Aluminium inorganique monomère

Il existe peu d'études sur la toxicité du Alim pour le biote aquatique et, plus particulièrement, celles sur les plantes et les invertébrés sont rares. Cela s'explique sans doute par la difficulté de trouver des méthodes analytiques exactes et précises pour la détermination des concentrations de Alim en solution (Driscoll et Postek, 1996; Driscoll et Schecher, 1990). En outre, la toxicité du Alim pour les organismes aquatiques peut s'avérer difficile à quantifier aux faibles pH étant donné la toxicité inhérente de l'ion H+ (Baldigo et Murdoch, 1997; Atland et Barlup, 1996; Parkhurst et al., 1990). Dans la nature, les espèces sensibles à la toxicité des faibles pH ne devraient pas se retrouver dans les milieux aquatiques qui sont surtout acides. Aux fins de la présente recommandation, on ne signale que les études faisant état des effets toxiques du Alim où l'on a utilisé des témoins adéquats ayant subi une exposition aux mêmes pH.

Parent et Campbell (1994) ont exposé des algues vertes unicellulaires (Chlorella pyrenoidosa) à du Alim afin d'observer les réponses biologiques à diverses valeurs de pH. L'inhibition de la croissance des algues était faible aux pH de la gamme de 4,3 à 4,6. Des CE30 pour la croissance des algues ont été calculées pour une gamme de 7 à 800 μg-L-1 à des pH variant de 6,0 à 5,0. La CE30 la plus sensible a été signalée pour un pH de 6,0 et une concentration de Alim de 7 μg-L-1. La toxicité présentait une très importante dépendance au pH dans cette gamme. Tant Parent et Campbell (1994) que Parker et al., (1989, dans Lydersen et al., 1990) ont proposé que l'espèce aluminium hydroxylé polycyclique pouvait avoir des effets phytotoxiques prononcés. Tout dépendant de la température et d'autres facteurs physico-chimiques (ligands, etc.), toutes les espèces d'aluminium devraient être présentes dans la gamme de pH allant de 5 à 7.

Mackie (1989) a exposé cinq espèces d'invertébrés benthiques à six concentrations de Alim allant de 0 à 400 μg-L-1 et à une gamme de pH comprise entre 4 et 5,5. Les espèces soumises à l'essai comprenaient un déchiqueteur, Hyalella azteca, un racleur, Amnicola limosa, un prédateur, Enallagma sp. et des bivalves, Pisidium casertanum et Pisidium compressum. Les invertébrés ont été exposés, en milieu statique, à du Alim pendant 96 heures afin de déterminer la CL50 de chaque concentration d'exposition. Les taux de mortalité observés aux concentrations d'essai se sont avérés insuffisants pour le calcul de CL50.

Khangarot et Ray (1989) ont étudié la toxicité de divers ions métalliques (Al3+) pour la daphnie, Daphnia magna, et sa corrélation avec leurs propriétés physicochimiques. Des essais biologiques statiques réalisés à 13°C ont servi à déterminer la toxicité des métaux. Les CE50-24 h et CE50-48 h signalées étaient, respectivement, de 85,9 mg-L-1 et de 59,6 mg-L-1.

Clark et LaZerte (1985) ont étudié les effets du pH et de l'aluminium sur les oeufs et les têtards du crapaud d'Amérique (Bufo americanus) et de la grenouille des bois (Rana sylvatica). Ils ont noté une réduction significative de l'éclosion chez les deux espèces lorsque le pH était faible (4,14). Au pH de 4,32, le succès de la reproduction était réduit chez le crapaud d'Amérique par l'ajout de 9,2 μg-L-1 de Alim. Mais au pH de 4,75, une concentration de Alim de 200 μg-L-1 ne modifiait pas le succès de l'éclosion. En deçà d'un pH de 4,75, l'aluminium avait pour effet d'accroître la toxicité. Des résultats semblables ont été signalés pour d'autres espèces d'amphibiens à différents stades de développement (Freda, 1991; Saber et Dunson, 1979; Gosner et Black, 1957). L'indicateur sensible de 9,2 μg-L-1 n'a pas été retenu pour l'élaboration de la recommandation à cause d'importants effets s'expliquant par le seul pH au moment de ces essais biologiques. Les auteurs ont conclu que la réponse de toxicité ne dépendait pas de la spéciation de l'aluminium (Clark et LaZerte, 1985).

Mount et al., (1988) ont exposé des ombles de fontaine (Salvelinus fontinalis) à de l'aluminium monomère en présence d'une faible concentration de calcium (0,5 mg-L-1) et d'un faible pH (4,97 ± 0,02). L'aluminium était décrit comme inorganique et monomère total. La concentration minimale produisant un effet observé (CMEO) sur la croissance était de 47 μg-L-1 de Alim. La concentration d'aluminium total monomère était de 169 μg-L-1. Les effets observés allaient d'une réduction de la croissance et de la survie à des anomalies physiologiques. Les auteurs ont observé que l'augmentation de la concentration de calcium ou la réduction de celle de l'aluminium atténuait les réponses nocives observées.

Holtz et Hutchinson (1989) ont exposé diverses espèces de poissons à divers stades de développement à des solutions de Alim de faibles pH (de 4,5 à 6,0). La survie d'alevins de grand corégone (Coregonus clupeaformis) au stade de l'émergence s'est avérée l'indicateur le plus sensible, à une CMEO de 28 μg-L-1 et à un pH de 5,1. La CMEO pour la survie des alevins d'achigan à petite bouche (Micropterus dolomieui) au stade de l'émergence était de 144 μg-L-1, à un pH de 5,1, et de >58 μg-L-1, à un pH de 5,4. À un pH de 5,97, les oeufs du mené à nageoires rouges (Notropis cornutus) présentaient un taux de mortalité de 90,7 % à une concentration de Alim de 17 μg-L-1. Cet indicateur sensible n'a pas été retenu pour l'élaboration de la recommandation. Les auteurs ont indiqué que la toxicité signalée pourrait bien avoir été causée par une sursaturation en aluminium. Ils ont mesuré l'aluminium colloïdal polymère dans les solutions d'essai et déterminé qu'elles étaient moins importantes que l'acidité et la concentration du Alim pour la survie des poissons.

Roy et Campbell (1995) ont exposé des saumons de l'Atlantique (Salmo salar) juvéniles à des concentrations d'aluminium (sous forme de Alim) et à des mélanges d'aluminium et de zinc, dans une large gamme de pH. La réponse la plus sensible au seul Alim a été notée au pH 5,24. La CL50 signalée était de 51,2 μg-L-1 (1,9 μmole). Ils ont trouvé que la CL50 tendait à être inférieure au cours des essais portant sur les mélanges d'aluminium et de zinc comparativement à ceux où seul l'aluminium était utilisé. L'aluminium agit comme un irritant des branchies qui stimule la production de mucus chez le saumon. Le zinc se fixe facilement sur le mucus des branchies, ce qui donne lieu à un passage rapide des ions métalliques à travers les tissus des branchies et donc à une réaction toxique.

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