Projet de loi C-10 – Motion du Comité concernant les amendements proposés
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Le Comité permanent du patrimoine canadien (le Comité) étudie le projet de loi C-10, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois. Au cours de l’examen article par article du projet de loi par le Comité, une question a été soulevée concernant les effets possibles, sur la liberté d’expression en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte), des amendements proposés au projet de loi qui pourraient toucher les émissions téléversées par les utilisateurs de médias sociaux.
L’article 4.2 de la Loi sur le ministère de la Justice exige que le ministre de la Justice prépare un Énoncé concernant la Charte pour chaque projet de loi du gouvernement afin d’éclairer le débat public et parlementaire sur les projets de loi du gouvernement. Un Énoncé concernant la Charte à l’égard du projet de loi C-10 a été déposé à la Chambre des communes le 18 novembre 2020.
Conformément à leur objectif, les Énoncés concernant la Charte sont rédigés à un niveau élevé et exposent, dans un langage simple et de manière accessible, les effets possibles d’un projet de loi sur les droits et libertés garantis par la Charte. Les Énoncés concernant la Charte ne fournissent pas d’avis juridique quant à ces effets. Les Énoncés concernant la Charte expliquent également les considérations qui soutiennent la constitutionnalité du projet de loi.
Même si les projets de loi peuvent faire l’objet de modifications au cours du processus parlementaire, les Énoncés concernant la Charte reflètent le projet de loi au moment de son dépôt. Conformément à l’article 4.2 de la Loi sur le ministère de la Justice, les Énoncés concernant la Charte ne sont pas mis à jour au fil de leur cheminement dans le processus parlementaire.
Amendements proposés au projet de loi C-10
Le projet de loi C-10, tel que déposé à la Chambre des communes le 3 novembre 2020, comprend une disposition à l’article 1 qui prévoit que les utilisateurs de services de médias sociaux, qui ont téléversé des émissions pour les transmettre à d’autres utilisateurs, et qui ne sont pas affiliés au fournisseur de services, ne seraient pas assujettis à la réglementation de la radiodiffusion à cet égard. Par « émission » on entend le contenu audio, visuel ou audiovisuel qui vise à informer, à éclaircir ou à divertir, ce qui exclut le contenu principalement textuel.
Le projet de loi comprend également, à l’article 3 (paragraphe 4.1), des dispositions qui excluent de l’application de la Loi i) les émissions téléversées vers une entreprise en ligne fournissant un service de média social par un utilisateur non affilié à ce service, et ii) une entreprise en ligne dont la seule radiodiffusion est celle de telles émissions.
Le Comité n’a pas adopté l’article 3 lors de l’examen article par article du projet de loi qui a eu lieu le 23 avril 2021. Le retrait proposé de l’article 3 a pour effet qu’une entreprise en ligne qui fournit un service de média social pourrait être assujettie au régime de la Loi en ce qui concerne les émissions téléversées par ses utilisateurs non affiliés. Cependant, l’article 1 (paragraphe 2(2.1)) demeure inchangé. Ceci signifie que les utilisateurs non affiliés des services de médias sociaux ne seraient pas assujettis au régime réglementaire de radiodiffusion en ce qui concerne les émissions qu’ils affichent.
Le gouvernement a proposé d’apporter au projet de loi C-10 des amendements qui limiteraient la capacité de réglementation du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (le Conseil) à réglementer une entreprise en ligne qui fournit un service de média social en ce qui concerne les émissions affichées par des utilisateurs non affiliés. Les pouvoirs réglementaires du Conseil seraient applicables uniquement aux questions suivantes et en visant exclusivement la plateforme de média sociale, et non ses utilisateurs non affiliés :
- L’imposition d’exigences en matière de dépenses (par exemple, le versement de fonds pour soutenir, promouvoir et former les créateurs canadiens, et pour soutenir la création d’une programmation canadienne destinée à être diffusée par les entreprises de radiodiffusion, y compris les entreprises en ligne), et de frais liés au recouvrement des coûts des activités du Conseil en vertu de la Loi;
- Les exigences relatives à la possibilité de découvrir les créateurs canadiens, afin que les créateurs canadiens et leurs émissions puissent être plus facilement découverts, mis en évidence et promus en ligne;
- L’enregistrement, afin que le Conseil soit informé des entreprises en ligne de ce type qui sont exploitées, au moins en partie, au Canada, et qu’il puisse obtenir les coordonnées de ces entreprises;
- La communication de renseignements et la vérification des registres, afin que le Conseil dispose de l’information dont il a besoin pour superviser le système canadien de radiodiffusion et exercer les pouvoirs discrétionnaires susmentionnés.
Le pouvoir du Conseil de réglementer un service de média social ne comprendrait pas les normes relatives aux émissions (par exemple, le contenu des émissions interdites) ou la proportion d’émissions qui doivent être canadiennes.
Droit de liberté d’expression (alinéa 2b) de la Charte)
Comme l’indique l’Énoncé concernant la Charte, les exigences réglementaires du projet de loi sont susceptibles de porter atteinte à la liberté d’expression garantie par l’alinéa 2b) de la Charte. Les considérations suivantes appuient la cohérence continue des exigences réglementaires proposées avec l’alinéa 2b) de la Charte canadienne des droits et libertés. L’article 1 (paragraphe 2(2.1)) empêcherait d’appliquer le régime réglementaire de la radiodiffusion aux utilisateurs non affiliés en ce qui concerne les émissions qu’ils affichent. Les objectifs du projet de loi visant à mettre à jour les pouvoirs réglementaires du Conseil et à conférer de nouveaux pouvoirs applicables aux services en ligne demeurent. Le projet de loi maintient le rôle et la souplesse du Conseil dans la détermination des exigences réglementaires à imposer aux entreprises de radiodiffusion, le cas échéant, en tenant compte des objectifs politiques et réglementaires de la Loi et de la variété des entreprises de radiodiffusion assujetties à la Loi. En ce qui concerne la proposition de donner au Conseil de nouveaux pouvoirs limités pour réglementer une entreprise en ligne qui fournit un service de média social à l’égard des émissions affichées par ses utilisateurs non affiliés, les considérations pertinentes de la Charte comprennent le rôle discrétionnaire et la souplesse du Conseil.
La proposition de limiter le pouvoir de réglementation discrétionnaire du Conseil de réglementer un service de média social en ce qui concerne les émissions affichées par ses utilisateurs non affiliés est une considération supplémentaire. Le Conseil est assujetti à la Charte et doit donc exercer tout pouvoir discrétionnaire dont il dispose d’une manière qui est conforme à la Charte. La Loi prévoit qu’elle doit être interprétée et appliquée d’une manière compatible avec la liberté d’expression. Comme il est affirmé dans l’Énoncé concernant la Charte, en prenant des décisions réglementaires, le Conseil doit établir un équilibre proportionnel entre les objectifs de la Loi et la protection de la liberté d’expression à la lumière des faits et des circonstances. Les décisions du Conseil sur des questions de droit ou de compétence peuvent être examinées par la Cour d’appel fédérale.
Les déclarations pertinentes, telles qu’elles sont définies dans l’énoncé concernant la Charte, demeurent valides et ne sont pas affectées par les amendements proposés.
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