuvent être prises en compte, la simple existence d'une loi n'est pas une preuve concluante qu'un organisme conférera un bienfait d'intérêt public au sens du droit de la bienfaisance. Selon Iacobucci, J., dans l'arrêt Vancouver Society, un bénéfice doit toujours être déterminé « par voie d'analogie avec les cas où des fins ont déjà été reconnues comme des fins de bienfaisance »ote de bas de page 58 . Ce n'est pas « que l'existence de mesures législatives régissant un secteur donné n'est jamais pertinente pour déterminer si une fin a un caractère de bienfaisance ». S'appuyant sur l'arrêt Everywoman's Health Centre, il fait remarquer que le tribunal dans cette affaire « a fait état de l'existence de mesures législatives pour réfuter l'argument que la prestation de services d'avortement en cliniques privées était contraire à la politique générale »Note de bas de page 59 .

Annexe A – Fondement juridique de la définition du terme « organisme de bienfaisance » en common law

Puisqu'il n'y a aucune définition du terme « organisme de bienfaisance » dans la Loi, il est nécessaire d'étudier la common law pour déterminer son sens. Le fondement de la définition de ce terme en common law remonte au préambule du Statute of Charitable Uses, 1601Note de bas de page 60 . Le préambule de la loi énumère bon nombre d'objectifs ou de fins de bienfaisance et est souvent mentionné dans son adaptation en anglais moderneNote de bas de page 61 :

Soulager les personnes âgées, les infirmes ou les pauvres; pourvoir aux besoins des soldats et des marins malades ou invalides; subventionner les établissements scolaires, les écoles gratuites et les boursiers étudiants dans les universités; réparer les ponts, les ports, les havres, la chaussée, les églises, le littoral et les grandes routes; faire élever et instruire les orphelins; venir en aide aux maisons de correction, leur fournir des provisions ou les subventionner; doter les jeunes filles pauvres; fournir une aide aux jeunes commerçants, aux artisans et aux personnes ruinées; soulager ou libérer les prisonniers, et aider ou soulager tous les citoyens pauvres relativement au paiement de la taxe d'un quinzième, de l'impôt pour la levée des armées et d'autres taxes.

Au moment de l'adoption de la loi, la liste des fins de bienfaisance établie ci-dessus n'était pas considérée comme exhaustive. Pour déterminer le caractère de bienfaisance, la cour déterminait plutôt si une fin particulière était en équité avec la loi ou en d'autres mots, si elle est conforme à l'esprit de la loi (préambule)Note de bas de page 62 . Dans ce contexte général, les tribunaux ont élaboré un ensemble de fins de bienfaisance en faisant une analogie entre les nouvelles fins et celles qui sont mentionnées dans le préambule ou celles qui ont été depuis reconnues comme fins de bienfaisance par un tribunal. Les tribunaux continuent aujourd'hui d'utiliser cette méthode.

À la fin des années 1800, Lord MacNaghton, dans l'arrêt Commissioners for Special Purposes of the Income Tax Act v. Pemsel a classé les fins de bienfaisance établies en common law en quatre categoriesNote de bas de page 63 :

[TRADUCTION]

Au sens juridique, il y a quatre principaux genres d'organismes de bienfaisance : les fiducies pour le soulagement de la pauvreté; les fiducies pour l'avancement de l'éducation; les fiducies pour l'avancement de la religion; et les fiducies pour d'autres fins profitant à la collectivité qui n'appartiennent pas à l'une des catégories précédentes.

Bien que la méthode de classification suivie pour déterminer s'il s'agit d'une fin de bienfaisance est généralement utile dans le cadre du processus, des problèmes persistent. Plus particulièrement, le libellé de la description des catégories est loin d'être clair, plus particulièrement en ce qui concerne la quatrième catégorie, dont l'interprétation a fait l'objet de litiges importants.

Ces quatre catégories de fins de bienfaisance, ainsi que le préambule, servent de point de départ pour déterminer si un organisme est un organisme de bienfaisance en common law. Règle générale, les tribunaux déterminent tout d'abord si les fins de l'organisme appartiennent à l'une ou plusieurs de ces catégories spécifiques et, dans la négative, si les fins peuvent raisonnablement appartenir à la catégorie générale appelée la « quatrième catégorie ». La méthode de la classification a été approuvée explicitement pour la première fois par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Guaranty Trust Co. of Canada c. ministre du Revenu nationalNote de bas de page 64 et confirmée dans une décision plus récente de la Cour suprême, l'arrêt Vancouver SocietyNote de bas de page 65 .

Annexe B – Jurisprudence

Bienfait d'intérêt public

Nous avons indiqué dans le préambule des présentes lignes directrices que les problèmes associés à l'application du critère du bienfait d'intérêt public dans le contexte de la définition de la bienfaisance ne sont pas sans importance. Diverses demandes de clarification et/ou de modernisation de cette définition ont été formulées aussi bien par des juges que par des commentateurs juridiques et des membres du secteur de la bienfaisance.

C'est dans ce contexte que nous proposons les présentes lignes directrices et, ce faisant, nous avons articulé la façon dont nous appliquons le critère du bienfait d'intérêt public, ainsi que son fondement. Nous avons fait, dans le texte, des renvois à la jurisprudence, qui constitue le fondement de nos interprétations. Dans cette annexe, nous fournissons certaines citations importantes tirées de certains des arrêts faisant jurisprudence et de textes juridiques sur lesquels nous nous sommes appuyés pour formuler ces lignes directrices. Cette annexe est divisée en trois catégories :

Règle générale

L'arrêt Verge v. Somerville est souvent cité comme source générale pour l'exigence relative au bienfait d'intérêtNote de bas de page 66 .

Verge v. Somerville, [1924] A.C., p. 496 à 499

Pour déterminer si un don constitue une fiducie de bienfaisance valide afin d'éviter d'être annulé en raison de sa perpétuité, la première question est de savoir s'il est public, c'est-à-dire s'il profite à la collectivité ou à une composante importante de la collectivité. Les habitants d'une paroisse ou d'une ville, ou n'importe quelle catégorie particulière d'habitants de ce genre [c'est nous qui soulignons] peuvent, par exemple, faire l'objet d'un tel don, mais des individus particuliers ou un ensemble variable d'individus particuliers ne le peuvent pas.

Les énoncés concernant la confusion entourant le libellé du critère très important du bienfait d'intérêt public et la quatrième catégorie des fins de bienfaisance :

Vancouver Society of Immigrant and Visible Minority Women c. M.R.N., [1999] 1 R.C.S. 10, paragraphes 147 et 148

L'expression « intérêt de la communauté » est malheureuse parce qu'elle crée de la confusion avec la quatrième catégorie d'organismes de bienfaisance de la classification établie dans Pemsel -- les fiducies constituées à d'autres fins utiles à la société. Cette autre notion d'intérêt du public est différente et reflète la préoccupation générale que [TRADUCTION] « […] la caractéristique essentielle d'une activité de bienfaisance est qu'elle vise le bien-être de la population; elle ne vise pas à conférer des avantages d'ordre privé » : Waters, op. cit., à la p. 550.

Et comme la Cour l'a illustré davantage,

« […] la différence entre la classification établie dans Pemsel et cette notion additionnelle d'« intérêt de la communauté » est peut-être plus facile à saisir lorsqu'elle est exprimée ainsi : la condition voulant que la fin serve l'« intérêt de la communauté » est une condition nécessaire, mais insuffisante, pour permettre de conclure à l'existence d'une fin de bienfaisance en common law. Si cette condition n'est pas respectée, la fin en cause ne peut alors pas être considérée comme une fin de bienfaisance. Toutefois, même si elle est respectée, les tribunaux doivent en plus se demander si la fin en question possède ce que le professeur Waters appelle, à la p. 550 de son ouvrage, le [TRADUCTION] « caractère générique de la bienfaisance ». On peut discerner la présence de ce caractère en établissant une analogie avec les fins déjà reconnues comme des fins de bienfaisance en common law et qui ont été commodément classifiées dans Pemsel. En outre, la différence dépend souvent du point de vue : les quatre catégories de fins de bienfaisance s'attachent à ce qui est fourni, alors que la condition voulant que la fin serve l'« intérêt de la communauté » s'attache plus souvent à l'identité du bénéficiaire. »

Éléments de preuve nécessaires pour établir le bienfait d'intérêt public.

McGovern v. A.G., [1982] 2 W.L.R., p. 222 à 234

[TRADUCTION] Sauf dans le cas des dons faits à des catégories de personnes pauvres, il faut toujours montrer qu'une fiducie vise la promotion d'un bienfait d'intérêt public dont la nature est reconnue en tant que telle par les tribunaux pour qu'elle ait droit au statut d'organisme de bienfaisance. La question de savoir si une fin conférera ou pourrait conférer un bénéfice public doit être tranchée par un tribunal qui se fera une opinion d'après la preuve qui lui aura été présentée : voir National Anti-Vivisection Society v. IRC [1948] AC 31, 44, selon Lord Wright. Il ne fait aucun doute que, dans certains cas, une fin peut être si manifestement bénéfique pour le public qu'il serait absurde d'y exiger une preuve à l'appui. Cependant, dans bon nombre d'autres cas, l'élément du bienfait d'intérêt public peut être beaucoup plus discutable. En effet, dans certains cas, le tribunal jugera même que cet élément est impossible à prouver d'une façon ou d'une autre et refusera donc inévitablement de reconnaître la fiducie comme relevant de la bienfaisance.

Re Hummeltenberg, [1923] 1 ch., p. 237 à 242

À mon avis, la question de savoir si un don confère ou peut conférer un bienfait d'intérêt public est une question que la cour doit trancher en se faisant une opinion d'après la preuve qui lui est présentée.

Volet « bénéfice conféré » du critère du bienfait d'intérêt public

Contestation de la présomption

On présume l'existence d'un bénéfice conféré au titre des trois premières catégories de fins de bienfaisance dès qu'un organisme demandeur établit en droit que les fins proposées satisfont aux exigences juridiques du droit de la bienfaisance portant sur l'une ou plusieurs de ces trois catégories, soit le soulagement de la pauvreté, à l'avancement de l'éducation ou à l'avancement de la religion. Cette présomption peut néanmoins être réfutée par les préoccupations soulevées par l'examinateur.

Dans leur décision concernant l'Église de la Scientologie, les Commissaires à la surveillance des organismes de bienfaisance (R.-U.) ont conclu que la présomption dans ce cas était réfutée par un certain nombre de circonstances et qu'ils adopteraient une perspective plus large du critère du bienfait d'intérêt public en tenant compte d'un certain nombre de facteurs, notamment du fait qu'il s'agissait d'une nouvelle religion, que le public était préoccupé par la scientologie en général et que des inquiétudes judiciaires avaient été soulevées concernant certaines de ses pratiques tant au R.-U. qu'à l'étranger. Ils ont rejeté l'argument selon lequel il fallait montrer que le don est préjudiciable à la collectivité pour déplacer la présomption du bienfait d'intérêt publicNote de bas de page 67 .

Preuve du bénéfice conféré pour l'enregistrement en vertu de la quatrième catégorie de fins de bienfaisance

Les organismes qui demandent l'enregistrement en vertu de la quatrième catégorie de fins de bienfaisances doivent prouver l'existence d'un bénéfice conféré. Cette quatrième catégorie pose des problèmes particuliers en ce qui concerne l'application de ce volet du critère. Comme Chesterman l'indique :

[TRADUCTION] L'exigence relative à la présence du bénéfice conféré est inextricablement liée à la démarcation de la catégorie elle-même, de sorte que s'il est strictement faux de dire que la preuve de la présence de ce bénéfice conféré vient s'ajouter à celle de l'appartenance de la fin à la catégorie, il est aussi quelque peu trompeur de parler de la présence « automatique » du bénéfice...

[TRADUCTION] La question soulevée par l'exigence relative au volet du bénéfice conféré, à savoir si les fins confèrent un bénéfice tangible, n'est pas une question distincte en ce qui a trait à la quatrième catégorie de fins de bienfaisance. La question est nécessairement réglée d'une façon ou d'une autre lorsqu'on détermine si les fins en question appartiennent à la quatrième catégorieNote de bas de page 68 .

Comme il est aussi indiqué dans le rapport de la CRDO, le volet « bénéfice conféré » du critère du bienfait d'intérêt public sert à [TRADUCTION] « faciliter l'examen de l'utilité pratique (le bienfait) du projet »Note de bas de page 69 . Cependant, dans le cas des fins de bienfaisance qui appartiennent à la quatrième catégorie, l'utilité pratique du projet est accolée à la fin de bienfaisance de ce dernier, car cette catégorie est définie en fonction des fiducies créées dans le but d'apporter des bénéfices à la collectivité.

Bénéfice tangible

Les bénéfices doivent généralement être tangibles. Cette exigence découle du besoin d'avoir un bénéfice identifiable et demonstrableNote de bas de page 70 , bien que la jurisprudence ait reconnu que des bénéfices intangibles sont acceptables, pourvu que certaines conditions soient satisfaitesNote de bas de page 71 . Il pourrait y avoir des circonstances, quoique limitées en nombre, où les bénéfices intangibles ont été jugés acceptables lorsque, plus précisément, de tels bénéfices seraient considérés comme valables [TRADUCTION] « selon une vue commune de l'opinion éclairée »Note de bas de page 72 .

National Anti-Vivisection Society v. I.R.C., [1948] A.C. 31, p. 42

[TRADUCTION] Je crois que la tendance générale de la notion de bienfaisance au sens juridique de la quatrième catégorie va vers les bénéfices tangibles et objectifs et, à tout le moins, d'exiger que la vue commune de l'opinion éclairée de l'époque approuve qu'un bénéfice intangible puisse constituer un bénéfice suffisant pour la collectivité pour justifier la reconnaissance de la fin au sein de la quatrième catégorie.

Ce critère a été appliqué, puis rejeté d'après les faits particuliers de la cause lors de la détermination du statut d'organisme de bienfaisance de l'Église de la Scientologie effectuée par la Commission de surveillance des oeuvres de bienfaisance du R.-U.

Application for Registration as a Charity by the Church of Scientology (England and Wales) Decision of the Charity Commissioners made on November 17th, 1999

Lorsqu'il s'agit d'un bénéfice intangible, les commissaires ont interprété le critère comme étant l'application d'un consensus de l'opinion entre personnes justes et dégagées de tout préjugé ou parti pris.

Variation du bénéfice conféré au fil du temps

National Anti-Vivisection Society v. I.R.C., [1948] A.C. 31, p. 42

[TRADUCTION] Il est aussi possible que les fiducies [de bienfaisance], par suite de l'évolution des idées et des conditions économiques, ainsi que des idées en matière de service social, cessent d'être considérées comme conférant un bénéfice à la collectivité et que les fiducies visant l'avancement de l'apprentissage ou de l'éducation ne soient pas reconnues comme organismes de bienfaisance si l'on considère que l'apprentissage ou l'éducation en question n'a plus de valeur aux yeux du public.

Vancouver Society of Immigrant and Visible Minority Women c. M.R.N., [1999] 1 R.C.S. 10, par. 159

« En l'absence de réforme législative donnant des indications à cet égard, le meilleur moyen de déterminer si les fins poursuivies par un organisme possèdent le caractère de bienfaisance requis consiste encore à procéder par voie d'analogie avec les fins qui ont déjà été reconnues comme telles par la common law et commodément classifiées dans Pemsel, sous réserve toujours du respect de la condition générale que les fins en question servent l'intérêt de la communauté, et tout en tenant compte du contexte social, moral et économique de la société au moment concerné. »

Volet « public » du critère du bienfait d'intérêt public

Le deuxième volet du critère du bienfait d'intérêt public est appliqué pour toutes les catégories d'organismes de bienfaisance, sauf les organismes de bienfaisance dont les fins appartiennent à la première catégorie, soit le soulagement de la pauvreté. Cependant, toutes les autres fins doivent satisfaire au volet « public » du critère, quoique d'une manière un peu différente dans chaque cas.

IRC v. Baddeley, [1955] A.C. 572, p. 615

[TRADUCTION] Je ne peux pas accepter le principe soumis par les intimés qu'une composante suffisante du public pour supporter la création d'une fiducie sous une des catégories de bienfaisance doit, en droit, être suffisante pour supporter la création d'une fiducie sous une autre catégorie. Je crois que des difficultés sont susceptibles de faire surface si on examine les bénéficiaires séparément du caractère particulier de la fin de bienfaisance. À mon avis, elles sont interdépendantes. Il pourrait bien y avoir une fiducie de bienfaisance valide visant la promotion de la religion qui profite à une très petite catégorie de personnes. Il ne s'ensuit aucunement qu'un terrain de jeu à l'usage exclusif de ces mêmes bénéficiaires constitue un organisme de bienfaisance qui se qualifierait.

Composante suffisante de la collectivité

Les fins d'un organisme de bienfaisance doivent viser l'ensemble de la collectivité ou du public ou une composante suffisante de la collectivité. Qu'est-ce qui constitue une composante suffisante de la collectivité?

Dingle v. Turner, [1972] A.C. 601

[TRADUCTION] L'expression « composante du public » est en vérité une expression vague qui pourrait signifier différentes choses pour différentes personnes. Dans le droit des organismes de bienfaisance, les juges ont cherché à élucider son sens en l'opposant à une autre expression, « un ensemble variable de particuliers ». Cependant, cette supposée opposition ne m'aide pas beaucoup, car, à mon avis, le même ensemble de personnes pourrait bien être décrit tant comme une composante du public que comme un ensemble variable de particuliers.

La question de savoir si on peut dire avec justesse que les bénéficiaires possibles constituent une composante du public est une question de degré qui dépendra beaucoup de la fin de la fiducie.

Springhill Housing Action Committee v. Commr. of Valuation, [1983] N.I. 184, p. 192

[TRADUCTION] […] Tout cela ne nous donne que très peu d'indications, la fin de la fiducie étant la seule indication fiable…. Je crois qu'il est impossible d'établir une distinction plus claire que celle qu'a établie la Chambre des Lords, aussi imprécise soit-elle. Je suis convaincu qu'une fiducie pour une composante de la collectivité relève normalement de la bienfaisance, à moins que l'objectif ou la fin de la fiducie mène à une conclusion différente. Dans le présent cas, le Centre est occupé pour une fin qui est normalement une fin de bienfaisance, et la catégorie de personnes au profit de laquelle il est occupé, soit les résidents d'un domaine assez grand, n'est pas assez suffisante en nombre pour le priver prima facie de son caractère public.

Voici certains des principes qui ont été élaborés par les tribunaux au cours des années et qui offrent un certain cadre pour déterminer si un groupe de personnes constitue une composante suffisante de la collectivité.

Davies v. Perpetual Trustee Company, [1959] A.C. 439, p. 456

[TRADUCTION] « [La restriction n'a] aucun rapport avec l'objectif éducationnel que le testateur avait en tête. On ne peut pas dire que les garçons, dont les ancêtres presbytériens… descendent d'immigrants de l'Irlande du Nord, ont plus besoin d'éducation en matière de doctrine presbytérienne (Westminster Divines) que les autres garçons dont les ancêtres presbytériens… descendent, par exemple, d'immigrants de l'Angleterre ou de l'Écosse. »

(Voir aussi la citation tirée de l'arrêt Baddeley et la référence ci-dessus.)

Oppenheim v. Tobacco Securities Trust Co Ltd., [1951] A.C. 297, par. 306

[TRADUCTION] L'expression « composante de la collectivité » n'a pas un sens sacré spécial, mais elle indique, premièrement, que le nombre de bénéficiaires possibles ne doit pas être négligeable et que, deuxièmement, la qualité qui distingue les membres de ce groupe des autres membres de la collectivité et qui leur permet ainsi de former un groupe de cette collectivité doit être une qualité qui ne dépend pas de leurs relations avec une personne en particulier… Il peut y avoir de nombreuses personnes dans un groupe, mais si le lien entre ces personnes est leurs relations personnelles à une seule personne proposée, le groupe en question n'est ni la collectivité ni une composante de la collectivité aux fins de bienfaisance.

Re Compton, [1945], chap. 123

Un don pour lequel les bénéficiaires sont définis par rapport à une relation purement personnelle à une personne proposée nommée ne peut pas, en principe, être un don de bienfaisance valide. Et cela, je crois, doit être le cas, que la relation soit proche ou lointaine, qu'elle soit limitée à une génération ou élargie à deux ou trois générations ou encore à perpétuité. Le vice inhérent à l'élément personnel existe indépendamment de la longueur de la chaîne, et le demandeur ne peut pas éviter de fonder sa demande sur cet élément.

Voir aussi l'arrêt Oppenheim ci-dessus.

IRC v. Baddeley, [1955] A.C. 572, p. 589, 592, selon le vicomte Simonds

[TRADUCTION] Ce qui m'amène à un autre aspect de l'affaire, qui a été débattu de façon approfondie et, du moins pour moi, présente le plus difficile des nombreux problèmes difficiles de cette branche du droit. Supposons que… la fiducie est une fiducie de bienfaisance valide si le bénéficiaire était l'ensemble de la collectivité ou un groupe de la collectivité défini par des limites géographiques : s'agit-il d'une fiducie moins valide si elle est limitée aux membres ou aux membres possibles d'une église en particulier dans une région limitée?… .Mais si son utilisation est limitée à un nombre de personnes choisies, si considérables et importantes soient-elles, il ne s'agit alors clairement pas d'un organisme de bienfaisance…. Je dois conclure, dans le présent cas, qu'une fiducie ne peut pas être considérée comme un organisme de bienfaisance appartenant à la quatrième catégorie établie dans l'arrêt Pemsel si les bénéficiaires sont une catégorie de personnes non seulement limitées à une région en particulier, mais choisies dans cette région par voie de référence à une croyance en particulier.

Notes

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