La décroissance s’imposera-t-elle d'elle-même?
Le concept de décroissance, introduit en 1972, intéresse de plus en plus les économistes. Malgré son nom, la décroissance n’est pas forcément synonyme d’une réduction de la taille de l’économie. En fait, la décroissance vise à ne plus faire de la croissance de l’économie et du produit intérieur brut (PIB) le seul objectif des activités économiques. Dans une économie en décroissance, la qualité de vie et la préservation de l’environnement sont des considérations aussi importantes que la croissance du PIB.

La décroissance, c’est quoi?
La décroissance est une forme d’économie où la richesse économique produite n’augmente pas ou diminue de manière planifiée. La décroissance se manifeste par une réduction de l’utilisation des matières premières et par la mise en place d’indicateurs liés au bien-être des populations.
Comme toutes les grandes économies mondiales, le Québec demeure à ce jour résolument engagé dans le modèle de la croissance économique. Cependant, face aux impacts grandissants des changements climatiques, la décroissance pourrait finir par s’imposer d’elle-même dans notre quotidien.
Le PIB, un indicateur imparfait
L’utilisation du PIB comme mesure du bien-être économique et social des populations a été introduite en 1934 afin de mesurer l’effet de la Grande Dépression sur l’économie. Or, cet indicateur est imparfait, car on ne mesure que certaines données. Par exemple, les coûts des facteurs extérieurs au marché, comme la pollution et la pauvreté, ne sont pas considérés par le PIB. Selon les auteurs du rapport Beyond Growth publié en 2020 par l’OCDE, une évaluation exhaustive de la santé et du bien-être d’une économie nécessite aussi l’utilisation d’indicateurs avec une portée plus large. Ces indicateurs refléteraient mieux la distribution et la viabilité du bien-être économique dans ses dimensions sociale, économique et environnementale.
Quelques manifestations de la décroissance
- Gestion des forêts commerciales axée sur la résilience : en 2023, les feux de forêt ont détruit 82 fois plus d’hectares que la moyenne annuelle des 10 dernières années au Québec. Pour assurer la survie des forêts, il sera nécessaire d’adapter la gestion des forêts commerciales afin qu’elle ne soit plus axée sur la croissance économique et le rendement commercial maximal, mais plutôt sur la résilience et la capacité des forêts à faire face aux feux et aux catastrophes naturelles.
- Quotas dans les sites touristiques : la surfréquentation des sites touristiques a un impact néfaste sur la biodiversité et l’écosystème, en plus de nuire à la qualité de vie des résidents et à l’expérience des touristes. Au Canada, cette réalité est notamment observée à Banff, le site touristique le plus achalandé au pays. En réponse à ce phénomène, des sites touristiques commencent à abandonner la recherche du rendement commercial maximal au profit d’une approche assurant la préservation de la biodiversité et de la qualité de vie. Cela peut passer par la mise en place de quotas.
- Obsolescence programmée : le gouvernement du Québec a déposé un projet de loi visant à mettre fin à l’obsolescence programmée des appareils électroniques. Pour remplacer ce symbole éloquent du modèle de la croissance à tout prix, on propose un modèle fondé sur la réutilisation des ressources et ancré dans l’économie circulaire.
- Semaine de travail de quatre jours : en plus des bénéfices en matière environnementale, la transition vers une semaine de travail de quatre jours procurerait plusieurs avantages sur le plan du bien-être des individus (p. ex. réduction du stress et des épuisements professionnels), sans engendrer de coûts additionnels. De plus, la réduction du temps de travail n’entraîne pas nécessairement de perte en productivité et peut même parfois produire des gains.
Comme on le constate, la décroissance ne signifie pas la fin du développement économique. Il s’agit en fait d’ajouter des indicateurs qualitatifs à la mesure du PIB afin de prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux auxquels nous faisons face.
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