ARCHIVÉE - Sommaire de l'examen scientifique de Santé Canada sur l'allégation santé autorisée aux É.U., visant les graisses alimentaires et le cancer

Bureau des sciences de la nutrition
Direction des aliments, Direction générale des produits de santé et des aliments
Santé Canada

Février 2005

Résumé

Depuis que l'allégation santé visant les graisses alimentaires et le cancer a été acceptée aux États-Unis en 1993, de nouvelles preuves sont venues affaiblir les arguments en faveur de cette allégation.

Les recherches visant à actualiser les preuves ont été réalisées dans Medline pour la période allant de 1993 à décembre 2003 inclusivement, dans la base Food Science and Technology Abstracts pour la période de 1997 à 2002 et dans Current Contents pour la période de 1998 à 2002. Les termes clés fat, dietary fat, fat intake, saturated fat, saturated fatty acids et meta analysis (lipides, graisses alimentaires, apport en lipides, lipides saturés, acides gras saturés et méta-analyse) ont été recoupés avec les termes cancer, breast cancer, prostate cancer, gastric cancer, colon cancer, colorectal cancer, rectal cancer, lung cancer, oesophagus cancer, endometrial cancer, testicular cancer and carcinogenesis (cancer, cancer du sein, cancer de la prostate, cancer de l'estomac, cancer du côlon, cancer colorectal, cancer rectal, cancer du poumon, cancer de l'oesophage, cancer de l'endomètre, cancer du testicule et carcinogenèse). La recherche s'est limitée aux études portant sur des sujets humains et publiées en anglais. Des recherches manuelles ont aussi été réalisées en vue de repérer des études primaires et des recensions signalant des travaux auxquels la recherche électronique n'avait pas donné accès. Les études expérimentales ont été exclues lorsque l'intervention alimentaire avait été menée auprès de sujets ayant reçu un diagnostic de cancer. Chaque étude a été classée selon la méthodologie utilisée et sa qualité a été évaluée à la lumière des Normes de preuve pour l'évaluation des aliments visés par des allégations santé. L'évaluation a porté sur quatre essais comparatifs, dix-huit études de cohortes et 60 études cas-témoins de qualité acceptable (sur 63 qui avaient été repérées).

Plusieurs vastes études de cohortes prospectives ont exploré le lien entre les graisses alimentaires et le risque de cancer, plus particulièrement de cancer du sein, de la prostate et du côlon. Seule une des neuf études de cohortes sur le risque de cancer du sein a associé ce phénomène à la consommation tant de lipides totaux que d'acides gras saturés; alors qu'une autre étude a associé ce risque uniquement à la consommation d'acides gras saturés; deux études ont mis en évidence une association inverse avec les acides gras mono-insaturés et une autre étude a fait ressortir une relation positive avec les acides gras mono-insaturés. Des trois études qui ont évalué la consommation d'acides gras trans, une a associé à ce facteur une augmentation du risque de cancer du sein, une autre lui a associé une diminution du risque de cancer du sein et une autre n'a observé aucun lien entre les deux. Aucune des trois études de cohortes prospectives portant sur le cancer de la prostate n'a associé l'apport en lipides totaux corrigé pour tenir compte de l'apport énergétique au risque total de cancer de la prostate. Huit des neuf études de cohortes sur le cancer du côlon n'ont constaté aucun lien avec l'apport en lipides totaux.

En outre, six rapports de comités d'experts (l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture/l'Organisation mondiale de la santé (FAO/OMS), 1994; le World Cancer Research Fund/l'American Institute for Cancer Research (WCR/AICR), 1997; le Committee on Medical Aspects of Food and Nutrition Policy (COMA), R.-U., 1998 (Gurr, 1998); l'OMS, 1999 (Scheppach et coll.,1999); l'Institute of Medicine (IOM), 2002 et la FAO/l'OMS, 2003) ont été publiés au cours de cette période de même que plusieurs études systématiques. Parmi les rapports de groupes d'experts, le premier, celui de la FAO/l'OMS sur les lipides et les huiles dans la nutrition humaine (1994), a conclu que les études de cohortes et les études cas-témoins ont soulevé des doutes au sujet des études réalisées chez l'animal et sur les liens établis d'un pays à l'autre sur les graisses alimentaires et le cancer du sein, du côlon, du pancréas et de la prostate. Il a toutefois signalé que les études cas-témoins et les études de cohortes présentaient des limites importantes.

Le rapport du WCR/de l'AICR (1997) a conclu à la constance de preuves liant une alimentation riche en lipides totaux à une possible augmentation du risque de cancer du poumon, du côlon et du rectum, du sein et de la prostate. En effet, comme une alimentation riche en lipides accroît le risque d'obésité, il s'agit d'un facteur de risque indirect du cancer, ce risque étant augmenté par l'obésité. Cette conclusion provisoire était fondée sur les premières études cas-témoins qui ont mis en évidence un lien entre la consommation de lipides totaux et ces formes de cancer.

Les auteurs du rapport du COMA (R.-U.) affirment avoir trouvé, au terme d'une analyse rigoureuse de la littérature, peu de données à l'appui de l'existence d'un lien solide entre l'apport en lipides totaux ou en divers acides gras et tout type de cancer (Gurr, 1998).

Dans une déclaration consensuelle émise en 1999 sur la consommation de lipides et ses effets sur le cancer, l'OMS a indiqué que la consommation de lipides est sans doute associée au risque de cancer colorectal et qu'il est impossible, faute de preuves suffisantes, de déterminer le rôle précis des lipides totaux en comparaison de types précis de lipides (Scheppach et coll.,1999).

Selon les recommandations de l'IOM (2002), une fourchette de distribution acceptable des macronutriments (FDAM) dans le cas des lipides se situerait entre 20 et 35 pour cent de l'apport énergétique chez les adultes. La réduction du risque de cancer n'a pas été prise en compte dans l'établissement de la FDAM applicable aux lipides, les données ne permettant pas de définir un niveau de consommation de lipides qui a pour effet de prévenir les maladies chroniques.

Le dernier rapport conjoint de la FAO/l'OMS, intitulé Régime alimentaire, nutrition et prévention des maladies chroniques (2003), a conclu que les éléments de preuve n'indiquent pas l'existence d'un lien entre la consommation de lipides totaux et l'accroissement du risque de cancer du sein, de la prostate, du côlon et du rectum et d'autres formes de cancer.

De manière générale, les données scientifiques à l'appui de l'existence d'un lien entre la consommation de graisses alimentaires et l'incidence du cancer du sein, de la prostate et du côlon ont perdu de leur vigueur au cours des dix dernières années. Bien que les études transversales en population continuent d'apporter des arguments à l'appui de l'existence d'un lien entre le cancer du sein et les types de lipides et entre le cancer colorectal et la consommation de lipides d'origine animale, cette conclusion n'est généralement pas corroborée par les études de cohortes prospectives et les études cas-témoins. Le grand changement observé dans la littérature est l'affaiblissement des arguments à l'appui d'un tel lien, d'après les études cas-témoins, surtout lorsque les risques relatifs et les rapports de cotes ont été rajustés pour tenir compte de l'apport énergétique. De plus, plusieurs vastes études de cohortes réalisées récemment n'ont pas milité en faveur de l'existence d'un lien entre la consommation de graisses alimentaires et le cancer du sein, de la prostate ou du côlon. De plus, on observe un manque de constance accru dans les liens établis entre certains aliments et le cancer. Les preuves à l'appui d'un lien entre la viande, surtout la viande rouge, et le risque de cancer n'ont pas été étayées par des études cas-témoins et des études de cohortes signalées au cours de la dernière décennie.

Les preuves indiquant l'absence de lien entre la consommation de lipides totaux et différents types de cancer l'emportent largement sur les données à l'appui de l'allégation. C'est pourquoi on recommande que le Canada n'accepte pas une allégation santé associant les graisses alimentaires au cancer.

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