Écart fiscal au Canada : Une étude conceptuelle

Chapitre 3

Que font les autres pays?

3.1 Aperçu

En 2015, l'OCDE a publié son rapport le plus récent sur l'administration fiscale3, qui comprenait un sondage réalisé en 2013 d'un certain nombre de pays relativement à différents aspects de  l'administration de leur régime fiscal. Sur les 56 pays sondés, 24 ont produit une estimation de l'écart fiscal pour au moins une partie de leurs impôt nationaux.

Les estimations les plus fréquentes étaient liées aux TVAs, ainsi qu'à l'impôt sur le revenu et la taxe d'accise. Parmi les pays qui ont estimé une partie de la composante de l'écart fiscal, un total de 13, y compris les États­-Unis, le Royaume­-Uni, la Suède et l'Australie, ont rendu ces résultats publics. Toutefois, la fréquence de ces estimations varie grandement, allant d'une estimation unique à une estimation annuelle.

Un certain nombre de pays sondés par l'OCDE ont également indiqué qu'ils utilisaient ou avaient l'intention d'utiliser des programmes de vérification aléatoire pour une partie de l'impôt et des taxes qu'ils administrent. Ces programmes servent diverses fonctions, autres que l'estimation de l'écart fiscal, y compris de permettre d'élaborer et/ou de perfectionner les systèmes d'établissement du profil des risques, de surveiller l'observation de certains secteurs précis du régime fiscal et de déterminer les secteurs où des modifications législatives pourraient être nécessaires. Les programmes de vérification aléatoire peuvent également être utilisés pour décourager l'inobservation en général.

 

Photo de drapeaux internationaux

Le tableau 1 sur la prochaine page est un tableau comparatif de l'approche stratégique de la gestion de l'observation fiscale par les pays de l'OCDE, et en particulier de leur utilisation de l'estimation de l'écart fiscal.

3.2 Programmes d'estimation de l'écart fiscal dans d'autres pays

Parmi les pays qui publient les estimations de l'écart, différents niveaux de détail et d'expérience sont fournis. Les approches d'un certain nombre de pays clés sont mises en évidence ci­-dessous.

Il est important de noter que les estimations de l'écart fiscal élaborées par différents pays ne sont pas directement comparables en raison des économies différentes, des différents contextes politiques et administratifs en matière d'impôt, ainsi que de la gamme d'approches relatives à l'estimation de l'écart fiscal.

Tableau 1 Estimation de l'écart fiscal pour une partie ou la totalité de l'impôt et des taxes
Pays Processus officiel de gestion des risques utilisé Exigé par le MF * Recherche menée Résultats rendus publics Vérifications aléatoires pour une partie ou la totalité de l'impôt et des taxes
Australie Oui Non Oui Oui Non
Autriche Oui Non Non S.O. Oui
Belgique Oui Oui Oui Non ?
Canada Oui Non Non S.O. Oui
Chili Oui Non Oui Oui Non
République tchèque Oui Oui Non Non Non
Danemark Oui Oui Oui Oui Oui
Estonie Oui Oui Oui Oui Oui
Finlande Oui Oui Oui Oui Oui
France Oui Oui Non S.O. Oui
Allemagne Oui Non Non S.O. Oui
Grèce Oui
Hongrie Oui Non Non Non Oui
Islande Oui Non Non S.O. Oui
Irlande Oui Non Non S.O. Oui
Israël Oui Non Non S.O. Oui
Italie Oui Non Non S.O. Non
Japon Oui Non Non S.O. Oui
Corée Oui Non Non Non Non
Luxembourg Oui Non Oui Oui Oui
Mexique Oui Oui Oui Oui Non
Pays-Bas Oui Non Non S.O. Oui
Nouvelle-Zélande Oui Non Non S.O. Non
Norvège Oui Non Oui Non Oui
Pologne Oui Oui Oui Non Non
Portugal Oui Non Oui Non Non
République slovaque Oui Non Oui Oui Non
Slovénie Oui Non Oui Oui Non
Espagne Oui Non Non S.O. Non
Suède Oui Non Oui Oui Non
Suisse Oui Non Oui Non Oui
Turquie Oui Oui Oui Non Oui
Royaume-Uni Oui Oui Oui Oui Oui
États-Unis Oui Non Oui Oui Oui

* Ministère des Finances
Source : FTA Tax Administration 2015: Comparative Information on OECD and Other Advanced and Emerging Economies Series (disponible en anglais seulement)

a. Royaume-Uni

Parmi les pays dont il est question dans ce document, le R.­U. est celui qui estime le plus grand nombre de composantes de son écart fiscal national, y compris la TVA, l'impôt sur le revenu des sociétés, l'impôt sur le revenu des particuliers, la taxe d'accise, les cotisations à l'assurance nationale, ainsi que l'impôt sur les gains en capital. Comme on le mentionne ci­-dessus, HMRC inclut une estimation distincte de son écart fiscal attribué à l'évitement fiscale4. HMRC ne publie pas une estimation distincte de la composante internationale.

HMRC définit l'écart fiscal comme [traduction] « la différence entre le montant de l'impôt qui devrait, en théorie, être perçu par HMRC, par rapport à ce qui est effectivement perçu. »

Les estimations sont exprimées tant en chiffre absolu (c.­-à-­d. en livres sterling) qu'en pourcentage de la dette fiscale afin de mieux mesurer l'observation au fil du temps. 

HMRC a indiqué que [traduction] « même si l'écart fiscal n'est pas suffisamment rapide ou précis pour établir des objectifs de rendement, il fournit des renseignements importants qui nous aident à comprendre notre rendement à long terme. »

La méthodologie utilisée par HMRC pour estimer l'écart fiscal dépend de l'aspect de l'écart fiscal national estimé (p. ex. la TVA, la taxe d'accise). Les méthodologies descendante et ascendante sont toutes deux utilisées, avec des méthodes et des sources de données comme le rapprochement des données, les renseignements sur la gestion, les demandes de renseignements aléatoires (c.­-à-­d. les vérifications aléatoires) et les mesures à titre indicatif5.

L'approche descendante est utilisée pour estimer les écarts fiscaux liés à la TVA et à la taxe d'accise en comparant les données sur la consommation aux recettes fiscales. Les estimations obtenues au moyen de l'approche ascendante sont utilisées pour les impôts directs et les écarts fiscaux directs sont estimés de façon distincte pour chaque groupe de contribuables différent et pour chaque type d'inobservation.

Le Royaume­-Uni est l'un des seuls pays qui fournit des renseignements concernant les coûts liés à son programme d'estimation de l'écart fiscal. En 2015, le Royaume­-Uni a déclaré que 14 employés équivalent temps plein travaillaient à améliorer, à produire, à garantir et à expliquer l'écart fiscal national (à l'exception de son programme de vérification aléatoire), ainsi qu'un programme de vérification aléatoire dont les dépenses relatives au personnel totalisent environ entre 2 et 4 millions de livres sterling.

b. États-Unis 

Les estimations des États-­Unis portent sur les trois aspects de son écart fiscal : l'écart lié aux non-déclarants, l'écart lié à la sous-estimation et l'écart lié au versement insuffisant. La plus grande part de ces composantes pour chaque type d'impôt ou de taxe est estimée séparément : l'impôt sur le revenu des sociétés, l'impôt sur le revenu des particuliers, l'impôt sur le patrimoine, la taxe d'accise et la taxe d'emploi. La composante internationale de ses écarts fiscaux n'est pas explicitement identifiée. 

L'IRS définit l'écart fiscal comme [traduction] « le montant de la dette fiscale des contribuables qui n'est pas payé à temps ».

À la fin du mois d'avril 2016, l'IRS a publié de nouvelles estimations de l'écart fiscal pour les années d'imposition 2008 à 2010.

Le rapport indique également que les taux d'observation sont beaucoup plus élevés lorsque des tiers sont tenus de produire des déclarations, et qu'ils sont encore plus élevés lorsque les montants sont assujettis à une retenue par des tiers (c.-­à­-d. lorsqu'un payeur d'un revenu doit retenir un montant de l'impôt du versement et le verser directement au gouvernement).

Plusieurs méthodes sont utilisées pour estimer l'écart fiscal, y compris les données administratives et de tiers, ainsi qu'un programme de vérification aléatoire important (environ 14 000 vérifications aléatoires de déclarations de revenus des particuliers par année).

L'IRS a d'abord publié ses estimations de l'écart fiscal en juillet 1983 qui portaient sur les années d'imposition 1973, 1976, 1979 et 1981. Ces estimations dépendaient grandement des renseignements recueillis à l'aide d'un programme exhaustif de vérification aléatoire, le Programme de mesure de l'observation des contribuables (PMOC). Le PMOC a couvert une période de près de 25 ans, y compris les années d'imposition sélectionnées de 1963 à 1988. Après l'année d'imposition 1988, le PMOC a été abandonné. En 1988, l'IRS a publié des estimations des écarts fiscaux bruts liés à l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés qui se concentraient sur les années d'imposition de 1973 à 1992. Les rapports subséquents comprenaient un rapport de l'écart fiscal net lié à l'impôt sur le revenu publié en 1990, un rapport sur l'écart fiscal lié à la taxe sur l'emploi publié en 1993 et un rapport sur l'écart fiscal lié à l'impôt sur le revenu des particuliers publié en 1996 (qui était fondé sur les dernières études du PMOC pour l'année d'imposition 1988). L'estimation de l'écart fiscal a recommencé en 2005 pour l'année d'imposition 2001 en utilisant les données recueillies par le Programme de recherche national récemment formé. Les résultats de ces analyses ont été publiés en mars 2005 et en avril 2006.

Les estimations de l'écart fiscal publiées par l'IRS en 2006 et en 2012 étaient liées à une seule année d'imposition, tandis que les résultats publiés en 2016 présentent un taux d'observation moyen et l'écart fiscal moyen annuel associé pour les années d'imposition 2008 à 2010. L'IRS a indiqué que ceci reflétait un changement de méthodologie visant à améliorer la fiabilité des estimations de l'écart fiscal lié à la sous-­estimation de l'impôt sur le revenu des contribuables par source d'inobservation découlant de la restructuration du PRN à partir d'échantillons périodiques plus volumineux vers des échantillons plus petits.

c. Suède

La Suède a estimé diverses composantes de son écart fiscal dans le passé, y compris les suivantes : la TVA, l'impôt sur le revenu des sociétés et l'impôt sur le revenu des particuliers.

L'autorité fiscale de la Suède (AFS) définit l'écart fiscal comme [traduction] « la différence entre l'impôt qui aurait été déterminé si tous les contribuables avaient déclaré toutes leurs activités et transactions correctement, et l'impôt déterminé en pratique à la suite des procédures d'observation de l'AFS. »

En 1998, à la demande du gouvernement suédois, l'AFS a tenté pour la première fois d'estimer l'écart fiscal. Depuis, des estimations de l'écart fiscal sont publiées périodiquement par l'AFS.

L'AFS a utilisé tant l'approche descendante qu'ascendante avec des sources de méthodes et de données : des données de tiers, des sondages et des contrôles au hasard (c.­-à­-d. des vérifications aléatoires). L'AFS suggère que plus l'AFS possède de renseignements sur l'assiette fiscale de sources autres que les contribuables eux-mêmes, plus petite sera la portée des erreurs; aussi, une estimation de l'écart fiscal vérifiable nécessiterait une hausse des vérifications aléatoires.

L'AFS n'a pas indiqué publiquement si elle a l'intention d'entreprendre une estimation de l'écart fiscal, et la façon dont elle s'y prendra le cas échéant. Dans son rapport de 2014, elle a indiqué que l'estimation de l'écart fiscal représente une tâche difficile, particulièrement parce que de grandes parties de l'écart fiscal sont cachées délibérément. De plus, le type de données qui a été utilisé afin d'élaborer l'estimation en 2008 n'est plus disponible en raison d'un changement dans l'approche de l'AFS à l'égard de la vérification. Plus particulièrement, plutôt que d'effectuer des vérifications de dossiers aléatoires, l'AFS mène désormais des vérifications moins nombreuses et plus détaillées sur les contribuables présentant un risque élevé, ce qui ne fournit pas le type de renseignements requis afin d'élaborer une estimation fiable de l'écart fiscal.

d. Australie

L'Australie estime et publie l'écart fiscal depuis 2012; elle estime actuellement les écarts fiscaux liés à la taxe sur les produits et les services (TPS), la taxe sur l'achat de voitures de luxe et certaines taxes d'accise6.

L'Australian Tax Office (ATO) définit l'écart fiscal comme [traduction] « la différence entre le montant estimé d'impôt à payer théoriquement, en supposant une observation parfaite de tous les contribuables, et le montant déclaré en réalité à l'ATO, ou que celui-ci a perçu au cours d'une période définie ».

L'ATO utilise tant l'approche descendante qu'ascendante, de même qu'une approche combinée lorsque cela est possible. Les méthodes utilisées comprennent les suivantes : les résultats de vérification, les registres des risques et la comparaison des données. Ces estimations sont considérées comme étant des écarts « en matière d'observation » qui surviennent en lien avec les obligations fiscales, les obligations des employeurs et les charges administrées. Les estimations de l'écart fiscal font partie de l'ensemble des mesures de haut niveau visant à faire le suivi de l'intégrité du régime fiscal. Les connaissances acquises orienteront l'approche afin d'appuyer la participation volontaire au régime fiscal et veilleront à ce que le montant exact des recettes soit recouvré.

L'ATO s'est engagé publiquement à élaborer à l'avenir des estimations de l'écart fiscal pour tous les impôts et les taxes administrés. Plusieurs nouvelles estimations de l'écart fiscal ont été publiées au cours de l'année d'imposition 2014­-2015, y compris les écarts en matière de taxe d'accise et de droits d'accise se rapportant au pétrole et au diesel et à la bière. Le calendrier actuel suggère que des estimations seront élaborées pour tous les impôts et les taxes restants d'ici 2017.

L'ATO collabore avec un comité d'experts et d'autres experts de l'écart fiscal du secteur privé, tels que des chercheurs, des intervenants et des universitaires, afin d'estimer son écart fiscal.

Aperçu des approches internationales

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Aperçu des approches internationales

* Exprimé en dollars canadiens de 2015. Ajustements d'inflation sont basés sur des données de la Banque mondiale et Eurostat (Union européenne  seulement)

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