L’utilisation de l’eau de Javel et le recours au Programme de traitement d’entretien à la méthadone comme mesures de réduction des méfaits dans les pénitenciers du Canada

Remerciements

Les auteurs aimeraient remercier Frederic Borgatta de sa contribution à l’élaboration et à la mise en œuvre du Sondage national de 2007 auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque et les membres du Groupe de travail associés au Sondage (Jacqueline Arthur, Katherine Dinner, Marie‑Line Gilbert, Emily Henry, Gayatri Jayaraman, Rhonda Kropp, Tammy Maheral, Marissa McGuire, Mary Beth Pongrac, Jonathan Smith, Greg Springer et Jill Tarasuk) pour leurs conseils et leurs commentaires judicieux tout au long de la période consacrée à l’élaboration du questionnaire et à la rédaction du rapport. L’appui, la coopération et le dévouement de la gestionnaire de projet principale nationale (Heather Lockwood), des coordonnateurs du Sondage dans les régions (Kimberley Andreassen, Michelle Beyko, Teresa Garrahan, David Lewis et Hélène Racicot) et dans les établissements (Tim Ankers, Cathy Ball, Bob Barkley, Louise Barriage, Gaston Bélanger, Réjean Bérard, Diane Bergeron, Sherry Blakeney, Laura Bodvarsen, Lori Boss-Greenhow, Michèle Boutin, Celeste Bowes-Koep, Randall Breaton, Pam Briar, Marsha Brown, Bev Bruce, Joan Christianson, Pénélope Cossette, Shelley Crawford, Solange Cyr, Johanne Demètre, Micheline Désilets, Penny Drury, Mary Ann Dundas, Annette Dupuis, Claire Erkan, Donna Fillmore, Stéphanie Fournier, Linda Fumerton, Debbie Fury, Lyne Giroux, Carla Grace, Sue Groody, Derek Hutchings, Kevin Jean, Pat Jones, Virginia Jugo, Wally Klein, Luc Lavigne, Sylvain Lefebvre, Gail Lévesque, Cherie Maceachern, Daniel Major, Alison Martin, Penny Martin, Dorothy McGregor, Mark Noon-Ward, Tim O’Hara, Enid Oke, Viateur Perreault, Christian Rivest, Johanne Roy, Eva Sabir, Holly Samuels, Suzanne Scott, Dale Shackleford, Marg Smith, Natalie Soroka, Jeff Strange, Paul Taylor, Tana Taylor, Brenda Tilander-Masse, Liza Trohan, Darlene Turk, Mario Veilleux, Vicki Vervynck, Katherine Visser, Lorena Watson, Marilyn Winters et Carol Young) ont joué un rôle de premier plan dans la réalisation du Sondage et la collecte des données. En dernier lieu, ce travail aurait été impossible sans la participation de la direction du Service correctionnel du Canada ainsi que celle du personnel des pénitenciers fédéraux et des détenus.

Résumé

Pour prévenir la transmission par le sang d’infections comme le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et le virus de l’hépatite C (VHC), le Service correctionnel du Canada (SCC) ordonne que de l’eau de Javel soit « aisément et discrètement » accessible aux détenus, pour qu’ils puissent désinfecter le matériel d’injection, de tatouage et de perçage (SCC, 2004) qu’ils utilisent. En outre, le SCC propose aux détenus ayant une grave dépendance aux opiacés un Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM) (SCC, 2003). Jusqu’à maintenant, il n’y a pas eu d’examen approfondi de la demande d’eau de Javel (définie ici comme étant toute tentative faite pour se procurer de l’eau de Javel entre novembre 2006 et le moment où le sondage a été réalisé) ou du recours au PTEM comme façon de réduire les méfaits dans les pénitenciers du Canada.

Pour pallier ce manque de connaissance, le SCC a réalisé en 2007 le Sondage national auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque. Le questionnaire a été rempli par un échantillon de bonne taille, composé de détenus sous responsabilité fédérale (n = 3 370). Le présent rapport expose les résultats du sondage en ce qui concerne l’injection de drogues, le tatouage et le perçage; la connaissance du fait qu’il est possible de se procurer de l’eau de Javel et la demande d’eau de Javel en tant que telle; ainsi que la participation au PTEM.

Une minorité de détenus a fait état de facteurs de risque d’infection transmissible par le sang : 17 % ont dit s’être injecté de la drogue, 38 % ont déclaré s’être fait tatouer et 13 % ont dit s’être adonnés au perçage corporel pendant qu’ils étaient sous la garde du SCC. Ces comportements les exposent à des infections transmissibles par le sang en raison du recours à du matériel d’injection, de tatouage ou de perçage appartenant à quelqu’un d’autre. Dans une grande proportion, les détenus s’étant injecté de la drogue ont déclaré avoir utilisé le matériel d’autrui (68 %). Fait à noter, les détenus sont moins nombreux à avoir pris le matériel d’une autre personne pour un tatouage ou un perçage dans une rangée d’un établissement du SCC (cela va de 15 à 40 %).

De l’ensemble des détenus, 87 % étaient au courant de la politique du SCC concernant l’accès à l’eau de Javel, et 57 % avaient déjà essayé de s’en procurer. La plupart des détenus s’étant injecté de la drogue ou fait tatouer ou percer le corps dans un établissement correctionnel fédéral a déclaré avoir utilisé pour cela du matériel désinfecté à l’eau de Javel. Par ailleurs, ce sont les détenus qui ont dit avoir utilisé le matériel d’injection d’autrui qui se sont le plus procuré d’eau de Javel dans une proportion plus grande. Globalement, les détenus s’adonnant à des comportements à risque associés à la transmission d’infections par le sang se servent de l’eau de Javel de la façon prévue.

Trente-sept pour cent des détenus ayant demandé de l’eau de Javel ont déclaré avoir eu des difficultés à s’en procurer. Selon les détenus, la principale cause de ces difficultés était des problèmes d’entretien (pour 69 % des hommes et 48 % des femmes). De même, 48 % des femmes ont affirmé qu’elles devaient s’adresser au personnel pour obtenir de l’eau de Javel.

De façon générale, les détenus qui ont déclaré s’être injecté des opiacés étaient plus susceptibles que ceux qui s’injectaient une autre drogue d’avoir emprunté le matériel usagé d’une autre personne. L’injection d’opiacés peut donc accroître le risque d’infection par le sang, car il s’agit de pratiques d’injection dont le risque est relativement plus élevé. Le PTEM est une mesure de réduction des méfaits que le SCC offre pour réduire la consommation d’opiacés et, de ce fait, l’exposition aux infections transmissibles par le sang. Au moment du Sondage, 7 % des détenus ont dit participer au PTEM. Parmi ceux-là, 60 % n’ont pas déclaré avoir consommé récemment des opiacés dans un pénitencier. Chez ceux qui ne participaient pas au programme, mais qui avaient déjà essayé de le faire, 53 % ont déclaré ne pas satisfaire aux exigences pour être admis au programme; les autres ont affirmé qu’ils s’étaient eux-mêmes exclus du programme (29 %) ou qu’on les avait exclus pour avoir détourné de la méthadone (<1 %) ou pour d’autres raisons (17 %).

Globalement, le Sondage national présente des données estimatives sur les comportements des détenus qui ont pour effet d’accroître ou, au contraire, de réduire le risque d’infection par le sang. Comme il s’agit d’une étude transversale, les mesures associées à certains indicateurs demeurent limitées. Des projets de recherche à venir devraient examiner les liens directs entre la demande d’eau de Javel, l’utilisation de l’eau de Javel comme produit de désinfection et les facteurs associés à l’utilisation de matériel non stérilisé. Plus particulièrement, il serait utile d’avoir plus d’information pour savoir pourquoi les détenus ne se prévalent pas des mesures de réduction des méfaits à leur disposition. De plus, mieux connaître les comportements à risque que les détenus présentent avant et après leur participation au PTEM serait utile pour examiner, voire améliorer l’efficacité du programme.

Table des matières

Listes des tableaux

Liste des annexes

Introduction

Par l’injection de drogues, le tatouage et le perçage du corps, la personne s’expose à des infections transmissibles par le sang, comme le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et celui de l’hépatite C (VHC) (ASPC, 2008a). Le risque de propagation d’une infection transmissible par le sang associé à ces pratiques provient de l’utilisation d’un matériel qui a servi à d’autres personnes. Plusieurs stratégies d’ordre général permettraient de réduire les méfaits associés à ces pratiques, dont les suivantes : le recours à l’eau de Javel pour désinfecter le matériel d’injection, de tatouage et de perçage et, pour les personnes qui s’injectent des opiacés, la participation à un programme de traitement d’entretien à la méthadone (ASPC, 2003; 2004). Or, réduire la transmission par le sang des infections par ces moyens et d’autres méthodes est essentiel à la santé de tous les Canadiens, dont celle des délinquants pendant qu’ils se trouvent en établissement et après, quand ils ont réintégré la collectivité.

La gestion des maladies infectieuses peut être difficile en milieu correctionnel, vu les taux élevés d’infection transmissible par le sang et les comportements à risque qui y sont adoptés, par exemple l’injection de drogues, le tatouage et le perçage (ASPC, 2008b). Bien que les administrations interdisent l’injection de drogues, le tatouage et le perçage dans leurs établissements correctionnels, certains détenus continuent à s’y adonner, d’où le risque accru d’infection attribuable au partage de matériel. Par exemple, d’après les études canadiennes à ce sujet, le taux déclaré d’injection de drogues varie entre 5 et 28 % au sein des établissements correctionnels fédéraux et entre 1 et 8 % dans les centres correctionnels provinciaux (Alary, Godin et Lambert, 2005; Calzavara et Burchell, 1999; Calzavara et coll., 2003; Calzavara, Myers, Millson, Schlossbert et Burchell, 1997; Dufour et coll., 1996; Ford, 1999; Ford et coll., 2000; Martin, Gold et Murphy, 2005; PASAN, 2003; Poulin et coll., 2007; Price Waterhouse, 1996; Rehman, 2004; Small et coll., 2005). Les taux déclarés sont plus élevés lorsqu’on demande aux détenus s’ils se sont déjà injecté de la drogue alors qu’ils étaient incarcérés (8 % à 28 %), plutôt que pendant une période donnée, par exemple, au cours des 12 derniers mois (1 % à 11 %).

En outre, selon les estimations, entre 2 % et 52 % des détenus dans les établissements correctionnels canadiens déclarent s’être déjà fait tatouer dans une rangée de prison – pratique généralement plus fréquente chez les détenus sous responsabilité fédérale (27 à 52 %) que chez les détenus des prisons provinciales (2 à 35 %) (Alary et coll., 2005; Burchell et coll., 2003; Calzavara et Burchell, 1999; Calzavara et coll., 1997; Ford et coll., 2000; PASAN, 2003; Price Waterhouse, 1996). Enfin, 15 % environ des détenus purgeant une peine de ressort fédéral ont déclaré s’être fait percer dans un établissement correctionnel, par rapport à moins de 4 % des détenus des centres correctionnels provinciaux (Alary et coll., 2005; Calzavara et Burchell, 1999; PASAN, 2003; Price Waterhouse, 1996). À cause de ces types de comportements, les détenus des établissements correctionnels fédéraux pourraient être nombreux à présenter un risque plus élevé d’infection hématogène.

Le point le plus préoccupant, toutefois, c’est la fréquence à laquelle du matériel est partagé, pratique liée à la propagation d’infections transmissibles par le sang. Dans les établissements fédéraux et provinciaux, on compte une proportion généralement importante de détenus s’injectant de la drogue qui déclarent partager leur matériel; d’après les estimations, cela irait de 32 à 100 % (Alary et coll., 2005; Calzavara et Burchell, 1999; Calzavara et coll., 1997; Calzavara et coll., 2003; Dufour et coll., 1996; Ford, 1999; Ford et coll., 2000; Martin et coll., 2005; Poulin et coll., 2007; Small et coll., 2005). À l’inverse, dans le cas du tatouage, les études donnent à penser que la majorité des détenus se fait tatouer à l’aide de matériel neuf ou de matériel qu’ils considèrent comme propre et d’utilisation sûre. Par exemple, Calzavara et Burchell (1999) ont constaté que moins de 1 % des détenus ayant déclaré avoir utilisé du matériel de tatouage avaient emprunté le matériel de quelqu’un d’autre. En outre, les données portent à croire que les détenus utilisent du matériel de tatouage qui a été nettoyé plutôt que du matériel stérilisé. Calzavara et ses collaborateurs (1997) ont déterminé que 71 % des détenus ont déclaré s’être fait tatouer en prison à l’aide de matériel propre; les autres, soit 29 %, ont affirmé avoir utilisé des aiguilles stérilisées pour le tatouage. Soixante-douze pour cent des hommes purgeant une peine de ressort fédéral en 1995 ont déclaré que le matériel de tatouage qu’ils avaient employé, depuis leur arrivée à l’établissement où ils se trouvaient, était à la fois propre et d’utilisation sûre (Price Waterhouse, 1996). Certaines données portent à croire que le recours à du matériel non stérilisé en milieu correctionnel est peut-être plus fréquent dans le cas du perçage que dans celui du tatouage. Selon Alary et ses collaborateurs (2005), 21 % des hommes et 30 % des femmes ayant subi un perçage dans une prison provinciale au Québec ont eu recours à du matériel de perçage non stérilisé; toutefois, on n’a pas cherché à déterminer si le matériel en question avait bel et bien été nettoyé. Néanmoins, 72 % des hommes purgeant une peine de ressort fédéral en 1995 ont affirmé que le matériel de perçage qu’ils avaient employé, depuis leur arrivée à l’établissement où ils se trouvaient, était à la fois propre et d’utilisation sûre (Price Waterhouse, 1996). Dans l’ensemble, donc, une forte proportion de détenus s’injectant de la drogue ou se faisant tatouer ou percer en milieu correctionnel s’expose à un risque accru d’être atteinte d’une infection transmissible par le sang ou de contaminer autrui, à cause du partage de matériel.

Le SCC a, par conséquent, adopté une série de stratégies de réduction des méfaits dans ses pénitenciers pour prévenir la propagation de maladies infectieuses chez les détenus, et, au bout du compte, les membres de la collectivité. Selon la Directive du commissaire no 821 – Gestion des maladies infectieuses (SCC 2004), afin de prévenir la propagation d’infections transmissibles par le sang, il faut que de l’eau de Javel soit aisément et discrètement accessible aux détenus. Certaines études donnent cependant à penser que l’accessibilité de l’eau de Javel dans les pénitenciers est peut-être restreinte. Dans l’échantillon analysé par le PASAN (2003), 66 % des femmes purgeant une peine de ressort fédéral ont déclaré avoir eu des difficultés à se procurer de l’eau de Javel. Les femmes en question ont affirmé que le fait de devoir s’adresser au personnel pour obtenir de l’eau de Javel représentait un obstacle de taille. Dans le cadre de son étude, Small (2005) a appris des détenus qu’il n’était pas possible ou qu’il était très difficile d’obtenir de l’eau de Javel, surtout de l’eau de Javel non diluée, et, lorsqu’ils pouvaient en obtenir, il n’était pas possible de s’approvisionner discrètement. Ces questions sont également ressorties d’une évaluation du programme de distribution d’eau de Javel réalisée par le SCC (SCC, 1999).

Quoi qu’il en soit de l’accessibilité de l’eau de Javel, selon les études antérieures, la plupart des détenus affirment qu’ils nettoient les seringues avant de s’injecter de la drogue. Selon Calzavara (2003), 50 % des détenus des centres correctionnels provinciaux s’étant injecté de la drogue à l’aide d’une seringue usagée ont déclaré l’avoir désinfectée à l’eau de Javel non diluée. Dans un échantillon du Centre correctionnel pour femmes de Burnaby, qui regroupait des détenues sous responsabilité provinciale et fédérale, 91 % des détenues s’étant injecté de la drogue ont déclaré avoir désinfecté la seringue à l’eau de Javel avant de l’utiliser (Martin et coll., 2005). Selon Price Waterhouse (1996), parmi les hommes qui se sont injecté de la drogue depuis leur admission dans un établissement fédéral, 59 % ont déclaré avoir utilisé une seringue propre; toutefois, la méthode de nettoyage n’a pas été examinée. Enfin, d’après Calzavara et ses collaborateurs (1997), 43 % des détenus ayant partagé une seringue dans un pénitencier fédéral depuis 1985 avaient utilisé une seringue qui n’avait pas été nettoyée ou qui avait été mal nettoyée.

Comme mesure supplémentaire de réduction des méfaits, le SCC propose le Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM) aux détenus qui ont une dépendance majeure aux opiacés. Le PTEM vise à réduire la propagation d’infections transmissibles par le sang en faisant baisser le taux d’injection de drogue. Seules les personnes répondant aux critères d’admissibilité au programme, précisés dans les Lignes directrices spécifiques pour le traitement d’entretien à la méthadoneau SCC (SCC, 2003), peuvent y participer. Le PTEM du SCC respecte toutes les normes des collèges provinciaux de médecins et chirurgiens et de Santé Canada. La participation à un PTEM en milieu correctionnel canadien a fait l’objet de deux études seulement Note de bas de page1 , chacune d’entre elles portant sur des femmes (PASAN, 2003; Martin et coll., 2005). Selon l’étude du PASAN (2003), la plupart des détenues (97 %) étaient généralement au courant de l’existence du programme. Pour Martin et ses collaborateurs (2005), 27 % des femmes interrogées au Centre correctionnel pour femmes de Burnaby participaient au PTEM, 43 % y avaient déjà participé et 8 % disaient avoir de la difficulté à cet égard. Nous savons donc peu de chose sur les habitudes de consommation des détenus qui participent ou essaient de participer à un PTEM au sein du système correctionnel canadien. Tout de même, des projets de recherche menés ailleurs donnent à penser que les détenus inscrits à un PTEM continuent souvent de s’injecter de la drogue, mais à un rythme réduit (la baisse variant entre 55 et 75 %) et que le taux de partage du matériel dans le cas des drogues injectables baisse lui aussi (réduction de 47 à 73 %) (Larney, 2010).

Les projets de recherche menés à ce jour montrent clairement qu’une forte proportion des détenus présente un risque d’infection transmissible par le sang, mais il faut noter que la documentation comporte certaines lacunes. Par exemple, une bonne part de l’information sur les comportements des détenus sous responsabilité fédérale est dépassée; elle est tirée des réponses d’une poignée de répondants et fait rarement la distinction entre les hommes et les femmes. De surcroît, les recherches effectuées souffrent d’un manque de précision; par exemple, elles portent sur l’utilisation commune de matériel plutôt que sur l’utilisation du matériel de quelqu’un d’autre après que cette personne s’en soit servi Note de bas de page2 et sur l’utilisation commune de seringues plutôt que sur l’utilisation de seringues et de matériel à la fois pour la préparation et l’injection de drogues, par exemple le réchaud et la cuillère, le filtre et le liquide, autrement dit l’attirail. En outre, il n’y a eu qu’un examen limité du recours à l’eau de Javel comme mesure de réduction des méfaits, surtout en ce qui concerne le matériel de tatouage et de perçage dans les établissements correctionnels fédéraux et provinciaux. Enfin, aucune recherche au Canada n’a porté sur les habitudes de consommation des détenus participant à un PTEM.

En réalisant le Sondage national de 2007 auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque, au moyen d’un questionnaire autoadministré portant sur des questions liées aux infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), le SCC souhaitait combler le manque de connaissances sur le partage du matériel, l’utilisation de l’eau de Javel et le recours au PTEM comme moyen de réduire les méfaits associés aux comportements évoqués chez les détenus purgeant une peine de ressort fédéral.

Le présent rapport va au-delà des études réalisées auparavant dans le sens où il examine l’utilisation faite d’un matériel d’injection ayant déjà servi à quelqu’un d’autre (les seringues et l’attirail à la fois), il quantifie les problèmes d’accessibilité à l’eau de Javel, et il renseigne sur les habitudes de consommation des détenus qui participent ou essaient de participer au PTEM. Le SCC peut se servir des renseignements ainsi établis pour mieux asseoir ses décisions en matière de politiques et programmes de santé.

Méthode

Élaboration de l’instrument de sondage

Pour obtenir les données nécessaires à l’atteinte des objectifs de l’étude, l’équipe de projet, composée de représentants de plusieurs ministères et organismes fédéraux Note de bas de page3 , a choisi d’utiliser un questionnaire papier-crayon autoadministré (Zakaria, Thompson et Borgatta, sous presse). Ce questionnaire a été élaboré à la suite de consultations menées sous forme de discussions de groupe avec des détenus de cinq pénitenciers, dont un établissement pour femmes et un groupe de détenus autochtones. Pour maximiser la compréhension, les questions étaient formulées de manière à ne pas dépasser le niveau d’alphabétisation d’un élève de 8e année. De plus, les détenus pouvaient choisir la version anglaise ou française du questionnaire.

Dans sa forme définitive, le questionnaire comptait 50 pages, et les détenus ont mis entre 45 et 55 minutes environ pour y répondre. Il a permis d’obtenir de l’information sur les comportements à risque associés à la propagation des infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) tant dans la collectivité qu’en milieu carcéral; sur la connaissance qu’ont les détenus des programmes d’éducation en matière de santé et de réduction des méfaits ainsi que leur participation à ces programmes; sur le dépistage et le traitement des infections à VIH et à VHC chez les détenus et leur connaissance du VIH et du VHC. Afin d’optimiser la justesse des souvenirs, seuls les détenus admis au cours des trois dernières années étaient invités à déclarer les comportements à risque qu’ils avaient eus pendant les six derniers mois dans la collectivité précédant leur incarcération actuelle.

Avant la collecte de données, le Comité d’éthique de la recherche de Santé Canada a examiné et approuvé la méthodologie du Sondage.

Mesures

Les données sur lesquelles s’appuie le présent rapport sont tirées des résultats du Sondage national auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque. Plusieurs sections du sondage se sont révélées utiles à l’examen des pratiques actuelles de réduction des méfaits chez les détenus. Le présent rapport porte particulièrement sur l’utilisation de l’eau de Javel et le recours au PTEM dans ce contexte; d’où la pertinence de certaines parties du Sondage, par exemple les questions visant à savoir si quelqu’un a utilisé le matériel d’une autre personne pour s’injecter de la drogue ou se faire tatouer ou percer, de même que les questions sur l’utilisation de l’eau de Javel et la participation au PTEM en milieu carcéral. En outre, nous avons pris en considération les caractéristiques démographiques établies à propos des détenus et les éléments d’information recueillis au sujet de leur période d’incarcération dans le cadre du Sondage. Pour les résultats du Sondage dans leur intégralité, voir le document de Zakaria et ses collaborateurs (sous presse).

Utilisation de l’eau de Javel et connaissance de la possibilité d’en utiliser

Connaissance de la politique d’accès facile à l’eau de Javel du SCC. On a demandé aux répondants d’indiquer s’ils étaient au courant de la politique que le SCC s’est donnée pour s’assurer que les détenus peuvent se procurer facilement de l’eau de Javel. Les réponses possibles étaient « oui » et « non ».

Demande récente d’eau de Javel. Les détenus ont été invités à répondre à la question suivante : avez-vous eu de la difficulté à vous procurer de l’eau de Javel au SCC depuis novembre 2006? Les réponses possibles étaient les suivantes : 1) Je n’ai pas essayé de me procurer de l’eau de Javel; 2) Non, je n’ai pas eu de difficulté à m’en procurer; et 3) Oui, j’ai eu de la difficulté à m’en procurer. Si un détenu n’avait pas essayé de se procurer de l’eau de Javel pendant la période en question Note de bas de page4 , il entrait dans la catégorie de ceux qui n’avaient pas fait de demande d’eau de Javel. Tous les autres entraient dans la catégorie de ceux qui avaient fait une telle demande, quelles que soient les difficultés qu’ils aient pu éprouver pour en obtenir.

Difficultés à se procurer de l’eau de Javel. Les détenus ayant déclaré avoir éprouvé de la difficulté à se procurer de l’eau de Javel ont été appelés à préciser la ou les sources du problème. Ils ont été invités à préciser toutes les raisons applicables : les distributrices étaient vides; les distributrices étaient brisées; les gens pouvaient me voir prendre de l’eau de Javel de la distributrice; d’autres détenu(e)s ont fait des provisions d’eau de Javel; d’autres détenu(e)s m’en ont empêché(e); l’eau de Javel a été diluée et j’ai dû demander à un(e) employé(e) de m’en procurer.

Pour regrouper les questions liées, nous avons créé deux indicateurs composites : problèmes d’entretien et comportements des autres détenus. Parmi les problèmes d’entretien, il faut inclure toute difficulté due au fait qu’une distributrice est vide ou brisée, ou encore qu’elle donne de l’eau de Javel diluée. Parmi les comportements des autres détenus, il faut compter ceux qui font des provisions (c’est-à-dire qu’ils gardent tout pour eux) ou ceux qui limitent l’accès à l’eau de Javel.

Comportements associés à l’injection de drogues, au tatouage et au perçage en milieu carcéral

Les détenus ayant déclaré s’être injecté de la drogue au pénitencier entre novembre 2006 et le moment du sondage ont répondu à une série de questions sur l’utilisation qu’ils avaient faite du matériel d’injection d’autrui durant cette période. Les détenus ayant déclaré qu’ils s’étaient déjà fait tatouer ou percer dans la rangée d’un pénitencier ont également répondu à une série de questions sur l’utilisation qu’ils avaient faite du matériel de tatouage ou de perçage d’autrui.

Utilisation récente de la seringue d’une autre personne après que celle-ci l’a employée elle-même. Les détenus ont été appelés à répondre à la question suivante : depuis novembre dernier en prison, avez-vous utilisé la seringue de quelqu’un d’autre après qu’il ou elle l’ait déjà utilisée? Les réponses possibles étaient « non » et « oui ».

Partage récent d’une seringue avec une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état est inconnu. Les participants ont été appelés à répondre à la question suivante : depuis novembre dernier, avez-vous utilisé une seringue ayant déjà été utilisée par une personne que vous saviezinfectée par l’hépatite C ou le VIH? Les réponses possibles étaient « non », « oui » et « je ne savais pas si la personne était infectée ». Les réponses « oui » et « je ne savais pas si la personne était infectée » étaient considérées comme dénotant un risque, étant donné la possibilité de propagation d’une infection transmissible par le sang.

Utilisation récente du matériel d’une autre personne après qu’elle s’en soit servi. On a posé la question suivante aux détenus : depuis novembre dernier en établissement, avez-vous utilisé le matériel de quelqu’un d’autre après qu’il s’en soit servi? Par matériel, il faut entendre ici l’eau, le filtre, le réchaud ou la cuillère. Les réponses possibles étaient « oui » et « non » (leur nombre étant faible, les détenus qui ont dit ne pas avoir utilisé le matériel d’une autre personne ont été placés dans la catégorie « non » parce que ce comportement n’était pas considéré comme présentant un risque pour eux).

Partage récent du matériel avec une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état est inconnu. Les détenus ont été appelés à répondre à la question suivante : depuis novembre dernier, avez-vous utilisé du matériel (eau, filtre, brûleur/cuillère) ayant déjà été utilisé par une personne que vous saviezinfectée par l’hépatite C ou le VIH? Les réponses possibles étaient « non », « oui » et « je ne savais pas si la personne était infectée ». Deux réponses, soit « oui » et « je ne savais pas si la personne était infectée », étaient considérées comme des comportements à risque, étant donné la possibilité de propagation d’une infection transmissible par le sang. Les détenus qui n’avaient pas utilisé le matériel d’une autre personne étaient placés dans la catégorie « non », le comportement n’étant pas considéré comme présentant un risque pour eux.

Utilisation d’une seringue nettoyée à l’eau de Javel au moment de la dernière injection.Les détenus ont été appelés à dire si la seringue utilisée pour leur dernière injection avait été nettoyée. Les réponses possibles étaient « non », « je ne sais pas » et « oui ». Ceux qui ont répondu oui ont été appelés à préciser comment la seringue avait été nettoyée. Trois réponses étaient possibles : « avec de l’eau de Javel », « autrement » et « je ne sais pas ». Les deux questions ont été combinées en une variable unique comportant trois catégories : 1) seringue non nettoyée ou détenu ne sachant pas si elle avait été nettoyée; 2) seringue nettoyée à l’eau de Javel; et 3) seringue nettoyée par une autre méthode (combinaison de « autrement » et de « je ne sais pas » comment la seringue a été nettoyée).

Utilisation du matériel à tatouage d’une autre personne pour ses propres tatouages. Les détenus ayant déclaré qu’ils avaient déjà été tatoués dans une rangée d’un établissement du SCC ont été appelés à répondre à la question suivante : avez-vous utilisé le matériel à tatouage de quelqu’un d’autre? Les réponses possibles étaient « oui » et « non ».

Utilisation de l’encre à tatouage d’une autre personne pour ses propres tatouages. Les détenus ayant déclaré qu’ils s’étaient déjà fait tatouer dans une rangée d’un établissement du SCC ont été appelés à répondre à la question suivante : avez-vous déjà utilisé l’encre de quelqu’un d’autre pour faire votre tatouage? Les réponses possibles étaient « oui » et « non ».

Utilisation de matériel à tatouage nettoyé à l’eau de Javel. On a demandé aux détenus s’étant déjà fait tatouer dans une rangée d’un établissement du SCC de répondre à la question suivante : ce matériel de tatouage a-t-il été nettoyé chaque fois que vous vous en êtes servi? Les réponses possibles étaient « non », « je ne sais pas » et « oui ». Ceux qui ont répondu « oui » ont été appelés à répondre à la question suivante : comment ce matériel a-t-il été nettoyé? Trois réponses étaient possibles : « avec de l’eau de Javel », « d’une autre façon » et « je ne sais pas ». Ces deux questions ont été combinées en une variable unique comportant trois catégories : 1) matériel de tatouage non nettoyé ou détenu ne sachant pas si le matériel avait été nettoyé; 2) matériel de tatouage nettoyé à l’eau de Javel; et 3) matériel de tatouage nettoyé d’une autre façon (cela combine « d’une autre façon » et « je ne sais pas » comment le matériel a été nettoyé).

Utilisation du matériel de perçage d’une autre personne pour ses propres perçages. Les détenus ayant déclaré qu’ils s’étaient déjà fait percer dans une rangée d’un établissement du SCC ont été appelés à répondre à la question suivante : avez-vous utilisé le matériel de perçage de quelqu’un d’autre pour votre perçage corporel (piercing)? Les réponses possibles étaient « oui » et « non ».

Utilisation de matériel pour le perçage nettoyé à l’eau de Javel. On a demandé aux détenus s’étant déjà fait percer dans une rangée d’un établissement du SCC de répondre à la question suivante : le matériel de perçage avait-il été nettoyé chaque fois que vous l’avez utilisé? Les réponses possibles étaient « non », « je ne sais pas » et « oui ». Ceux qui ont répondu « oui » ont été appelés à répondre à la question suivante : comment ce matériel a-t-il été nettoyé? Trois réponses étaient possibles : « avec de l’eau de Javel », « autrement » et « je ne sais pas ». Ces questions ont été combinées en une variable unique comportant trois catégories : 1) matériel pour le perçage non nettoyé ou détenu ne sachant pas si le matériel avait été nettoyé; 2) matériel pour le perçage nettoyé à l’eau de Javel; et 3) matériel pour le perçage nettoyé d’une autre façon (cela combine « d’une autre façon » et « je ne sais pas » comment le matériel avait été nettoyé).

Habitudes de consommation de drogues, recours au Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM) et motifs de non-participation au programme

Nous nous sommes également penchés sur le lien entre plusieurs habitudes de consommation, par exemple l’injection récente d’opiacés en établissement et les antécédents en matière de drogues, et le recours au PTEM du SCC. De même, nous avons examiné la participation ou la non-participation des détenus au PTEM et les motifs de non-participation au programme.

Consommation récente d’opiacés au pénitencier. Nous avons mis dans la catégorie des personnes ayant consommé des opiacés les détenus qui ont déclaré avoir consommé récemment au pénitencier (entre novembre 2006 et le moment du sondage) et qui ont aussi signalé les opiacés parmi les trois drogues qu’ils ont le plus souvent consommées au moyen d’une seringue ou de matériel d’injection, pendant la même période. Ceux qui ont dit avoir consommé des drogues autres que les opiacés ont été placés dans la catégorie de ceux qui consommaient seulement des drogues autres que les opiacés. Si le détenu n’a pas précisé le type de drogue, il nous était impossible de le classer dans une catégorie quelconque. De la même façon, nous avons créé une autre variable pour l’injection récente d’opiacés.

Antécédents en matière de drogues. Plusieurs des éléments du sondage ont permis de classer les détenus comme ayant des antécédents particuliers en matière de drogues dans la mesure où ils révélaient certaines habitudes de consommation. Ceux qui ont dit n’avoir jamais consommé de drogues ou de substances chimiques ont été classés dans la catégorie de ceux qui n’avaient jamais consommé de drogues. Les détenus qui ont déclaré qu’ils avaient déjà consommé de la drogue au pénitencier, mais pas récemment, ont été mis dans la catégorie de ceux qui avaient déjà consommé de la drogue. Les détenus qui ont déclaré qu’ils avaient récemment consommé de la drogue au pénitencier ont aussi été appelés à préciser les trois drogues qu’ils avaient consommées le plus souvent pendant la période visée. Ils ont été subdivisés encore en deux catégories. Ceux qui ont dit les opiacés étaient l’une des trois drogues qu’ils avaient le plus souvent consommées au moyen d’une seringue ou de matériel d’injection ont été mis dans la catégorie des détenus ayant récemment consommé des opiacés au pénitencier. Ceux qui n’ont pas signalé les opiacés parmi les trois drogues qu’ils avaient le plus souvent consommées au moyen d’une seringue ou de matériel ont été classés dans la catégorie « a récemment consommé des drogues autres que des opiacés au pénitencier ». Au total, les antécédents en matière de drogues comportaient quatre catégories : n’a jamais consommé de drogue, a déjà consommé de la drogue Note de bas de page5 , n’a consommé que des drogues autres que des opiacés au pénitencier et a consommé des opiacés au pénitencier.

Recours au PTEM. Les détenus qui ont dit avoir déjà consommé de la drogue ont été appelés à répondre à une série de questions concernant leur expérience face au PTEM du SCC. Ils devaient d’abord préciser s’ils participaient au programme au moment du sondage. Trois réponses étaient possibles : « non », « oui » et « je n’ai plus besoin de suivre un traitement à la méthadone ». Ceux qui ont répondu qu’ils ne participaient pas au programme à ce moment-là (c.àd. « non ») ont été appelés à préciser s’ils avaient essayé d’y être admis. Les catégories de réponse à cette question étaient « oui » et « non ». La variable unique utilisée dans le présent rapport combine ces deux éléments du sondage et comporte quatre catégories : ne participe actuellement pas au PTEM et n’a jamais essayé d’y être admis; ne participe actuellement pas au PTEM, mais a déjà essayé d’y être admis; participe actuellement au PTEM; n’a plus besoin de traitement à la méthadone.

Motifs de non-participation au PTEM au moment du sondage. Les détenus qui ne participaient pas au PTEM au moment du sondage, mais qui avaient essayé d’y être admis ont été appelés à répondre à la question suivante : pourquoi ne participez-vous pas à un programme de traitement à la méthadone au SCC? Réponses possibles : La dernière fois où j’ai demandé à suivre un tel traitement, je me suis fait dire que je ne répondais pas aux exigences du programme; j’ai entrepris le programme, mais on a interrompu le traitement parce que je vendais/donnais ma méthadone à quelqu’un d’autre; j’ai abandonné le traitement; on a mis fin à ma participation au programme pour une autre raison.

Échantillonnage

Plan d’enquête et estimation de la taille de l’échantillon

La base de l’échantillonnage se composait de toutes les personnes détenues dans les pénitenciers fédéraux, dont le nombre s’élevait à quelque 13 749 détenus juste avant le moment du sondage (mars 2007). Étaient exclus de cette base les détenus incapables de comprendre l’anglais ou le français, oralement ou par écrit (moins de 0,5 % de la population carcérale). Chaque pénitencier servait de strate de taille variable l’une par rapport à l’autre. Nous avons établi la taille de l’échantillon de chaque pénitencier pour hommes de manière à nous assurer que les proportions estimées présentaient une faible marge d’erreur (± 5 %), 8 fois sur 10 [α = 0,20 (pour intervalles bilatéraux), σ2 = 0,25, facteur de correction pour population finie appliqué] (Cochran, 1977, p. 75). Si la taille estimée de l’échantillon pour un établissement donné correspondait à 80 % ou plus de la population de l’établissement, tous les détenus de cet établissement étaient invités à participer au sondage. Comme cette situation s’est produite dans le cas de petites populations pénitentiaires, les coûts de sondage supplémentaires étaient minimes. Étant donné le petit nombre (N = 479) de détenues, toutes ont été invitées à participer. La taille de l’échantillon final pour l’ensemble de la population carcérale sous responsabilité fédérale, incluant les hommes et les femmes, a été estimée à 4 981 détenus. L’échantillon final, formé de 3 357 détenus, est décrit à la première section sur les résultats (annexe A).

Listes de l’échantillon

Dans chaque pénitencier pour hommes, un échantillonnage aléatoire simple, sans remplacement à partir de la base de l’échantillon, a servi à générer la liste principale. Deux listes de remplacement ou plus (listes secondaires) ont aidé à maintenir les tailles requises de l’échantillon au cas où un détenu refuserait de participer à l’étude ou ne se trouvait pas dans l’établissement. Les listes classées en fonction de l’auto-identification en tant qu’Autochtone, de la principale langue officielle et de la durée de la peine globale ont facilité les substitutions. Lorsqu’un détenu inscrit sur la liste principale refusait de participer au sondage ou ne se trouvait pas dans l’établissement pour quelque motif que ce soit, il était possible de le remplacer par un autre détenu inscrit sur la liste secondaire et possédant les mêmes caractéristiques que le détenu de l’échantillon initial.

Mise en œuvre du sondage

Sélection et formation des coordonnateurs du sondage

Les coordonnateurs régionaux (Atlantique, Québec, Ontario, Prairies et Pacifique) du sondage ont été nommés par les sous-commissaires adjoints, Opérations en établissement. Chaque directeur d’établissement a également désigné un coordonnateur du sondage dans son établissement. Les coordonnateurs régionaux assuraient la liaison avec les coordonnateurs en établissement et tenaient des téléconférences hebdomadaires avec la Direction de la recherche afin de résoudre les problèmes de logistique durant la mise en œuvre du sondage. La Direction de la recherche a préparé un manuel complet de formation à l’intention des coordonnateurs du sondage et dirigé des séances de formation individualisées afin de renforcer l’engagement des coordonnateurs à l’égard du sondage et d’uniformiser les approches et les messages utilisés.

Sensibilisation au sondage

Les comités régionaux de gestion, les directeurs d’établissement, les employés chargés de la sécurité et les syndicats ont reçu de l’information sur le sondage et manifesté leur appui à celui-ci. Afin de faire connaître le sondage dans les établissements, un communiqué général et un document sur les questions les plus souvent posées ont été envoyés à tous les employés du SCC, et des affiches annonçant la tenue du sondage ont été apposées dans tous les établissements. Ces affiches insistaient sur le caractère volontaire de la participation au sondage, garantissaient l’anonymat et la confidentialité aux participants et rappelaient que l’objectif général du sondage était d’améliorer la santé des détenus. Les directeurs d’établissement ont facilité la mise en œuvre du sondage en se chargeant d’informer les comités de gestion, les comités de détenus et les syndicats locaux.

Recrutement des détenus

Les coordonnateurs en établissement ont reçu les listes des détenus admissibles entre deux et trois semaines avant la date prévue du début de la collecte de données. Avant de communiquer avec les détenus, le directeur de l’établissement ou son remplaçant désigné a examiné les listes principale et secondaires pour déceler tout risque sur le plan de la sécurité. Les détenus considérés comme présentant un risque pour la sécurité ont été soit exclus définitivement du sondage, soit autorisés à répondre au questionnaire dans leur cellule. Il semble que peu de détenus aient été exclus pour des raisons de sécurité; par contre, plusieurs ont dû effectivement remplir le questionnaire dans leur cellule.

Les coordonnateurs du sondage dans les établissements ont invité les détenus dont le nom figurait sur la liste d’échantillonnage à participer à l’étude et à signer un formulaire de consentement, le cas échéant (Zakaria et coll., sous presse). Par souci d’efficacité, on a organisé des séances d’information en groupe avec les détenus admissibles afin de leur expliquer le déroulement du sondage et d’examiner avec eux le formulaire de consentement. Les détenus ont été appelés à donner leur consentement non pas au cours de cette séance d’information en groupe, mais plutôt dans le cadre d’une rencontre en privé. Les détenus en isolement ont été recrutés individuellement. Là où le niveau de scolarité du détenu et les interactions antérieures avec lui (ou elle) le justifiaient, on lui a demandé s’il souhaitait avoir de l’aide pour remplir le questionnaire. Une reproduction en petit format (13,9 cm par 21,6 cm) de l’affiche du sondage a été laissée à chacun des détenus dont la participation était sollicitée (Zakaria et coll., sous presse).

Une fois le calendrier du sondage établi, la Direction de la sécurité du SCC a passé en revue la liste des détenus appelés à répondre au sondage dans un lieu commun afin de s’assurer de la compatibilité entre les détenus convoqués pour la même séance de groupe. Ensuite, chaque détenu a été informé du moment et de l’endroit où il devrait remplir le questionnaire, et ces renseignements lui ont été rappelés la veille du jour prévu. Les activités de recrutement se sont poursuivies, selon les besoins, jusqu’à la fin de la période de collecte de données dans l’établissement. Cette façon de faire a permis le remplacement des détenus qui ne pouvaient répondre au questionnaire pour une raison ou une autre.

Collecte des données

Entre le 22 mai et le 6 juillet 2007, une entreprise privée a administré le questionnaire, dans chaque établissement, aux détenus qui avaient signé le formulaire de consentement. Le coordonnateur du sondage devait faire en sorte que les détenus soient là au jour et à l’heure prévus de la venue de l’entrepreneur chargé du sondage et de la distribution des questionnaires. Puisque l’entrepreneur ne possédait pas la liste d’échantillonnage et que les détenus avaient comme consigne de ne pas inscrire leur nom ou le nom de quelqu’un d’autre sur le questionnaire, il était impossible d’établir un lien entre le formulaire de consentement et le questionnaire rempli. Cette façon de faire garantissait l’anonymat et la confidentialité aux détenus participants.

Chaque détenu a rempli un questionnaire autoadministré : derrière une cloison lorsqu’il se trouvait en groupe, dans sa cellule s’il était en isolement, ou dans le cadre d’une entrevue individuelle, en privé, lorsqu’il avait demandé de l’aide pour répondre au questionnaire. À la fin de la collecte de données dans leur établissement, tous les participants ont reçu les réponses aux questions portant sur leur connaissance du VIH et du VHC (Zakaria et coll., sous presse).

En milieu correctionnel, plusieurs facteurs compliquent le recrutement des détenus et l’administration d’un questionnaire, notamment le transfèrement de détenus d’un établissement à un autre, l’absence des détenus qui bénéficient d’une forme quelconque de liberté sous condition ou, dans quelques cas, le départ de ceux dont la peine a pris fin durant la période de sondage. En tout, 3 370 détenus (3 006 hommes, 351 femmes, 13 transgenres) ont répondu au questionnaire. Pour des motifs opérationnels, la plupart des établissements n’ont pu tenir un compte précis du nombre de détenus invités à participer au sondage. Toutefois, 13 établissements, comptant environ 27 % de la population carcérale totale sous responsabilité fédérale au moment du sondage, ont fourni des renseignements suffisamment détaillés pour qu’on puisse estimer les taux de consentement et de réponse au sondage. Dans ces 13 établissements de divers niveau de sécurité (de sécurité minimale à sécurité maximale), 1 687 détenus ont été invités à participer au sondage, 996 détenus ont accepté (taux de consentement = 59 %) et 811 ont rempli un questionnaire (taux de réponse = 48 %). Par comparaison, le Sondage national de 1995 avait obtenu un taux de réponse de 64,2 % [taux de réponse = nombre de détenus qui ont rempli un questionnaire/(nombre de détenus qui ont rempli un questionnaire + nombre de détenus qui ont refusé)]. Si les détenus malades, mis en liberté et transférés sont toutefois inclus dans le dénominateur, le taux de réponse chute à 59,7 % (Price Waterhouse, 1996, renseignements tirés de la pièce 1.3, à la p. 12). La différence entre les taux de réponse des deux sondages peut être attribuée à plusieurs facteurs comme une évolution du profil des détenus au fil du temps ou le fait que le Sondage national de 2007 auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque abordait des sujets plus délicats.

L’entrepreneur a conservé tous les questionnaires remplis et, en août 2007, a fourni une base de données contenant les résultats anonymes du sondage. Les analyses préliminaires visant à vérifier l’intégrité des données ont été réalisées à l’automne 2007 et à l’hiver 2008. Une fois réglées toutes les questions relatives à l’intégrité des données, en juin 2008, l’entrepreneur a détruit tous les questionnaires remplis.

Démarche analytique générale

Méthodes statistiques pour les enquêtes par échantillonnage complexe

Les méthodes statistiques sont généralement adaptées aux données obtenues par échantillonnage aléatoire simple. Dans un tel cas, chaque détenu faisant partie de l’échantillon représente un détenu issu de la population carcérale, et les estimations dérivées de l’échantillon se rapportent à cette population. Dans le Sondage national de 2007, les détenus étaient choisis au hasard, mais la fraction de l’échantillon qu’ils constituaient n’était pas la même d’un établissement à l’autre, s’échelonnant entre 8 % et 94 %. Par conséquent, chaque détenu membre de l’échantillon représentait un nombre pouvant aller de 1 à 13 détenus. Si on avait analysé les données du Sondage national de 2007 comme si celles-ci avaient été obtenues par échantillonnage aléatoire simple (c.-à-d. que chaque détenu membre de l’échantillon aléatoire aurait représenté un détenu issu de la population carcérale), on aurait obtenu des estimations et des variances inexactes de la population (Lee et Forthofer, 2006). Toutes les valeurs estimées présentées dans le présent rapport tiennent compte du plan d’échantillonnage complexe du Sondage national de 2007 en intégrant des coefficients de pondération qui indiquent le nombre de détenus de la population que représente chaque détenu membre de l’échantillon. Le coefficient de pondération d’un dossier correspondait à l’inverse de la fraction de l’échantillon de l’établissement. Ainsi, les estimations figurant dans le présent rapport sont représentatives de la population carcérale sous responsabilité fédérale au Canada.

Toutes les analyses ont été réalisées à l’aide des méthodes d’enquête 9.1 ou 9.2 du SAS® (SAS Institute Inc., 2004, 2008), qui tiennent compte de l’échantillonnage complexe. Les inférences à la population se font à l’aide de critères communs de décision (p. ex., alpha bilatéral de 0,05). La linéarisation Note de bas de page6 par série de Taylor a été utilisée de pair avec le facteur de correction de la population finie pour calculer la variance d’une estimation. Au cours des analyses bidimensionnelles, nous avons utilisé le test du khi carré de Rao-Scott Note de bas de page7 pour association statistique lorsque les données étaient catégorielles, et le test de Wald (statistique F Note de bas de page8 ), lorsque nous étions en présence de données continues.

Non-réponse à certaines questions et sous-populations de petite taille

La non-réponse à certaines questions est une limite inhérente à la plupart des sondages où le sujet est appelé à fournir des renseignements sur des questions personnelles comme le comportement sexuel. Bien qu’il existe des méthodes perfectionnées applicables en cas de faible taux de réponse, nous avons employé une méthode semblable à celle d’autres études répertoriées : quelle que soit la question, nous présumons que les non-répondants et les répondants possèdent des caractéristiques communes. Toutefois, lorsque le taux de non-réponse à une question excédait les 50 %, nous avons choisi de ne pas divulguer les estimations. Afin de protéger la confidentialité des données, nous n’indiquons pas les estimations lorsque moins de cinq détenus partagent une même caractéristique. Enfin, en raison du petit nombre (n = 13) de répondants transgenres, les résultats du sondage mené auprès d’eux ne figurent pas dans le présent rapport.

Analyses spécifiques

Estimations ponctuelles et intervalles de confiance pour les comportements clés

Pour le présent rapport, nous avons effectué plusieurs estimations de la demande d’eau de Javel et de la connaissance que les détenus avaient de la possibilité de s’en procurer, de l’utilisation du matériel d’injection, de tatouage et de perçage, et du recours au PTEM. Ces estimations sont exprimées en pourcentage de détenus avec un intervalle de confiance de 95 %. Là où les échantillons sont de taille suffisante, les pourcentages sont présentés séparément pour les hommes et pour les femmes; sinon, les deux groupes sont combinés. Encore une fois, là où les échantillons sont de taille suffisante, une analyse approfondie visait généralement à déterminer en quoi les pourcentages variaient suivant des caractéristiques démographiques et des données relatives à l’incarcération (auto-identification en tant qu’Autochtone, âge, région, années de la peine purgées et niveau de sécurité). De même, là où il convenait de le faire, nous avons établi des comparaisons selon la connaissance de la politique d’accès à l’eau de Javel, les habitudes d’injection, les types de drogues injectées et les antécédents en matière de drogues. Le test du khi carré de Rao-Scott a permis d’établir les différences.

Examen des liens entre les variables principales – analyse de régression logistique

De façon générale, l’analyse de régression logistique a servi à établir des variables concernant la connaissance de la politique d’accès à l’eau de Javel, la demande d’eau de Javel et le nettoyage du matériel d’injection, de tatouage et de perçage. Les variables explicatives reposaient le plus souvent sur des caractéristiques liées à la démographie ou à l’incarcération (auto-identification en tant qu’Autochtone, âge, région, années de la peine purgées et niveau de sécurité). Naturellement, les variables explicatives n’étaient pas les mêmes suivant le résultat analysé. Par exemple, la connaissance de la politique d’accès à l’eau de Javel a aussi servi de variable pour une analyse de régression touchant la demande d’eau de Javel, les pratiques d’injection risquées ont servi à l’analyse des pratiques de désinfection des seringues Note de bas de page9 , et les pratiques risquées de tatouage ou de perçage ont servi à analyser l’utilisation des seringues désinfectées à ces fins Note de bas de page10 . Toutes les variables associées à la variable des résultats utilisée pour les analyses bidimensionnelles (p < 0,25) figuraient dans le modèle de régression logistique. Sommairement, là où le modèle global était statistiquement significatif du point de vue du rapport de vraisemblance, le test du khi carré de Wald a permis de déterminer la signification statistique des variables du modèle.

Résultats

La présente partie du rapport est divisée en trois grandes sections. Premièrement, nous exposons en quoi l’échantillon est représentatif. Ensuite, de manière générale, nous traitons de l’utilisation de l’eau de Javel et de la mesure dans laquelle les détenus savent qu’ils peuvent s’en procurer. Enfin, nous nous penchons en particulier sur l’utilisation de matériel d’injection, de tatouage ou de perçage désinfecté à l’eau de Javel. En dernier lieu, nous nous attachons à la participation au PTEM.

Représentativité de l’échantillon et caractéristiques de la population

Une comparaison des caractéristiques des détenus tirées du Sondage national de 2007 auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque et de celles issues des données administratives du Service correctionnel du Canada (SCC) a permis d’établir que l’échantillon était représentatif de la population carcérale. Selon les données du Sondage national, la majorité des détenus étaient des anglophones (78 %) d’origine non autochtone (79 %) nés au Canada (89 %) qui possédaient un diplôme d’études secondaires ou plus à l’époque du sondage (54 %) et qui n’étaient pas engagés dans une relation (69 %). Ces estimations concordent avec les données établies au sujet de la population carcérale au moment du sondage (voir l’annexe A). L’échantillon laissait voir entre les hommes et les femmes des différences correspondant elles aussi aux données établies au sujet de la population carcérale. Comparativement aux femmes, en moyenne, les hommes étaient plus âgés (38 ans par rapport à 34 ans), avaient purgé une plus longue partie de leur peine (4,8 ans par rapport à 2,2 ans) et comprenaient un pourcentage moins élevé d’Autochtones (21 % par rapport à 36 %).

Eau de Javel

Connaissance de la possibilité de s’en procurer

La plupart des détenus (87 %) savaient que le SCC a pour politique de s’assurer que les détenus peuvent aisément avoir accès à de l’eau de Javel. Cette connaissance ne variait pas en fonction des caractéristiques liées à la démographie ou à l’incarcération (voir les tableaux 1 et 2).

Tableau 1
Connaissance de la politique d’accès facile à l’eau de Javel au SCC et demande d’eau de Jave,l selon les caractéristiques démographiques établies

Pour la taille de l’échantillon, n = 3 357; pour la taille estimée de la population, N = 13 701. SCC = Service correctionnel du Canada.
* p < 0,05.

Connaissance de la politique d’accès facile Demande d’eau de Javel
n % (IC 95 %) n % (IC 95 %)

Ensemble

2 558

87 (86, 88)

1 651

57 (55, 59)

Sexe

Hommes

2 280

87 (86, 88)

1 456

57 (55, 59)

Femmes

278

88 (86, 90)

195

63 (61, 66)

χ2 (1)

0,89

12,72*

Auto-identification en tant qu’Autochtone

Autochtones

576

87 (84, 89)

365

59 (55, 63)

Non-Autochtones

1 916

87 (86, 89)

1 246

56 (54, 58)

χ2 (1)

0,09

0,79

Âge

18-29

658

87 (84, 89)

471

63 (59, 66)

30-39

776

87 (84, 89)

515

58 (55, 62)

40-49

665

88 (86, 91)

416

57 (53, 60)

50 ans ou plus

401

87 (84, 90)

205

44 (40, 49)

χ2(3)

0,94

29,38*

Demande

La demande d’eau de Javel a été définie comme étant toute tentative faite récemment pour se procurer de l’eau de Javel, et on a déterminé que cela vise 57 % des détenus. La façon particulière dont l’eau de Javel a été utilisée n’a pas été examinée, mais elle peut avoir servi au nettoyage général et à des fins d’hygiène personnelle, en plus de la désinfection du matériel de tatouage, de perçage ou d’injection de drogues. La demande d’eau de Javel variait selon les caractéristiques démographiques ou d’incarcération : le sexe, l’âge, les années de la peine purgées, la région et la cote de sécurité chez les hommes (voir les tableaux 1 et 2). Proportionnellement, les hommes ont été moins nombreux que les femmes à faire état d’une demande d’eau de Javel, soit 59 % contre 63 % (χ2 (1, n = 2 966) = 12,72, p < 0,05). Les détenus de 50 ans ou plus étaient moins susceptibles de faire état d’une demande d’eau de Javel que les détenus plus jeunes, soit 44 % contre 63 % (χ2 (1, n = 2 904) = 29,38, p < 0,05). Les détenus qui avaient purgé une année de leur peine ou moins étaient aussi proportionnellement moins nombreux à avoir demandé de l’eau de Javel que ceux qui étaient incarcérés depuis plus longtemps, soit 49 % contre 62 % (χ2 (1, n = 2 812) = 31,89, p < 0,05). Les détenus de la région de l’Atlantique étaient moins susceptibles de signaler qu’ils avaient demandé de l’eau de Javel par rapport à ceux des autres régions, soit 45 % contre 58 % (χ2 (1, n = 2 976) = 15,95, p < 0,05). Enfin, chez les hommes, ceux qui se trouvaient dans un établissement à sécurité minimale étaient moins susceptibles de demander de l’eau de Javel que ceux des autres établissements, soit 47 % contre 59 % (χ2 (1, n = 2 621) = 28,60, p < 0,05).

Les liens ainsi établis se confirmaient et souvent prenaient de l’ampleur si on prenait en considération toutes les caractéristiques au moyen d’une analyse de régression logistique (voir l’annexe B). Par exemple, les probabilités que les détenus demandent de l’eau de Javel étaient inférieures de 27 % chez les hommes par rapport aux femmes (RC : 0,73 (0,61, 0,87), χ2 de Wald(1, n = 2 632) = 12,98, p < 0,05). La demande d’eau de Javel diminuait à mesure que l’âge augmentait : les probabilités qu’un détenu de 40 ans ou plus demande de l’eau de Javel étaient inférieures de 36 % à celles observées dans le groupe des 18 à 39 ans (RC : 0,64 (0,54, 0,76), χ2 de Wald (1, n = 2 632) = 26,70, p < 0,05). Les probabilités de demander de l’eau de Javel étaient supérieures de 62 % chez les détenus qui avaient purgé plus d’une année de leur peine que chez les autres détenus (RC : 1,62 (1,37, 1,93), χ2 de Wald (1, n = 2 632) = 30,14, p < 0,05). Par rapport aux détenus de la région de l’Atlantique, les détenus partout ailleurs présentaient des probabilités de demander de l’eau de Javel au moins 68 % plus importantes (χ2 de Wald(4, n = 2 632) = 33,98, p < 0,05). Enfin, chez les hommes, la probabilité de demander de l’eau de Javel était inférieure de 42 % chez les détenus se trouvant dans un établissement à sécurité minimale par comparaison à ceux dans les établissements à sécurité maximale (RC : 0,58 (0,45, 0,74), χ2 de Wald (2, n = 2 291) = 24,09, p < 0,05). Prises ensemble, ces analyses donnent à penser que les hommes, les détenus relativement plus âgés, les détenus ayant purgé une moins grande partie de leur peine, les détenus de la région de l’Atlantique et les détenus de sexe masculin dans un établissement à sécurité minimale présentent tous une demande d’eau de Javel plus faible que les autres. Dans certains cas, cela dénote qu’il y a moins d’injections de drogue dans ces groupes (les hommes détenus dans un établissement à sécurité minimale, les détenus plus âgés, les détenus ayant purgé moins d’une année de leur peine); toutefois, cela n’est pas toujours vrai. Dans la région de l’Atlantique, notamment, la consommation de drogues injectables est élevée, mais la demande d’eau de Javel est faible.

Tableau 2
Connaissance de la politique d’accès facile à l’eau de Javel au SCC et demande d’eau de Javel d’après les caractéristiques liées à l’incarcération

Pour la taille de l’échantillon, n = 3 357; pour la taille estimée de la population N = 13 701. SCC = Service correctionnel du Canada. a Les estimations établies s’appliquent aux hommes seulement. Le niveau de sécurité invoqué dans le Sondage correspond au niveau de sécurité des établissements; il demeure inconnu pour la plupart des femmes purgeant leur peine dans un établissement à niveaux de sécurité multiples. * p < 0,05.

Connaissance de la politique d’accès facile Demande d’eau de Javel
n % (IC 95 %) n % (IC 95 %)
Années de la peine actuelle purgée

Une année ou moins

989

86 (84, 88)

567

49 (46, 52)

Plus d’une année

1 436

88 (86, 89)

991

62 (59, 64)

χ2 (1)

1,19

31,89*

Région

Pacifique

314

86 (82, 90)

213

59 (53, 64)

Prairies

768

89 (87, 91)

440

55 (52, 59)

Ontario

554

89 (86, 91)

360

57 (53, 61)

Québec

652

85 (82, 87)

497

62 (59, 65)

Atlantique

270

84 (81, 88)

141

45 (40, 50)

χ2 (4)

7,02

18,84*

Niveau de sécuritéa

Minimale

674

86 (84, 89)

352

47 (44, 50)

Moyenne

1 137

88 (86, 90)

761

58 (56, 61)

Maximale

420

86 (83, 89)

310

61(56, 65)

χ2 (2)

5,87

26,40*

Connaissance de la politique d’accès à l’eau de Javel et demande

Les détenus au courant de la politique visant à leur donner un accès facile à de l’eau de Javel étaient plus susceptibles d’en avoir demandé récemment que ceux qui n’étaient pas au courant, soit 59 % contre 43 % (χ2 (1, n = 2 826) = 23,94, p < 0,05). Après correction pour tenir compte des caractéristiques démographiques et d’incarcération, nous avons établi que les probabilités d’avoir demandé récemment de l’eau de Javel étaient environ deux fois plus importantes chez ceux qui étaient au courant de la politique (RC : 1,95 (1,52, 2,50), χ2 de Wald (1, n = 2 632) = 27,76, p < 0,05) (voir l’annexe B).

Tableau 3
Difficulté à se procurer de l’eau de Javel pour les détenus qui en ont fait la demande

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population. Les détenus pouvaient donner plus d’une raison. Parmi les problèmes d’entretien, mentionnons toute difficulté due au fait que des distributrices sont vides ou brisées ou le fait que l’eau de Javel a été diluée. Le comportement d’autres détenus comprend le fait que des détenus ont fait des provisions (gardé tout pour eux) ou que des détenus ont limité l’accès à l’eau de Javel.
‡ Donnée supprimée, car moins de cinq détenues ont signalé cette raison.
*p < 0,05.

Hommes
(n = 1 456)
(N = 7 483)
Femmes
(n = 195)
(N = 304)
χ2 (1)
n % (IC 95 %) n % (IC 95 %)
Difficulté à se procurer de l’eau de Javel

551

37 (35,40)

55

28 (24,32)

12,65*

Access issues among inmates who had problems accessing bleach:
Raisons particulières

Problèmes d’entretien

391

69 (65,73)

22

48 (42,53)

28,46*

Des personnes auraient pu me voir prendre de l’eau de Javel de la distributrice

28

6 (4, 8)

-

J’ai dû demander au personnel de m’en procurer

117

23 (19, 26)

25

48 (40, 55)

5,93*

Comportement des autres détenus

163

33 (29,36)

10

19 (13,25)

7,82*

Accès

Parmi les détenus ayant demandé récemment d’obtenir de l’eau de Javel, les hommes étaient plus susceptibles de faire état de difficultés à s’en procurer, soit 37 % contre 28 % (χ2 (1, n = 1 651) = 12,65, p < 0,05) (voir le tableau 3). De manière générale, les hommes étaient plus susceptibles d’évoquer chacun des problèmes particuliers associés à l’accès à l’eau de Javel, sauf le fait de devoir s’adresser au personnel pour en obtenir. Le principal problème d’accès évoqué est un problème d’entretien, c’est‑à‑dire par exemple une distributrice vide ou brisée ou encore une eau de Javel diluée Note de bas de page11 (hommes : 69 %; femmes : 48 %). En outre, 48 % des femmes ont dit devoir s’adresser au personnel pour obtenir de l’eau de Javel.

Injection de drogues

Utilisation du matériel d’injection d’une autre personne

Dix-sept pour cent (17 %) des détenus ont déclaré s’être injecté de la drogue récemment. Une bonne part d’entre eux a augmenté son risque de contracter une infection transmissible par le sang en utilisant le matériel d’injection d’une autre personne (voir les estimations selon le sexe au tableau 4). Parmi ceux qui s’étaient récemment injecté de la drogue, 37 % ont dit avoir utilisé la seringue d’une personne dont ils savaient qu’elle avait une infection transmissible par le sang ou dont ils ne connaissaient pas l’état à ce chapitre et 42 % ont signalé avoir utilisé le matériel d’une autre personne après que cette dernière l’eut utilisé. En outre, les hommes étaient proportionnellement plus nombreux que les femmes à déclarer avoir utilisé la seringue d’une autre personne après qu’elle s’en soit déjà servi, soit 55 % contre 41 % (χ2 (1, n = 438) = 6,22, p < 0,05) et le matériel d’une personne dont elle savait qu’elle avait une infection transmissible par le sang ou dont ils ne connaissaient pas l’état à ce chapitre, soit 33 % contre 23 % (χ2 (1, n = 397) = 4,40, p < 0,05).

Tableau 4
Consommation de drogues et partage du matériel d’injection d’une autre personne au pénitencier

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
¶ Il manquait plus de 20 à 50 % des données (répartition pondérée).
*p < 0,05.

Hommes
(n = 3 006)
(N = 13 222)
Femmes
(n = 351)
(N = 479)
χ2 (1)
n % (95% CI) n % (95% CI)
Tous les détenus confondus

Recent Injection Drug Use

433

17 (15,18)

48

14 (12,16)

2,77

Parmi les détenus qui se sont récemment injecté de la drogue au pénitencier

Utilisation de la seringue d’une personne après qu’elle l’a utilisée

199

55 (50,59)

18

41 (33,48)

6,22*

Utilisation de la seringue d’une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état est inconnu à ce chapitre

125

38 (33,42)

12 ¶

29(24,34)

2,64

Utilisation du matériel d’une personne après qu’elle l’a utilisé

142

42 (37,47)

13 ¶

33 (26,40)

2,70

Utilisation du matériel d’une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état est inconnu à ce chapitre

113

33 (28,38)

8 ¶

23 (17,29)

4,40*

Pratiques de nettoyage des seringues

La demande d’eau de Javel était plus importante chez les détenus qui s’étaient récemment injecté de la drogue au pénitencier et plus importante encore chez ceux qui s’adonnaient à des pratiques d’injection à risque (voir le tableau 5). D’abord, les détenus qui se sont récemment injecté de la drogue au pénitencier ont fait état d’une demande d’eau de Javel plus élevée que les autres, soit 78 % contre 53 % (χ2 (1, n = 2 892) = 72,96, p < 0,05). En outre, les détenus qui se sont injecté de la drogue à l’aide de la seringue qui a servi à une autre personne étaient plus susceptibles de demander de l’eau de Javel que les détenus qui ne partageaient pas leur seringue avec quelqu’un d’autre, soit 89 % contre 70 % (χ2 (1, n = 373) = 16,38, p < 0,05). Cette tendance a aussi été observée chez les détenus qui utilisaient ou partageaient du matériel. Prises globalement, ces constatations donnent à penser que la plupart des détenus qui adoptent des comportements présentant un risque élevé à cet égard utilisent un matériel nettoyé avec de l’eau de Javel.

Tableau 5
Demande d’eau de Javel selon l’injection récente de drogue et l’utilisation de matériel d’injection qui a servi à une autre personne au pénitencier

n = 2 892; N = 13 70l.
*p < 0,05.

Demande d’eau de Javel χ2 (1)
n % (IC 95 %)
Tous les détenus confondus
Injection récente de drogue

Non

1 311

53 (51, 55)

72,96*

Oui

304

78 (75, 82)

Parmi les détenus qui se sont récemment injecté de la drogue au pénitencier
Utilisation d’une seringue qui a servi à une autre personne

Non

121

70 (64, 76)

16,38*

Oui

167

89 (85, 94)

Utilisation d’une seringue qui a servi à une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état est inconnu à ce chapitre

Non

169

79 (74, 84)

2,68

Oui

100

87 (81, 92)

Utilisation de matériel qui a servi à une autre personne

Non

149

74 (68, 80)

14,41*

Oui

120

92 (87, 95)

Utilisation du matériel qui a servi à une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état est inconnu à ce chapitre

Non

170

75 (70, 81)

11,31*

Oui

94

92 (88, 97)

Note:

Les répondants qui se sont récemment injecté de la drogue ont aussi été appelés à préciser comment ils avaient nettoyé leur seringue lors de la dernière injection. La plupart (69 %) l’avaient nettoyée avec de l’eau de Javel, 11 % avaient procédé d’une autre façon et 20 % avaient utilisé une seringue qui n’avait pas été nettoyée ou dont ils ne savaient pas si elle avait été nettoyée (voir les estimations selon le sexe au tableau 6).

En examinant les réponses sur l’utilisation des seringues nettoyées, nous avons constaté que le fait, pour un détenu, d’avoir nettoyé ou non sa seringue à l’eau de Javel lors de la dernière injection, était associé à certaines caractéristiques d’incarcération, comme la région et le nombre d’années de la peine purgées (voir l’annexe C). Plus particulièrement, la probabilité qu’un détenu au Québec ou dans la région de l’Atlantique ait utilisé une seringue nettoyée à l’eau de Javel lors de la dernière injection était inférieure de 79 % et de 73 %, respectivement, à la même donnée dans la région de l’Ontario (région du Québec : RC : 0,21 (0,07, 0,59); région de l’Atlantique : RC : 0,27 (0,08, 0,94), χ2 (4, n = 264) = 15,65 p < 0,05). En outre, la probabilité de s’être injecté de la drogue à l’aide d’une seringue nettoyée à l’eau de Javel était trois fois plus importante chez ceux qui avaient purgé plus d’une année de leur peine que chez les autres détenus (RC : 3,31 (1,51, 7,24), χ2 (2, n = 264) = 11,49 p < 0,05.)

Le fait d’utiliser la seringue d’une autre personne faisait augmenter sensiblement la probabilité d’avoir utilisé une seringue nettoyée à l’eau de Javel lors de la dernière injection. En effet, la probabilité d’utiliser une seringue désinfectée à l’eau de Javel était neuf fois plus grande chez les détenus utilisant la seringue d’une autre personne (RC : 9,17 (4,04, 20,83), χ2 (1, n = 264) = 28,04 p < 0,05).

Tableau 6
Pratiques de nettoyage de la seringue lors de la dernière injection, chez les détenus qui s’injectent de la drogue

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
¶Il manquait plus de 20 à 50 % des données (répartition pondérée).
‡ Donnée supprimée, car moins de cinq détenues ont signalé cette raison.
*p < 0,05.

Hommes
(n = 320)
(N = 2 248)
Femmes
(n = 29)
(N = 67)
χ2 (2)
n % (IC 95 %) n % (IC 95 %)

Seringue non nettoyée ou dont on n’est pas sûr si elle a été désinfectée

70

20 (16, 24)

8

30 (21, 40)

3,47

Seringue nettoyée d’une autre façon

38

11 (7, 14)

Seringue nettoyée à l’eau de Javel

212

69 (65, 74)

19

61 (54, 69)

Tatouage et perçage

Utilisation du matériel d’une autre personne

En tout, 38 % des détenus ont dit s’être fait tatouer dans une rangée d’un pénitencier Note de bas de page12 . Parmi eux, 32 % ont déclaré avoir utilisé du matériel qui avait servi à quelqu’un d’autre et 25 %, l’encre d’autrui. Les deux comportements augmentent le risque de transmission d’une infection par le sang. En outre, 13 % des détenus ont obtenu un perçage dans une rangée d’un pénitencier. Les hommes étaient deux fois moins susceptibles que les femmes de déclarer avoir utilisé le matériel de perçage d’une autre personne dans la rangée, soit 15 % contre 27 % (χ2 (1, n = 371) = 6,95, p < 0,05) (voir les estimations selon le sexe au tableau 7). Or, on sait que le fait de partager du matériel augmente le risque de contracter une infection transmissible par le sang.

Tableau 7
Comportements relatifs au tatouage et au perçage dans un pénitencier

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population. SCC = Service correctionnel du Canada
*p < 0,05.

Hommes
(n = 3 006)
(N = 13 222)
Femmes
(n = 351)
(N = 479)
χ2 (1)
n % (IC 95 %) n % (IC 95 %)
Tous les détenus confondus

S’est fait tatouer dans une rangée

1 072

38 (36, 39)

131

39 (36, 41)

0,28

Parmi les détenus tatoués dans une rangée

A utilisé le matériel de tatouage d’une autre personne

324

32 (29, 35)

40

31 (27, 36)

0,03

A utilisé l’encre de tatouage d’une autre personne

263

25 (23, 28)

38

29 (25, 33)

1,86

Tous les détenus confondus

S’est fait percer dans une rangée l

360

13 (12, 14)

35

10 (9, 12)

4,08*

Parmi les détenus qui se sont fait percer dans une rangée

A utilisé le matériel de perçage d’une autre personne

50

15 (11, 19)

10

27 (20, 34)

6,95*

Pratiques de nettoyage du matériel

La plupart des détenus (68 %) qui se sont fait tatouer dans une rangée utilisaient toujours un matériel désinfecté à l’eau de Javel (voir le tableau 8); 20 % des détenus utilisaient un matériel nettoyé d’une autre façon et 12 % utilisaient un matériel qui n’avait pas été nettoyé ou dont ils ne savaient pas s’il avait été désinfecté. L’utilisation de matériel de tatouage nettoyé était liée à l’utilisation de matériel de tatouage qui avait servi à quelqu’un d’autre. Plus particulièrement, la probabilité d’utiliser du matériel désinfecté à l’eau de Javel était inférieure de 55 % chez ceux qui utilisaient le matériel de quelqu’un d’autre par rapport aux autres détenus, ce qui veut dire que les détenus se servant du matériel d’une autre personne étaient moins susceptibles d’utiliser un matériel désinfecté à l’eau de Javel que s’ils avaient utilisé leur propre matériel (RC : 0,45 (0,33, 0,61), χ2 de Wald (1, n = 1 026) = 24,89 p < 0,05) (voir l’annexe D).

Tableau 8
Awareness CSC’s policy ensuring easy access to bleach and the demand for bleach by demographic characteristics

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population. SCC = Service correctionnel du Canada
‡ Donnée supprimée, car moins de cinq détenues ont signalé cette raison.
*p < 0,05./p>

Hommes
(n = 3 006)
(N = 13 222)
Femmes
(n = 351)
N = 479)
χ2 (1)
n % (IC 95 %) n % (IC 95 %)
Tous les détenus confondus

S’est fait tatouer dans une rangée

1 072

38 (36, 39)

131

39 (36, 41)

0,28

Parmi les détenus s’étant fait tatouer dans une rangée

Matériel pas toujours nettoyé ou dont on n’est pas sûr s’il a été désinfecté

126

12 (10, 14)

17

13 (10, 16)

1,46

Matériel toujours nettoyé à l’eau de Javel

695

68 (65, 70)

90

70 (66, 74)

Matériel toujours nettoyé à l’aide d’une autre méthode

206

20 (18, 23)

22

17 (14, 21)

Tous détenus confondu

S’est fait percer dans une rangée

360

13 (12, 14)

35

10 (9, 12)

4,08*

Parmi les détenus s’étant fait percer dans une rangée)

Matériel pas toujours nettoyé ou dont on n’est pas sûr s’il a été nettoyé

20

6 (4, 9)

4,36

Matériel toujours nettoyé à l’eau de Javel

207

60 (55, 65)

17

51 (41, 61)

Matériel toujours nettoyé à l’aide d’une autre méthode

114

34 (29, 39)

13

37 (27, 46)

Parmi les détenus s’étant fait percer dans une rangée, 60 % ont déclaré avoir toujours utilisé un matériel nettoyé avec de l’eau de Javel, 34 % avoir toujours utilisé un matériel nettoyé d’une autre façon et 6 % n’avoir pas toujours utilisé un matériel de perçage qui avait été nettoyé ou su s’il l’avait été (voir le tableau 8). Dans ce cas, l’utilisation de matériel désinfecté à l’eau de Javel n’était pas associée à des caractéristiques démographiques ou d’incarcération ou encore à des comportements à risque.

Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM)

Injection d’opiacés et utilisation du matériel déjà utilisé d’une autre personne

En tout, 87 % des détenus qui se sont injecté récemment de la drogue dans un pénitencier ont affirmé que les opiacés figuraient parmi les trois drogues qu’ils consommaient le plus souvent. Le nombre de détenus qui ont déclaré s’être injecté uniquement des drogues autres que les opiacés était faible, mais les comparaisons entre eux et les consommateurs d’opiacés donnent à penser que l’injection d’opiacés est peut-être associée à l’utilisation de matériel déjà utilisé par une autre personne (voir le tableau 9). Les détenus s’étant récemment injecté des opiacés étaient plus susceptibles que les autres détenus d’utiliser une seringue ayant déjà servi à quelqu’un d’autre, soit 81 % contre 48 % (χ2 (1, n = 251) = 13,92, p < 0,05), ou le matériel d’une autre personne, soit 59 % contre 36 % (χ2 (1, n = 236) = 3,98, p < 0,05).

Tableau 9
Utilisation et partage de matériel d’injection ayant servi à quelqu’un d’autre au pénitencier, par type de drogues récemment injectées

Pour la taille de l’échantillon, n = 481; pour la taille estimée de la population, N = 2329.
* p < 0,05

Drogues autres que des opiacés Opiacés χ2 (1)
n % (95 % IC) n % (95 % IC)
Parmi les détenus s’étant récemment injecté de la drogue dans un pénitencier

A utilisé la seringue d’une personne qui s’en était déjà servi

15

48 (31, 64)

174

81 (76, 86)

13,92*

A partagé une seringue avec une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état à ce chapitre est inconnu

11

38 (21, 54)

112

52 (45, 59)

1,86

A utilisé le matériel d’une personne qui s’en était déjà servi

10

36 (19, 54)

121

59 (52, 66)

3,98*

A partagé du matériel avec une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état à ce chapitre est inconnu

10

31 (16, 47)

97

47 (40, 53)

2,04

Participation

Au moment du sondage, 7 % des détenus ont déclaré participer au PTEM; 9 % encore ont affirmé qu’ils ne participaient pas au programme, mais qu’ils avaient déjà essayé de s’y inscrire. Les 84 % qui restent ont déclaré : n’avoir jamais essayé d’être admis au programme (63 %), n’avoir jamais consommé de drogues (20 %) ou n’avoir plus besoin du programme (< 1 %).

La participation au PTEM était associée à la consommation de drogue au pénitencier. Parmi les détenus participant au PTEM, 60 % ont déclaré ne pas avoir consommé récemment d’opiacés au pénitencier; toutefois, 40 % l’avaient fait (voir le tableau 10). De même, ceux qui ne participaient pas au PTEM, mais qui avaient essayé d’y être admis, ont déclaré à parts presque égales n’avoir pas consommé de drogues au pénitencier (45 %) ou avoir récemment consommé des opiacés au pénitencier (44 %). À l’inverse, la plupart des détenus qui n’avaient jamais essayé de s’inscrire au PTEM ont déclaré n’avoir pas consommé récemment d’opiacés au pénitencier (87 %), tandis qu’une minorité (12 %) a déclaré avoir consommé récemment des opiacés au pénitencier.

Tableau 10
Participation au Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM) du SCC, selon les antécédents en matière de drogues

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
‡ Donnée supprimée, car moins de cinq détenus ont signalé cette caractéristique.
*p < 0,05.

A déjà consommé de la drogue
(n = 1 488)
(N = 6 642)
A consommé récemment des drogues autres que les opiacés au pénitencier
(n = 332)
(N = 2 324)
A consommé récemment des opiacés au pénitencier
(n = 420)
(N = 1 885)
χ2(6)
Participation au PTEM n % (95 % IC) n % (95 % IC) n % (95 % IC)

Participe actuellement au PTEM

77

40 (33, 48)

32

20 (14, 26)

55

40 (31, 48)

142,83*

N’a plus besoin du PTEM

6

34 (10, 57)

5

55 (30, 81)

Ne participe pas au PTEM, mais a déjà essayé d’y être admis

108

45 (38, 51)

24

12 (7, 16)

86

44 (37, 51)

Ne participe pas au PTEM et n’a jamais essayé d’y être admis

1 068

64 (62, 68)

313

23 (21, 26)

165

12b (11, 14)

Les détenus qui ne participaient pas au PTEM au moment du sondage, mais qui avaient déjà essayé d’y être admis se divisaient en deux groupes : 1) ceux qui ne répondaient pas aux exigences du programme la dernière fois où ils ont essayé de s’y inscrire (53 %) et 2) ceux qui avaient déjà participé au programme, mais qui avaient cessé de le faire (47 %). Parmi ceux qui ne satisfaisaient pas aux critères, seulement 40 % ont déclaré avoir consommé récemment des opiacés dans un pénitencier (voir le tableau 11). Ce sous‑groupe de consommateurs d’opiacés ayant déjà essayé d’être admis au programme compte pour moins de 2 % du total de la population carcérale.

Le deuxième groupe se compose des détenus qui ont cessé de participer au PTEM. En tout, moins de 1 % de ce groupe a été exclu du programme pour avoir détourné de la méthadone (au profit d’une autre personne), 17 % ont déclaré avoir été exclus pour d’autres raisons et 29 % ont admis avoir abandonné le programme. Environ la moitié des détenus qui ont abandonné ou qui ont été exclus ont déclaré avoir consommé récemment des opiacés au pénitencier. Un très petit nombre de détenus a déclaré avoir été exclu du programme pour avoir détourné de la méthadone qui leur avait été donnée (< 1 %).

Tableau 11
Raisons de non-participation au Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM) selon les antécédents en matière de drogues chez les détenus qui ne participaient pas au PTEM, mais qui avaient essayé d’y être admis au SCC

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
‡ Donnée supprimée, car moins de cinq détenus ont signalé cette caractéristique.
*p < 0,05.

A déjà consommé de la drogue
(n = 108)
(N = 527)
A consommé récemment des drogues autres que les opiacés au pénitencier
(n = 24)
(N = 259)
A consommé récemment des opiacés au pénitencier
(n = 86)
(N = 516)
Motifs de non-participation au PTEM n % (95 % IC) n % (95 % IC) n % (95 % IC)

La dernière fois où j’ai demandé à suivre un tel traitement, je me suis fait dire que je ne répondais pas aux exigences du programme

55

50 (39, 59)

11

11 (5, 17)

34

40 (29, 50)

J’ai abandonné le traitement

27

47 (33, 61)

5

8 (0, 16)

22

45 (32, 58)

J’ai entrepris le programme, mais on a interrompu le traitement parce que je vendais/donnais ma méthadone à quelqu’un d’autre

On a mis fin à ma participation au programme pour une autre raison

13

34 (19, 50)

15

58 (41, 75)

Analyse

Les détenus qui ont participé à l’étude présentent peut-être un risque plus élevé de contracter une infection transmissible par le sang, du fait qu’ils utilisent le matériel d’une autre personne pour s’injecter de la drogue ou se faire tatouer ou percer le corps. Toutefois, il y a lieu de croire que les détenus utilisent bel et bien l’eau de Javel mise à leur disposition comme prévu pour désinfecter leur matériel. En particulier, 17 % des détenus ont déclaré s’être injecté de la drogue, 38 %, s’être fait tatouer et 13 %, s’être fait percer dans un pénitencier. Ces estimations de comportements à risque peuvent sembler élevées, mais elles se situent dans la fourchette établie dans le cadre d’autres études portant sur des populations carcérales au Canada.

Le sexe des détenus a été associé à des pratiques d’injection et de perçage qui constituent des comportements à risque. Contrairement aux données d’Alary et de ses collaborateurs (2005) ainsi qu’à celles de Dufour et de ses collaborateurs (1996), les estimations tirées du Sondage national portent à croire que les hommes sont plus susceptibles que les femmes d’adopter pratiques d’injection à risque. Par ailleurs, les femmes sont légèrement moins susceptibles de se faire percer dans une rangée de pénitencier que les hommes. De même, elles sont presque deux fois plus enclines à déclarer avoir utilisé le matériel de perçage d’une autre personne, données qui concordent avec les résultats d’Alary et de ses collaborateurs (2005). Selon le cas, ces différences de comportement peuvent signifier une exposition plus grande aux infections transmissibles par le sang chez les hommes, du fait qu’ils adoptent des pratiques d’injection à risque élevé, ou encore chez les femmes, du fait qu’elles se font percer le corps.

En outre, le fait d’avoir récemment consommé des opiacés par injection dans un pénitencier était lié à des pratiques d’injection à risque. Cela peut donner à penser que l’injection d’opiacés accroît le risque d’exposition aux infections transmissibles par le sang, mais la relation observée entre la consommation d’opiacés et le partage du matériel d’injection est difficile à démêler; comme le sondage ne tenait pas compte de la chronologie des événements, il est difficile d’établir un lien de cause à effet. Pour bien approfondir la relation en question, il faudrait mener d’autres projets de recherche longitudinale détaillée.

Le SCC met de l’eau de Javel à la disposition des détenus de façon à réduire les méfaits associés à l’utilisation de matériel non stérilisé, surtout en ce qui concerne les infections transmissibles par le sang. Un faible pourcentage de détenus s’adonnait à ces pratiques à risque, mais 87 % de la population carcérale était au courant de la politique du SCC visant à lui fournir un accès facile à de l’eau de Javel du SCC et 57 % des détenus avaient déjà essayé d’obtenir de l’eau de Javel au pénitencier. La demande extraordinaire d’eau de Javel s’explique souvent par le fait qu’on s’en sert à des fins d’hygiène personnelle, c’est‑à‑dire pour le nettoyage général et la lessive. Des données empiriques en ce sens avaient déjà été établies dans le cadre d’une étude sur les détenues (PASAN, 2003). En outre, il existe un lien étroit entre le fait de connaître l’existence d’une politique visant à fournir un accès facile à de l’eau de Javel et le fait d’essayer de s’en procurer. D’où l’idée qu’il faudrait s’organiser pour que les détenus demeurent bien au fait des articles favorisant une réduction des méfaits mis à leur disposition dans les pénitenciers, pour s’assurer que les membres des groupes les plus vulnérables continuent à se procurer de l’eau de Javel.

La plupart des détenus qui se sont injecté de la drogue ou qui se sont fait tatouer ou percer dans un pénitencier ont déclaré avoir utilisé non seulement un matériel nettoyé, mais du matériel désinfecté à l’eau de Javel. C’est une bonne nouvelle, car même si le nettoyage au sens général ou la désinfection à l’eau de Javel n’élimine pas le risque entièrement, il y a lieu de croire qu’il réduit le risque de propagation de maladies infectieuses (Tweed, 2004). Par conséquent, les détenus ayant des comportements à risque élevé semblent prendre des mesures actives pour réduire les méfaits associés à ces comportements. Voilà qui concorde avec les recherches précédentes examinant le nettoyage sans porter toutefois en particulier sur l’eau de Javel. Selon Calzavara et ses collaborateurs (2003), 50 % des détenus des centres correctionnels de la province de l’Ontario s’injectant de la drogue nettoyaient la seringue avec de l’eau de Javel non diluée; selon Martin et ses collaborateurs (2005), 91 % des femmes s’injectant de la drogue au Centre correctionnel pour femmes de Burnaby utilisaient des seringues désinfectées à l’eau de Javel. De même, d’autres études ont démontré qu’environ 70 % des détenus sous responsabilité fédérale au Canada ont déclaré avoir eu recours à du matériel de tatouage et de perçage propre (Alary et coll., 2005; Calzavara et coll., 1997; Price Waterhouse, 1996). Les pratiques de désinfection du matériel chez les détenus relevant du SCC semblent se situer dans la « moyenne » pour le milieu carcéral. Il est toutefois préoccupant de savoir que le tiers environ des détenus qui s’injectent de la drogue ou se font tatouer ou percer dans les établissements du SCC dit utiliser des aiguilles qui n’ont pas été nettoyées à l’eau de Javel. Parmi les détenus qui s’injectent de la drogue, ceux qui ont purgé une année ou moins de leur peine semblent représenter un groupe particulièrement vulnérable, du fait qu’ils utilisent des seringues qui n’ont pas été nettoyées. Toutes proportions gardées, toutefois, la probabilité que la dernière injection ait été faite au moyen d’une seringue désinfectée à l’eau de Javel était 3,3 fois supérieure chez les détenus ayant purgé plus d’une année de leur peine que chez les autres détenus. Pour ceux qui en sont encore à leur première année de peine, des programmes ciblés permettraient peut-être de modifier le comportement à proscrire.

La demande d’eau de Javel et l’utilisation de seringues désinfectées à l’eau de Javel étaient plus courantes chez les détenus qui s’étaient servi du matériel d’injection d’une autre personne. Cela donne à penser que l’eau de Javel est utilisée comme prévu par ceux qui sont les plus vulnérables aux infections transmissibles par le sang (c.‑à‑d. ceux qui utilisent le matériel déjà utilisé d’autres personnes). Le résultat est plus révélateur que ceux des études canadiennes précédentes sur la désinfection du matériel d’injection, de tatouage et de perçage, qui portaient seulement sur le nettoyage lui‑même, mais non pas la méthode employée pour ce faire.

Contrairement aux attentes, les détenus qui ont dit avoir utilisé le matériel de tatouage de quelqu’un d’autre étaient moins susceptibles de désinfecter le matériel de tatouage à l’eau de Javel. Ce résultat unique est peut-être lié aux mesures entourant la question posée sur la désinfection du matériel de tatouage et de perçage à l’eau de Javel dans un pénitencier. La question portait sur l’ensemble des expériences vécues dans un pénitencier fédéral, plutôt que sur la fréquence de désinfection du matériel ou encore sur un événement particulier, par exemple la dernière fois où le détenu s’est fait tatouer ou percer. Une question mieux ciblée aurait donné un résultat plus précis. Cette précision aurait permis de mieux comprendre des résultats en apparence contradictoires.

Trente‑sept pour cent des détenus ont déclaré avoir de la difficulté à se procurer de l’eau de Javel. Cela valait particulièrement pour les hommes. Les raisons surtout invoquées à cet égard étaient les suivantes : les distributrices étaient vides ou brisées, ou encore elles donnaient de l’eau de Javel diluée. De même, les femmes ont déclaré qu’une des raisons était qu’elles devaient s’adresser au personnel pour obtenir de l’eau de Javel. Ces problèmes ont été notés à l’occasion d’autres examens faits de l’utilisation de l’eau de Javel par les détenus dans les établissements carcéraux du Canada; aucune recherche ne les avait cependant quantifiés (SCC, 1999; PASAN, 2003; Small et coll., 2005). Une faible proportion de détenus signalent avoir de la difficulté à obtenir de l’eau de Javel, mais le SCC pourrait accroître l’accessibilité globale de l’eau de Javel dans ses établissements en s’attaquant aux problèmes évoqués ci-dessus; le travail à cet égard est d’ailleurs déjà en cours. Une meilleure accessibilité générale à l’eau de Javel aurait peut-être pour effet d’accroître, chez les détenus, l’utilisation de matériel désinfecté à l’eau de Javel.

La participation au PTEM en tant que façon de réduire les méfaits a également fait l’objet d’un examen. Elle a été liée à la consommation de drogues dans un pénitencier. Soixante pour cent des détenus participant au programme ont dit ne pas avoir consommé d’opiacés récemment; ce qui veut dire que 40 % ont déclaré l’avoir fait. Une consommation persistante, mais moins fréquente d’opiacés a été notée chez des détenus dans d’autres populations carcérales participant au PTEM (Dolan et coll., 2003; Dolan, Hall et Wodak, 1996; Heimer et coll., 2006; Larney, 2010; Magura, Rosenblum, Lewis et Joseph, 1993) aussi bien que chez des délinquants dans la collectivité.

Les détenus qui ne participaient pas au PTEM au moment du sondage, mais qui avaient essayé d’y être admis se divisaient principalement en deux groupes : 1) ceux qui ne répondaient pas aux exigences du programme la dernière fois où ils ont essayé d’y être admis (53 %) et 2) ceux qui y avaient déjà participé, mais qui avaient cessé de le faire (47 %). La proportion de détenus qui ne satisfaisaient pas aux exigences est une donnée qu’il faut interpréter avec prudence, car les exigences du PTEM ont évolué au fil du temps. Quoi qu’il en soit des modifications apportées au programme, un petit groupe de détenus (2 %) a déclaré ne pas répondre aux critères et avoir récemment consommé des opiacés. Ceux-là sont peut-être très exposés au risque de contracter une infection transmissible par le sang en raison de l’association entre la consommation d’opiacés et l’utilisation du matériel d’injection déjà utilisé par une autre personne. De ce fait, il leur serait peut-être utile de participer au PTEM. Pour assurer l’accessibilité au programme, il faudrait examiner plus à fond les raisons pour lesquelles ces détenus ne répondent pas aux critères d’admission établis.

L’examen fait de la participation au PTEM et de la consommation de drogues était limité : aucune question ne portait sur le moment où étaient survenus les événements, donnée essentielle pour déterminer un lien de cause à effet au moyen d’un sondage transversal. Cette caractéristique du sondage étant, il devient difficile de déterminer en quoi la consommation de drogues peut être liée à la participation au PTEM et comment cette participation est susceptible de modifier les comportements liés à la drogue.

Le SCC a bien adopté des mesures pour aider les détenus à réduire leur risque de contracter une infection transmissible par le sang, sous forme de programmes de réduction des méfaits, mais les projets de recherche à venir permettront peut-être d’accroître l’efficacité des programmes en place et d’imaginer des interventions nouvelles. Les projets de recherche à venir devraient examiner le lien direct qui existe entre la demande d’eau de Javel, l’utilisation de l’eau de Javel en tant que mesure de réduction des méfaits et l’utilisation de matériel non stérilisé. Ils permettraient de mieux comprendre comment il faudrait cibler les groupes vulnérables aux infections transmissibles par le sang. Par ailleurs, il faut approfondir les raisons pour lesquelles les détenus continuent à s’adonner à des comportements à risque sans profiter des mesures de réduction des méfaits mises à leur disposition. L’information obtenue aidera alors à prévoir des interventions conçues pour mieux faire connaître les programmes de réduction des méfaits chez les détenus et le recours par ces derniers aux programmes en question, de même qu’à réduire peut-être aussi la probabilité que les détenus adoptent des comportements à risque. Enfin, en obtenant des renseignements plus détaillés sur les comportements à risque adoptés avant et après la participation au PTEM, on pourrait examiner et peut-être améliorer l’efficacité des programmes. Ces futurs projets de recherche aideront le SCC à réduire la propagation des infections transmissibles par le sang et à protéger les collectivités.

Bibliograpie

Annexes

Annexe A : Caractéristiques des détenus sous responsabilité fédérale au Canada, selon la source de données

Les pourcentages ayant été arrondis, leur somme peut ne pas correspondre à 100. Le niveau de scolarité établi à partir des données administratives ne peut être comparé aux estimations découlant du Sondage national en raison de l’incompatibilité des deux méthodes de collecte des renseignements (test normalisé à l’admission par opposition à une autodéclaration lors du Sondage). Comme la cote de sécurité indiquée dans le Sondage correspond au niveau de sécurité de l’établissement, c’est une donnée qui est inconnue pour la plupart des femmes dans les établissements à niveaux de sécurité multiples. Du fait de la variation d’une strate à l’autre, le test du khi carré ne pouvait se calculer pour les régions.
SCC = Service correctionnel du Canada; n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
*p < 0,05.

Sondage national auprès des détenu(e)s sur les maladies infectieuses et les comportements à risque
(n = 3 357)
(N = 13 701)
Données administratives du SCC
(N = 13 041)
Hommes
(n = 3 006)
(N = 13 222)
Femmes
(n = 351)
(N = 479)
Χ2(dl)
ou
F (v1,v2)
Hommes
(N = 12 574)
Femmes (N = 467)
Caractéristiques n M (CI 95 %) n M (CI 95 %) N M N M

Âge (année)

2 899

38 (38, 39)

335

34 (34, 35)

106,64*
(13 192)

12 554

38

466

35

Niveau de scolarité le plus élevé au moment du Sondage (%)

Inférieur au diplôme d’études secondaires

1 252

46 (44, 48)

156

48 (45, 51)

0,68

-

-

-

-

Diplôme d’études secondaires ou plus

1 533

54 (52, 56)

176

52 (49, 55)

(1)

-

-

-

-

Situation conjugale (%)

Mariés/conjoints de fait

884

31 (29, 32)

121

35 (32, 38)

4,90*

4 839

39

165

36

Célibataires/séparés/divorcés/veufs

2 043

69 (68, 71)

224

65 (62, 68)

(1)

7 654

61

297

64

Pays de naissance (%)

Canada

2 622

89 (88, 90)

320

92 (91, 94)

5,87*

11 175

89

412

89

Autre

305

11 (10, 12)

26

8 (6, 9)

(1)

1 386

11

53

11

Auto-identification en tant qu’Autochtone (%)

Autochtones

612

21 (19, 22)

129

36 (33, 38)

94,37*

2 466

20

147

32

Non‑Autochtones

2 281

79 (78, 81)

212

65 (62, 67)

(1)

10 023

80

310

68

Race (%)

Blanc

1 852

65 (63, 67)

179

55 (52, 58)

82,52*

8 482

68

258

56

Autochtone

612

21 (20, 23)

129

36 (34, 38)

(2)

2 466

20

147

32

Autre minorité visible

356

14 (13, 15)

28

9 (7, 11)

1 541

12

52

11

Langue la plus aisément parlée (%)

Anglais

2 154

78 (77, 79)

302

84 (83, 86)

32,90*

8 425

74

317

79

Français

719

20 (20, 21)

37

14 (13, 15)

(2)

2 342

21

62

15

Autre

54

2 (1, 2)

6

2 (1, 2)

642

6

22

5

Années purgées de la peine en cours

2 702

4,8 (4,6, 5,1)

318

2,2 (2,0, 2,4)

274,15*
(1 2975)

12 554

4,4

466

3,0

Région (%)

Atlantique

317

10 (10, 10)

50

13 (13, 13)

-

1 297

10

62

13

Québec

868

24 (24, 24)

42

16 (16, 16)

2 990

24

73

16

Ontario

627

27 (27, 27)

84

26 (26, 26)

3 344

27

123

26

Prairies

847

25 (25, 25)

137

33 (33, 33)

3 168

25

151

32

Pacifique

347

15 (14, 15)

38

13 (12, 13)

1 772

14

58

12

Cote de sécurité (%)

Maximale

581

21 (21, 21)

0

-

3 199

25

102

22

Moyenne

1 488

60 (60, 60)

0

6 934

55

196

42

Minimale

869

18 (18, 18)

4

1 (1, 1)

1 907

15

161

34

Inconnue

68

1 (1, 1)

347

99 (99, 99)

534

4

8

2

Annexe B : Régression logistique de la demande d’eau de Javel chez les détenus

n = taille de l’échantillon; N = taille estimative de la population. a Comme la cote de sécurité indiquée dans le Sondage correspond au niveau de sécurité de l’établissement, c’est une donnée qui est inconnue pour la plupart des femmes dans les établissements à niveaux de sécurité multiples. Là où la cote de sécurité représentait une donnée significative (p < 0,25) selon l’analyse bidimensionnelle, une analyse multidimensionnelle déterminant l’impact de la cote de sécurité se limitait au seul cas des hommes.
*p < 0,05.

Caractéristique Hommes et femmes
(n = 2 632)
(N = 13 701)
RC rajusté (IC95 %)
Hommes seulementa
(n = 2 291)
(N = 13 222)
RC rajusté (IC95 %)
Sexe

Femme

1,00

Homme

0,73 (0,61, 0,87)*

Âge

18 à 39 ans

1,00

1,00

40 ans ou plus

0,64 (0,54, 0,76)*

0,66 (0,55, 0,79)*

Région

Atlantique

1,00

1,00

Québec

2,29 (1,73, 3,03)*

2,24 (1,67, 3,01)*

Ontario

1,73 (1,29, 2,33)*

1,70 (1,24, 2,33)*

Prairies

1,68 (1,28, 2,21)*

1,81 (1,34, 2,43)*

Pacifique

1,91 (1,36, 2,66)*

1,82 (1,28, 2,59)*

Années purgées de la peine en cours

Une année ou moins

1,00

1,00

Plus d’une année

1,62 (1,37, 1,93)*

1,63 (1,36, 1,95)*

Connaît la politique d’accès à l’eau de Javel

Non

1,00

1,00

Oui

1,95 (1,52, 2,50)*

1,87 (1,44, 2,43)*

Cote de sécurité (%)

Maximale

1,00

Moyenne

0,85 (0,67, 1,08)

Minimale

0,58 (0,45, 0,74)*

Ajustement du modèle Ajustement du modèle

Test du rapport des ressemblances (dl)

487,95 (8) p < 0,0001

529,05 (9) p < 0,0001

R2

0,17

0,20

Annexe C : Régression logistique des pratiques de nettoyage des seringues lors de la dernière injection chez les détenus s’étant injecté récemment de la drogue dans un pénitencier

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
*p < 0,05.

Caractéristique Hommes et femmes
(n = 264)
(N = 2 329)
RC rajusté (IC95 %)
Région

Ontario

1,00

Atlantique

0,27 (0,08, 0,94)*

Québec

0,21 (0,07, 0,59)*

Prairies

0,95 (0,27, 3,41)

Pacifique

0,29 (0,08, 1,02)

Années purgées de la peine en cours

Une année ou moins

1,00

Plus d’une année

3,31 (1,51, 7,24)*

Utilisation de la seringue d’une autre personne

Non

1,00

Oui

9,17 (4,04, 20,83)*

Partage récent d’une seringue avec une personne dont on sait qu’elle a une infection transmissible par le sang ou dont l’état à ce chapitre est inconnu

Non

1,00

Oui

0,49 (0,20, 1,19)

Ajustement du modèle

Test du rapport des ressemblances (dl)

347,59 (7) p < 0,001

R2

0,73

Annexe D : Régression logistique des pratiques de désinfection du matériel de tatouage chez les détenus s’étant déjà fait tatouer dans une rangée d’un établissement du SCC

n = taille de l’échantillon; N = taille estimée de la population.
*p < 0,05.

Caractéristique Hommes et femmes
(n = 1 026)
(N = 5 206)
RC rajusté (IC95 %)
Âge

18 à 29 ans

1,00

30 à 39 ans

1,76 (1,19, 2,60)*

40 à 49 ans

1,66 (1,09, 2,52)*

50 ans ou plus

1,22 (0,77, 1,92)

Années purgées de la peine en cours

Une année ou moins

1,00

Plus d’une année jusqu’à trois années

0,69 (0,46, 1,03)

Plus de trois années

0,80 (0,57, 1,13)

Utilisation du matériel de tatouage d’une autre personne

Non

1,00

Oui

0,45 (0,33, 0,61)*

Ajustement du modèle
Test du rapport des ressemblances (dl)

199,61 p < 0,0001

R2

0,18

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Johnson, van de Ven et Grant (2001) ont aussi examiné le Programme de traitement d’entretien à la méthadone (PTEM) dans les établissements correctionnels fédéraux du Canada. Toutefois, ils n’ont pas étudié la participation au programme en tant que telle, mais plutôt l’incidence du traitement sur les comportements des détenus et les cas de récidive en établissement. Au moment de l’étude, le PTEM était un programme pilote dont les critères d’admissibilité étaient restreints, par rapport à ceux du programme actuel. L’étude en question n’a pas examiné la participation au programme ni les comportements liés à la consommation de drogue.

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Note de bas de page 2

Le partage ou l’utilisation commune d’un matériel suppose deux actes : prêter son matériel ou emprunter le matériel de l’autre. La personne qui prête seulement son matériel n’est pas à risque; toutefois, celle qui emprunte et utilise une seringue qui a servi à quelqu’un d’autre est toujours à risque. Au moment d’évaluer les risques, le deuxième cas est le plus pertinent des deux.

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Note de bas de page 3

La Direction de la recherche et la Direction de la santé publique du SCC, ainsi que la Division des politiques, de la coordination et des programmes sur le VIH/sida et la Division des infections acquises dans la collectivité de l’Agence de la santé publique du Canada.

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Note de bas de page 4

Il s’agit de la période qui commence en novembre 2006 et qui se termine une fois le questionnaire rempli, soit entre le 22 mai et le 6 juillet 2007, selon l’établissement. Cette période s’étale sur six à neuf mois, suivant le moment où le sondage a été effectué.

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Note de bas de page 5

Quel que soit le lieu.

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Note de bas de page 6

Pour obtenir des renseignements détaillés et des références connexes, voir SAS Institute Inc. (2004, p. 166).

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Note de bas de page 7

Pour obtenir des renseignements détaillés et des références connexes, voir SAS Institute Inc. (2004, p. 4216).

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Note de bas de page 8

Pour obtenir des renseignements détaillés, voir SAS Institute Inc. (2008, p. 6558).

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Note de bas de page 9

Dans ce cas, les pratiques de désinfection des seringues ont été divisées en deux (seringues désinfectées à l’eau de Javel et seringues n’ayant pas été désinfectées à l’eau de Javel).

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Note de bas de page 10

Dans ce cas, les pratiques de désinfection du matériel ont été divisées en deux (matériel désinfecté à l’eau de Javel et matériel n’ayant pas été désinfecté à l’eau de Javel).

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Note de bas de page 11

Selon la DC 821, les détenus doivent pouvoir se procurer une eau de Javel ordinaire non diluée (5,25 % à 7 %) à utiliser comme agent désinfectant. Certains détenus croient que le personnel dilue l’eau de Javel au moment de la préparer, mais il n’existe aucun élément de preuve à ce sujet. La dilution (ou la dégradation chimique) de l’eau de Javel est peut-être attribuable à une exposition à la lumière ou à la chaleur et au passage du temps.

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Note de bas de page 12

Cela exclut les détenus qui disent avoir été tatoués au local de tatouage du SCC.

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