OLLO – Rapport de sommaire pertinent de la réunion du comité sénatorial permanent des langues officielles – 6 février 2023
Date et heure : 21 novembre 2022 / 17h00-19h30
Vidéoconférence (hybride et en personne et zoom)
Rapport préparé par :
Geneviève Dubois-Richard, Direction des Affaires parlementaires et du Cabinet
Patrimoine canadien
genevieve.dubois-richard@pch.gc.ca
Membres du Comité :
René Cormier (GSI) (président)
Rose-May Poirier (C) (vice-présidente)
Bernadette Clement (GSI)
Jean-Guy Dagenais (GSC)
Pierre J. Dalphond (GPS)
Raymonde Gagné (Non-affiliée)
Marie-Françoise Mégie (GSI)
Percy Mockler (C)
Lucie Moncion (GSI)
Sujet
Étude sur l’immigration francophone en situation minoritaire
Témoins :
1er panel :
Commissariat aux langues officielles
- Raymond Théberge, Commissaire
- Me Pascale Giguère, avocate générale
- Pierre Leduc, commissaire adjoint, Direction générale des politiques et communications
- Martin Labelle, directeur des Enquêtes, Direction générale de l’assurance de la conformité
2e panel :
University of Hearst
- Samantha Losier, International Office Advisor
- University of Saint-Boniface
Christian Perron, Director, Recruitment and Student Services
Sainte-Anne University
Luc Tardif, Director of International Recruitment and Immersion Schools, Recruitment Office
New Brunswick Community College
Juan Manuel Toro Lara, Director, Enrolment Management
Sommaire :
1er panel
Commissariat aux langues officielles
- Depuis plus d’une décennie, l’immigration francophone en milieu minoritaire est une priorité
- La diminution du poids démographique de la population minoritaire francophone par rapport à la population anglophone demeure une préoccupation majeure
- La cible d’immigration de 4,4 % pour les immigrants d’expression française en milieu minoritaire, adoptée il y a près de 20 ans, n’a jamais été atteinte par le gouvernement fédéral
- Nous avons besoin d’un nouvel objectif clair et d’une cible d’immigration francophone beaucoup plus ambitieuse
- Il faut aussi faire attention particulière à la rétention et à l’intégration des nouveaux arrivants dans les communautés afin de maintenir le poids démographique des francophones hors Québec
- Le gouvernement doit s’engager à atteindre une cible plus ambitieuse et tenir compte de tous les changements requis aux différentes étapes du continuum de l’immigration francophone
- Reconnaît l’ouverture du nouveau Centre d’innovation en Immigration Francophone du gouvernement fédéral à Dieppe, au Nouveau-Brunswick, qui vise à accroître le nombre d’immigrants francophones qui viennent au Canada
- Le projet de loi C-13 a le potentiel de transformer le régime linguistique du pays en faisant de la Loi sur les langues officielles une loi qui permettra à nos langues officielles de progresser et qui défendra réellement les droits linguistiques de la population canadienne
- L’appui du public canadien doit s’appuyer sur des politiques et des initiatives solides dans tous les secteurs de la société afin que les deux langues officielles du Canada puissent prospérer partout au pays.
1er tour de questions :
Raymonde Gagné (Non-affiliée)
- D’après vous, quels éléments sont manquants dans le projet de loi C-13 et pourquoi vous apparaît-il important de modifier certaines dispositions de la partie VII?
- Théberge : beaucoup de latitude laissée aux institutions fédérales pour la mise en œuvre, besoin des mesures positives, des études d’impact et des consultations.
- Selon vous, ce serait plutôt dans le cadre des règlements qu’on élaborerait en plus grands détails toute la question d’étude d’impact et définir davantage ce qu’on entend par mesures positives?
- Théberge : Effectivement, c’est dans le règlement qu’on va préciser les détails de la mise en œuvre, le comment.
- Dois-je comprendre que la directive sur la vente de terrains du fédéral devrait finalement se retrouver dans le règlement?
- Théberge : Nous devons certainement être plus clairs dans le règlement au sujet des attentes des institutions fédérales.
Marie-Françoise Mégie (GSI)
- Est-ce que mettre le bilinguisme comme critère d’embauche ne pourrait pas affecter les primes de bilinguisme qu’on offre aux employés? Est-ce que cela pourrait ne pas faire l’unanimité ou créer de la controverse? Qu’en pensez-vous?
- Théberge : Je ne vois pas comment la prime sur le bilinguisme peut avoir un impact sur le concept de s’assurer que les gens maîtrisent les deux langues officielles pour occuper un poste
- Comment qualifiez-vous les réponses du gouvernement à vos études?
- Théberge : Notre rapport sur l’Institut linguistique a amené à la création d’un groupe de travail au Secrétariat du Conseil du Trésor, qui s'est penché sur les façons de créer de meilleures conditions pour assurer l’épanouissement des deux langues officielles en milieu de travail.
Lucie Moncion (GSI)
- Sachant que le racisme dans le traitement des demandes d’immigration affecte démesurément l’immigration francophone, quel rôle le commissariat aux langues officielles peut-il jouer afin de se pencher sur ce problème systémique au sein de l’IRCC?
- Théberge : Le rôle du commissaire relativement à cette situation est en lien avec l’étude que nous avons réalisée, soit de s’assurer qu'on élabore pour l'avenir une politique d’immigration francophone séparée de la politique actuelle, qui est actuellement une politique anglophone et francophone en même temps. La seule façon d’éviter certains des problèmes systémiques comme eux que vous avez mentionnés, c’est d’avoir une politique holistique qui traite de la question de l’immigration francophone séparément de l’immigration anglophone.
- Comment fait-on, à l’intérieur d’une politique, pour diminuer les conséquences du biais associé aux personnes qui prennent les décisions, lorsqu’il s’agit d’accepter ou de refuser des candidats, sur l’acceptation des demandes en immigration francophone qui viennent des pays d’Afrique?
- Théberge : Il faut vérifier s’il y avait un biais dans le fameux algorithme du système Chinook. Beaucoup des décisions sont prises par ce logiciel.
René Cormier (GSI) (président)
- Dans le cadre de cette politique, devrait-il y avoir, à votre avis, une initiative qui permettrait d’accompagner les candidats? Je crois que certaines demandes qui sont refusées sont aussi liées aux défis auxquels sont confrontés des candidats potentiels, notamment quant à la façon de remplir adéquatement une demande et quant au processus à suivre.
- Théberge : Je crois que si on est à la recherche de candidats et de candidates, il est important de leur donner les appuis nécessaires pour bien compléter le formulaire et pour bien faire leur demande.
- Est-ce que bilinguisme de la haute fonction publique devrait faire partie d’amendements au projet de loi C-13? Où devraient se retrouver ces obligations pour que le gouvernement fédéral soit vraiment imputable, responsable et actif dans sa manière d’assurer le bilinguisme de la haute fonction publique?
- Théberge : je pense que si les législateurs jugent bon d’inclure dans un projet de loi le critère de bilinguisme chez les hauts fonctionnaires, ce serait un pas important.
- Est-ce qu’on devrait s’assurer des obligations de bilinguisme auprès des hauts fonctionnaires et des ambassadeurs et ambassadrices?
- Théberge : Je pense que, si on veut réellement que les langues officielles rayonnent à l’international, il faut que les personnes qui font partie du corps diplomatique, comme les ambassadeurs et les ambassadrices, soient en mesure de communiquer dans les deux langues officielles.
- Êtes-vous en faveur de la notion de cible réparatrice comme le propose la Fédération des communautés francophones et acadienne?
- Théberge : Il est clair qu’il faut essayer de rétablir le poids démographique entre les deux communautés. Pour ce faire, il est évident que le 4,4 % est insuffisant et si on maintient le 4,4 % avec les nouvelles cibles d’immigration que s’est donné le gouvernement fédéral il y a quelques semaines, l’écart continuera à se creuser.
- Est-ce qu’il faudrait harmoniser à votre avis les dispositions législatives qui sont applicables aux administrations portuaires et aux administrations aéroportuaires? On a saisi qu’il y avait des différences et des demandes d’harmoniser cela. Qu’en pensez-vous?
- Théberge : Je pense que tout ce qui touche, ce que j’appelle le « public voyageur », devrait être harmonisé. Notre choix de mode de transport ne devrait pas avoir un impact sur nos droits linguistiques.
- Que pensez-vous des commentaires à savoir que le projet de loi C-13 devrait prévoir des dispositions pour protéger les entreprises privées de compétence fédérale ou les institutions fédérales contre les litiges vexatoires?
- Théberge : Je pense qu’il faut s’entendre sur la définition de « litige vexatoire ». Si on se trouve devant un tribunal, c’est toujours conflictuel. Il faut laisser aux tribunaux décider ce qui est vexatoire ou non.
Percy Mockler (C)
- Lorsqu’on regarde le nombre de plaintes et la méthodologie pour trouver des solutions à ces plaintes — et y répondre dans un délai raisonnable et raisonné — à quoi attribuez-vous le nombre record de plaintes reçues par votre bureau en 2021-2022?
- Théberge : Il y a eu deux événements qui expliquent 75 % des plaintes, c’est le discours unilingue du PDG d’Air Canada, et c’est la nomination d’une gouverneure générale unilingue en août. Ces deux plaintes sont différentes, une touche spécifiquement la partie IV et l’autre la partie VII. Encore cette année, les plaintes augmentent. Pourquoi? Je pense que les Canadiens et Canadiennes sont de plus en plus conscients de leurs droits linguistiques.
- Lorsqu’on regarde les statistiques du passé à la lumière du projet de loi C-13, l’enjeu des obligations linguistiques dans la dotation des postes de haute gestion de la fonction publique fédérale, et dans les nominations aussi du gouverneur en conseil, devrait-il faire partie des amendements au projet de loi C-13?
- Théberge : je crois qu’il revient au législateur de déterminer s’il ou elle veut inclure ce genre de directive dans un règlement.
- Pouvez-vous nous donner plus d’informations ou commenter la raison pour laquelle vous avez demandé au comité parlementaire d’étudier cet enjeu, plutôt que de vous adresser aux ministres responsables de cette application?
- Théberge : votre rôle comme comité, c’est de se pencher souvent sur des enjeux. Ici, l’enjeu touche tout l’appareil fédéral et même au-delà, c’est plus large qu’un simple ministre, cela touche tout l’appareil fédéral.
- Les institutions fédérales devraient-elles faire rapport spécifiquement de leurs réalisations dans les bilans annuels qu’elles fourniraient au Secrétariat du Conseil du Trésor et à Patrimoine canadien comme elles l’ont fait pour l’égalité réelle?
- Théberge : je crois que le rôle du Conseil du Trésor est extrêmement important par rapport à ceci. Et effectivement, un des rôles du Conseil du Trésor, c’est justement les redditions de comptes et l’imputabilité.
- Est-ce que vous avez des commentaires sur Patrimoine canadien?
- Théberge : On doit reconnaître que Patrimoine canadien et son prédécesseur ont toujours été les intervenants privilégiés par le gouvernement pour intervenir et travailler avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Bernadette Clement (GSI)
- Quelles pistes de solutions voyez-vous en ce qui a trait à la façon d’éliminer le manque de cohérence entre les différents paliers de gouvernements et d’inclure les municipalités et les communautés plus directement?
- Théberge : Les municipalités sont au cœur de tous les éléments entourant l’immigration. Aussi, il faut s’assurer que les ressources sont à la bonne place. C’est extrêmement important que ces organismes soient bien financés pour réellement faire le travail d’accueil. Il faut vraiment connaître les réels besoins des immigrants lorsqu’ils arrivent dans votre communauté. Une fois qu’on sait cela, il faut se demander si la communauté a les moyens et les outils pour répondre à ces besoins.
- Pouvez-vous nous donner plus de détails sur la raison de votre optimisme? Que voyez-vous d’optimiste dans le cadre des résultats de ce sondage de 2021?
- Théberge : Être optimiste fait partie de la description de tâches pour avoir un emploi au Commissariat aux langues officielles. Le sondage fait par Environics en 2021, est un sondage semblable à celui effectué en 2016. On a constaté qu’environ 87 % des Canadiens, tous âges confondus et peu importe où ils sont, appuient les objectifs de la Loi sur les langues officielles.
2e tour de questions
Raymonde Gagné (Non-affiliée)
- Est-ce que vous avez quand même les ressources humaines et financières pour assurer le traitement des plaintes dans les délais prescrits?
- Théberge : Je dirais que le commissariat n’a pas été structuré pour répondre à un volume de plainte comme c'était le cas l’année passée.
- Vous avez commencé à aborder le sujet de mon autre question, à savoir si vous avez déjà fait une évaluation des ressources nécessaires dans le cadre du projet de loi C-13, si on adopte le projet de loi tel que proposé.
- Théberge : Dans le projet de loi, on parle de médiation. Nous ne faisons pas de médiation à l'heure actuelle au commissariat. Donc il faudra établir une unité de médiation. Présentement, on ne conclut pas des ententes de conformité. On n’émet pas des ordonnances. On devrait avoir du personnel pour le faire.
Lucie Moncion (GSI)
- Je voudrais vous entendre sur un peu plus de spécificités par rapport à la politique en matière d’immigration.
- Théberge : C’est peut-être la première chose à reconnaître: il faut différencier les cibles en fonction des communautés. Pour moi, c’est évident.
- Est-ce que le gouvernement devrait ralentir l’immigration anglophone pour permettre un rattrapage de l’immigration francophone?
- Théberge : là où j’ai certainement un problème, c’est que les nouvelles cibles d’immigration sont lancées sans réellement se pencher sur l’immigration francophone. On dit tout simplement qu’on va maintenir la cible à 4,4 %. qu’on va continuer à faire ce qu’on faisait avant et qu’on va bonifier des éléments. La seule façon qu’on sera en mesure d’atteindre le 4,4 %, ou peu importe le chiffre, c’est de se doter d’une politique séparée
René Cormier (GSI) (président)
- On entend certains dire qu’en immigration francophone, on devrait aussi cibler les pays où la langue parlée n’est ni l’anglais ni le français. Qu’en pensez-vous?
- Théberge : La seule façon de réussir cette approche, c’est d’avoir en place des programmes de formation de très haute qualité.
- Est-ce qu’il y a des craintes dans les communautés anglophones du Québec de perte de leurs droits? Cette crainte est-elle légitime et de quelle manière est-elle inscrite dans le projet de loi C-13? Est-ce qu’il y a une perte de droits pour les communautés anglophones en situation minoritaire?
- Théberge : On a une approche asymétrique dans le projet de loi où l’on prône la promotion et la protection du français, mais pas nécessairement au détriment de l’anglais. Rien n’empêche la promotion du français et, en même temps, la protection des droits linguistiques des deux communautés.
- J’aimerais vous entendre sur le modèle de maturité des langues officielles. Est-ce que cet outil a permis d’assurer une meilleure conformité? Pouvez-vous nous donner des exemples, en fait? Comment cet instrument a été efficace?
- Théberge : Le modèle de maturité n’est pas un outil pour mesurer la conformité, mais pour mesurer l’état des processus et des procédures en place pour assurer une mise en œuvre.
Percy Mockler (C)
- Avec votre expérience, êtes-vous d’accord avec le Quebec Community Groups Network, qui prône le retrait du projet de loi C-13 dans sa forme actuelle?
- Théberge : Non, je crois que le projet de loi C-13 est très prometteur pour l’avenir des langues officielles au Canada. À ce point-ci du processus, je crois que nous devrions aller de l’avant.
- Est-ce que vous et votre équipe êtes d’accord avec la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, qui souhaite accélérer l’adoption du projet de loi C-13 en mettant fin au débat?
- Théberge : nous avons consulté tout le monde. Tout le monde a écrit des rapports. Tous les intervenants se sont prononcés. De plus, il y a une clause dans le projet de loi qui dit qu’après dix ans, on peut le ré-examiner. Je crois que le moment est venu de passer à l’action.
- De quelle manière les parlementaires pourraient-ils apaiser les craintes par rapport au projet de loi C-13?
- Théberge : le projet de loi est divisé en deux: il y a le volet sur les langues officielles, qui traite de la partie I jusqu’à la partie XII; et la LUF, c’est différent. Dans notre mémoire, nous proposons que la codification du concept d’égalité réelle dans la LUF répondrait à plusieurs craintes qu’ont les gens.
- Avec votre grande expérience à travers le pays et nos communautés, tant du côté anglophone que francophone et je pourrais inclure autochtone, dites-moi quel mécanisme serait le meilleur pour administrer le projet de loi C-13 : Patrimoine canadien ou le Conseil du Trésor?
- Théberge : Selon moi, ce serait le Conseil du Trésor. Le Conseil du Trésor est une agence centrale ayant une influence sur l’ensemble de l’appareil fédéral, tandis que Patrimoine canadien est un ministère avec un mandat particulier.
- Qu’en penseriez-vous si on attitrait cela directement au bureau du premier ministre?
- Théberge : Honnêtement, je n’ai jamais pensé à cela, donc il serait difficile pour moi de commenter à ce sujet.
Marie-Françoise Mégie (GSI)
- Par rapport à la proposition de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, à savoir d’instaurer le poste de sous-ministre adjoint responsable de l’immigration francophone, est-ce que vous pensez que c’est pertinent compte tenu de tout ce que nous venons de dire ensemble : il faut continuer, il faut bonifier et se donner des politiques? Est-ce que cela ne serait pas une façon d’aider tout ce mécanisme à se mettre en place?
- Théberge : Certainement. Avec une direction ou une division ayant pour mandat l’immigration francophone et, à sa tête, un sous-ministre adjoint responsable de l’immigration francophone, il est clairement important que, dans la structure et l’appareil fédéral, on reconnaisse l’importance de l’immigration francophone en lui accordant les ressources nécessaires.
2e panel
Juan Manuel Toro Lara, directeur, Gestion, Collège communautaire du Nouveau-Brunswick (CCNB):
- Le CCNB offre environ 80 programmes dans 16 familles de programmes dans toutes les régions francophones de la province du Nouveau-Brunswick par le biais de ses cinq campus situés à Bathurst, Campbellton, Edmundston, Dieppe et la Péninsule acadienne.
- Avant 2015, la proportion de la population étudiante internationale du CCNB était faible et principalement installée dans l’agglomération de la population de Dieppe, la plus importante région du Nouveau-Brunswick. Dès 2015, la population étudiante internationale du CCNB a commencé à s’installer ailleurs dans les différentes régions francophones de la province.
- L’établissement a réussi à diversifier non seulement l’origine géographique de sa population étudiante, mais également leur destination au Nouveau-Brunswick.
- Durant les dernières années, c’est grâce à une gestion rigoureuse de l’effectif étudiant que le CCNB a contribué de manière très importante et à la redynamisation des communautés francophones de la province.
- La population étudiante internationale constitue un bassin de recrutement véritablement prometteur pour l’immigration francophone.
- Dans le cadre d’une entente avec IRCC, le CCNB assure la formation linguistique en français et en anglais pour des réfugiés et des immigrants dans les provinces atlantiques.
Luc Tardif, directeur du recrutement international et des écoles d’immersion, Bureau de recrutement, Université Sainte-Anne:
- L’Université Sainte-Anne est la seule institution postsecondaire d’expression française en Nouvelle-Écosse, et ce depuis 1890.
- L’influx de nouveaux cerveaux provenant de tous les coins de la francophonie mondiale, mais en très grande majorité du continent africain, a eu comme effet de diversifier notre corps étudiant et la population de notre communauté rurale.
- Il y a plusieurs facteurs expliquant les difficultés à amener de nouvelles recrues, dont certains ne sont pas la responsabilité de notre université ou du gouvernement du Canada.
- Le défi le plus important est l’émission de visas.
- Le fait que les visas de 16 pays sont traités dans le seul et même centre de traitement de visas, à Dakar au Sénégal est un enjeu.
- Les institutions francophones hors Québec doivent constamment se battre pour exister aux yeux des agentes et des agents d’immigration.
- Une plus grande collaboration entre les universités canadiennes et les bureaux de visas partout dans le monde apaiserait une partie des frustrations.
- Nous nous attendons à un système plus transparent, plus logique, mais surtout plus juste.
Samantha Losier, conseillère au bureau international, Université de Hearst:
- L’Université de Hearst est un établissement postsecondaire par les francophones et pour les francophones. Elle formait et forme toujours les cerveaux qui animent et font rayonner le Nord de l’Ontario. Ce faisant, l’Université de Hearst assure la présence et la qualité du français dans la région.
- De façon concrète, le recrutement international a permis à l’Université de Hearst d’aller à la rencontre de gens exceptionnels issus de l’immigration.
- Les fonds, les précieuses connaissances, les services en établissement demeurent inaccessibles pour nos étudiants issus de l’international. Pourquoi? Par leur statut temporaire, ils n’y sont pas admissibles.
- L’accompagnement de cette clientèle issue des pays de l’Afrique francophone n’est pas sans défis, des défis que nous sommes nombreux à souligner et à condamner sans relâche.
- L’immigration n’est pas dans notre mandat, mais c’est devenu une partie importante, voire incontournable, de notre travail et pas seulement pour combler nos propres besoins, mais aussi ceux de nos collectivités.
Christian Perron, directeur, Recrutement et services aux étudiant-e-s, Université de Saint-Boniface:
- L’Université de Saint-Boniface, l’USB, est la seule université francophone dans l’Ouest canadien. Elle offre une éducation collégiale et universitaire; 30 programmes au total.
- Aujourd’hui, sur un peu plus de 1300 étudiants, les étudiants internationaux représentent près de 15 % de la population étudiante globale. Ces étudiants proviennent de plus de 20 différents pays, mais surtout de l’Afrique francophone.
- Les enjeux principaux ayant un effet sur la contribution de l’USB à l’immigration francophone au Manitoba sont :
- Le haut taux de refus des demandes de permis d’étude.
- Et l’image de marque de l’éducation internationale du Canada à l’étranger.
- L’USB investit beaucoup de ressources et consacre beaucoup d’efforts à préparer ses activités, recruter, accueillir, orienter, suivre, former, retenir, loger et accompagner les étudiants internationaux, mais elle doit surmonter des obstacles, comme les risques qui relèvent des instances fédérales.
- Recommande que l’on adopte des mesures visant à appuyer les établissements postsecondaires en situation minoritaire dans leurs efforts de contribuer directement au recrutement d’étudiants internationaux et à l’accroissement de l’immigration francophone, entre autres l’harmonisation des messages sur l’éducation internationale et l’immigration serait un atout.
Tour de questions :
Lucie Moncion (GSI)
- J’aimerais avoir votre avis sur le poids financier en lien avec les opérations de vos universités respectives.
- Perron : Les frais de scolarité et la majoration sont parmi les plus bas au pays. La majoration à l’Université de Saint-Boniface pour la plupart des cours est un facteur de deux, c’est-à-dire qu’un étudiant international va payer deux fois ce que paie un étudiant canadien.
- Toro Lara : Pour le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, les étudiants internationaux paient environ deux fois les montants payés par les étudiants canadiens.
- Tardif : À l’Université Sainte-Anne, les étudiants internationaux paient environ 2 000 $ de plus que les étudiants canadiens. On a une sorte de système de bourse qui fait en sorte qu'on ne facture pas beaucoup plus aux étudiants canadiens. Le recrutement international nous permet de continuer à exister.
- Losier : À l’Université de Hearst, on parle d’une différence d’environ 1 600 $ par année. De plus, bien que cela soit vrai, je suis dans une drôle de position parce que les étudiants internationaux représentent jusqu’à 75, 80 % de notre population étudiante, c’est un nombre important.
- Pourriez-vous nous parler de l’aide gouvernementale que vous recevez quant à l’intégration de ces personnes dans vos communautés?
- Losier : S’il y a des services en établissement qui existent à l’Université de Hearst, c’est parce qu’on les a créés, on les finance avec nos budgets et qu'on a créé un bureau international.
- Toro Lara : La façon de fonctionner, nos modèles d’affaires, sont grandement appuyés par le gouvernement provincial qui nous aide financièrement à soutenir des services d’établissement qu’on a montés avec leur aide. On croit également qu’un appui financier du gouvernement fédéral pour des services directs à la population étudiante internationale pourrait avoir un impact à la fois sur les étudiants qui sont ici, mais aussi effectuer une promotion positive de nos établissements à l’international.
- Perron : À Saint-Boniface, on ne reçoit pas de financement supplémentaire pour ce genre d'activités, mais on interagit beaucoup avec nos partenaires communautaires, entre autres l’Accueil francophone.
Raymonde Gagné (Non-affiliée)
- Êtes-vous en mesure de suivre le cheminement de vos diplômés? Et le cas échéant, je souhaiterais savoir quel est le pourcentage d’étudiants internationaux qui font la transition vers la résidence permanente.
- Perron : En ce moment, on n’a pas vraiment la possibilité de suivre nos étudiants internationaux après qu'ils aient obtenu leur diplôme. Nous savons que 60 % de nos diplômés déposent une demande de résidence permanente par l’entremise du programme Candidats du Manitoba. Y en a-t-il d’autres qui passent par l’engrenage fédéral? Possiblement, mais je l’ignore.
- Toro Lara : Au CCNB, 90 % des diplômés de l'année en cours et de l'an dernier ont fait des demandes de permis de travail postdiplôme et ont reçu l’appui de nos consultants en immigration pour des questions de résidence permanente.
- Tardif : Beaucoup plus que la moitié de nos étudiants finissent par obtenir un permis de travail postdiplôme par la suite.
- Croyez-vous que lorsqu’on sera en mesure d’étoffer la politique en matière d’immigration francophone mentionnée dans le projet de loi C-13, qu'il serait important d’inclure des éléments reliés à l’immigration d’étudiants internationaux après qu'ils aient obtenu leur diplôme?
- Toro Lara : Définitivement, cela serait bénéfique à la fois pour notre recrutement en tant qu'établissement postsecondaire, mais également pour la transition et la résidence permanente.
- Losier : J’abonderais dans le même sens. On sait que la double intention est là. Si on accueille des gens de l’Afrique francophone, on sait que grand nombre d’entre eux veulent rester, bien que certains d'entre eux ne le veuillent pas.
- Perron : À mon avis, c’est certain qu’il y aurait un avantage d’harmoniser les stratégies d'éducation internationale et d’immigration et qu’il y ait un élément de cela dans une politique ou une loi.
Marie-Françoise Mégie (GSI)
- Êtes-vous au courant du processus pour l’obtention des visas tout en sachant qu’avec l’algorithme Chinook, beaucoup de demandes sont bloquées. Est-ce votre organisation qui gère tout cela?
- Perron : Je suis conscient que dans nos marchés, particulièrement en ce qui concerne l’Afrique francophone, le taux de refus est en effet à 80 %.
- Losier : À l’Université de Hearst, par exemple, si je suis conseillère en immigration, c’est pour aider les gens à préparer leur demande de permis d’études, qui est ensuite traitée dans un bureau de visa, souvent à partir des ambassades.
- Y a-t-il d’autres éléments que vous pourriez ajouter ou d’autres recommandations que vous pourriez faire pour améliorer le bilan et l’accessibilité aux études des étudiants étrangers francophones?
- Toro Lara : Nous croyons qu’une collaboration accrue avec IRCC pour échanger ce genre d’informations, soit le taux d’approbation des demandes de permis d’études, pourrait être très bénéfique.
- Losier : Une des solutions que je trouve intéressantes, c’est le Volet direct pour les études, qui a commencé dans cinq pays et s’étend désormais dans d’autres pays, notamment dans des pays de l’Afrique francophone où les étapes à franchir sont beaucoup plus exigeantes, mais où les taux d’acceptation sont légèrement plus élevés.
Pierre J. Dalphond (GPS)
- Est-ce que, depuis septembre, vous avez été contactés par le ministère de l’Immigration ou le Cabinet du ministre Fraser pour dire comment vous pourriez participer à une harmonisation des politiques?
- Perron : Pas à ma connaissance.
- Toro Lara : On a été invité à un échange informel, mais pas nécessairement à ce niveau-là.
- Losier : On vous parle aujourd’hui. On espère que cela va continuer dans la bonne direction.
- Sur le terrain, les bonnes intentions ne se sont pas traduites jusqu’à maintenant en des réalités ou des programmes concrets?
- Losier : C’est difficile à dire, car autant qu’on veuille accompagner les bonnes personnes qui rencontrent les critères d’admissibilité et les exigences pour continuer à cheminer, on ne veut pas non plus contribuer à faire augmenter le nombre de personnes au Canada sans statut.
- Toro Lara : Le poids de l’étudiant international anglophone a un impact majeur sur les politiques publiques au détriment des communautés francophones tout court.
René Cormier (GSI) (président)
- Y a-t-il des cas de gens qui font des demandes de permis d’étude et qui finalement ne se retrouvent pas directement dans vos établissements postsecondaires, qui cherchent avant tout à immigrer? Y a-t-il de nombreux cas comme cela?
- Tardif : Oui. C’est difficile de donner des chiffres. Comme je l’ai dit dans mon allocation, on n’a pas de lien avec les ambassades ou les bureaux de visa. Cela fait qu’on ne sait pas exactement le nombre de personnes.
- Perron : Dans les cas où les étudiants francophones arrivent avec l’admission officielle, qu’ils s’inscrivent, qu’on ne les voit jamais et qu’ils finissent par se désinscrire, comme l’a dit M. Tardif, on parle d’un, deux ou trois cas maximum par année. Ce n’est pas fréquent.
- Losier : Nous sommes conscients qu’il existe des fléaux de faux agents qui émettent parfois des lettres d’admission frauduleuses.
- Avez-vous des recommandations à faire pour renforcer une meilleure cohérence des travaux en immigration dans les régions francophones?
- Perron : Il faut comprendre que l’éducation internationale, le recrutement d’étudiants internationaux est une des stratégies qui appuie l’immigration francophone. Ce n’est pas la stratégie. Cela veut dire que l'Université de Saint-Boniface fait partie du réseau d’immigration francophone qui compte plus de 15 différents organismes du Manitoba. Quand on va en arriver à régionaliser, on devra travailler avec nos partenaires communautaires faisant partie de la grande stratégie de l’immigration francophone au Manitoba.
- Tardif : Si on pouvait former tout nouvel employé d’ambassade et les sensibiliser au fait qu’il y a un fait français à l’extérieur de la ville de Montréal, ce serait déjà une partie du travail de fait. Je pense que faciliter la navigation sur le site Web pourrait aider à faire moins d'erreurs.
- Toro Lara : Je crois qu’il est important et il est temps que le gouvernement reconnaisse les établissements d'enseignement postsecondaire pas seulement comme des établissements d’enseignement, mais également comme des partenaires de choix pour ce qui touche l’immigration.
Bernadette Clement (GSI)
- Avez-vous des partenariats avec vos villes en particulier et comment est-ce que cela fonctionne? Comment est-ce que cela se vit?
- Toro Lara : Au Nouveau-Brunswick, on travaille de très près avec les municipalités. Elles y sont investies.
- Tardif : Il y a une initiative avec la municipalité de Clare qui s’appelle Clare: Municipalité accueillante, où l'on mélange la population et les immigrants.
- Losier : Il est vrai que les municipalités sont vraiment un partenaire incontournable pour les universités. Parfois on pense être seul à faire ce travail, on a besoin de leur aide parce qu’on fournit les futures personnes qui vont acheter leurs maisons, qui vont travailler sur leurs comités et siéger au sein de leurs conseils municipaux.
- Monsieur Perron, vous avez parlé de l’image de marque forte qui serait nécessaire. L’image du Canada, j’imagine. Est-ce qu’on a une bonne marque? Est-ce que les problèmes qu’on soulève lors de notre conversation ont porté atteinte à l'image du Canada?
- Perron : Oui, je crois sincèrement que le Canada a une excellente identité de marque pour l’éducation internationale, absolument. Cependant, les propos discutés ce soir, si on apprend que cela se parle ici et là dans d’autres pays que le Canada semble avoir un penchant pour le refus, je pense que ce sont des choses qui peuvent certainement porter atteinte à la réputation et aux volontés de notre pays à faire du recrutement d’étudiants parfois pour l’immigration et parfois non.
Prochaine réunion :
Il est attendu que le comité se réunisse le 28 novembre pour poursuivre son étude sur l’immigration francophone en milieu minoritaire.
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