I-Track: surveillance améliorée du VIH et de l’hépatite C ainsi que des comportements à risque chez les utilisateurs de drogues injectables au Canada - Rapport sur la phase 3 (2010-2012)

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Résumé

Introduction

L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) est responsable de la coordination de la lutte contre le VIH/sida, tel que décrit dans l’Initiative fédérale de lutte contre le VIH/sida au Canada (IF). L’un des éléments clés de l’IF est l’acquisition des connaissances, ce qui comprend la mise en œuvre de programmes de surveillance sentinelle pour les populations vulnérables. Depuis 2002, le Centre de la lutte contre les maladies transmissibles et les infections de l’Agence de la santé publique du Canada a élaboré et mis en place le système de surveillance I-Track, en collaboration avec les instances gouvernementales provinciales et locales de santé et avec les organisations communautaires.

Principaux objectifs de I-Track (Phase 3) 

I-Track est un système de surveillance accrue qui assure le suivi du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et de l’hépatite C ainsi que des comportements à risque qui y sont associés chez les utilisateurs de drogues injectables au Canada, et ce, en associant la surveillance biologique à la surveillance comportementale. Les principaux objectifs de I-Track visent à décrire :

  • la prévalence du VIH et de l’hépatite C;
  • l’utilisation des drogues, des drogues injectables et des comportements sexuels;
  • le comportement en matière de dépistage du VIH et de l’hépatite C;
  • les antécédents de soins et de traitement du VIH et de l’hépatite C;
  • les connaissances de base des comportements liés au VIH, des modes de transmission et des stratégies de réduction des risques;
  • les tendances en matière de prévalence et des principales mesures comportementales au fil du temps.

Aperçu des méthodes employées par i-track

Le système I-Track comprend la mise en œuvre de sondages périodiques transversaux chez les utilisateurs de drogues injectables. Ces enquêtes sont menées dans des sites sentinelles à travers le Canada. L’information sur les caractéristiques démographiques, l’utilisation de drogues, les comportements sexuels et d’injection à risque, le dépistage du VIH et de l’hépatite C et les antécédents de traitement est collectée grâce à des questionnaires remplis par un intervieweur lors de rencontres en personne. Un échantillon biologique (échantillon de sang séché ou salive) est ensuite prélevé pour la détection d’anticorps contre le VIH et l’hépatite C.

Les sites sentinelles ont la possibilité d’ajouter des questions propres à leur site pour aborder des enjeux ou caractéristiques de programme spécifiques à la population cible.

Les participants sont recrutés au moyen d’un échantillonnage de commodité selon le lieu. La participation est volontaire, totalement anonyme, et requiert le consentement éclairé des sujets.

Objectif du rapport

Ce rapport présente les résultats descriptifs des enquêtes de la phase 3 de I-Track qui ont été menées entre le 26 avril 2010 et le 7 août 2012 dans les sites sentinelles participants au Canada. Les résultats visent à orienter les efforts en matière de prévention et de contrôle du VIH, l’élaboration d’une politique de santé publique et l’évaluation de programmes. Ils offrent aussi des données de base pour formuler des questions pour des analyses plus complexes.

Analyse des données

Au total, 2 687 participants admissibles pour lesquels les données étaient complètes étaient disponibles pour les analyses de ce rapport. Les données sont affichées sous forme de tableau pour pouvoir effectuer des comparaisons entre les sites sentinelles et avec l’échantillon national I-Track dans son ensemble. Sauf indication contraire, les résultats sont fondés sur la déclaration des participants à l’enquête à propos de leurs comportements au cours des 6 mois précédant leur entrevue. Les analyses ont été stratifiées selon le sexe lorsque les chiffres étaient assez grands pour en permettre l’interprétation. Aucune procédure statistique n’a été utilisée pour comparer les résultats entre les sites sentinelles ni n’a été appliquée aux données de ce rapport.

Résumé des résultats de la phase 3 de I-Track

        Aperçu des participants et caractéristiques socio-démographiques

  • Des 2 687 participants à la phase 3 de I-Track, 68,2 % étaient de sexe masculin et 55,6 % n’avaient pas terminé leurs études secondaires. L’âge moyen était de 39,4 ans.
  • La majorité de ces participants étaient nés au Canada (96,0 %) et possédaient divers antécédents ethnoculturels; 36,1 % se sont identifiés comme Autochtones et 66,4 % comme Blancs.
  • Plus d’un tiers ont déclaré un revenu mensuel entre 500 $ et 999 $ (39,7 %). La principale source de revenus déclarée était l’aide sociale (40,3 %).
  • Près d’un cinquième ont déclaré avoir vécu dans plus d’une ville au cours des 6 mois précédant l’entrevue (17,6 %), ce qui indique que cette population était plutôt mobile.
  • Plus de la moitié ont déclaré avoir vécu dans un logement stable à un moment donné au cours des 6 mois précédant l’entrevue (61,3 %).

        Comportements d’utilisation de drogues et d’injection

  • Parmi les drogues généralement injectées, on trouve la cocaïne (64,3 %), l’hydromorphone (48,3 %), la morphine non prescrite (47,0 %), l’oxycodone (37,7 %), l’héroïne (26,7 %) et le crack (24,8 %).
  • La cocaïne était la drogue la plus souvent injectée au cours des 6 mois (29,4 %) et du mois (24,8 %) précédant l’entrevue.
  • Un peu plus de la moitié des participants ont déclaré avoir consommé des drogues injectables le plus souvent dans leur appartement ou dans leur maison (53,6 %); une grande proportion des participants ont également déclaré s’être injecté des drogues dans les lieux publics (rue, parc, local vacant, métro, passage inférieur, toilettes, cage d’escalier, etc. : 16,1 %).
  • Au total, 15,5 % des participants ont déclaré s’être injecté des drogues avec des aiguilles et/ou des seringues usagées dans les 6 mois précédant l’entrevue. De ces participants, plus de la moitié ont déclaré avoir emprunté du matériel le plus souvent à des partenaires sexuels réguliers (50,5 %).
  • Un peu plus du tiers ont déclaré s’être injecté avec de l’équipement usagé comme de l’eau, des filtres, des réchauds, des garrots, de la ouate, des cuillères et des acidifiants (34,5 %); près de la moitié ont déclaré avoir emprunté cet équipement le plus souvent à des amis ou à des personnes qu’ils connaissaient bien (46,8 %).

        Comportements sexuels

  • Les participants à la phase 3 de I-Track ont signalé des comportements sexuels à risque élevé, comme des partenaires sexuels multiples, l’utilisation irrégulière du condom et le travail du sexe.
  • La proportion de participants ayant signalé avoir utilisé un condom la dernière fois qu’ils ont eu un rapport sexuel était de 36,6 %, proportion plus élevée que le taux mondial de 2010 rapporté par ONUSIDA (27 %).
  • En général, l’utilisation du condom pendant les relations sexuelles avec pénétration était plus fréquente que pendant les relations orales. L’utilisation du condom était moins souvent pratiquée avec les partenaires sexuels occasionnels ou réguliers qu’avec les partenaires sexuels clients ou rémunérés.

        Séroprévalence et dépistage de l’hépatite C et du VIH

  • Parmi les participants ayant fourni un échantillon biologique en quantité suffisante pour effectuer un dépistage, 11,2 % ont obtenu un résultat positif au test du VIH, proportion variant de 0,5 % à Kingston à 17,4 % dans le réseau SurvUDI.
  • La séroprévalence du VIH était de 10,4 % chez les femmes et de 11,6 % chez les hommes. Chez les femmes, la proportion de personnes ayant obtenu des résultats positifs au test du VIH était la plus élevée à Edmonton (24,5 %). Chez les hommes, la proportion de personnes ayant obtenu des résultats positifs au test du VIH était la plus élevée à Prince George (17,6 %) et dans le réseau SurvUDI (18,6 %).
  • Un cinquième des personnes ayant obtenu un résultat positif au test de laboratoire pour le VIH ignoraient leur statut séropositif (20,0 %).
  • Parmi les participants ayant fourni un échantillon biologique en quantité suffisante pour effectuer un dépistage, l’exposition à vie à l’infection par le virus de l’hépatite C était de 68,0 %, proportion variant de 45,2 % à Thunder Bay à 79,1 % à London; les proportions étaient semblables chez les hommes et les femmes.
  • Un cinquième des personnes ayant obtenu un résultat positif au test de laboratoire pour les anticorps contre le virus de l’hépatite C ignoraient leur statut (20,2 %).
  • La proportion de participants séropositifs à la fois pour le VIH et l’hépatite C était de 9,5 %. Les personnes séropositives pour le VIH uniquement ne représentaient qu’une petite proportion des participants (1,7 %), tandis que plus de la moitié des participants étaient séropositifs pour l’hépatite C uniquement (58,4 %).
  • La majorité des participants ont déclaré avoir déjà subi un test de dépistage du VIH ou de l’hépatite C (92,9 % et 91,3 %, respectivement).

        Antécédents de soins et de traitement du VIH et de l’hépatite C

  • Parmi les participants ayant déclaré avoir déjà obtenu un résultat positif au test du VIH, une grande proportion ont déclaré être suivis par un médecin (89,9 %) et 85,9 % prenaient actuellement des médicaments prescrits pour leur infection au VIH.
  • Ces mesures affichaient de plus petites proportions pour les participants ayant déclaré avoir reçu un résultat positif au test de l’hépatite C (42,5 % et 15,3 %, respectivement).

Forces et faiblesses

Les données de I-Track sont collectées au moyen d’enquêtes transversales et, bien qu’il ne soit pas possible d’examiner directement la causalité, ces données de surveillance offrent une précieuse source d’information qui est cruciale pour la planification des services et programmes de traitement et de prévention à l’échelle locale, provinciale et nationale.

I-Track utilise des méthodes d’échantillonnage de commodité non aléatoire pour surmonter les difficultés d’accès inhérentes à cette population difficile à atteindre. Par conséquent, ces résultats de surveillance peuvent ne pas être représentatifs de l’ensemble des utilisateurs de drogues injectables au Canada.

À l’exception des résultats en laboratoire, les résultats de ce rapport sont fondés sur des données autodéclarées, qui peuvent être sujettes à un biais de désirabilité sociale. Pour cette raison, il est possible que certains comportements à risque aient été sous-déclarés.

Les principaux objectifs du système de surveillance, ses questions clés, ses critères d’inclusion, ses stratégies d’échantillonnage et de recrutement ont été normalisés et mis en œuvre systématiquement, permettant ainsi de comparer les sites sentinelles au cours des multiples phases de mise en œuvre de l’enquête. Toutefois, les résultats de ce rapport doivent être interprétés avec précaution, car les variations régionales observées peuvent ne pas refléter les données à l’échelle nationale et toute différence dans les comparaisons entre les phases transversales peut aussi être due à des variations régionales ou temporelles. En outre, aucune procédure statistique n’a été utilisée pour comparer les résultats entre les sites sentinelles et aucun ajustement n’a été réalisé selon les variations de taille des sites sentinelles.

Conclusions

Les résultats présentés dans ce rapport offrent un point de référence important pour surveiller les tendances au niveau des caractéristiques démographiques, de l’utilisation des drogues, des comportements sexuels et d’injection à risque, des tendances en matière de dépistage et de la prévalence des infections au VIH et à l’hépatite C chez les utilisateurs de drogues injectables au Canada.

Les résultats des sites sentinelles participants ont confirmé que la prévalence des infections au VIH et à l’hépatite C restait élevée parmi les utilisateurs de drogues injectables. De nombreux utilisateurs de drogues injectables ont signalé des pratiques d’injection qui réduisent le risque, ainsi que des pratiques sexuelles sûres. Toutefois, le nombre de comportements sexuels et d’injection à risque signalés suggère que les utilisateurs de drogues injectables représentent encore un groupe présentant un risque élevé d’infection et de transmission du VIH au Canada. Ces résultats soulignent également l’importance du dépistage régulier et intégré du VIH et de l’hépatite C pour les utilisateurs de drogues injectables.

La connaissance de sa séropositivité pour le VIH chez les utilisateurs de drogues injectables n’est pas aussi élevée que dans l’ensemble de la population canadienne séropositive pour le VIH. Ces lacunes en matière de connaissances pourraient être résolues au moyen de communications de promotion de la santé appropriées, ce qui pourrait entraîner une sensibilisation plus élevée de la séropositivité à la fois pour le VIH et l’hépatite C et pourrait réduire le fardeau de l’infection au VIH chez les utilisateurs de drogues injectables.

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