Évaluation préalable 4-Éthénylcyclohexène (4-Vinylcyclohexène)
Titre officielle: Évaluation préalable 4-Éthénylcyclohexène (4-Vinylcyclohexène)
Numéro de registre du Chemical Abstracts Service 100-40-3
Environnement et Changement climatique Canada
Santé Canada
mars 2018
Résumé
En vertu de l’article 68 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement 1999 (LCPE), les ministres de l’Environnement et de la Santé ont procédé à l’évaluation préalable du 4‑vinylcyclohexène, ci-après nommé 4-éthénylcyclohexène (4-ECH). Son numéro de registre du Chemical Abstracts Service (NE CASNote de bas de page 1 ) est le 100-40-3. En raison des préoccupations qu’il suscite pour la santé humaine, il a été classé parmi les substances dont l’évaluation était prioritaire.
Le 4-ECH n’est pas présent naturellement dans l’environnement. Il est principalement utilisé comme intermédiaire industriel et est consommé chimiquement lors de la production de composés ignifuges, de matériaux à base de matière plastique et de caoutchouc et d’autres produits chimiques de spécialité. Le 4-ECH peut aussi être présent en tant que résidu dans des adhésifs au latex de type styrène‑butadiène utilisés lors du procédé de production ou d’installation d’articles manufacturés, comme des tapis et des matériaux de construction stratifiés. Les concentrations de 4-ECH dans l’environnement devraient être très faibles en raison de son oxydation rapide dans l’atmosphère et de son potentiel de polymérisation. En 2008, moins de 100 kg de 4-ECH ont été produits au Canada et entre 1000 et 10 000 kg y ont été importés.
Les risques pour l’environnement posés par le 4-ECH ont été caractérisés au moyen de la Classification des risques écologiques des substances organiques (CRE). La CRE est une approche basée sur les risques, qui tient compte de plusieurs paramètres liés au danger et à l’exposition et basés sur une pondération des éléments de preuve servant à déterminer la classification du risque. Les profils de danger sont établis principalement en se basant sur des paramètres liés au mode d’action toxique, à la réactivité chimique, aux seuils de toxicité interne dérivés du réseau trophique, à la biodisponibilité et à l’activité chimique et biologique. Parmi les paramètres pris en compte pour les profils d’exposition, on retrouve la vitesse d’émission potentielle, la persistance globale et le potentiel de transport à grande distance. Une matrice de risques est utilisée pour assigner aux substances un potentiel de préoccupation faible, moyen ou élevé, basé sur leurs profils de danger et d’exposition. La CRE a permis d’identifier le 4-ECH comme composé ayant un faible potentiel d’effets nocifs sur l’environnement.
Compte tenu de tous les éléments de preuve disponibles avancés dans la présente évaluation préalable, le 4-ECH pose un faible risque d’effets nocifs sur les organismes et l’intégrité globale de l’environnement. Il est conclu que le 4-ECH ne satisfait pas aux critères énoncés aux alinéas 64a) ou b) de la LCPE, car il ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur la diversité biologique, ou à mettre en danger l’environnement essentiel pour la vie.
Les effets critiques du 4-ECH sur la santé sont sa carcinogénicité et sa toxicité pour le développement mises en évidence lors d’études en laboratoire. Une faible toxicité a été observée lors d’études par inhalation à court terme.
L’exposition de la population générale au 4-ECH devrait être faible. L’exposition de la population générale au 4-ECH à partir de milieux environnementaux n’est pas attendue étant donné que l’industrie utilise le 4-ECH dans des systèmes fermés. De plus, la quantité de 4-ECH dans le commerce est faible. Le 4-ECH peut être présent en tant que résidu dans des produits manufacturés contenant des adhésifs à base de styrène-butadiène. Les renseignements disponibles indiquent un potentiel d’exposition due au dégazage d’un nombre limité d’articles manufacturés contenant de tels adhésifs. Toutefois, une telle exposition serait limitée et ne surviendrait que pendant une courte période. Étant donné la nature du potentiel d’exposition, les risques pour la santé humaine sont considérés faibles.
À la lumière des renseignements présentés dans la présente évaluation préalable, il est conclu que le 4-ECH ne satisfait pas aux critères énoncés à l’alinéa 64c) de la LCPE, car il ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à constituer un danger au Canada pour la vie ou la santé humaines.
Il est conclu que le 4-ECH ne satisfait à aucun des critères énoncés à l’article 64 de la LCPE.
1. Introduction
En vertu de l’article 68 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement 1999 (LCPE), les ministres de l’Environnement et de la Santé ont procédé à l’évaluation préalable du 4-éthénylcyclohexène (4-ECH) afin de déterminer si cette substance pose ou peut poser des risques pour l’environnement ou la santé humaine. Le 4‑éthénylcyclohexène, appelé ci-après 4‑ECH, a été identifié comme d’intérêt prioritaire pour une évaluation en vertu de la LCPE en raison d’autres préoccupations ayant trait à la santé humaine (ECCC, SC [modifié en 2007]).
Le 4-ECH a déjà fait l’objet d’une évaluation par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA 2012), ainsi que par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC 1994). Ces évaluations font l’objet d’un examen et d’un processus d’approbation rigoureux. Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada considèrent ces évaluations fiables. Nous avons utilisé ces rapports pour étayer la caractérisation des effets sur la santé de la présente évaluation préalable.
Les risques pour l’environnement posés par le 4-ECH ont été caractérisés au moyen de la Classification des risques écologiques posés par les substances organiques (CRE) (ECCC 2016a). Pour la CRE, on décrit les risques posés par une substance en utilisant des paramètres clés parmi lesquels le mode d’action toxique, la réactivité chimique, les seuils de toxicité interne dérivés du réseau alimentaire, la biodisponibilité et l’activité chimique et biologique. Elle tient compte de l’exposition possible des organismes dans des environnements terrestres ou aquatiques, basée sur des facteurs incluant les taux d’émission potentiels, la persistance globale et le potentiel de transport atmosphérique à grande distance. Les divers éléments de preuve sont combinés afin d’identifier les substances nécessitant une évaluation plus poussée de leur potentiel d’effets nocifs sur l’environnement ou présentant une faible probabilité de tels effets.
Pour la présente évaluation préalable, nous avons pris en compte des renseignements sur les propriétés chimiques, le devenir dans l’environnement, les dangers, les utilisations et les expositions. Des données pertinentes ont été identifiées jusqu’en avril 2016. Nous avons utilisé des données empiriques tirées d’études clés ainsi que certains résultats de modélisation pour tirer nos conclusions. Quand ils étaient pertinents, nous avons tenu compte de renseignements présentés dans des évaluations faites par d’autres juridictions.
La présente évaluation préalable a été préparée par le personnel des programmes d’évaluation des risques de la LCPE travaillant à Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada. Elle inclut des intrants d’autres programmes de ces ministères. L’évaluation des effets sur l’environnement du présent document repose sur le document sur la CRE (publié le 30 juillet 2016), lequel a été examiné par des pairs et a été soumis à une période de consultation publique de 60 jours. De plus, l’ébauche de la présente évaluation préalable a aussi été l’objet d’une période de commentaires du public de 60 jours. Bien que des commentaires de l’extérieur aient été pris en compte, Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada restent responsables du contenu final et des conclusions de la présente ébauche d’évaluation préalable.
La présente évaluation préalable est centrée sur des renseignements critiques afin de déterminer si la substance visée satisfait aux critères de l’article 64 de la LCPE. À cette fin, nous avons examiné les renseignements scientifiques et suivi une approche basée sur une pondération des éléments de preuve et le principe de précautionNote de bas de page 2 . Nous présentons dans l’ ébauche d’évaluation préalable les renseignements critiques et les considérations à partir desquels notre conclusion a été tirée.
2. Identité de la substance
Le 4-éthénylcyclohexène est un composé organique appartenant à la classe des alcènes. Le numéro de registre du Chemical Abstracts Service (No CASNote de bas de page 3 ), le nom sur la Liste intérieure des substances (LIS) et le nom commun du 4-éthénylcyclohexène sont présentés au tableau 2‑1.
3. Propriétés physiques et chimiques
Nous donnons dans le tableau 3-1 un résumé des propriétés physiques et chimiques du 4‑ECH. D’autres propriétés physiques et chimiques sont présentées dans le document ECCC 2016b.
Propriété |
Valeur |
Type de donnée |
Référence |
Point de fusion (oC) |
-108,9 |
expérimentale |
EPA 2006 |
Point d’ébullition (oC) |
128,9 |
expérimentale |
EPA 2006 |
Hydrosolubilité (mg/L) |
50 |
expérimentale |
EPA 2006 |
Masse moléculaire (g/mL) |
0,8299 à 20 oC |
expérimentale |
EPA 2006 |
Pression de vapeur (kPa) |
2,09 à 25 oC (15,7 mm Hg) |
expérimentale |
EPA 2006 |
Constante de Henry (Pa.m3/mol) |
4,54 × 103 |
expérimentale |
EPI Suite c2010-2012 |
log Koe (sans dimension) |
3,93 |
expérimentale |
EPI Suite c2010-2012 |
Abbréviation : Koe = coefficient de partage octanol-eau
4. Sources et utilisations
Le 4-ECH n’est pas présent naturellement dans l’environnement. C’est le produit de la réaction de dimérisation catalytique du buta-1,3-diène, sa production et son utilisation étant réalisées dans des systèmes clos (EPA 2006).
Le 4-ECH a été visé lors d’enquêtes menées en vertu de l’article 71 de la LCPE. Dans le Tableau 4‑1, nous donnons un résumé des quantités totales de 4-ECH produites et importées (Canada 2009).
Nom commun |
Production totale (kg) |
Importations totalesa(kg) |
Année de déclaration |
Référence de l’enquête |
4-ECH |
100 |
1 000 à 10 000 |
2008 |
Canada 2009 |
a Ces valeurs reflètent les quantités déclarées en réponse à des enquêtes menées en vertu de l’article 71 de la LCPE. Voir l’enquête pour des détails spécifiques sur les inclusions et les exclusions (annexes 2 et 3).
Le 4-ECH est principalement utilisé comme intermédiaire pour la production d’autres composés chimiques et produits, comme des composés ignifuges, des matières plastiques et des matières à base de caoutchouc, des adhésifs et des solvants (EPA 2006; CIRC 1994; ECHA 2012). Nous donnons dans le tableau 4-2 d’autres renseignements sur les utilisations de cette substance.
Utilisation |
Oui ou Non |
Additif alimentairea |
N |
Matériaux d’emballage alimentairea |
O |
Base de données sur les produits pharmaceutiques, comme ingrédient médicinal ou non médicinal dans des désinfectants ou des médicaments destinés aux humains ou aux animaux au Canadab |
N |
Base de données d’ingrédients de produits de santé naturelsc |
N |
Base de données des produits de santé naturels homologués, comme ingrédient médicinal ou non médicinal dans des produits de santé naturels au Canadac |
N |
Liste critique des ingrédients des cosmétiques : ingrédients interdits et d’usage restreintd |
N |
Déclaré présent dans des cosmétiques, basé sur des déclarations faites en vertu du Règlement sur les cosmétiques de Santé Canadad |
N |
Formulant dans des produits antiparasitaires homologués au Canadae |
N |
Abbréviations : O = oui; N = non
a (courriel de la Direction des aliments au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé)
b (courriel de la Direction des produits thérapeutiques au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé)
c (courriel de la Direction des produits de santé naturels et sans prescription au au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé)
d (courriel de la Direction de la sécurité des produits de consommation au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé)
e (courriel de l’Agence de la réglementation de la lutte antiparasitaire au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé)
Au Canada, le 4-ECH a été identifié en tant qu’impureté dans un composant utilisé pour la production de certains matériaux d’emballage alimentaire. Il n’est pas directement ni intentionnellement ajouté à ces matériaux d’emballage alimentaire (courriel de la Direction des aliments au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé).
D’autres recherches dans des fiches signalétiques (FS) ont permis d’identifier un petit nombre de produits spécialisés pour lesquels le 4-ECH est mentionné comme composant, typiquement de moins de 0,02 % à moins de 0,1 %. Parmi ces produits, on retrouve des adhésifs spécialisés pour l’électronique et les circuits électroniques et des matériaux polymères en vrac qui sont ensuite utilisés à un niveau industriel (copolymères de styrène et de butadiène) (FS 2015a, FS 2009, FS 2015b). Le 4-ECH peut aussi être présent comme résidu dans le composant adhésif d’articles manufacturés, comme des tapis et des matériaux de construction stratifiés (EPA 2006).
Aux États-Unis, la production nationale de 4-ECH a été rapportée à 1,41 million de kilogrammes (3,11 millions de livres) pour l’année 2012 (CDAT 2014). Une recherche effectuée dans la Household Products database n’a pas permis d’identifier de produits de consommation associés au no CAS du 4-ECH (Household Products Database 2016).
5. Potentiel d’effets nocifs sur l’environnement
5.1 Caractérisation des risques pour l’environnement
Les risques posés à l’environnement par le 4-ECH ont été caractérisés au moyen de la Classification des risques écologiques des substances organiques (CRE) (ECCC 2016a). La CRE est une approche basée sur les risques qui tient compte de plusieurs paramètres liés au danger (puissance) et à l’exposition basés sur la pondération de plusieurs éléments de preuve. Les divers éléments de preuve sont combinés afin de faire la différence entre des substances présentant une puissance plus ou moins élevée et un potentiel d’exposition plus ou moins élevé dans divers milieux. Cette approche réduit l’incertitude globale de la caractérisation des risques comparativement à une approche qui reposerait sur un seul paramètre dans un seul milieu (p. ex. CL50). Dans les paragraphes qui suivent, nous résumons l’approche adoptée, qui est décrite en détail dans le document ECCC 2016a.
Des données sur les propriétés physico-chimiques, le devenir (demi-vie chimique dans divers milieux et biotes, coefficients de partage et bioconcentration dans le poisson), l’écotoxicité aiguë pour le poisson et les quantités produites et importées au Canada ont été collectées dans la littérature scientifique, dans des bases de données empiriques (p. ex. boîte à outils QSAR de l’OCDE) et dans les réponses à des enquêtes menées en vertu de l’article 71 de la LCPE. D’autres données ont été obtenues en utilisant des modèles de type QSAR (Quantitative Structure-Activity Relationship) ou de bioaccumulation et de devenir du bilan massique. Ces données ont été utilisées comme intrants dans d’autres modèles de bilan massique ou pour compléter les profils d’exposition et de danger de la substance.
Les profils de danger ont été établis en se basant principalement sur des paramètres liés au mode d’action toxique, à la réactivité chimique, aux seuils de toxicité interne dérivés du réseau trophique, à la biodisponibilité et à l’activité chimique et biologique. Les profils d’exposition ont aussi été élaborés à partir de plusieurs paramètres dont la vitesse d’émission potentielle, la persistance globale et le potentiel de transport à grande distance. Les profils de danger et d’exposition ont été comparés aux critères de décision afin de classer les potentiels de risque et d’exposition de chaque substance comme faible, moyen ou élevé. D’autres règles ont été appliquées (p. ex. constance de la classification, marge d’exposition) afin de raffiner les classifications préliminaires du danger et de l’exposition.
Une matrice de risques a été utilisée pour assigner à chaque substance un risque potentiel faible, moyen ou élevé, basé sur la classification de son danger et de son exposition. Les classifications du risque potentiel au moyen de la CRE ont été vérifiées en suivant une approche en deux étapes. La première étape servait à ajuster les résultats de la classification du risque de moyen ou élevé à faible pour les substances présentant une faible vitesse d’émission estimée dans l’eau après traitement des eaux usées, représentant un faible potentiel d’exposition. La deuxième étape servait à revoir les résultats d’une classification du potentiel de risque faible ou moyen de scénarios de risque relativement prudents, d’échelle locale (c.-à-d. dans la zone à proximité du point de rejet), conçus pour protéger l’environnement, afin de déterminer si la classification du risque potentiel devrait être accrue.
La CRE est basée sur une approche pondérée afin de réduire au minimum toute surclassification ou sousclassification du danger et de l’exposition et du risque subséquent. Les approches équilibrées pour tenir compte des incertitudes sont décrites en plus de détails dans le document ECCC 2016a. Nous décrivons ci-après deux des zones d’incertitude les plus importantes. Les erreurs dans les valeurs de toxicité aiguë empiriques ou modélisées pourraient conduire à des changements de la classification du danger, en particulier en ce qui a trait aux paramètres reposant sur des valeurs de résidus dans les tissus (c.-à-d. mode d’action toxique), dont de nombreux sont des valeurs prédites à partir de modèles QSAR. Cependant, l’impact de cette erreur est atténué par le fait qu’une surestimation de la létalité médiane conduira à une valeur prudente (protectrice) pour les résidus dans les tissus pour l’analyse des résidus corporels critiques (RCC). L’erreur de sousestimation de la toxicité aiguë sera atténuée par l’utilisation d’autres paramètres de risque comme le profilage structurel du mode d’action, la réactivité et/ou l’affinité de liaison à l’estrogène. Les changements dans les quantités chimiques ou les erreurs dans ces quantités pourraient conduire à des classifications différentes de l’exposition, la classification de l’exposition et du risque étant hautement sensible à la vitesse d’émission et aux quantités utilisées. Les résultats de la CRE reflètent donc l’exposition et le risque au Canada basés sur les quantités actuellement utilisées et pourraient ne pas refléter des tendances futures.
Les données critiques et les paramètres pris en compte pour développer les profils spécifiques au 4-ECH et les résultats de la classification du danger, de l’exposition et du risque sont présentés dans le document ECCC 2016b.
En se basant sur les classifications de faible danger et de faible exposition obtenues au moyen de la CRE, le 4-ECH a été classé comme ayant un faible potentiel de risque pour l’environnement. Il est donc improbable que cette substance soit inquiétante pour les organismes ou l’intégrité plus globale de l’environnement au Canada.
6. Potentiel d’effets nocifs sur la santé humaine
6.1 Évaluation de l’exposition
6.1.1 Milieux de l’environnement
Le 4-éthénylcyclohexène est principalement utilisé comme intermédiaire pour la production d’autres composés chimiques et produits, dont des composés ignifuges et des matières plastiques et caoutchoucs. Il est produit et utilisé dans des systèmes clos de production, car il est réactif et s’oxyde facilement dans l’air.
Il ne devrait pas y avoir d’exposition de la population générale au 4‑ECH présent dans les milieux naturels étant donné que l’industrie le produit et l’utilise dans des systèmes fermés. De plus, tout rejet dans l’air serait oxydé, avec une demi-vie atmosphérique d’environ 1,4 heure (HPV 2006). Cette substance peut aussi se polymériser dans l’air à des températures supérieures à 26,6 ºC, produisant un matériau de type gomme et limitant ainsi le potentiel d’accumulation dans l’environnement (ECHA 2006). Il est improbable de retrouver du 4-ECH dans le sol en raison de sa pression de vapeur relativement élevée (EPA 2006) et de son Koe faible à modéré. Il est facilement éliminé de l’effluent sortant des systèmes de traitement des eaux uséesNote de bas de page 4 , avec un taux d’élimination estimée à 92 % par un traitement secondaire basé sur le modèle SimpleTreat (Struijs et al. 1991).
6.1.2 Produits de consommation
Des concentrations limitées de 4-ECH ont été rapportées dans un petit nombre de produits spécialisés pouvant être disponibles pour les consommateurs. Étant donné la nature de ses utilisations et ses propriétés physico‑chimiques, le 4-ECH peut potentiellement conduire à une exposition limitée par inhalation.
Les articles manufacturés neufs, comme les tapis et les matériaux de construction stratifiés (dans lesquels des adhésifs de type latex à base de styrène-butadiène ont été utilisés pendant la fabrication ou l’installation) peuvent contenir des résidus de 4-ECH (EPA 2006). Le dégazage de tels produits peut avoir lieu à l’intérieur d’une résidence et ceci peut entraîner une exposition par inhalation.
L’ampleur du dégazage de 4-ECH lors de l’installation d’articles manufacturés neufs a fait l’objet d’études en enceinte. Le Conseil national de recherches du Canada (Base données sur les émissions des matériaux du CNRC) a quantifié la concentration atmosphérique de 4-ECH dans une enceinte fermée pendant 24 heures, après simulation de l’installation d’articles manufacturés neufs (CNRC 2011). La concentration de 4-ECH dans l’enceinte allait de 2,84 µg/m3 à 0,12 µg/m3 avec une moyenne arithmétique de 1,48 µg/m3 (CNRC 2011).
De même, d’autres études en enceinte suggèrent que les concentrations atmosphériques de 4-ECH résultant de tapis nouvellement produits et installés pourraient être de l’ordre de quelques parties par milliard (6 ppb) immédiatement après l’installation et décroissant rapidement au cours des six premières heures (à 2 ppb) (de 0,027 à 0,009 mg/m3) (Hodgson 1993).
Ces faibles niveaux initiaux et la diminution de la concentration en peu de temps reconfirment que les niveaux résiduels de 4-ECH présents dans des articles manufacturés sont faibles et rapidement éliminés dans un environnement intérieur. L’exposition au 4-ECH devrait donc être limitée.
L’exposition potentielle au 4-ECH due à sa présence comme résidu dans des composants utilisés pour la production de certains matériaux d’emballage alimentaire devrait être négligeable (courriel de la Direction des aliments au Bureau de l’évaluation du risque des substances existantes; non référencé).
En résumé, l’exposition de la population générale au 4-ECH dans les milieux de l’environnement ne devrait pas avoir lieu et l’exposition due aux aliments devrait être négligeable. L’utilisation d’articles manufacturés contenant des résidus de 4-ECH peut conduire à une exposition limitée après installation. Aucune exposition ne devrait avoir lieu après le dégazage du 4-ECH résiduel.
6.2 Évaluation des effets sur la santé
L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), ainsi que d’autres groupes ou agences, ont résumé la littérature sur les effets sur la santé et/ou caractérisé la toxicité du 4-ECH (NTP 1986; CIRC 1994; TCEQ 2011; ECHA 2012; Kappeler et Hoyer 2012; OEHHA 2013). Les études sur les effets sur la santé indiquent que l’exposition orale répétée d’animaux de laboratoire au 4-ECH peut résulter en une carcinogénicité. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé le 4-ECH comme carcinogène du groupe 2B (possiblement carcinogène pour les humains), et la Commission européenne dans le cadre du Système général harmonisé de classification et d’étiquetage des produits chimiques des Nations Unies l’a classé comme carcinogène de catégorie 2 (suspecté carconigène pour les humains) (CIRC 1994; Union européenne 2008, 2009; NU 2013). Dans des études sur la carcinogénicité réalisées chez la souris, on a observé l’apparition de tumeurs ovariennes et surrénaliennes chez les femelles et des lymphomes et des tumeurs du poumon chez les mâles. Les études de carcinogénicité chez le rat indiquent une fréquence accrue de tumeurs cutanées chez les mâles et de tumeurs du gland du clitoris chez les femelles (IARC 1994).
Des effets nocifs sur la reproduction ont aussi été observés dans les études animales réalisées chez la souris et le rat, lesquelles font état d’une toxicité in ovo induite par le 4‑vinyl‑1‑cyclohexène diépoxyde (vinyl cyclohexane dioxyde), principal métabolite bioactif du 4‑ECH (Kappeler et Hoyer 2012; OEHHA 2013).
Des souris exposées à du 4-ECH par inhalation à raison de 250, 490 ou 1000 ppm (4425 mg/m3) pendant deux jours et des rats exposés à raison de 500, 1000 ou 2000 ppm (8850 mg/m3) n’exhibaient aucun accroissement de formation de micronoyaux, et les souris n’exhibaient aucun signe clinique de toxicité (concentration sans effet nocif observé (CSENO) = 4425 mg/m3), bien que les souris mâles exhibaient un gain de poids significativement réduit (Bevan et al. 2001). Les rats exhibaient une réactivité moindre au bruit ainsi qu’une narcose, les deux étant réversibles après l’arrêt de l’exposition chez tous les groupes exposés (concentration minimale avec effet observé (CMEO) = 500 ppm; 2212 mg/m3). Lors d’une étude de détermination de 10 jours d’exposition de souris et de rats par inhalation, une CSENO de 3185 mg/m3 a été établie (EPA 1994).
6.3 Caractérisation des risques pour la santé humaine
Le 4-éthénylcyclohexène est un intermédiaire chimique industriel qui est produit et utilisé dans des systèmes clos pendant la production d’autres composés chimiques ou produits. L’exposition de la population générale au 4-ECH dans les milieux de l’environnement ne devrait pas avoir lieu et, donc, le risque pour la santé humaine est faible. Le risque pour la santé humaine dû à une exposition alimentaire potentielle à du 4‑ECH, pouvant être présent sous forme de résidu dans des composants utilisés pour la production de matériaux d’emballage alimentaire, est considéré négligeable.
Le dégazage de tapis ou de matériaux de contruction stratifiés neufs contenant des adhésifs à base de styrène-butadiène peut conduire à une exposition limitée à du 4‑ECH par inhalation à l’intérieur de résidences. Toute exposition potentielle devrait être limitée (de quelques minutes à quelques heures, immédiatement après l’installation du produit), comme l’ont montré des études en enceinte. Lors d’études en laboratoire, la carcinogénicité chez des animaux a été établie comme effet critique lors d’expositions répétées à du 4-ECH. Toutefois, cet effet critique n’est pas considéré pertinent pour la caractérisation des risques posés par une inhalation limitée à des produits manufacturés. De même, les effets sur la reproduction dus à une inhalation n’ont été observés que chez des animaux exposés à de très fortes concentrations de 4‑ECH pendant de longues périodes (90 jours). Les études plus représentatives d’une durée d’exposition pertinente pour la population générale ont montré des effets limités et réversibles à des doses qui étaient de plusieurs ordres de grandeur supérieures à celles auxquelles la population générale pourrait être exposée. Le risque pour la santé humaine est donc considéré faible.
Bien que l’exposition de la population générale au 4-ECH ne soit pas préoccupante aux niveaux actuels, cette substance est considérée avoir un effet préoccupant pour la santé, basé sur sa carcinogénicité potentielle. Elle pourrait donc devenir préoccupante pour la santé humaine si les niveaux d’exposition venaient à augmenter.
6.4 Incertitudes de l’évaluation des risques pour la santé humaine
La confiance globale dans la base de données sur l’exposition par inhalation est modérée, des incertitudes provenant d’un manque de données de surveillance de l’air à l’intérieur des résidences au Canada. Néanmoins, les études en enceinte simulant un scénario d’air intérieur fournissent un contexte pour l’exposition potentielle due au dégazage d’articles manufacturés.
7. Conclusion
Compte de tous les éléments de preuve contenus dans l’évaluation préalable, le 4-ECH présente un risque faible d’effets nocifs sur les organismes et sur l’intégrité globale de l’environnement. Il est conclu que le 4-ECH ne satisfait pas aux critères énoncés aux alinéas 64a) ou b) de la LCPE, car il ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur la diversité biologique, ou à mettre en danger l’environnement essentiel pour la vie.
À la lumière des renseignements présentés dans la présente évaluation préalable, il est conclu que le 4-ECH ne satisfait pas aux critères énoncés à l’alinéa 64c) de la LCPE, car il ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à constituer un danger au Canada pour la vie ou la santé humaines.
Il est donc conclu que le 4-ECH ne satisfait à aucun des critères énoncés à l’article 64 de la LCPE.
Références
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Canada; 1999; Loi canadienne sur la protection de l’environnement, 1999, L.C. 1999, ch. 33; Gazette du Canada, Partie III, vol. 22, no 3.
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[ECCC, SC] Environnement et Changement climatique Canada, Santé Canada; modifié le 20 avril 2007; Catégorisation; Ottawa (ON) : gouvernement du Canada [consulté le 25 septembre 2015].
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