Heather Finn : Lauréate du Prix du multiculturalisme Emerson Douyon 2020-2021
2 août 2022
Si Heather Finn n’a qu’un seul conseil à donner au personnel travaillant avec des délinquants ethnoculturels, ce serait : écoutez.
« Être à l’écoute. C’est vraiment ça, a déclaré Heather, lauréate du Prix Emerson Douyon du multiculturalisme 2020-2021. Nous ne comprendrons pas les expériences des autres si nous ne les écoutons pas. En tant que femme blanche, je n’ai pas le même vécu que celui de certaines personnes avec qui je travaille. Je dois être à l’écoute, c’est ma seule façon de comprendre. »
Une ardente défenseure des délinquants noirs
Sa capacité d’écoute et de compréhension a fait d’elle une ardente défenseure des délinquants noirs et une championne des initiatives visant à favoriser leur réadaptation et leur réinsertion sociale depuis plus de 15 ans.
« Ce prix est une si belle reconnaissance de tout ce qu’elle a fait. Elle est animée par sa passion pour aider les personnes issues de groupes marginalisés, en particulier les délinquants noirs, a déclaré Ed Muise, membre de la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Elle a travaillé avec beaucoup d’ardeur pour attirer l’attention sur ce groupe et sur la nécessité de mieux les comprendre. »
Heather, administratrice régionale intérimaire, Évaluation et interventions, à Moncton, au Nouveau-Brunswick, a passé toute sa carrière en première ligne dans des établissements de la région de l’Atlantique, ainsi que dans des bureaux de libération conditionnelle à Terre-Neuve et au Nouveau-Brunswick
Après avoir obtenu un baccalauréat en travail social en 2004, Heather a d’abord travaillé dans le domaine des services correctionnels pour les jeunes, avant de travailler avec des détenus dans le cadre de programmes de la Société John Howard, puis au Service correctionnel du Canada (SCC).
« En tant que travailleuse sociale, vous vous occupez des personnes vulnérables dans la population. Le travail social vous donne la possibilité de voir au-delà des déficits individuels et d’examiner les systèmes qui ne les servent pas bien. Dans le domaine correctionnel, vous travaillez avec les populations les plus vulnérables du Canada; parfois, le système correctionnel ne les sert pas bien. C’est la source de mon inspiration », a-t-elle déclaré.
La thèse de Heather pour sa maîtrise en travail social de 2017 portait sur la surreprésentation des délinquants canadiens noirs dans la région de l’Atlantique. Elle considérait le sujet comme un enjeu majeur qui devait être plus largement connu. Elle était convaincue que les nombreux intervenants de première ligne n’étaient pas conscients des problèmes complexes propres aux délinquants noirs et que, par conséquent, ces problèmes n’étaient pas abordés. Elle a rencontré un allié en la personne de Jude Clyke, agent de libération conditionnelle dans la collectivité.
« Heather avait un intérêt marqué pour le soutien et la défense des groupes marginalisés. Nous pensons de la même façon en voulant créer des interventions significatives qui peuvent mener à des résultats positifs. Nous avons tous deux compris que la région n’en faisait pas assez », a déclaré Jude.
Heather, Jude et Ed (et ensuite le directeur du Pénitencier de Dorchester) se sont efforcés de changer cette situation et ont créé le Comité pour la réinsertion sociale des délinquants noirs, un groupe de travail chargé de s’attaquer à la disparité des délinquants canadiens noirs dans la région de l’Atlantique. Ils ont conçu des ateliers et des séances de formation pour sensibiliser les agents de libération conditionnelle.
En 2017, Heather a offert une séance d’information sur la surreprésentation des délinquants noirs aux agents de libération conditionnelle du Pénitencier de Dorchester, au Nouveau-Brunswick. La séance comprenait l’histoire des Canadiens noirs en Nouvelle-Écosse; le travail de lutte contre le racisme; et ce que les agents de libération conditionnelle pourraient faire pour faciliter la réinsertion sociale.
Les réactions positives à l’atelier ont inspiré la création d’une formation d’une journée de Perfectionnement continue des agents de libération conditionnelle (PCALC) pour tous les agents de libération conditionnelle de la région de l’Atlantique en 2018, animée par Jude. Le cours a été élargi l’année suivante pour inclure l’expert en la matière, Robert Wright. Cette fois, la formation de PCALC a été coanimée par Heather et Robert et dispensée aux agents de libération conditionnelle et aux membres de la Commission des libérations conditionnelles du Canada en 2019 et 2020. Elle a été conçue pour engager les agents de libération conditionnelle dans une véritable discussion afin de leur fournir une compréhension des délinquants noirs, de sorte que ces agents puissent intégrer des renseignements culturellement pertinents dans leurs évaluations et leurs décisions.
Le cours a connu un taux d’achèvement phénoménal de 97 % chez les agents de libération conditionnelle.
« Nous avons pu nous engager dans une conversation qui n’était pas conflictuelle, où il y avait une occasion d’apprentissage positive, et où les gens pouvaient poser librement des questions et devenir un peu plus conscients et culturellement compétents », a déclaré Jude.
Observer d’énormes changements de vie
Heather a expliqué à quel point son travail est gratifiant.
« C’est un environnement de travail tellement dynamique », a déclaré Heather. « Vous faites vraiment la différence, et vous avez un impact, que ce soit en général dans les systèmes dans lesquels nous travaillons ou dans la vie d’une personne. J’ai eu le privilège d’observer d’énormes changements de vie prendre forme sous mes yeux. »
Heather a également fait une différence dans la vie des détenus dans les Caraïbes. Elle a participé à une initiative réussie entre le SCC et le ministère des Services correctionnels des Bahamas. Elle a donné la Formation initiale des agents de libération conditionnelle à 20 participants dans le but de doter le ministère d’un système de libération conditionnelle fonctionnel pour cette partie du monde. Pendant la pandémie, Heather a travaillé avec le ministère de la probation et de la libération conditionnelle de Sainte-Lucie, ce qui a permis à deux délinquants de bénéficier d’une libération conditionnelle lors des toutes premières audiences de libération conditionnelle du pays.
Des initiatives passionnantes pour les délinquants noirs se poursuivent dans la région de l’Atlantique. Heather reconnaît que l’engagement avec les partenaires communautaires est essentiel pour améliorer la prestation des services; toutefois, les initiatives régionales ont également besoin du soutien des cadres supérieurs. Sous la direction du sous-commissaire régional Jay Pyke, la région voit à l’exécution de plusieurs contrats externes qui répondent aux besoins des délinquants noirs en matière de santé mentale, d’éducation et de surveillance de la libération conditionnelle. La région de l’Atlantique a également créé un nouveau poste communautaire d’agent de réinsertion sociale pour les Canadiens noirs, qui aidera les délinquants noirs à réintégrer leur collectivité.
« Grâce au soutien de ces importantes initiatives, il semble y avoir un regain d’espoir et de confiance parmi le personnel, les délinquants et les partenaires communautaires qui réclament ce type de services depuis des décennies », a déclaré Heather. À l’instar de nombreux cadres supérieurs, Heather siège également au Comité régional sur la réinsertion sociale des délinquants ethnoculturels et au Comité régional sur la réinsertion sociale des délinquants autochtones, et est membre du Comité ethnoculturel d’équité en matière d’emploi.
Jude et Ed conviennent que le Prix du multiculturalisme Emerson Douyon est une reconnaissance plus vaste de la passion et de l’engagement inébranlable de Heather envers les délinquants noirs, et de l’importance de combler l’écart entre les délinquants noirs et non noirs.
Que signifie ce prix pour Heather?
« D’une part, j’ai eu du mal à accepter d’être récompensée pour mon engagement dans ce travail, car c’est un travail que nous devrions tous faire; nous devrions tous travailler à l’établissement d’un système correctionnel plus équitable, car c’est la bonne chose à faire », a déclaré Heather. « Cependant, je suis honorée de cette reconnaissance et j’espère qu’elle pourra sensibiliser les gens et les inciter à s’engager. Ce travail non seulement est extrêmement important pour nos clients des services correctionnels, mais encore m’a permis de découvrir des expériences et des personnes qui ont changé ma vie de façon positive. »
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