Recherche quantitative originale – D’une pratique exemplaire à la pratique subséquente : mise en œuvre de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire dans les collectivités rurales et éloignées du Nord
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Publié par : L'Agence de la santé publique du Canada
Date de publication : août 2022
ISSN: 2368-7398
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Paul J. Veugelers, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 1; Julia Dabravolskaj, M. Sc.Note de rattachement des auteurs 1; Mohammad K.A. Khan, M. Sc.Note de rattachement des auteurs 2Note de rattachement des auteurs 3; Truc (Trudy) Tran, D. Pt.Note de rattachement des auteurs 2Note de rattachement des auteurs 3; Jenn Flynn, B. Ed. Phys.Note de rattachement des auteurs 4; Katerina Maximova, Ph. D.Note de rattachement des auteurs 2Note de rattachement des auteurs 3
https://doi.org/10.24095/hpcdp.42.8.04f
Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.
Rattachement des auteurs
Correspondance
Paul J. Veugelers, École de santé publique, Université de l’Alberta, 3‑50E University Terrace, 8303 112 Street NW, Edmonton (Alberta) T6G 1K4; tél. : 780-492-9095; courriel : paul.veugelers@ualberta.ca
Citation proposée
Veugelers PJ, Dabravolskaj J, Khan MKA, Tran T, Flynn J, Maximova K. D’une pratique exemplaire à la pratique subséquente : mise en œuvre de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire dans les collectivités rurales et éloignées du Nord. Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada. 2022;42(8):388-397. https://doi.org/10.24095/hpcdp.42.8.04f
Résumé
Introduction. Les collectivités du Nord du Canada sont touchées dans une mesure disproportionnée par les maladies chroniques, en particulier les maladies mentales. Pour atténuer les inégalités croissantes en matière de santé, un programme de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire ciblant les comportements liés au mode de vie sain, la santé mentale et le bien-être, a été étendu aux collectivités rurales et éloignées du Nord. Nous rendons compte de l’incidence du programme sur les connaissances, les attitudes, les comportements liés au mode de vie (alimentation saine, activité physique, temps passé devant un écran), le poids, la santé mentale et le bien-être d’élèves d’école primaire au cours des quatre premières années de mise en œuvre.
Méthodologie. Suivant un plan transversal répété, nous avons interrogé 440 élèves de la 4e à la 6e année (9 à 12 ans) de huit écoles en 2016, 352 en 2018 et 384 en 2020-2021. La répartition entre filles et garçons parmi les élèves était presque égale.
Résultats. Entre 2016 et 2018, les réponses des élèves ont révélé des augmentations modestes dans la consommation de fruits et légumes et dans la diversité des aliments, une diminution du temps passé devant les écrans, aucun changement dans l’activité physique, un recul des attitudes en faveur d’un mode de vie sain ainsi qu’une baisse de la santé mentale et du bien-être. Entre 2018 et 2020-2021, les comportements liés au mode de vie se sont considérablement détériorés, tandis que les attitudes, la santé mentale et le bien-être ont continué à décliner.
Conclusion. Un programme ayant connu du succès dans les quartiers urbains défavorisés sur le plan socioéconomique a eu, dans les collectivités rurales et éloignées du Nord, une incidence favorable, bien que modeste, sur certains comportements liés au mode de vie, mais pas sur les attitudes ni sur la santé mentale ou le bien-être. À la lumière des différences culturelles et des défis logistiques du Nord canadien, des adaptations systématiques et proactives aux contextes locaux, une intensité accrue et une prestation prolongée des programmes sont essentielles afin de faciliter des améliorations durables en matière de santé mentale, de bien-être et de comportements liés au mode de vie.
Mots-clés : enfants, nutrition, activité physique, temps passé devant un écran, sommeil, santé mentale, estime de soi, santé en milieu scolaire, santé publique.
Points saillants
- Un programme de promotion de la santé en milieu scolaire ciblant les comportements liés au mode de vie, la santé mentale et le bien-être – APPLE Schools – a été mis en œuvre dans les collectivités rurales et éloignées du Nord du Canada afin d’améliorer la santé et de réduire les inégalités en matière de santé.
- Les enquêtes menées auprès d’élèves de la 4e à la 6e année en 2016, 2018 et 2020-2021 ont révélé des améliorations initiales modestes des comportements liés au mode de vie, qui se sont dissipées avec la pandémie de COVID-19.
- Les attitudes à l’égard de la santé et des modes de vie sains ne se sont pas améliorées entre 2016 et 2020-2021.
- Des adaptations systématiques et proactives ainsi qu’une intensité et une durée accrues des programmes de promotion de la santé sont essentielles pour obtenir des améliorations substantielles et durables en matière de comportements liés au mode de vie, de santé mentale et de bien-être dans le Nord canadien.
Introduction
Des comportements liés à un mode de vie sain, une bonne santé mentale et le bien-être sont essentiels à la croissance et au développement sains d’un jeuneNote de bas de page 1. Lorsqu’ils sont présents dès un jeune âge, les comportements de vie malsains et les problèmes de santé mentale semblent difficiles à inverser et sont susceptibles de persister à l’âge adulteNote de bas de page 2. Ils peuvent entraîner une spirale de conséquences négatives sur la santé physique (comme l’obésité ou le diabète) et mentale (comme une mauvaise estime de soi, du stress psychologique ou de la dépression)Note de bas de page 3.
Les comportements liés à un mode de vie malsain et les problèmes de santé mentale sont répandus chez les enfants au Canada : en 2018, seulement 52 % et 54 % des enfants canadiens d’âge scolaire consommaient des fruits et des légumes, respectivement, sur une base quotidienne; 25 % faisaient les 60 minutes d’activité physique d’intensité modérée à élevée (APIME) recommandées et le temps d’écran quotidien moyen variait entre 4 et 5 heures (selon l’année scolaire et le sexe)Note de bas de page 4. Les comportements malsains sont susceptibles d’être encore plus répandus chez les enfants vivant dans des milieux défavorisés sur le plan socioéconomique, comme les collectivités rurales et éloignées du Nord, où les maladies chroniques et les maladies mentales représentent un fardeau disproportionnéNote de bas de page 5.
Le programme APPLE Schools (A Project Promoting Healthy Living for Everyone in Schools [un projet promouvant un mode de vie sain pour tous dans les écoles]) a été lancé en 2007 pour faire la promotion de la santé et pour lutter contre les inégalités en matière de santé. APPLE Schools est un programme innovant, reconnu à l’échelle internationale et à but non lucratif, qui cible les écoles des collectivités défavorisées sur le plan socioéconomique. Inspiré d’une initiative locale (le programme Annapolis Valley Health Promoting SchoolsNote de bas de page 6) et reposant sur les principes de la Charte d’Ottawa pour la promotion de la santé de l’Organisation mondiale de la santéNote de bas de page 7, APPLE Schools adopte l’Approche globale de la santé en milieu scolaire afin de promouvoir des comportements de vie sains, une bonne santé mentale et le bien-être en transformant la culture des milieux scolaires en une culture où « le choix santé est le choix facile »Note de bas de page 8. Conscients du contexte spécifique dans lequel chaque école évolue, les responsables du programme APPLE Schools travaillent avec les intervenants des collectivités pour adapter les activités aux besoins de chaque milieu scolaire. Nous avons déjà mesuré l’effet sur deux ans du programme dans des collectivités défavorisées sur le plan socioéconomique en milieu rural et urbain : par rapport aux écoles témoins, les enfants du programme APPLE Schools avaient augmenté leur activité physique à l’école et en dehors de l’écoleNote de bas de page 9, leur consommation de fruits et légumes et la qualité de leur alimentation, diminuant ainsi leur probabilité d’obésitéNote de bas de page 8.
Cette étude rend compte de l’effet du programme, sur une période de quatre ans, sur les connaissances, les attitudes, les comportements liés au mode de vie, la santé mentale et le bien-être d’élèves de la 4e à la 6e année fréquentant des écoles situées dans des collectivités rurales et éloignées du Nord du Canada.
Méthodologie
APPLE Schools a été lancé en 2008 dans 10 écoles de la province de l’Alberta (Canada). Une fois la preuve de son efficacité faite dans ces écoles, le programme a été étendu et a continué à fonctionner dans 74 écoles de collectivités défavorisées sur le plan socioéconomique de régions rurales et urbaines de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Manitoba et des Territoires du Nord-OuestNote de bas de page 10.
En 2016, le programme APPLE Schools a été lancé dans des écoles des collectivités rurales et éloignées du Nord. Au cours des deux premières années, un intervenant en santé scolaire à temps partiel (0,5 équivalent temps plein [ETP]) a été affecté dans chaque école pour faciliter l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action et de stratégies en faveur d’une alimentation saine, d’une vie active ainsi que d’une bonne santé mentale et du bien-être, tout en tenant compte des caractéristiques, des besoins et des enjeux spécifiques de la collectivité et de l’école susceptibles de freiner ou de favoriser la promotion de la santé.
Les responsabilités de l’intervenant en santé scolaire sont de mobiliser les principales parties prenantes (familles, personnel, collectivité); de contribuer à la vision, au plan et au programme d’études de l’école en matière de santé (à la fois en classe et en dehors du temps d’enseignement); de participer à l’établissement d’un enseignement et de liens transversaux dans l’ensemble du programme d’études; d’animer des journées de perfectionnement professionnel pour les enseignants et le personnel de l’école; d’organiser des soirées d’information, des programmes de nutrition et des clubs de cuisine pour les familles, des programmes d’activité physique après l’école, des campagnes d’éducation par les pairs, des événements et des célébrations les fins de semaine; d’afficher du matériel dans les couloirs; de diffuser des bulletins d’information; de veiller à la mise en œuvre des politiques de la province, du district et de l’école en matière de santé, de nutrition, d’activité physique, de santé mentale et de bien-être; de modifier l’environnement physique et social pour favoriser le développement d’habitudes saines et enfin de coordonner et de mobiliser les partenariats et les services dans l’élaboration et la mise en œuvre de plans d’action et de politiques spécifiques à l’école, axés sur le bien-être des élèves, du personnel, des familles et des membres de la collectivité. La troisième année, le poste d’intervenant passe de 0,5 ETP à 0,2 ETP. Au cours de la quatrième année et par la suite, l’intervenant est remplacé par un bénévole de la communauté scolaire qui, à titre de Champion de la santé en milieu scolaire, gère les activités du programme.
L’étude repose sur un plan transversal répété. Tous les conseils scolaires et les directeurs d’école ayant consenti à mettre en œuvre le programme APPLE Schools ont été contactés en vue de la réalisation d’enquêtes auprès des élèves, des parents/tuteurs et de la direction. Nous avons recueilli ces données dans 10 (2016), 15 (2018) et 20 (2020-2021) écoles enseignant à des élèves de la 4e à la 6e année, mais cet article porte sur les huit écoles qui ont participé à la collecte de données aux trois dates.
Pour assurer la rigueur de la méthodologie, les enquêtes auprès des élèves ont été menées par des assistants de recherche à l’école, durant les heures de cours. Le mode de collecte des données a été en personne en 2016 et 2018 (des assistants de recherche formés se sont rendus dans les écoles pour mener les enquêtes) et en ligne à l’automne 2020/hiver 2021, pour respecter les protocoles liés à la COVID-19.
Les taux de participation des élèves ont été respectivement de 66 % en 2016, 67 % en 2018 et 77 % 2020-2021. Tous les élèves ont donné leur accord et l’accord des parents a été obtenu selon une approche d’information active et de consentement passif. Le comité d’éthique de la recherche en santé de l’Université de l’Alberta (Pro00061528) et les conseils scolaires participants ont approuvé toutes les procédures.
Mesures
L’un des objectifs de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire est d’améliorer les connaissances et les attitudes à l’égard d’un mode de vie sain. Pour évaluer les connaissances des recommandations actuelles concernant la pratique d’au moins 60 minutes d’APIME chaque jourNote de bas de page 11, il a été demandé aux enfants de choisir le nombre de minutes pendant lesquelles un enfant de leur âge devrait pratiquer une APIME chaque jour (15, 30, 45, 60 ou 90 minutes ou « je ne sais pas »). Les attitudes à l’égard d’une vie saine et active ont été évaluées en demandant aux enfants dans quelle mesure ils se souciaient d’être physiquement actifs, de manger sainement, d’aller au lit à l’heure et d’être en bonne santé.
Pour l’évaluation de leur consommation alimentaire, les élèves ont rempli un questionnaire interactif de rappel alimentaire sur 24 heures, précédemment validé chez les jeunesNote de bas de page 12. Nous avons utilisé le score du Diet Quality Index-International (DQI-I)Note de bas de page 13, une mesure composite de la qualité de l’alimentation allant de 0 à 100, les scores les plus élevés indiquant une meilleure qualité de l’alimentation. Le DQI-I intègre les dimensions d’adéquation, de variété, d’équilibre et de modération du régime alimentaire.
Pour évaluer l’activité physique, les élèves ont été invités à porter un podomètre horodateur (Omron HJ-720 ITC; OMRON Healthcare, Kyoto, Japon) pendant neuf jours consécutifs sur la hanche droite durant toutes les heures d’éveil, sauf pendant la douche ou la baignade. Ces données ne sont disponibles que pour 2016 et 2018 car les podomètres nécessitent des instructions en personne qui n’ont pas pu être données en 2020-2021 à cause des mesures de santé publique liées à la COVID-19. En 2018 et 2020-2021, les enquêtes auprès des élèves ont intégré le Physical Activity Questionnaire for older Children (PAQ-C)Note de bas de page 14, avec un score variant entre 0 et 5, le score le plus élevé indiquant un niveau d’activité physique élevé. On a demandé aux élèves combien d’heures par jour ils passaient à regarder la télévision ou des DVD, à jouer à des jeux vidéo et à utiliser un téléphone portable ou un appareil similaire en dehors des heures de classe.
En 2016 et 2018, la taille des élèves en position debout (sans chaussures) a été mesurée à 0,1 cm près et le poids a été mesuré à 0,1 kg près sur des balances numériques étalonnées. Étant donné la nature sensible de ces mesures (en particulier le poids), les élèves ont été invités à passer derrière un écran et les assistants de recherche ont enregistré les résultats sans les commenter ou en parler avec les élèves. Le surpoids et l’obésité ont été définis à l’aide des seuils d’indice de masse corporelle (IMC) ajustés en fonction de l’âge et du sexe de l’International Obesity Task ForceNote de bas de page 15. La taille et le poids n’ont pas été mesurés en 2020-2021 en raison des protocoles liés à la COVID-19.
L’enquête auprès des élèves comportait également une série de 12 questions dans le domaine de la santé mentale et du bien-être, tirées d’instruments d’enquête auprès de la populationNote de bas de page 16Note de bas de page 17Note de bas de page 18Note de bas de page 19 et adaptées à la recherche en milieu scolaire auprès d’élèves de la 4e à la 6e année (détails décrits dans Wu et collab.Note de bas de page 20). Les choix de réponse étaient « jamais ou presque jamais », « parfois » et « souvent ou presque toujours ». Des scores de respectivement « -1 », « 0 » et « 1 » ont été attribués à ces choix pour les éléments énoncés positivement, et la notation a été inversée pour les éléments énoncés négativement, de sorte que des valeurs élevées indiquent une santé mentale et un bien-être supérieurs. Le score cumulatif, sur une échelle de -12 à +12, correspond à la somme de ces éléments individuels, les valeurs les plus élevées indiquant une santé mentale et un bien-être supérieurs.
Analyses statistiques
Dans le cadre des analyses descriptives, nous présentons le nombre et le pourcentage de filles/garçons et d’élèves de 4e/5e/6e année pour tous les cycles de collecte de données portant sur l’étendue des connaissances, les attitudes et comportements liés au mode de vie, la santé mentale et le bien-être pour chacune des années de mesure, ainsi que les écarts absolus entre les résultats sur deux ans. Pour ces écarts absolus (2018 par rapport à 2016 et 2020-2021par rapport à 2018), nous avons calculé des intervalles de confiance à 95 % en utilisant le test t de Student pour les variables continues et le test de Wald pour les proportions. Pour étudier les changements au fil du temps en matière de connaissances, d’attitudes et comportements liés au mode de vie, de santé mentale et de bien-être, nous avons eu recours à des modèles de régression linéaire et logistique multivariés, ajustés en fonction du niveau scolaire, du sexe de l’élève, du milieu (milieu rural, petit centre de population) et de la défavorisation sociale et matérielle associée à l’école. Les indices de défavorisation sociale et matérielle ont été établis à partir des données du recensement canadien de 2016. Étant donné que le cycle suivant (le recensement canadien de 2021) n’était pas disponible lors des analyses, nous avons conservé ces indices.
Conformément aux recommandations établies, les modèles de régression à effets fixes ont été préférés aux modèles à effets mixtes, car la corrélation intraclasse était inférieure à 0,02Note de bas de page 21. Les analyses ont été réalisées à l’aide du logiciel R version 4.0.2 (GNU General Public Licence; R Foundation for Statistical Computing, Vienne, Autriche).
Résultats
Le tableau 1 présente les caractéristiques des élèves et des écoles participantes. Au total, 440 élèves ont participé aux enquêtes en 2016, 352 en 2018 et 384 en 2020-2021. Les proportions de filles et de garçons sont demeurées sensiblement égales dans les trois cycles de données.
Caractéristiques des écoles n (%) | 2016 à 2020-2021 (n = 8) |
---|---|
Milieu de résidence | |
Milieu rural | 6 (75) |
Petit centre de population | 2 (25) |
Quintile de l’indice de défavorisation matérielle | |
1 (le moins défavorisé) | 0 (0) |
2 | 3 (37,5) |
3 | 2 (25) |
4 | 0 (0) |
5 (le plus défavorisé) | 3 (37,5) |
Quintile de l’indice de défavorisation sociale | |
1 (le moins défavorisé) | 2 (25) |
2 | 2 (25) |
3 | 2 (25) |
4 | 2 (25) |
5 (le plus défavorisé) | 0 (0) |
Caractéristiques des élèves n (%) | 2016 (n = 440) | 2018 (n = 352) | 2020-2021 (n = 384) |
---|---|---|---|
Sexe | |||
Filles | 215 (49) | 175 (50) | 206 (54) |
Garçons | 225 (51) | 177 (50) | 178 (46) |
Niveau scolaire | |||
4e année | 144 (33) | 121 (34) | 124 (33) |
5e année | 139 (32) | 128 (36) | 128 (33) |
6e année | 153 (35) | 103 (29) | 132 (34) |
En ce qui a trait aux attitudes, moins d’élèves ont déclaré se soucier d’aller au lit à l’heure en 2018 par rapport à 2016, et moins d’élèves ont déclaré se soucier d’être en bonne santé et de manger sainement en 2020-2021 par rapport à 2018.
En moyenne, les élèves ont déclaré consommer 3,1 portions de fruits et légumes par jour en 2016 (voir tableau 2). La consommation de fruits et légumes était de 3,5 portions par jour en 2018 mais est redescendue à 2,9 portions par jour en 2020-2021. Les scores de qualité de l’alimentation sont passés de 53,9 en 2016 à 56,4 en 2018 et sont restés à ce niveau en 2020-2021. La diversité de l’alimentation s’est améliorée entre 2016 (13,9) et 2018 (17,6) et est demeurée à ce niveau en 2020-2021. La consommation de sucre a augmenté entre 2016 (96,9 g/jour) et 2018 (106,2 g/jour), bien que cette augmentation ne soit pas statistiquement significative. La consommation de boissons sucrées est, quant à elle, demeurée similaire en 2016 et 2018, mais a plus que doublé pour atteindre, en moyenne, 2,4 portions par jour en 2020-2021.
Mesures | 2016 | 2018 | 2020-2021 | Différence entre 2016 et 2018 (IC à 95 %)Note de bas de page a |
Différence entre 2018 et 2020-2021 (IC à 95 %)Note de bas de page a |
---|---|---|---|---|---|
Connaissance des recommandations (n et %) | |||||
Sait qu’il faut faire au moins 60 minutes d’APIME par jour | 136 (31) | 98 (28) | 69 (18) | −3 (−10 à 3) | −10 (−17 à −3)Note de bas de page c |
Attitudes envers un mode de vie sain (n et %) | |||||
Se soucie d’être en bonne santé | 409 (93) | 320 (91) | 334 (87) | −2 (−7 à 1) | −4 (−8 à 0)Note de bas de page c |
Se soucie d’être actif physiquement | 383 (87) | 299 (85) | 307 (80) | −2 (−7 à 3) | −5 (−10 à 1) |
Se soucie de manger sainement | 374 (85) | 289 (82) | 288 (75) | −3 (−9 à 2) | −7 (−13 à −1)Note de bas de page c |
Se soucie d’aller au lit à l’heure | 277 (63) | 180 (51) | 188 (49) | −12 (−18 à −3)Note de bas de page c | −2 (−10 à 5) |
Alimentation saine | |||||
Fruits et légumes (portions/jour) | 3,1 | 3,5 | 2,9 | 0,3 (−0,1 à 0,7) | −0,6 (−1 à −0,2)Note de bas de page c |
Lait et substituts (portions/jour) | 2,1 | 2,2 | 2,2 | 0,1 (−0,1 à 0,4) | 0,0 (−0,3 à 0,3) |
Céréales et produits céréaliers (portions/jour) | 6,0 | 6,5 | 7,2 | 0,5 (−0,1 à 1,0) | 0,7 (0,1 à 1,3)Note de bas de page c |
Viande et substituts (portions/jour) | 1,9 | 2,0 | 2,2 | 0,1 (−0,2, 0,3) | 0,1 (−0,1, 0,4) |
DQI-I | 53,9 | 56,4 | 56,6 | 2,4 (1,2 à 3,6)Note de bas de page c | 0,3 (−0,8 à 1,3) |
Diversité de l’alimentation | 13,9 | 17,6 | 17,2 | 3,7 (3,1 à 4,2)Note de bas de page c | 0,4 (−0,9 à 0,2) |
Boissons sucrées (portions/jour) | 1,1 | 1,0 | 2,4 | −0,1 (−0,3 à 0,1) | 1,4 (1,0 à 1,8)Note de bas de page c |
Quantité totale de sucre (g/jour) | 96,9 | 106,2 | 107,6 | 9,3 (−1,2 à 19,8) | 1,4 (−11,3 à 14,1) |
Activité physique | |||||
Nombre de pas | 9 417 | 9 418 | – | 1 (−508 à 510) | – |
PAQ-C | – | 2,2 | 2,1 | – | 0 (−0,1 à 0,1) |
Temps passé devant un écran (heures/jour) | |||||
Temps passé devant la télévision | 1,9 | 1,5 | 2,3 | −0,4 (−0,7 à −0,2)Note de bas de page c | 0,8 (0,5 à 1,2)Note de bas de page c |
Temps consacré aux jeux vidéo | 1,9 | 1,5 | 2,4 | −0,5 (−0,9 à −0,1)Note de bas de page c | 0,9 (0,6 à 1,3)Note de bas de page c |
Temps passé sur un téléphone portable | 1,2 | 1,3 | 1,8 | 0,1 (−0,3 à 0,4) | 0,5 (0,2 à 0,9)Note de bas de page c |
Poids (n et %) | |||||
Surpoids (sans obésité) | 92 (21) | 78 (22) | – | 1 (−4,9 à 7,4) | – |
Obésité | 79 (18) | 63 (18) | – | 0 (−5,7 à 5,5) | – |
Santé mentale et bien-être | |||||
Score cumulatifb | 5,4 | 4,7 | 4,3 | −0,6 (−1,2 à −0,1)Note de bas de page c | −0,4 (−1,1 à 0,2) |
Abréviations : APIME, activité physique d’intensité modérée à élevée; DQI-I, Diet Quality Index – International; IC, intervalle de confiance; PAQ-C, Physical Activity Questionnaire for Older Children.
|
Nos mesures de l’activité physique (nombre de pas et scores PAQ-C) n’ont pas présenté de changements substantiels ou statistiquement significatifs entre 2016 et 2020-2021. Le temps passé à regarder la télévision et à jouer à des jeux vidéo a diminué de près de 30 minutes par jour entre 2016 et 2018, mais a ensuite augmenté de près d’une heure par jour entre 2018 et 2020-2021. Le temps d’utilisation d’un téléphone portable a également augmenté entre 2018 et 2020-2021 d’environ 30 minutes par jour.
La fréquence du surpoids et de l’obésité n’a pas évolué de manière substantielle entre 2016 et 2018. En ce qui concerne les connaissances des élèves en matière de santé, ils étaient moins nombreux en 2018 et 2020-2021 qu’en 2016 à connaître la recommandation correcte d’au moins 60 minutes d’activité physique par jour. Quant à la santé mentale et au bien-être, le score cumulatif a diminué au fil du temps : 5,4 en 2016, 4,7 en 2018 et 4,3 en 2020-2021.
Le tableau 3 présente les observations faites en 2018 et en 2020-2021 par rapport aux valeurs de référence de 2016 avant le démarrage du programme, avec ajustement des données pour tenir compte des facteurs de confusion. En 2020-2021, une proportion moindre d’élèves par rapport à 2016 a répondu correctement à la question sur le temps d’activité physique recommandé. Cette baisse s’est révélée statistiquement significative. De plus, les élèves ont été statistiquement moins nombreux à déclarer, après quatre ans de mise en œuvre du programme, des attitudes favorables à l’égard de la santé, de l’activité physique, de l’alimentation saine et du fait d’aller au lit à l’heure, par rapport aux valeurs de référence de 2016.
Mesures | 2 ans d’intervention (2018)Note de bas de page a |
4 ans d’intervention (2020-2021)Note de bas de page a |
||
---|---|---|---|---|
RC (IC à 95 %)Note de bas de page b | β (IC à 95 %)Note de bas de page b | RC (IC à 95 %)Note de bas de page b | β (IC à 95 %)Note de bas de page b | |
Connaissance des recommandations | ||||
Sait qu’il faut faire au moins 60 minutes d’APIME par jour | 0,9 (0,7 à 1,2) | – | 0,5 (0,3 à 0,7)Note de bas de page c | – |
Attitudes envers un mode de vie sain | ||||
Se soucie d’être en bonne santé | 0,7 (0,4 à 1,2) | – | 0,4 (0,3 à 0,7)Note de bas de page c | – |
Se soucie d’être actif physiquement | 0,8 (0,6 à 1,3) | – | 0,6 (0,4 à 0,9)Note de bas de page c | – |
Se soucie de manger sainement | 0,8 (0,6 à 1,2) | – | 0,5 (0,4 à 0,7)Note de bas de page c | – |
Se soucie d’aller au lit à l’heure | 0,6 (0,5 à 0,8)Note de bas de page c | – | 0,6 (0,4 à 0,8)Note de bas de page c | – |
Alimentation saine | ||||
Fruits et légumes | – | 0,3 (−0,1 à 0,7) | – | 0,1 (−0,4 à 0,6) |
Lait et substituts | – | 0,1 (−0,1 à 0,4) | – | −0,4 (−0,7 à −0,1)Note de bas de page c |
Céréales et produits céréaliers | – | 0,6 (−0,1 à 1,2) | – | 0,2 (−0,6 à 1) |
Viande et substituts | – | 0,1 (−0,2 à 0,4) | – | −0,4 (−0,7 à −0,1)Note de bas de page c |
DQI-I | – | 2,6 (1,4 à 3,7)Note de bas de page c | – | 3,6 (2,2 à 5,1)Note de bas de page c |
Diversité de l’alimentation | – | 3,7 (3,2 à 4,3)Note de bas de page c | – | 3,1 (2,3 à 3,8)Note de bas de page c |
Boissons sucrées | – | −0,1 (−0,4 à 0,2) | – | 1,2 (0,8 à 1,6)Note de bas de page c |
Quantité totale de sucre | – | 9,2 (−2,1 à 20,5) | – | 0,1 (−14,4 à 14,6) |
Activité physique | ||||
Nombre de pas | – | 8,9 (−251,6 à 269,5) | – | – |
PAQ-C | – | – | – | −0,0 (−0,1 à 0,1) |
Temps passé devant un écran | ||||
Temps passé devant la télévision | – | −0,4 (−0,8 à −0,1)Note de bas de page c | – | 0,4 (0,1 à 0,7)Note de bas de page c |
Temps consacré aux jeux vidéo | – | −0,3 (−0,8 à 0,1) | – | 0,6 (0,2 à 1,0)Note de bas de page c |
Temps passé sur le téléphone portable | – | 0,1 (−0,3 à 0,5) | – | 0,6 (0,2 à 1,0)Note de bas de page c |
Poids | ||||
% en surpoids (sans obésité) | 1,0 (0,8 à 1,2) | – | – | – |
% en état d’obésité | 1,0 (0,8 à 1,2) | – | – | – |
Santé mentale et bien-être | ||||
Score cumulatif | −0,7 (−1,3 à −0,1)Note de bas de page c | – | −1,0 (−1,6 à −0,4)Note de bas de page c | – |
Abréviations : APIME, activité physique d’intensité modérée à élevée; DQI-I, Diet Quality Index – International; IC, intervalle de confiance; PAQ-C, Physical Activity Questionnaire for Older Children; RC, rapport de cotes.
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La consommation de lait et substituts et de viande et substituts a diminué d’environ 0,4 portion entre 2016 et 2020-2021, tandis que le nombre de boissons sucrées a augmenté de manière statistiquement significative. Les changements dans la consommation de fruits et légumes n’ont pas été statistiquement significatifs. Par rapport à 2016, le DQI-I a présenté une augmentation de l’ordre de 2,6 en 2018 et de 3,6 en 2020-2021. De même, la diversité de l’alimentation s’est révélée plus élevée en 2018 et 2020-2021 qu’en 2016.
Par rapport à 2016, les élèves de 2018 étaient moins susceptibles de passer du temps à regarder la télévision, à jouer à des jeux vidéo et à utiliser un téléphone portable, et ceux de 2020-2021 l’étaient davantage. Aucun changement en matière d’activité physique et de statut pondéral n’a été observé au cours des quatre années où des observations ont été réalisées.
La santé mentale et le bien-être en 2018 et en 2020-2021 étaient significativement inférieurs sur le plan statistique par rapport aux valeurs de référence de 2016.
Analyse
Au cours des deux premières années de mise en œuvre du programme APPLE Schools dans les collectivités rurales et éloignées du Nord, nous avons observé une augmentation modeste de la consommation de fruits et légumes et une diminution du temps passé devant un écran (temps passé à regarder la télévision, à jouer à des jeux vidéo et à utiliser un téléphone portable). Toutefois, ces changements positifs n’ont pas été maintenus au cours des années suivantes de mise en œuvre, années qui ont coïncidé avec la pandémie de COVID-19. Entre 2016 et 2020-2021, nous avons constaté une diminution progressive dans la connaissance des recommandations en matière d’activité physique, dans les attitudes envers un mode de vie sain ainsi que dans la santé mentale et le bien-être.
En 2012, nous avions conclu qu’un programme de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire (une « pratique exemplaire ») qui s’était révélé efficace dans un milieu rural de l’est du Canada (en Nouvelle-Écosse) était transférable dans un milieu essentiellement urbain d’une province de l’ouest (Alberta)Note de bas de page 6Note de bas de page 8. Dans ce nouveau cadre, nous avons démontré que la « pratique subséquente » (nouvellement nommée APPLE Schools) était efficace pour augmenter la consommation de fruits et légumesNote de bas de page 8, augmenter les niveaux d’activité physiqueNote de bas de page 8Note de bas de page 9, prévenir l’obésité infantileNote de bas de page 8 et réduire les inégalités en matière de santéNote de bas de page 22, tout en étant économique et rentableNote de bas de page 23.
Dans cette étude, nous avons voulu vérifier si cette « pratique exemplaire » était également transférable aux collectivités rurales et éloignées du Nord. Nous avons connaissance de plusieurs études ayant analysé les effets particuliers d’interventions de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire dans les collectivités rurales (projet « It’s Your Move! »Note de bas de page 24) et défavorisées (projet Prevention of Overweight among Pre-school and School ChildrenNote de bas de page 25), mais aucune étude n’a, à notre connaissance, pleinement pris en compte les caractéristiques très spécifiques des collectivités ciblées. Dans ces collectivités rurales et éloignées du Nord vivent des Autochtones bataillant contre le traumatisme infligé par la colonisation et le système des pensionnatsNote de bas de page 26, ce qui alimente probablement le scepticisme existant à l’égard des écoles et des programmes gérés par des intervenants de l’extérieur. Certaines collectivités sont accessibles par voie aérienne seulement ou sont tellement éloignées (jusqu’à 200 km du centre de population le plus proche) que l’accès aux aliments et en particulier à des produits frais est très limité. Dans ces collectivités, les comportements liés à un mode de vie malsain sont particulièrement répandus, de même que des résultats médiocres sur le plan de la santé mentale et du bien-êtreNote de bas de page 27Note de bas de page 28, et le roulement élevé des enseignants rend difficile un changement durable de la culture scolaireNote de bas de page 29. Certaines de ces collectivités ont également été touchées par le feu de forêt de Horse River et l’évacuation qui en a découlé en mai 2016Note de bas de page 30 et par les ralentissements économiques causés par les fortes baisses des prix du pétrole en 2018 et au début de 2020Note de bas de page 31. En outre, la pandémie de COVID-19, qui a débuté en mars 2020, a touché ces collectivités de manière disproportionnéeNote de bas de page 32.
Malgré ces difficultés, le programme APPLE Schools a réussi à améliorer certains comportements des élèves. La diversité de l’alimentation, promue dans le nouveau Guide alimentaire canadienNote de bas de page 33, a été améliorée. La qualité de l’alimentation et la consommation de fruits et légumes se sont améliorées au cours des deux premières années du programme, le nombre de portions de fruits et légumes, particulièrement faible à 3,1 portions/jour en 2016 (le Guide alimentaire canadien de 2007 recommande 5 à 6 portions par jour dans ce groupe d’âgeNote de bas de page 34), ayant augmenté de 0,3 pour atteindre 3,4 portions par jour en 2018. Cette modeste augmentation n’est pas statistiquement significative et s’est révélée plus faible que celle précédemment rapportée pour le programme APPLE Schools dans des écoles essentiellement urbaines (une augmentation de 0,5 portion par jour, de 4,6 portions au départ à 5,1 portions par jour deux ans plus tardNote de bas de page 8). Les scores moyens de qualité de l’alimentation ont augmenté, passant de 53,9 en 2016 à 56,4 en 2018, ce qui reste nettement inférieur aux scores moyens de 62 et plus dans les quartiers urbains défavorisés sur le plan socioéconomiqueNote de bas de page 8. La consommation totale de sucre a augmenté de 9,3 g par jour, passant de 96,9 g par jour en 2016 à 106,2 g par jour en 2018. Cette augmentation n’est pas attribuable au sucre naturellement présent dans les fruits et légumes : même si une hausse de 0,3 portion par jour pourrait correspondre à des fruits à forte teneur en sucre, cela ne représenterait qu’environ 35 % de l’augmentation de la consommation totale de sucre. Ce sont donc plutôt principalement les sucres ajoutés et non les sucres naturels qui ont contribué à l’augmentation de la quantité totale de sucre.
Vu l’ampleur de la mauvaise alimentation chez les enfants de ces collectivités et le peu d’améliorations obtenues à cet égard, il paraît nécessaire d’adapter encore plus la prestation des programmes, par exemple en s’associant aux intervenants locaux, afin d’améliorer l’accessibilité et l’abordabilité d’une gamme variée d’aliments sainsNote de bas de page 35. Les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur la sécurité alimentaire, conjuguées à un accès réduit aux produits frais en raison des restrictions imposées aux déplacements interprovinciaux et au transport, peuvent avoir mené à une consommation accrue d’aliments transformés et ultra-transformésNote de bas de page 36Note de bas de page 37, sans doute à l’origine des changements observés entre 2018 et 2020-2021. La diminution prononcée de la consommation de fruits et légumes et l’augmentation de la consommation de boissons sucrées pendant la pandémie illustrent la précarité de comportements sains encore peu ancrés et la vulnérabilité des collectivités nordiques face aux facteurs de stress externes.
Avant la pandémie, seuls 37,6 % des enfants canadiens respectaient les recommandations issues des Directives canadiennes en matière de mouvement sur 24 heures en matière d’activité physique, 70,7 % celles en matière de sommeil et 28,5 % celles en matière de temps d’écranNote de bas de page 38. Divers rapports commencent à révéler les conséquences de la pandémie de COVID-19 sur ces comportementsNote de bas de page 39Note de bas de page 40Note de bas de page 41Note de bas de page 42. Dans les collectivités du Nord, après le succès initial d’une diminution du temps d’écran, les gains réalisés entre 2018 et 2020-2021 ont probablement été annulés par la pandémie de COVID-19, ce que ces rapports sous-entendentNote de bas de page 39Note de bas de page 40. La fermeture des écoles, des terrains de jeux et des installations récréatives pendant le confinement a laissé aux enfants peu d’options, voire aucune, pour bouger, se divertir et interagir avec leurs pairsNote de bas de page 43. On s’attendait à des résultats négatifs en ce qui concerne le temps passé devant un écran, mais s’il est utilisé pour socialiser en général et dans le contexte de la pandémie en particulier, le temps d’écran ne doit pas nécessairement être considéré comme un comportement négatif lié au mode de vie. En effet, il peut être consacré à encourager l’activité physique (jeux vidéo actifsNote de bas de page 44), en particulier lorsqu’il est associé à la possibilité d’interaction sociale avec des pairs.
Bien que l’amélioration des connaissances et des attitudes des élèves à l’égard d’un mode de vie sain soit un aspect crucial de l’approche APPLE Schools, nous n’avons pas observé de changements positifs en la matière dans la notre évaluation. La littérature ne corrobore pas cette observation. Deux études récentes ont confirmé une augmentation des connaissances et des attitudes positives chez les élèves fréquentant des écoles exposées à des programmes de promotion de la santéNote de bas de page 45Note de bas de page 46. L’absence d’amélioration des connaissances et des attitudes des élèves soulève des interrogations quant à la portée du programme et à l’ampleur de l’adaptation culturelle et logistique nécessaire à une mise en œuvre réussieNote de bas de page 47. L’adaptation du programme en fonction du roulement du personnel dans les écoles secondaires peut s’avérer particulièrement difficile, car la continuité de la direction et du personnel enseignant est essentielle pour faire évoluer la culture scolaire de façon durable. Cette portée limitée pourrait expliquer l’absence d’amélioration de la santé mentale et du bien-être et, parallèlement, les ralentissements économiques et la pandémie de COVID-19Note de bas de page 48Note de bas de page 49 pourraient avoir entraîné quant à eux une détérioration de la santé mentale et du bien-être. La portée du programme est aussi tributaire de la « dose d’activités de programme » : une revue systématique récente sur l’efficacité de l’Approche globale de la santé en milieu scolaire a attiré l’attention sur l’importance de la « dose d’intervention », en montrant que les interventions « à faible dose » étaient généralement moins efficacesNote de bas de page 50. La mise en œuvre du programme APPLE Schools dans les collectivités du Nord, facilitée par un intervenant en santé scolaire représentant 0,5 ETP pour les deux premières années et 0,2 ETP pour la troisième année en raison de restrictions budgétaires, a connu une efficacité limitée. En revanche, la mise en œuvre d’APPLE Schools en milieu urbain, facilitée par un intervenant à temps plein pendant les deux premières années, a été efficaceNote de bas de page 8Note de bas de page 9. La « dose d’activités de programme » a sans doute été trop faible, en particulier à la lumière des besoins et des défis démesurés dans les collectivités du Nord.
Points forts et limites
Les points forts de cette étude sont l’obtention de taux de participation relativement élevés malgré sa réalisation dans des régions difficiles à atteindre, ainsi que l’utilisation d’instruments d’enquête validés dans le groupe d’âge ciblé.
Plusieurs limites méritent d’être prises en considération. Les huit écoles du programme APPLE Schools ont été sélectionnées par les administrations scolaires plutôt qu’au hasard, ce qui limite la généralisabilité des résultats. L’absence d’écoles « témoins » limite notre capacité à attribuer les changements observés au programme plutôt qu’à tout événement concomitant comme la pandémie. Il convient de noter que le recours à des écoles « témoins », qui nécessiterait trois vagues de collecte de données dans des milieux difficiles à atteindre où aucun programme n’est offert, est perçu par de nombreuses parties prenantes comme n’étant ni acceptable ni éthique. En outre, en raison de la pandémie, les enquêtes ont été menées pendant les mois d’hiver en 2020-2021, alors que les données ont été recueillies comme prévu au printemps en 2016 et en 2018, ce qui peut avoir introduit une variation saisonnière dans les comportements liés au mode de vie.
Conclusion
Certains changements positifs dans les comportements liés à la santé (diversité de l’alimentation, consommation de fruits et légumes, temps passé devant un écran) ont été relevés au cours des deux premières années suivant la mise en œuvre du programme APPLE Schools dans huit écoles de collectivités rurales et éloignées du Nord. Toutefois, ces changements n’ont pas persisté après l’adoption des mesures de santé publique liées à la COVID-19, ce qui illustre la précarité des changements récents de comportements sur le plan de la santé et la vulnérabilité de ces collectivités face aux facteurs de stress externes. À la lumière des multiples défis qu’amène la promotion de la santé dans les collectivités rurales et éloignées du Nord, il semble essentiel d’envisager une adaptation systématique et proactiveNote de bas de page 47 ainsi qu’une intensité accrue et une durée prolongée des programmes afin de contribuer à une amélioration durable de la santé mentale, du bien-être et des comportements liés à un mode de vie sain.
Remerciements
La mise en œuvre du programme dans les écoles de collectivités rurales et éloignées du Nord et la collecte des données ont été financées par l’Agence de santé publique du Canada (subvention no 1516-HQ-000071), avec un financement de contrepartie de divers partenaires (voir APPLESchools.ca). La collecte de données en 2020-2021 et les analyses de cette étude ont également été soutenues par les fonds d’exploitation attribués à KM et à PJV par les Instituts de recherche en santé du Canada (subvention no 172685). KM est titulaire de la chaire de la Fondation de la famille Murphy en interventions précoces.
Les auteurs remercient les élèves, les parents/tuteurs et les directeurs d’école de leur participation à cette recherche. Ils remercient également les enseignants, les intervenants et champions de la santé en milieu scolaire, les assistants de projet et le personnel du programme APPLE Schools pour avoir facilité la recherche, en particulier Tina Skakun, Katherine Dekker et Landra Walker pour leur implication majeure dans la coordination et la conduite de la collecte des données. Ils remercient également Connie Lu pour la gestion des données et Shannon Sim pour son aide dans la révision du manuscrit.
Conflit d’intérêts
Les auteurs n’ont aucun conflit d’intérêt réel ou perçu à divulguer en rapport avec cet article.
Contributions des auteurs et avis
Tous les auteurs ont contribué à la conception de l’étude, ont rédigé et révisé l’article et ont approuvé à la version soumise pour publication. KM et PV ont conçu l’étude et la méthodologie et ont assuré l’obtention du financement et des ressources. MK, KM et PV ont élaboré le plan d’analyse statistique et MK a effectué toutes les analyses de données. TT a validé et analysé les données sur l’alimentation et a contribué à l’interprétation des résultats relatifs à l’alimentation. JF a contribué à la conception et l’interprétation de l’étude du point de vue de la pratique. JD et PV ont géré les données, les ont vérifiées et ont rédigé la version initiale du manuscrit. Tous les auteurs ont revu et approuvé la version finale du manuscrit.
Le contenu de l’article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que les auteurs; ils ne correspondent pas nécessairement à ceux du gouvernement du Canada.
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