Page 12 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – le chlorure de vinyle
Partie II. Science et considérations techniques (continué)
Le chlorure de vinyle est classé comme étant cancérogène pour l'être humain (cancérogène du groupe 1) avec une preuve suffisante de cancérogénicité chez l'humain et chez les animaux. Le chlorure de vinyle peut contaminer l'eau potable à la suite de son rejet dans l'eau à la source par des installations de fabrication de produits chimiques et de latex, ou à la suite du relargage de monomères résiduels que renferment les conduites en PVC. Du chlorure de vinyle peut aussi être formé dans les eaux souterraines et dans l'environnement par la biodégradation de solvants synthétiques comme le trichloroéthylène, le trichloroéthane et le tétrachloroéthylène.
Les effets de l'exposition au chlorure de vinyle ont été étudiés chez les humains et les animaux, et des résultats similaires ont été obtenus chez toutes les espèces. Des effets sur le foie et des effets neurologiques ont été invariablement observés chez les travailleurs ainsi que chez plusieurs espèces animales après une exposition au chlorure de vinyle pendant diverses durées. Le cancer du foie est l'effet le plus grave qui découle de l'exposition par voie orale (aliments et eau) ou par inhalation au chlorure de vinyle, d'après la concordance des résultats d'études épidémiologiques et d'études sur des animaux de laboratoire. Même si d'autres types de tumeurs ont été constatés chez des animaux après exposition au chlorure de vinyle, le type de tumeurs observées varie beaucoup d'une espèce à l'autre.
Étant donné la volatilité du chlorure de vinyle, on a eu recours à une modélisation PBPK pour effectuer une évaluation de l'exposition multivoies, cela pour caractériser l'exposition additionnelle par voie cutanée et par inhalation subie lors d'une douche ou d'un bain. Le modèle PBPK pour l'humain a établi à 1,9 L-eq la contribution associée à l'exposition par voie cutanée lors d'un bain ou d'une douche, et à 0,4 L-eq la contribution associée à l'exposition par inhalation lors d'un bain ou d'une douche; si on ajoute à cela une consommation de 1,5 L d'eau potable par jour, valeur normale au Canada, l'exposition quotidienne totale au chlorure de vinyle par l'eau potable est estimée à 3,8 L-eq. Cette exposition quotidienne a été utilisée pour l'évaluation des risques de cancer et des autres risques.
On a eu recours à la modélisation PBPK pour calculer l'excès de risque de cancer d'après la dose interne de métabolites de chlorure de vinyle chez les humains exposés au chlorure de vinyle par l'eau potable. Les résultats des études menées chez les animaux laissent supposer que les très jeunes enfants (de moins de cinq semaines) pourraient être plus sensibles aux effets cancérogènes du chlorure de vinyle que les adultes; en fait, les données scientifiques actuelles suggèrent que les enfants de moins de cinq semaines seraient deux fois plus sensibles à l'exposition au chlorure de vinyle que le reste de la population. Par conséquent, les concentrations représentant un risque « essentiellement négligeable » de tumeurs du foie sur toute la durée de vie se situeraient, pour les enfants de moins de 5 semaines, entre 0,04 et 0,4 µg/L. Santé Canada considère comme « essentiellement négligeable » un accroissement se situant entre un nouveau cas de cancer de plus que la valeur normale par 100 000 personnes à un nouveau cas de plus que la valeur normale par million de personnes (soit 10−5 à 10−6). Cette concentration protège contre les effets cancérogènes et les effets autres que cancérogènes qui découlent de l'exposition au chlorure de vinyle présent dans l'eau potable.
Le strippage à l'air et l'ATG sont deux procédés de traitement d'échelle municipale qui permettent d'abaisser la concentration de chlorure de vinyle dans l'eau potable à des valeurs inférieures à 1 µg/L. D'autres moyens, comme l'ozonation et les POA, sont réputés efficaces pour réduire les concentrations de chlorure de vinyle à des valeurs inférieures à 0,5 µg/L.
Il n'existe pas de dispositifs de traitement actuellement certifiés pour l'élimination du chlorure de vinyle dans l'eau potable. Toutefois, une étude menée sur les dispositifs de traitement faisant appel à des filtres au charbon activé a montré que ceux-ci pourraient être efficaces pour réduire les concentrations de chlorure de vinyle jusqu'à des valeurs inférieures à 2 µg/L. Santé Canada recommande que les tuyaux en PVC utilisés pour la distribution de l'eau potable soient certifiés conformes NSF/ANSI 61, ce qui permet de limiter le relargage de chlorure de vinyle en fonction d'une limite réglementaire harmonisée de 2 µg/L.
Une CMA de 0,002 mg/L (2,0 µg/L) est établie pour le chlorure de vinyle sur la base des considérations suivantes :
- La CMA doit être mesurable. L'U.S. EPA a établi une CMA de 0,002 mg/L, fondé sur la capacité des laboratoires à mesurer les concentrations de chlorure de vinyle, en utilisant des méthodes approuvées et en respectant des limites raisonnables d'exactitude et de précision. Il n'existe pas de mécanisme similaire au Canada.
- La CMA doit pouvoir être atteinte à un coût raisonnable. Les techniques de traitement à l'échelle municipale permettent de réduire systématiquement les concentrations de chlorure de vinyle à 0,5 µg/L, valeur inférieure à la CMA de 2 µg/L. À l'échelle résidentielle, même s'il n'existe pas de dispositifs actuellement certifiés pour éliminer le chlorure de vinyle de l'eau, on s'attend à ce que l'utilisation de deux dispositifs de traitement ou plus faisant appel à des techniques telles que le charbon activé permette de ramener les concentrations de chlorure de vinyle sous la CMA.
- La norme NSF/ANSI 61 permet de limiter le relargage de chlorure de vinyle dans l'eau potable en assurant que les matériaux satisfont à une CPPI de 0,0002 mg/L ou moins (NSF/ANSI, 2012). La CPPI est établie comme un dixième de la valeur réglementaire pour l'eau potable, valeur harmonisée des États-Unis et du Canada.
En se fondant sur le caractère réalisable des traitements et sur les risques pour la santé qui sont associés à l'exposition au chlorure de vinyle dans l'eau potable, le Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable a établi une CMA de 0,002 mg/L (2,0 µg/L). On estime le risque sur la durée de vie qui est associé à l'ingestion d'eau contenant la CMA de chlorure de vinyle à 5,0 × 10−5 , ce qui est supérieur à la gamme des risques « essentiellement négligeables ». Cette valeur est basée sur la capacité analytique des laboratoires; comme elle dépasse la valeur basée sur la santé assurant la protection de la santé des jeunes enfants, tout doit être mis en œuvre pour maintenir des concentrations de chlorure de vinyle aussi basses qu'il soit raisonnablement possible d'atteindre (ALARA).
Santé Canada continuera, dans le cadre de son processus continu de révision des recommandations, à suivre les nouvelles recherches à ce sujet, et recommandera au besoin toute modification jugée appropriée.
Détails de la page
- Date de modification :