Ian Scott au cours « Exponential potential: Media growth and innovation » (« Potentiel exponentiel : l’évolution des médias et l’innovation » [traduction]) de l’Université Ryerson

Discours

1 avril 2022

Ian Scott, président et premier dirigeant
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC)

Le discours prononcé fait foi

Bonjour à tous.

Je vous remercie de m’avoir invité à m’entretenir avec vous aujourd’hui. C’est un plaisir d’être avec vous.

J’aimerais souligner que je me joins à vous depuis les bureaux du CRTC, qui sont situés sur le territoire traditionnel non cédé des Algonquins. Je tiens à remercier le peuple Anishnaabeg et à rendre hommage à ses ancêtres.

Mme Berkowitz m’a demandé de vous parler brièvement du travail du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) et de la façon dont il pourrait changer si le projet de loi C-11 du gouvernement fédéral, Loi sur la diffusion continue en ligne, devenait une loi.

Cela fait beaucoup de renseignements à couvrir en quelques minutes, mais permettez-moi d’abord de vous expliquer pourquoi ce projet de loi est proposé et comment il pourrait avoir une incidence sur le système canadien de radiodiffusion, les services de diffusion continue en ligne et les créateurs de contenu numérique.

La Loi sur la radiodiffusion et le monde prioritairement numérique

À l’heure actuelle, la Loi sur la radiodiffusion du Canada est un texte législatif de 30 ans; elle est probablement plus vieille que certains d’entre vous. Bien qu’elle ne mentionne pas de technologies particulières, elle se rapporte largement à une époque et à un âge précis. Au début des années 1990, l’Internet n’en était qu’à ses débuts et l’idée de diffuser du contenu médiatique grand public par l’intermédiaire de données sans fil n’était peut-être que dans la mire d’un entrepreneur en herbe.

Vous voyez où je veux en venir. La loi nous a donné, l’organisme de réglementation du système canadien de radiodiffusion, les bons outils pour atteindre ses objectifs stratégiques tout au long des années 1990 et de la première décennie du nouveau millénaire. Cependant, le jardin clos qu’elle encourageait pour soutenir la narration d’histoires canadiennes et la musique canadienne devenait de plus en plus désuet au fil des ans, à mesure que la technologie à large bande s’incrustait de plus en plus profondément dans les foyers, ainsi que sur les téléphones et les tablettes, des Canadiens partout au pays.

Nous sommes passés d’une ère de rareté – où il n’y avait de place que pour un nombre limité de chaînes de télévision et de stations de radio – à une ère d’abondance. Cette évolution s’est avérée positive pour les Canadiens, car ils ont désormais accès à une panoplie de contenus, allant du créneau au grand public, de vidéos produites par des professionnels aux vidéos TikTok.

Au CRTC, nous avons suivi de près ce changement. Nous avons observé que les habitudes d’écoute et de visionnement des Canadiens ont progressivement évolué des plateformes médiatiques traditionnelles vers les plateformes numériques. En réponse, nous avons organisé une série d’instances exhaustives pour déterminer quelle approche réglementaire devrait être adoptée, le cas échéant, pour régir le contenu audio et audiovisuel en ligne.

À chacune de ces occasions, nous avons estimé que les médias numériques étaient complémentaires au système traditionnel et que, par conséquent, les diffuseurs en ligne devraient rester exemptés de l’obligation de détenir une licence de radiodiffusion. Nous ne mettons pas en place des réglementations pour le plaisir de réglementer. Il y a toujours un objectif clair, que ce soit pour atteindre un objectif stratégique ou parce que cela profitera aux Canadiens.

Y a-t-il eu un élément déterminant ayant mené à la nécessité d’une révision complète de la Loi sur la radiodiffusion? Il n’y a pas eu de moment précis, en soi, mais il est devenu de plus en plus évident ces dernières années que la boîte à outils actuelle n’était pas équipée pour relever les défis et saisir les occasions inhérentes à l’environnement prioritairement numérique d’aujourd’hui.

Nous avons produit notre rapport, Emboîter le pas au changement : L’avenir de la distribution de la programmation au Canada, à la demande du gouvernement en 2018. Dans ce rapport, nous avons formulé trois recommandations, soit :

  • que les approches stratégiques futures soient axées sur la production et la promotion de contenus de haute qualité réalisés par des Canadiens et pouvant être découverts par le public au Canada et à l’étranger;
  • qu’elles permettent de veiller à ce que tous les acteurs bénéficiant du système de radiodiffusion canadien participent de manière appropriée et équitable;
  • qu’elles devraient être suffisamment flexibles pour permettre à l’organisme de réglementation – autrement dit, le CRTC – de s’adapter rapidement à l’évolution de la technologie et de la demande des consommateurs.

Nous avons formulé des recommandations similaires à l’intention du Groupe d’examen du cadre législatif en matière de radiodiffusion et de télécommunications – le groupe chargé de recommander des modifications à la Loi sur la radiodiffusion.

Le projet de loi C-11 et le potentiel de changement

Tout cela nous amène à aujourd’hui, et au projet de loi C-11. Comme vous le savez probablement, le projet de loi a été présenté à la Chambre des communes en février. Il en est actuellement à l’étape de la deuxième lecture.

Au CRTC, nous soutenons l’approche globale adoptée dans le cadre du projet de loi. À notre avis, il propose trois éléments importants.

D’abord, il clarifie la compétence du CRTC en ce qui concerne les diffuseurs en ligne. Deuxièmement, il nous donne une approche plus souple de la réglementation, à plusieurs égards importants. Et troisièmement, il permet de moderniser les pouvoirs d’exécution du CRTC.

Tous ces changements combinés nous assureraient la flexibilité, la rapidité et les outils nécessaires pour répondre aux tendances changeantes du secteur.

Le projet de loi C-11 et le CRTC

Alors, pour revenir au message que j’ai promis de livrer au début de mes propos, comment le nouveau projet de loi changerait-il la façon dont nous travaillons au CRTC?

Certains pensent que le projet de loi, dans sa forme actuelle, laisse trop d’éléments devant être déterminés par le CRTC. Par exemple, comment définir un diffuseur en ligne? Ou un contenu qui apporte une contribution significative à la culture canadienne? Ou encore, comment des services tels que Spotify ou Netflix devraient-ils soutenir les contenus et les artistes canadiens de langue française?

Le danger d’être trop précis dans la législation est que celle-ci devienne un document statique une fois qu’elle a reçu la sanction royale. Comme nous l’avons vu, il peut s’écouler plusieurs décennies avant que le Parlement n’ait l’occasion de réviser la législation, et entre-temps, les circonstances sur le terrain peuvent changer de manière importante.

Un organisme de réglementation, en revanche, peut agir rapidement pour mettre à jour ses politiques réglementaires. Tout ce qu’il faut, c’est le lancement d’une instance publique, la collecte de points de vue et d’éléments de preuve, et le temps nécessaire pour délibérer et rédiger une décision.

Certains ont également affirmé que le projet de loi C-11 donnerait au CRTC le pouvoir de réglementer le contenu généré par les utilisateurs sur les médias sociaux. Une personne qui télécharge une chanson originale sur YouTube ou une vidéo sur TikTok pourrait être soumise à des exigences en matière d’enregistrement, de contribution ou de possibilité de découverte.

Ce n’est vraiment pas le cas.

Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi établit une distinction entre les utilisateurs des médias sociaux et les plateformes elles-mêmes. Il est clair pour nous que l’intention du projet de loi est d’exclure les utilisateurs individuels de la réglementation.

Même nos pouvoirs de réglementation des plateformes de médias sociaux seraient limités par le projet de loi C-11. Ainsi, ils pourraient exiger que ces plateformes soutiennent la création d’émissions canadiennes, qu’elles rendent le contenu découvrable par les personnes handicapées ou accessible à celles-ci.

Nous comprenons que les créateurs canadiens de l’ère prioritairement numérique sont des innovateurs qui ont su tirer parti de leur créativité et de la liberté de l’Internet pour attirer un public et des adeptes, dont beaucoup se trouvent à l’extérieur du Canada. Nous n’avons pas l’intention de faire quoi que ce soit qui puisse compromettre, restreindre ou entraver leur capacité à créer et à transmettre leur contenu.

Le CRTC doit exercer ses pouvoirs en vertu de la primauté de droit et d’une manière conforme à la Charte canadienne des droits et libertés. Les utilisateurs de services en ligne et de médias sociaux s’attendent à la liberté d’expression, et ils continueront d’en bénéficier en vertu de la nouvelle Loi sur la radiodiffusion.

Autrement dit, le CRTC rend, annuellement, environ 250 décisions de radiodiffusion. Pas une seule n’a été contestée avec succès au motif qu’elle portait atteinte d’une manière quelconque à la liberté d’expression des Canadiens.

Si certains d’entre vous ont étudié le travail du CRTC au fil des ans, vous constaterez une vérité claire et simple quant à notre travail. Nous nous sommes toujours efforcés d’adopter une approche de la réglementation assouplie, même si les diffuseurs en ligne sont devenus de plus en plus répandus et importants dans le système canadien de radiodiffusion.

Voici un exemple qui montre pourquoi cette approche assouplie est si importante, et comment elle a profité au secteur de la radiodiffusion. Il y a plusieurs années, nous avons émis des ordonnances d’exemption pour les services de médias numériques et les services de vidéo sur demande qui sont offerts sur Internet.

Pourquoi? Parce que ces services permettent à des services de radiodiffusion innovants comme CBC Gem, tou.tv et Crave de se lier aux Canadiens et de leur donner accès à un contenu abondant. En même temps, l’exemption nous a permis, au CRTC, de surveiller les effets de ces services sur le système canadien de radiodiffusion – ainsi que les contributions qu’ils y ont apportées.

Cela m’amène à un autre point que certains soulèvent au sujet des nouveaux pouvoirs qui nous sont accordés en vertu du projet de loi C-11. Les gens se demandent si nous avons l’expertise nécessaire pour réglementer la diffusion en continu en ligne au Canada.

Voici comment je répondrais à cette question.

Le CRTC a un riche passé et une solide expérience de la mise en œuvre de politiques efficaces et de l’adaptation de ses approches au fil du temps pour répondre aux besoins changeants des Canadiens et du système de radiodiffusion. Nous le faisons depuis plus de 50 ans. Et nous continuerons à le faire dans le cadre de la nouvelle Loi sur la radiodiffusion, quelle que soit la plateforme, et uniquement lorsque la réglementation contribue de manière significative aux objectifs de la Loi.

Recueillir les points de vue et des éléments de preuve

Le dernier point dont je tiens à vous faire part est le suivant, et il est encore une fois lié à la question de savoir comment notre travail changera si le projet de loi C-11 est adopté. En effet, bien que le projet de loi propose de nouveaux outils pour nous aider à réglementer un système de radiodiffusion qui a beaucoup changé depuis 30 ans, il y a une chose qu’il ne changera pas : le processus que nous suivons pour servir l’intérêt public.

Le CRTC est un tribunal administratif indépendant et spécialisé qui définit des politiques et prend des décisions qui sont fondées sur des éléments de preuve recueillis lors de consultations publiques. Nous aurons besoin de l’aide de tous pour concevoir le nouveau cadre réglementaire qui sera nécessaire à la mise en œuvre du projet de loi C-11. Nous ne pouvons pas simplement appliquer nos approches traditionnelles de la réglementation au monde en ligne.

Les consultations que nous organisons sont ouvertes à tous, et nous les affinons constamment afin de garantir la prise en compte de la plus grande diversité possible de points de vue, notamment ceux des peuples autochtones, des communautés au profil racial diversifié, des Canadiens handicapés et de la communauté LGBTQ2+. Leurs points de vue seront essentiels pour établir un cadre réglementaire inclusif et tourné vers l’avenir.

Et, bien que je ne puisse pas prédire ce qui se passera à l’avenir en ce qui concerne l’influence du monde en ligne sur la radiodiffusion traditionnelle – ou toute autre tendance des médias numériques que vous voudrez bien nommer – je peux vous dire qu’au CRTC, nous nous tournerons vers les outils qui nous ont si bien servis dans le passé pour nous guider.

Merci.

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