Information sur les aliments nouveaux - Canne à sucre CTC175-A

Santé Canada a avisé le Centro de Tecnologia Canavieira qu’il ne s’oppose pas à la vente comme denrée alimentaire du sucre brut et raffiné dérivé de la lignée de canne à sucre CTC175-A. Le Ministère a réalisé une évaluation approfondie de cette variété conformément à ses Lignes directrices sur l'évaluation de l'innocuité des aliments nouveaux. Ces lignes directrices sont fondées sur les principes admis internationalement de l’établissement de l’innocuité d’aliments comportant des caractères nouveaux.

Contexte

Le texte qui suit résume l’avis remis par le Centro de Tecnologia Canavieira ainsi que l’évaluation qu’en a faite Santé Canada. Il ne contient aucun renseignement commercial confidentiel.

1. Introduction

Le Centro de Tecnologia Canavieira a mis au point la canne à sucre CTC175-A afin qu’elle soit résistante aux insectes dans le but de contribuer à la maîtrise des infestations par la mineuse de la canne à sucre. Pour y parvenir, on a eu recours à la technologie de l’ADN recombinant. La canne à sucre doit être cultivée uniquement au Brésil et les ingrédients alimentaires dérivés de la canne à sucre destinés à l’importation par le Canada sont des sucres bruts et raffinés.

Cette évaluation de l’innocuité, dont les scientifiques de la Direction des aliments se sont chargés, a été réalisée conformément aux Lignes directrices relatives à l’évaluation de l’innocuité des aliments nouveaux de Santé Canada. Ces dernières sont fondées sur les démarches visant l’harmonisation avec les directives établies par d’autres autorités réglementaires et reflètent les documents d’orientation internationaux dans ce domaine (p. ex., le Codex Alimentarius). L’évaluation a porté sur la façon dont la canne à sucre CTC175-A a été mise au point, la comparaison de sa composition et de sa qualité nutritionnelle par rapport à celles des variétés non modifiées et, enfin, sa toxicité et son allergénicité éventuelles. Le Centro de Tecnologia Canavieira a déposé des données démontrant que la canne à sucre CTC175-A est tout aussi inoffensive que les variétés de canne à sucre traditionnelle utilisées dans les aliments au Canada et que sa qualité nutritionnelle est la même.

La Direction des aliments assume la responsabilité imposée par la loi de l’évaluation préalable à la mise en marché des aliments nouveaux et des ingrédients alimentaires nouveaux, et la responsabilité en question est exposée en détail au titre 28 du Règlement sur les aliments et drogues. La canne à sucre CTC175-A consommée à des fins alimentaires est considérée comme un aliment nouveau selon la partie suivante de la définition d’aliment nouveau : « c) aliment dérivé d'un végétal, d'un animal ou d'un micro-organisme qui, ayant été modifié génétiquement, selon le cas :

  1. présente des caractères qui n’avaient pas été observés auparavant […]. »

2. Mise au point de la plante modifiée

Le requérant a fourni les renseignements décrivant les méthodes auxquelles il a fait appel pour mettre au point la canne à sucre CTC175-A. Il a aussi présenté les données qui caractérisent la modification génétique qui donne lieu à la lignée de canne à sucre résistant aux insectes au moyen de la cassette d’expression de la protéine insecticide Cry1Ab. De plus, cette lignée de canne à sucre exprime un caractère de sélection spécifique, soit le gène nptII, codant la protéine néomycine-phophotransférase (NPTII) et conférant chez les végétaux la résistance à la kanamycine.

La canne à sucre CTC175-A a été produite par l’application de la transformation biolistique à des cellules embryonnaires (callus) des feuilles primordiales (cœur) de la canne à sucre au moyen d’un fragment d’ADN contenant les cassettes d'expression des gènes cry1Ab et nptII purifiées du vecteur pGH-CTC2.nptII. La première cassette contient la séquence codante modifiée du gène cry1Ab de Bacillus thuringiensis, qui est régulée par le promoteur PEP carboxylase de Zea mays (PepC), et la séquence terminatrice transcriptionnelle du gène de la nopaline synthase (nos). La deuxième cassette contient la séquence génétique nptII, qui est régulée par le promoteur d’un gène d’ubiquitine Zea. mays (ubi-1), et l’extrémité 3’ de la séquence terminatrice du gène de la nopaline synthase (nos).

3. Caractérisation de la plante modifiée

Pour déterminer le nombre de sites d’insertion et de copies de l’ADN-T intégré de même que la présence ou l’absence de toute séquence du squelette plasmidique, l’analyse par transfert de Southern, la qPCR et l’analyse de la séquence d’ADN ont été utilisées. Cette analyse a démontré sept sites d’insertion, ainsi que six copies de cry1Ab et neuf copies de nptII dans la canne à sucre CTC175-A. Cette analyse n’a détecté aucune séquence squelette du vecteur dans la canne à sucre CTC175-A.

On a retracé les sites d’insertion de l’ADN-T au moyen des données relatives à la séquence du génome afin d’examiner les possibilités de formation de cadres de lecture ouverts dans les sites d’insertion du génome de la canne à sucre. L’analyse de la lignée de canne à sucre CTC175-A a révélé au total neuf séquences de jonction entre l’ADN inséré et le génome. L’analyse bioinformatique de ces séquences n’a révélé aucune preuve de cadres de lecture ouverts traduits entre l’insertion et les jonctions. Les insertions d’ADN-T dans la canne à sucre CTC175-A sont très peu susceptibles d’entraîner la traduction de nouveaux cadres de lecture ouverts éventuels.

La canne à sucre commerciale repose sur la multiplication végétative (par clonage). La stabilité de l’ADN-T inséré devrait donc être maintenue sur plusieurs générations. L’analyse par transfert de Southern pratiquée sur des feuilles issues de quatre multiplications végétatives a démontré la stabilité de l’insertion.

4. Information sur le produit

Selon la caractérisation du matériel génétique inséré, deux nouvelles protéines devraient être exprimées dans la canne à sucre CTC175-A. Les protéines Cry1Ab et NptII produites par l’insertion des deux cassettes ont été caractérisées. Cette caractérisation comportait une analyse par transfert de Western, laquelle a démontré la présence et l’intégrité des protéines Cry1Ab et NptII dans la canne à sucre CTC175-A. Le requérant a aussi fourni des données démontrant que les protéines exprimées dans la canne à sucre CTC175-A étaient équivalentes aux protéines Cry1Ab et NptII évaluées précédemment.

5. Exposition alimentaire

La modification génétique apportée à la canne à sucre CTC175-A n’a pas pour but d’en modifier les aspects nutritionnels par rapport aux variétés conventionnelles non génétiquement modifiées. On s'attend à ce que le sucre raffiné issu de la canne à sucre CTC175-A soit utilisé aux mêmes fins que le sucre raffiné provenant de variétés de canne à sucre traditionnelles et on ne prévoit donc aucune modification quant à l’utilisation qui sera faite du sucre raffiné.

6. Nutrition

Les ingrédients alimentaires dérivés de la canne à sucre importés au Canada depuis le Brésil sont le sucre brut (~95 %) et le sucre raffiné (~5 %). À la suite de l’importation, tout le sucre brut doit être raffiné avant d’être utilisé comme aliment ou ingrédient alimentaire destiné à la consommation humaine. Ainsi, l’aliment ou l’ingrédient alimentaire consommé par des Canadiens et qui serait dérivé de la canne à sucre de lignée CTC175-A le serait sous forme de sucre raffiné. L’analyse de la composition nutritionnelle du sucre raffiné n’est pas informative étant donné que celui-ci se compose quasi-entièrement de saccharose (99,93 %), les impuretés restantes étant constituées d’eau, de sucres invertis ou réducteurs (glucose et fructose), de cendre, de constituants colorants et d'autres composés organiques non glucidiques. Les Canadiens consomment de la tige de canne à sucre en petite quantité sous forme d’ingrédient de confiserie ou d’ingrédient alimentaire dans la cuisine orientale, mais la canne à sucre est une source négligeable d’autres nutriments et est peu digestible en raison de sa teneur élevée en fibres.

Le choix des paramètres de composition aux fins de l’analyse nutritionnelle est fondé sur les recommandations contenues dans le document de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) intitulé Consensus Document on Compositional Considerations for New Varieties of Sugarcane (Saccharum ssp. hybrids): Key Food and Feed Nutrients, Antinutrients, and Secondary Plant Nutrients (2011). Plus précisément, le requérant a mesuré les teneurs en macromolécules (c.-à-d., l'humidité, les protéines, les lipides totaux, les cendres, les fibres brutes) et en saccharose. Il a également mesuré les compositions en fibre au détergent neutre (FDN) et en fibre au détergent acide (FBA) en raison de leur pertinence à l’égard des variétés transformées.

On a analysé les données issues de six sites d’essais au champ dans des régions de culture de la canne à sucre au Brésil pendant la saison de culture 2014-2015. Des plans en blocs aléatoires complets ont été appliqués à chaque site, avec quatre répétitions par bloc. Chaque bloc contenait le cultivar expérimental (CTC175-A), le cultivar témoin (isoline CTC 20) et quatre variétés de référence (CTC 20 null, CTC9001, CTC4 et CTC15) cultivés dans des conditions identiques.

Aucune différence significative sur le plan statistique n'a été observée dans les résultats d’analyse entre la lignée CTC175-A et les variétés témoin et de référence. Également, les teneurs en nutriments de toutes les variétés se situaient dans la plage des valeurs énoncées dans le document sur la canne à sucre de l’OCDE (2011), sauf en ce qui concerne la fibre brute. La plage des teneurs en fibres brutes, exprimée en pourcentage de matière sèche pour la lignée, avoisinait la limite inférieure de la plage indiquée dans le document de l’OCDE. Les autres variétés de référence (à l’exception de CT15) présentaient également une faible teneur en fibres brutes par rapport aux valeurs indiquées par l’OCDE. Les valeurs relatives à la fibre au détergent neutre et à la fibre au détergent acide n’ont révélé aucune différence significative par rapport à celles du document de l’OCDE, et l’utilisation alimentaire au Canada se limitera au sucre raffiné. Par conséquent, la teneur légèrement inférieure en fibres brutes de la lignée par rapport aux valeurs de l’OCDE n’est pas significative sur le plan nutritionnel.

Selon les renseignements disponibles, l’utilisation de la canne à sucre CTC175-A comme source de sucre raffiné ou des tiges de canne à sucre à des fins alimentaires ne pose pas plus de danger sur le plan de la composition en nutriments que le sucre raffiné et les tiges provenant des variétés de canne à sucre traditionnelles.

7. Chimie et toxicologie

Le requérant a fourni des données probantes toxicologiques et des justifications scientifiques afin de démontrer l’innocuité de la lignée de canne à sucre CTC175-A exprimant les protéines Cry1Ab et NptII. Cette justification relative à l’innocuité, appuyée par une analyse chimique, est fondée sur le fait que l’exposition aux protéines nouvelles devrait être négligeable et sur le fait que ces mêmes protéines ont déjà été approuvées à l’égard d’autres cultures modifiées génétiquement offertes au Canada.

Grâce à l’analyse chimique, le requérant a été en mesure de démontrer que l’exposition aux protéines nouvelles dans le produit alimentaire fini (le sucre raffiné) serait négligeable. Le sucre brut et le sucre raffiné sont des produits hautement transformés soumis à des températures élevées et à différentes valeurs de pH. Le requérant a indiqué en référence de la documentation publiée dans laquelle on a établi qu’aucune protéine ne peut être détectée dans le sucre raffiné acheté en magasin, la limite de détection étant fixée à 1 ppm ou 1 µg/g. Il a aussi analysé des échantillons de sucre brut dérivé de la lignée CTC175-A, dans lesquels aucune protéine n’était détectableNote de bas de page 1. On peut donc s'attendre à une exposition négligeable aux protéines Cry1Ab et NptII.

Malgré les données probantes selon lesquelles le sucre raffiné ne contient aucune protéine en teneur mesurable, le requérant a exposé un scénario de la pire éventualité dans lequel on suppose que la teneur en protéine du sucre raffiné était la même que dans la tige de canne à sucre non transformée. En se fondant sur les données de consommation énoncées par l’Institut canadien du sucreNote de bas de page 2, on a estimé que l’exposition aux protéines nouvelles équivaudrait à 308 ng Cry1Ab/kg pc/jour et à 16,6 ng NptII/kg pc/jour.

Ces deux protéines ont déjà été exprimées dans des cultures alimentaires approuvées aux fins de la vente au Canada, et des données probantes démontrant que les protéines Cry1Ab et NptII exprimées dans la lignée CTC175-A étaient identiques à celles exprimées dans des cultures alimentaires déjà évaluées et autorisées par Santé Canada.

Pour Cry1Ab, on a fixé une DSENO de > 4 000 mg/kg pc/jour selon une étude de toxicité orale aiguë portant sur des souris. Selon le scénario de la pire éventualité produit par le requérant et la DSENO établie dans les évaluations antérieures en matière d’innocuité, une marge d’exposition (ME) de 13 000 000 a été calculée. Du point de vue de l’innocuité, cette valeur de ME très élevée a été considérée comme suffisante pour assurer la protection des consommateurs canadiens.

On s'attend à ce que l’exposition à la protéine NptII inerte soit négligeable. En outre, des denrées alimentaires provenant de cultures contenant cette protéine sont offertes au Canada depuis 20 ans et aucun effet indésirable n’a été signalé. Sur ces bases, on ne s’attend pas à ce qu’elle suscite des préoccupations en matière d’innocuité.

Une justification scientifique, appuyée par des études ayant déjà fait l’objet d’un examen, a été présentée au soutien du risque allergène que comportent les protéines Cry1Ab et NptII exprimées dans la lignée CTC175-A.

Dans le cadre d’évaluations antérieures de l’innocuité de la protéine Cry1Ab, on a démontré la dégradation importante de la protéine dans des liquides gastriques simulés. On a aussi démontré que la séquence de la protéine ne ressemblait à aucun allergène connu. Compte tenu de ces résultats, du fait que l’exposition à la protéine intacte devrait être négligeable lors de la consommation de sucre brut ou raffiné et des antécédents d’innocuité en ce qui concerne l’utilisation de produits dérivés de cultures contenant la protéine Cry1Ab dans des denrées alimentaires, il n’existe aucun motif de croire que la présence de cette protéine dans la lignée de canne à sucre CTC175-A comporterait de risques allergènes pour les consommateurs.

Sur la base des antécédents d’innocuité en ce qui concerne l’utilisation de produits dérivés de cultures contenant cette protéine dans des denrées alimentaires, ainsi que sur l’exposition négligeable prévue, il n’existe aucun motif de croire que la présence la protéine NptII dans la lignée de canne à sucre CTC175-A comporterait de risques allergènes pour les consommateurs.

Selon ce qui précède, le sucre brut ou raffiné dérivé de la canne à sucre CTC175-A n’est pas considéré comme comportant des risques toxicologiques ou allergènes supérieurs à ceux que comportent les variétés de canne à sucre traditionnelles.

Conclusion

L’examen qu’a réalisé Santé Canada de l’information présentée à l’appui de l’utilisation alimentaire du sucre brut et raffiné dérivé de la lignée de canne à sucre CTC175-A ne suscite pas de préoccupations sur le plan de l’innocuité. De l’avis de Santé Canada, les aliments dérivés de la canne à sucre CTC175-A ne comportent pas davantage de danger et sont tout aussi nutritifs que les aliments issus des variétés de canne à sucre actuellement sur le marché.

L’opinion exprimée par Santé Canada ne porte que sur l’utilisation alimentaire de la canne à sucre issue de la lignée CTC175-A.

Pour obtenir plus de renseignements, veuillez communiquer avec :

Section des aliments nouveaux
Direction des aliments
Direction générale des produits de santé et des aliments
Santé Canada, IA 2204E
251, promenade Sir Frederick Banting
Ottawa (Ontario) K1A 0K9
novelfoods-alimentsnouveaux@hc-sc.gc.ca

Note de bas de page

Note de bas de page 1

Limite de quantification de 125 µg/mL

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Note de bas de page 2

Provenant de données de l'ESCC (2004) produites par Statistique Canada. Les données de l'ESCC ne font pas de distinction entre les sucres ajoutés et les sucres d'origine naturelle. Par conséquent, on a supposé que la moitié de la consommation de sucre des Canadiens provenait de sucre ajoutés.

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