Ce que nous avons entendu : Consultations au sujet d’une politique moderne sur les justes salaires

De : Emploi et Développement social Canada

Programme du travail

Le 28 juin 2019

Sur cette page

Formats substituts

Ce que nous avons entendu : Consultations au sujet d’une politique moderne sur les justes salaires [PDF - 1,02 Mo]

Les formats en gros caractères, braille, MP3 (audio), texte électronique, et DAISY sont disponibles sur demande en commandant en ligne ou en composant le 1 800 O-Canada (1-800-622-6232). Si vous utilisez un téléscripteur (ATS), composez le 1-800-926-9105.

À propos du présent rapport

Les politiques sur les justes salaires visent généralement à empêcher les fournisseurs de soumissionner à des contrats publics en versant à leurs employés des salaires sous un seuil acceptable. Elles exigent habituellement que les entrepreneurs et les sous-traitants versent à leurs employés un salaire égal ou supérieur aux niveaux de salaire établis pour certaines professions et régions. Plusieurs administrations canadiennes ont de telles politiques, notamment le Nouveau-Brunswick, l’Ontario, le Manitoba, le Yukon et la Ville de Toronto.

Le gouvernement fédéral avait adopté une politique sur les justes salaires, à savoir la Loi sur les justes salaires et les heures de travail, qui visait les entrepreneurs et les sous-traitants des secteurs de la construction, de la rénovation, de la réparation et de la démolition. Cette loi, promulguée à l’origine en 1935 pendant la Grande Dépression, a été abrogée en 2014.

Le très honorable Justin Trudeau, premier ministre, a demandé à l’honorable Patty Hajdu, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail, de collaborer avec la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement et le président du Conseil du Trésor pour mettre en œuvre une politique moderne sur les justes salaires. À l’appui de cet engagement, le gouvernement du Canada a consulté des intervenants sur la façon dont une politique moderne sur les justes salaires pourrait contribuer à garantir que les travailleurs ayant des contrats financés avec l’argent des contribuables sont rémunérés équitablement.

Chaque année, environ 1,9 million d’employés travaillent pour des entreprises qui fournissent au gouvernement du Canada des biens et services d’une valeur de près de 25 milliards de dollars. Un certain nombre de programmes sont en place pour utiliser ce pouvoir d’achat afin d’améliorer la vie des Canadiens. Le premier est le Programme de contrats fédéraux, qui exige que certains entrepreneurs du gouvernement (ceux qui reçoivent des contrats d’une valeur d’au moins un million de dollars et qui comptent au moins 100 employés permanents au Canada) cherchent à constituer et à maintenir un effectif représentatif de la population active canadienne, notamment avec des membres des quatre groupes désignés en vertu de la Loi sur l’équité en matière d’emploi. La Stratégie d’approvisionnement auprès des entreprises autochtones, qui vise à favoriser le développement des entreprises autochtones, est un autre exemple.

Entre novembre 2018 et mars 2019, le gouvernement du Canada a consulté le public, les syndicats et des organisations syndicales, des fournisseurs et des organisations de fournisseurs, des experts et des défenseurs des droits pour savoir si une politique moderne sur les salaires était nécessaire et à quoi elle devrait ressembler.

Le présent rapport est un résumé de ce que nous avons entendu au cours des consultations qui comprenaient un sondage public en ligne ayant récolté 234 réponses, 6 observations écrites, des tables rondes avec des représentants de 20 syndicats et organisations syndicales et des discussions avec des représentants de 20 fournisseurs et organisations de fournisseursNote de bas de page 1.

Ce que nous avons entendu

Les intervenants ont envoyé un message clair au cours des consultations : tous les Canadiens, y compris ceux qui travaillent pour le gouvernement fédéral, méritent un juste salaire pour leur travail. En même temps, nous avons entendu des points de vue divergents sur ce que cela signifie dans le contexte d’industries, de professions et de régions particulières.

Dans l’ensemble, les syndicats et les organisations syndicales ont exprimé des opinions favorables à l’égard des politiques sur les justes salaires, tandis que les fournisseurs et les organisations de fournisseurs estiment que de telles politiques ne sont ni nécessaires ni souhaitables. Des experts d’universités, d’entreprises et d’organisations non gouvernementales ont exprimé des points de vue partagés sur les politiques sur les justes salaires, tandis que les membres du public avaient tendance à se concentrer sur ce qu’une telle politique pourrait signifier pour eux et leurs familles.

Ces points de vue s’articulent autour de 4 grandes questions, qui sont résumées ci-dessous dans cette section :

  1. une politique sur les justes salaires est-elle nécessaire?
  2. qu’est-ce qu’un juste salaire?
  3. quelles industries devraient être visées par une politique sur les justes salaires?
  4. quels effets une politique sur les justes salaires pourrait-elle avoir?

Question 1 : Une politique sur les justes salaires est-elle nécessaire?

Les représentants des fournisseurs nous ont dit que les entreprises qui ont des contrats avec le gouvernement paient déjà bien leurs employés, ce qui rend inutile une politique sur les justes salaires. Ils ont également noté que le marché du travail pousse actuellement les salaires à la hausse, car la demande de main-d’œuvre est élevée et le chômage est faible.

« Le marché est déjà très compétitif sur le plan des salaires, en raison de la pénurie de candidats qualifiés. »

Un participant au sondage en ligne

Les syndicats et les organisations syndicales, en revanche, ont soutenu qu’une politique sur les justes salaires est nécessaire pour garantir des règles du jeu équitables entre les entreprises syndiquées et non syndiquées qui se disputent les contrats gouvernementaux. Selon eux, les niveaux de rémunération fixés par les conventions collectives ont tendance à être plus élevés que les salaires en vigueur sur le marché, en partie parce qu’ils peuvent inclure des avantages sociaux. Par conséquent, ils estimaient que les entreprises syndiquées étaient désavantagées sur le plan concurrentiel parce qu’elles peuvent faire face à des coûts de main-d’œuvre plus élevés que les entreprises non syndiquées.

« Cela est nécessaire pour que tous les employeurs qui soumissionnent à des projets fédéraux puissent présenter des soumissions équitables. En l’absence d’un processus d’appel d’offres équitable, un entrepreneur syndiqué sera éliminé en raison de la différence de coûts horaires de la main-d’œuvre et des avantages sociaux liés aux soins de santé et de bien-être qui ne sont pas versées par un entrepreneur non syndiqué. »

Un participant au sondage en ligne

Certains experts ont fait valoir qu’une politique sur les justes salaires est nécessaire pour faire en sorte que les marchés publics n’entraînent pas de bas salaires, tandis que d’autres ont fait valoir que les lois sur le salaire minimum pourraient être plus efficaces pour remédier aux bas salaires.

Les membres du public qui ont participé au sondage en ligne étaient d’avis qu’une politique sur les justes salaires était nécessaire pour soutenir les emplois bien rémunérés dans un contexte où le coût de la vie est en hausse.

« Pour avoir une économie forte et une classe moyenne prospère dans notre pays, nous devons reconnaître que tout commence par des salaires décents et justes pour nos travailleurs. »

Un participant au sondage en ligne

Question 2 : Qu’est-ce qu’un juste salaire?

Les administrations qui ont des politiques sur les justes salaires ont adopté différentes définitions pour expliquer ce concept. Certaines se fient aux taux prévus dans les conventions collectives, tandis que d’autres s’en remettent aux taux des justes salaires établis par les gouvernements qui prennent en compte diverses sources d’information.

Lors des consultations, la plupart des syndicats et des organisations syndicales ont réclamé une approche de rémunération globale pour la définition d’un juste salaire, faisant valoir qu’elle devrait inclure non seulement le salaire de base, mais aussi les avantages sociaux. Ils ont également affirmé que les niveaux de rémunération globale prévus dans les conventions collectives constituaient l’information la plus fiable accessible au public sur ce que serait un juste salaire.

Les représentants des fournisseurs nous ont dit qu’il est préférable que les décisions concernant la définition d’un juste salaire soient prises par les entreprises individuelles à la lumière des forces du marché et des lois et règlements en vigueur. Ils ont également noté que les taux publiés dans les échelles de justes salaires en vertu de la Loi sur les justes salaires et les heures de travail étaient parfois inférieurs aux taux du marché.

En outre, un expert a suggéré que l’idée d’un salaire suffisant, lié au coût de la vie local, devrait faire partie du débat sur les justes salaires.

Question 3 : Quelles industries devraient être visées?

Bien que certains syndicats, organisations syndicales et experts aient demandé qu’une politique sur les justes salaires s’applique à toutes les industries dans lesquelles le gouvernement du Canada passe des marchés de biens et de services, une grande partie de ce que nous avons entendu portait sur la construction, la seule industrie visée par l’ancienne Loi sur les justes salaires et les heures de travail.

Les syndicats de la construction craignaient que la concurrence pour l’obtention de contrats n’amène les sous-traitants à verser à leurs travailleurs de faibles salaires, parfois en espèces, afin de limiter les coûts. Par conséquent, selon eux, ces travailleurs reçoivent des salaires sous un seuil acceptable, ne reçoivent pas les avantages auxquels ils ont droit et n’ont parfois pas la formation et les permis d’exercer un métier nécessaires pour effectuer leur travail. De telles conditions, nous ont dit ces syndicats, rendraient difficiles le recrutement de nouveaux apprentis et l’augmentation de la représentation des femmes, des travailleurs autochtones, des jeunes, des membres des minorités visibles, des anciens combattants et d’autres groupes dans les métiers spécialisés.

Les représentants des fournisseurs de services de construction ont fait remarquer que la sous-traitance est la norme dans leur industrie, où les entrepreneurs font régulièrement appel à des spécialistes qualifiés pour réaliser des parties précises d’un projet. Ils ont également fait valoir que les entreprises de construction sont concurrentielles et maintiennent leurs offres à un bas niveau non pas en versant aux travailleurs des salaires sous un seuil acceptable, mais grâce à une bonne gestion de projet, à des innovations de processus, à une stratégie et à l’achat rapide de matériaux. Ils ont dit qu’ils travaillent fort pour augmenter le nombre d’apprentis et la représentation des groupes sous-représentés dans les métiers spécialisés.

Question 4 : Quels effets une politique sur les justes salaires pourrait-elle avoir?

On nous a dit que les effets d’une politique sur les justes salaires pourraient varier selon l’industrie et la profession, selon les détails de la politique et selon qu’une politique tiendrait compte ou non des situations distinctes des différentes régions.

En général, les représentants des fournisseurs ont averti qu’une politique sur les justes salaires pourrait :

« L’économie canadienne est fondée sur un système de libre marché. Imposer des niveaux de salaire arbitraire peut présenter des obstacles pour les nouvelles entreprises qui souhaitent soumissionner et exclure les petites entreprises désireuses de développer leurs activités [...] »

Un participant au sondage en ligne

Les syndicats et les organisations syndicales ont insisté sur le fait qu’une politique sur les justes salaires pourrait avoir de nombreux avantages pour autant qu’elle soit bien appliquée, et ont suggéré diverses mesures d’application précises. Ils nous ont dit qu’une politique sur les justes salaires pourrait :

« Les politiques sur les justes salaires sont un moyen de promouvoir une concurrence positive fondée sur l’amélioration des compétences et la productivité de la main-d’œuvre plutôt que la concurrence destructrice fondée sur la réduction des coûts de main-d’œuvre en diminuant la rémunération des travailleurs. Les politiques sur les justes salaires augmentent le salaire et les avantages sociaux des travailleurs, et sont associées à l’amélioration des résultats de l’apprentissage et à une réduction du nombre de blessures. »

Un participant au sondage en ligne

Certains experts ont fait valoir qu’une politique sur les justes salaires entraînerait une augmentation des coûts à court terme, mais que ces coûts seraient compensés par une augmentation de la productivité à mesure que les entreprises s’adapteraient en investissant davantage dans la main-d’œuvre qualifiée et en trouvant des gains d’efficience dans d’autres domaines.

Les membres du public qui ont participé au sondage en ligne ont déclaré qu’une politique sur les justes salaires pourrait les aider à rester dans le métier pour lequel ils ont été formés, à passer plus de temps avec leur famille et à subir moins de pression les poussant à quitter leur communauté pour un travail.

« [Une politique sur les justes salaires] inciterait à rester dans le corps de métier, à rester dans l’économie locale et à y contribuer au lieu de trouver du travail ailleurs. »

Un participant au sondage en ligne

Conclusion

Dans l’ensemble, nous avons entendu que même si le principe selon lequel les travailleurs devraient recevoir un juste salaire est largement appuyé, les intervenants ont des opinions divergentes quant à la nécessité d’une politique sur les justes salaires pour y parvenir et quant à ce que cela signifie dans la pratique. Les syndicats et les organisations syndicales considèrent qu’une politique sur les justes salaires est nécessaire pour garantir des règles du jeu équitables aux entreprises syndiquées et non syndiquées et pour répondre aux préoccupations particulières concernant la sous-traitance dans l’industrie de la construction. Les représentants des fournisseurs soutiennent que les employés des entreprises ayant des contrats avec le gouvernement sont déjà rémunérés équitablement et qu’une politique sur les justes salaires pourrait entraîner une augmentation des coûts et des charges supplémentaires pour ces entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises.

Nous sommes reconnaissants envers les personnes et les organisations qui nous ont fait part de leurs points de vue au cours de ces consultations. Nous réfléchissons attentivement à ce que nous avons entendu alors que nous traçons la voie à suivre pour nous assurer que les employés qui travaillent sous contrat avec le gouvernement du Canada sont rémunérés équitablement pour leur travail.

Annexe : Activités de consultation

En ligne

Un sondage de consultation en ligne sur les justes salaires a eu lieu du 13 novembre au 14 décembre 2018. Un lien vers le sondage a été envoyé par courriel aux intervenants ciblés et affiché sur le site Web des consultations d’Emploi et Développement social Canada. Le lien a également été affiché sur le site Web des consultations auprès des Canadiens du gouvernement du Canada et dans une demande de renseignements sur le site Web de Services publics et Approvisionnements Canada, achatsetventes.gc.ca. Il a également été publié sur le compte Twitter du Programme du travail, @Travail_EDSC.

Les participants au sondage ont été invités à s’identifier comme « fournisseur », « syndicat », « expert (organisation non gouvernementale, universitaire, etc.) » ou « particulier », et à répondre à des questions majoritairement ouvertes à propos des politiques sur les justes salaires, y compris la portée, les exigences et les moyens d’application d’une éventuelle politique sur les justes salaires. Le sondage a recueilli 234 réponses (230 en anglais et 4 en français)Note de bas de page 2.

Les fournisseurs travaillaient dans les secteurs de l’éducation, des services professionnels, scientifiques et techniques, de l’information et de la culture, de la construction, du transport et de l’entreposage. Les syndicats étaient surtout concentrés dans les secteurs de la construction, des services publics, des mines, de la fabrication, du transport et de l’entreposage. La catégorie de travail la plus souvent mentionnée par les particuliers était celle des électriciens et travailleurs assimilés.

Lorsqu’on leur a demandé d’indiquer une province ou un territoire, l’Alberta, l’Ontario, la Nouvelle-Écosse et la Saskatchewan ont été les plus nommées par les participants. Chaque province et territoire a été indiqué par au moins quelques participants.

Les syndicats (142 participantsNote de bas de page 3, soit 61 %) ont été les plus nombreux à répondre au sondage, suivis des particuliersNote de bas de page 4 (74 participants, soit 32 %), puis des fournisseurs et experts (9 participants, soit 4 % chacun).

De plus, le Programme du travail a également reçu des observations écrites par voie électronique de la part des organisations suivantes :

Tables rondes avec les syndicats et les organisations syndicales

Des représentants des organisations suivantes ont participé à des tables rondes ministérielles dans la région de la capitale nationale, à Edmonton ou à Halifax dans le cadre des consultations au sujet d’une politique moderne sur les justes salaires :

Veuillez lire le document d’information remis aux participants.

Consultations avec les fournisseurs

Au cours des réunions du Comité consultatif des fournisseurs de Services publics et Approvisionnement Canada dans la région de la capitale nationale et à St. John’s, des représentants du Programme du travail ont rencontré des représentants des organisations suivantes pour connaître leur point de vue concernant une politique moderne sur les justes salaires :

De plus, les responsables du Programme du travail ont eu une discussion avec des représentants de l’Association canadienne de la construction.

Détails de la page

Date de modification :