Les héros de l’explosion d’Halifax
Le rôle de la Marine royale canadienne dans la pire catastrophe d’origine humaine du Canada
L’explosion
La citation pour la médaille Albert attribuée au maître d’équipage intérimaire Albert Charles Mattison et à l’officier marinier chauffeur Ernest Edmund Beard :
Extrait de la London Gazette – Le 18 février 1919
Le Roi (est) heureux d’approuver l’attribution à titre posthume de la médaille Albert pour bravoure en matière de sauvetage en mer à :
M. Albert Charles Mattison, feu maître d’équipage intérimaire, Marine royale canadienne, et Officier marinier chauffeur Edward S. (sic) Beard, feu membre de la Réserve navale royale des volontaires du Canada.
Voici le compte rendu des réalisations pour lesquelles ces décorations ont été décernées :
Le 6 décembre 1917, le navire à vapeur français Mont Blanc, transportant une cargaison d’explosifs, et le navire à vapeur norvégien Imo sont entrés en collision dans le port d’Halifax. Un incendie a éclaté sur le Mont Blanc immédiatement après la collision, et les flammes ont très vite atteint une hauteur de plus de 100 pieds. L’équipage a abandonné son navire et s’est dirigé vers le rivage. Le commandant du NCSM Niobe, qui se trouvait dans le port, en constatant ce qui s’était passé, a envoyé un petit bateau à vapeur pour voir ce qui pouvait être fait. M. Mattison et six hommes de la Réserve navale royale des volontaires du Canada se proposèrent pour former l’équipage de ce bateau, mais au moment où le bateau venait de se placer à côté du Mont Blanc, celui-ci explosa, et M. Mattison ainsi que tout l’équipage du bateau perdirent la vie. L’équipage du bateau était pleinement conscient de la nature désespérée du travail qu’il effectuait, et par leur bravoure et leur dévouement au devoir, ils ont sacrifié leur vie pour tenter de sauver celle des autres.
L’histoire est bien connue, et encore terrifiante de nos jours. Le 6 décembre 1917, le Mont-Blanc, un cargo français transportant des explosifs, entre en collision avec le navire norvégien Imo dans le passage appelé The Narrows, un détroit entre le port d’Halifax et le bassin de Bedford. Le Mont-Blanc prend feu et sa cargaison mortelle s’enflamme, provoquant une immense explosion qui détruit presque toutes les structures dans un rayon de 800 mètres. Quelque 2 000 personnes sont tuées et 9 000 autres blessées dans la plus grande explosion d’origine humaine de l’époque; l’ampleur de cette explosion ne sera éclipsée que par les détonations de la bombe atomique dans les années 1940.
La MRC était là
La Marine royale canadienne (MRC) n’avait que sept ans d’existence au moment de l’explosion d’Halifax; c’était encore une force relativement petite utilisée principalement pour la défense côtière. Toutefois, l’histoire de la MRC et celle de l’explosion d’Halifax sont à jamais liées. Il s’agit d’une histoire qui ne peut être racontée sans l’autre : il y a eu des actes de bravoure de la part de nos marins, et le bilan des pertes liées à l’explosion a touché de nombreuses familles de la marine.
Le NCSM Niobe et son rôle
Le Navire canadien de Sa Majesté (NCSM) Niobe a été le tout premier navire de guerre de la jeune marine canadienne à arriver sur nos côtes, raison pour laquelle la journée du Niobe est célébrée chaque année le 21 octobre pour marquer l’arrivée du navire dans le port d’Halifax ce jour-là en 1910.
Pendant les premiers mois de la Première Guerre mondiale, le Niobe, un croiseur protégé de la classe Diadem, patrouillait les abords du Saint-Laurent et la côte est de l’Amérique, en pourchassant et en interceptant les navires allemands. En juillet 1915, il est retourné à Halifax et a servi de bâtiment-base à quai, accueillant des marins enrôlés, des stagiaires et le quartier général de la marine canadienne. C’est dans le port d'Halifax que se trouvait le Niobe au matin du 6 décembre 1917.
Lorsqu’il aperçut l’incendie sur le Mont Blanc, le maître d’équipage intérimaire du Niobe, Albert Charles Mattison, se porta volontaire pour sauter dans la pinasse du navire (un petit bateau à vapeur), à la tête d’une équipe de six autres volontaires. Ils ont d’abord tenté de remorquer le navire en feu, qui avait été abandonné par son équipage, loin de toute zone habitée. Lorsque cet effort a échoué, ils ont essayé de combattre l’incendie. Malgré tous leurs efforts, le Mont Blanc a explosé, et les sept hommes ont été tués sur le coup.
Décorés pour leur acte d’héroïsme
Pour leur héroïsme, le maître d’équipage intérimaire Mattison et l’officier marinier chauffeur Ernest Edmund Beard ont reçu à titre posthume la médaille Albert pour bravoure en matière de sauvetage en mer. Ils ont été nommés et reconnus au Parlement, avec les cinq autres hommes qui ont participé à la tentative de sauvetage en mer :
- Matelot de 1re classe Charles McMillan
- Matelot de 3e classe Freeman Burnley Nickerson
- Matelot de 2e classe Albert Saunders
- Opérateur de télégraphie sans fil George Veals
- Chauffeur George Roley Yates
De nombreuses familles de la marine dévastées
En plus des sept personnes qui ont péri en essayant d’empêcher la catastrophe, 14 autres membres de la marine canadienne sont morts à la suite de l’explosion. Au moment même où les pertes humaines étaient ressenties dans toute la ville, plus de 30 membres de familles de marins de la marine canadienne ont été tués.
Post-scriptum : l’ancre du Niobe est retrouvée
Le NCSM Niobe a été endommagé par l’explosion, mais le navire a survécu. Il a été réparé et a continué à servir de bâtiment-base jusqu’à ce qu’il soit vendu comme navire excédentaire en 1920, puis envoyé à la ferraille.
Le 17 octobre 2014, une ancre de 900 kilos, que l’on pense appartenir au Niobe, a été découverte dans le port d’Halifax lors des travaux de rénovation d’un entrepôt sur une jetée. L’ancre et la chaîne avaient été enterrées sous un site de démolition. L’ancre a été retrouvée juste avant la proclamation officielle du 21 octobre comme Journée du Niobe.
« La découverte de l’une des ancres du NCSM Niobe dans le port d’Halifax une semaine seulement avant la Journée du Niobe/, qui sera célébrée par la Marine royale canadienne le 21 octobre, est vraiment stupéfiante », a dit le vice-amiral Mark Norman, commandant de la Marine royale canadienne au moment de la découverte. « Cette découverte est une vraie bénédiction et une occasion unique d’établir des liens entre nos ancêtres et les prochaines générations de marins de la Marine royale canadienne. »
On a restauré et remis à neuf l’ancre, qui sera bientôt exposée en permanence dans la nouvelle installation d’instruction en matelotage de la Marine à la BFC Halifax. Le tout comprendra également deux grands panneaux : une photo grandeur nature du premier équipage du Niobe et une photo du navire dans le port d’Halifax vers 1910. Le bâtiment de matelotage est l’endroit idéal pour l’ancre, car il permettra aux nouveaux membres de la MRC d’établir un lien personnel avec la riche histoire de leur marine pendant leur instruction dans cette installation.
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