Examen des pratiques de vente au détail des banques canadiennes

Le 20 mars 2018  

Sommaire

Le présent rapport détaille les constatations et les conclusions de l’examen mené par l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC) sur les pratiques de vente au détail des six grandes banques canadiennes (Banque de Montréal, Banque de Nouvelle-Écosse, Banque Canadienne Impériale de Commerce, Banque Nationale du Canada, Banque Royale du Canada et Banque Toronto-Dominion), qui sont visées par les dispositions législatives fédérales en matière de protection des consommateurs dont l’ACFC surveille l’application.

L’examen a porté sur les pratiques de vente au détail des banques afin de permettre de déterminer et d’évaluer les risques pour les consommateurs. L’ACFC a examiné les facteurs de risque liés aux pratiques de vente, évalué l’efficacité des contrôles mis en place par les banques pour atténuer ces risques et recommandé des façons plus efficaces de les réduire.

Les risques liés aux pratiques de vente comprennent le risque de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales et le risque de vente abusive. Le risque lié aux pratiques commerciales est le risque de manquement aux obligations prévues par les lois et règlements, les codes de conduite volontaires et les engagements publics dont l’ACFC surveille l’application.

L’ACFC définit la vente abusive comme le fait de vendre un produit ou un service financier à un consommateur alors que le produit ou le service ne convient pas au consommateur; la vente qui se fait sans tenir suffisamment compte de la situation, des objectifs et des besoins financiers du consommateur; et le fait de vendre un produit ou un service en donnant au consommateur une information incomplète, imprécise ou trompeuse. Cette définition se fonde sur les travaux de recherche menés par la Financial Conduct Authority du Royaume-Uni, la banque centrale de l’Irlande, le groupe de travail de l’OCDE et du G20 sur la protection des consommateurs de produits et services financiers et la Banque mondiale.

L’examen a permis à l’ACFC de constater que la culture liée aux services bancaires de détail incite les employés à vendre des produits et des services et les récompense selon les résultats obtenus à cet égard. Le fait que les banques mettent fortement l’accent sur les ventes peut accroître les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales. Les contrôles que les banques ont mis en place pour surveiller, déterminer et atténuer ces risques sont insuffisants.

Dans le cadre de son examen, l’ACFC n’a pas constaté que la vente abusive était une pratique généralisée. Les consommateurs réalisent des millions d’opérations bancaires chaque jour sans incident, et les banques et leur personnel s’efforcent dans l’ensemble de se conformer aux obligations en matière de pratiques commerciales.

Les banques travaillent actuellement à améliorer leur surveillance et leur gestion des risques liés aux pratiques de vente. Les constatations contenues dans le présent rapport rendent compte de l’état des risques et des contrôles au moment de l’examen.

Le rapport n’aborde pas les allégations d’infractions aux obligations en matière de pratiques commerciales. L’ACFC enquête sur ces allégations dans le cadre d’un processus distinct, et elle prendra les mesures d’application qui s’imposent, le cas échéant, conformément à son Cadre de conformité.

Le présent rapport a été soumis au ministre des Finances afin qu’il puisse orienter l’élaboration des politiques, selon le mandat de l’ACFC qui consiste à surveiller et à évaluer les tendances et les nouveaux enjeux qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur les consommateurs de produits et services financiers.

Principales constatations

L’examen de l’ACFC a permis de dégager cinq constatations principales :

1. La culture des services bancaires de détail vise avant tout la vente de produits et de services, ce qui augmente le risque que les intérêts des consommateurs ne se voient pas toujours accorder la priorité qui leur revient.

L’évolution qui a mené les banques à faire des ventes leur priorité a été facilitée par les nouvelles technologies, qui ont rendu les services bancaires plus pratiques pour les consommateurs et ont permis aux banques de transformer leurs succursales en « boutiques » consacrées à la fourniture de conseils et à la vente de produits. Ce changement d’orientation accroît le risque que les banques fassent passer les ventes avant les intérêts de leurs clients.

2. Les programmes de gestion du rendement — incitatifs pécuniaires et non pécuniaires, objectifs de vente et fiches de rendement — pourraient accroître les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.

Les programmes de gestion du rendement jouent un rôle de premier plan pour ce qui est d’influencer le comportement des employés de banque à l’égard des consommateurs. Les employés considèrent que la réalisation de bons chiffres de vente leur donne plus de possibilités d’obtenir des récompenses.

3. Certains produits, pratiques commerciales et circuits de vente sont associés à des risques accrus liés aux pratiques de vente.

Le système d’incitatifs et de récompenses est plus développé que les contrôles visant à atténuer les risques liés aux pratiques de vente dans le cas des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants, de la vente croisée, des produits d’assurance crédit et des vendeurs tiers.

4. Les cadres de gouvernance ne permettent pas de gérer efficacement les risques liés aux pratiques de vente.

Les banques appliquent généralement des pratiques de gouvernance efficaces. Cependant, les mesures visant à réduire les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales devraient être améliorées.

5. Les contrôles visant à atténuer les risques liés aux pratiques de vente sont insuffisants.

Les contrôles visant à atténuer les risques liés aux pratiques de vente n’ont pas suivi l’évolution du modèle de prestation des services bancaires de détail. Il existe des possibilités pour des services tels que ceux de la vérification de la conformité, de la gestion des risques, de la vérification et des ressources humaines d’améliorer la surveillance des pratiques de vente.

Conclusions

Au cours de l’examen, l’ACFC a cerné un certain nombre de mesures qui permettraient de renforcer la protection des consommateurs de produits et de services financiers. Ces mesures sont décrites ci-dessous.

Améliorations visant la gestion par les banques des risques liés aux pratiques de vente

Pour améliorer la gestion des risques liés aux pratiques de vente, l’ACFC recommande que les banques prennent les mesures suivantes :

Améliorations visant l’ACFC

L’ACFC adoptera un cadre de surveillance modernisé qui lui permettra de s'assurer de manière proactive que les banques ont mis en place les cadres, les politiques, les procédures et les processus qui s’imposent pour atténuer efficacement les risques de vente abusive et de manquement aux obligations relatives aux pratiques commerciales. Elle est aussi en train d’augmenter ses ressources en vue de renforcer ses activités de surveillance et d’application de la loi.

L’ACFC améliorera son matériel éducatif pour mieux renseigner les consommateurs sur les produits et services financiers ainsi que sur leurs droits et responsabilités, de même que sur l’importance de poser les bonnes questions au personnel des banques. Ces efforts aideront les consommateurs à prendre des décisions financières éclairées et leur permettront peut-être d’éviter certains des risques dont il est question dans le présent rapport.

Contexte

Les banques sont visées par les dispositions législatives fédérales en matière de protection des consommateurs dont l’application est surveillée par l’Agence de la consommation en matière financière (ACFC). À la suite de la crise financière mondiale de 2007-2008, les autorités de réglementation et organismes d’établissement de règles internationaux ont élaboré des lignes directrices se rapportant à la culture du milieu bancaire. Il est désormais largement reconnu qu’une culture d’entreprise saine en matière de risque, favorisée par la communication d’orientations fermes de la part de la haute direction, est un contrôle crucial pour l’atténuation des risques liés aux pratiques de vente.

Malgré l’importance accrue accordée à l’établissement d'une culture appropriée, certaines banques dans le monde disposent de cadres de gouvernance et de contrôles insuffisants pour surveiller, déterminer et atténuer les risques liés aux pratiques de vente. Un exemple flagrant en a été donné en septembre 2016 lorsqu’aux États-Unis le Consumer Financial Protection Bureau, l’Office of the Comptroller of the Currency et l’avocat de la ville de Los Angeles ont imposé une amende de 185 millions de dollars à Wells Fargo pour s’être livré à des pratiques de vente irrégulières. Pour atteindre leurs objectifs de vente, les employés de la banque avaient ouvert frauduleusement plus de trois millions de comptes de dépôt et de carte de crédit. Au cours des cinq années ayant précédé l’imposition de l’amende, Wells Fargo avait congédié plus de 5 000 employés pour transgression du code de conduite de la banque.

En novembre 2016, des médias canadiens ont fait état d’allégations selon lesquelles une banque inscrivait des clients, pour qu’ils reçoivent des produits ou des services, sans leur consentement exprès. Après enquête, l’ACFC a publié un avis à l’intention de toutes les banques pour leur rappeler qu’elles devaient obtenir le consentement exprès des consommateurs pour la vente de tout produit ou service, et communiquer à cet égard d’une façon claire, simple et n’induisant pas en erreur. L’ACFC a également rappelé aux banques leurs obligations pour ce qui est de divulguer aux consommateurs l’information requise. L’ACFC a publié un avis aux consommateurs informant ces derniers que les banques devaient obtenir leur consentement exprès avant d’émettre une carte de crédit à leur nom.

Le 3 février 2017, l’ACFC a envoyé une lettre aux acteurs de l’industrie pour souligner et clarifier ses attentes en matière de consentement exprès. Par la suite, en mars 2017, l’ACFC a publié le bulletin sur la conformitéNote de bas de page 1 B-5 Consentement pour les nouveaux produits ou services, dans lequel elle énonçait à nouveau ses attentes.

À la fin février et au début mars 2017, des médias ont rapporté que les banques canadiennes avaient recours à des pratiques de vente agressives et à des méthodes douteuses pour vendre tout un éventail de produits et de services. Parmi leurs sources figuraient d’anciens employés des banques, de même que des employés actuellement en poste. Par la suite, l’ACFC a annoncé qu’elle mènerait un examen de l’industrie portant sur les pratiques commerciales liées à la vente de produits et de services par les institutions financières sous réglementation fédérale. L’examen de l’ACFC s’est déroulé de mai 2017 à novembre 2017, en parallèle à un examen mené par le Bureau du surintendant des institutions financières, mais indépendamment de celui-ci.

Méthode d’examen

Objectif

L’ACFC s’est penchée sur les facteurs de risque liés aux pratiques de vente, y compris les objectifs de vente et les programmes d’incitatifs des banques. L’ACFC a également évalué les cadres de gouvernance et les contrôles adoptés par les banques en vue d’atténuer ces risques.

L’examen a porté sur deux types de risques liés aux pratiques de vente : le risque de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales et le risque de vente abusive. L’ACFC définit la vente abusive comme le fait de vendre un produit ou un service financier à un consommateur alors que le produit ou le service ne convient pas au consommateur; la vente qui se fait sans tenir suffisamment compte de la situation, des objectifs et des besoins financiers du consommateur; et le fait de vendre un produit ou un service en donnant au consommateur une information incomplète, imprécise ou trompeuse.

Méthode et portée

L’examen a porté sur les circuits de vente au détail des banques où il y a interaction entre, d’une part, les consommateurs et, d’autre part, les employés de banque ou des fournisseurs tiers, que ces interactions se déroulent en personne ou par téléphone. Les circuits en question comprennent les succursales, les centres d’appels, les spécialistesNote de bas de page 2 et les vendeurs tiers.

L’ACFC a examiné plus de 4 500 plaintes afin de mieux comprendre les problèmes vécus par les consommateurs lorsqu’ils font l’acquisition de produits et de services bancairesNote de bas de page 3. Elle a également passé en revue plus de 100 000 pages de documents des banques, touchant notamment la formation, la gestion du rendement et des ventes, la conformité, la gestion des risques et la vérification interne. L’examen de ces documents a contribué à cerner les facteurs de risque liés aux pratiques de vente et à évaluer les contrôles et les cadres de gouvernance mis en place pour atténuer ces risques.

De mai à novembre 2017, l’ACFC a mené des entrevues auprès de plus de 400 employés des six grandes banques : présidents de conseil d’administration, administrateurs, cadres supérieurs, cadres intermédiaires et représentants du service à la clientèle de première ligne. Plus de 200 employés travaillant dans 30 succursales ont aussi été rencontrés. Les entrevues ont aidé l’ACFC à confirmer et à remettre en question les renseignements tirés de l’examen documentaire. Elles ont aussi contribué à guider l’évaluation de la culture de vente des banques et de son incidence sur les pratiques de vente des banques.

Constatations

L’examen a porté sur les pratiques de vente au détail des banques afin de permettre de déterminer et d’évaluer les risques pour les consommateurs. L’ACFC a examiné les facteurs de risque liés aux pratiques de vente, évalué l’efficacité des contrôles mis en place par les banques pour atténuer ces risques et recommandé des façons plus efficaces de les réduire. Dans le cadre de son examen, l’ACFC n’a pas constaté que la vente abusive était une pratique généralisée.

Les banques travaillent actuellement à améliorer leur surveillance et leur gestion des risques liés aux pratiques de vente. Les constatations contenues dans le présent rapport rendent compte de l’état des risques et des contrôles au moment de l’examen.

L’examen de l’ACFC a permis de dégager cinq constatations principales :

  1. La culture des services bancaires de détail vise avant tout la vente de produits et de services, ce qui augmente le risque que les intérêts des consommateurs ne se voient pas toujours accorder la priorité qui leur revient.
  2. Les programmes de gestion du rendement — incitatifs pécuniaires et non pécuniaires, objectifs de vente et fiches de rendement — pourraient accroître les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.
  3. Certains produits, pratiques commerciales et circuits de vente sont associés à des risques accrus liés aux pratiques de vente.
  4. Les cadres de gouvernance ne permettent pas de gérer efficacement les risques liés aux pratiques de vente.
  5. Les contrôles visant à atténuer les risques liés aux pratiques de vente sont insuffisants.

1. Culture de vente

La culture des services bancaires de détail vise avant tout la vente de produits et de services, ce qui augmente le risque que les intérêts des consommateurs ne se voient pas toujours accorder la priorité qui leur revient.

La culture peut être définie comme étant l’ensemble des valeurs et des croyances qui traduit la philosophie sous-jacente d’une organisation. L’ACFC a constaté que la culture des services bancaires de détail vise avant tout la vente de produits et de services. Même si les banques accordent de l’importance au service à la clientèle et à l’engagement dans la collectivité, leur culture des services au détail est de plus en plus axée sur la vente, pour les raisons étudiées dans le cadre de l’examen. Cet état de choses peut conduire les banques à faire passer leurs intérêts et leurs objectifs de vente avant les intérêts de leurs clients.

Les progrès technologiques des 20 dernières années ont engendré des changements importants dans le comportement des consommateurs de produits et de services financiers et dans les pratiques de vente des banques. Pour la plupart, les consommateurs préfèrent maintenant effectuer leurs opérations en ligne, et ils utilisent les applications mobiles et les guichets automatiques. Pourtant, malgré l’importance accrue des ventes en ligne, les principaux moteurs de croissance des ventes et des parts de marché demeurent les succursales, les centres d’appels et les spécialistes. De nos jours, les consommateurs interagissent avec les employés de banque principalement pour obtenir de nouveaux produits, demander conseil, poser des questions, formuler des plaintes ou effectuer des opérations financières complexes. La technologie a aussi permis aux banques d’adapter leur offre de produits et de services aux différents consommateurs à la lumière des données qu’elles recueillent à leur sujet.

Ainsi, les succursales et les centres d’appels ont progressivement modifié leurs priorités, délaissant le traitement des opérations pour se concentrer sur la vente de produits et de services, la prestation de conseils financiers et le service à la clientèle lié à la vente. Aujourd’hui, la plupart des employés en succursale participent directement à la vente de produits et de services aux clients ou doivent repérer les possibilités de vente et diriger les clients vers les employés qui sont responsables de la vente. De plus en plus, les employés des centres d’appels doivent vendre des produits et des services bancaires en plus d’assurer le service à la clientèle.

Ces dernières années, les banques ont établi des circuits spécialisés qui revêtent une importance croissante dans la vente des produits et services financiers aux consommateurs. Les employés dans les circuits spécialisés se concentrent habituellement sur un produit, comme les prêts hypothécaires ou les placements, et travaillent indépendamment des succursales. Les banques font aussi appel aux services de tierces parties pour mettre en marché et vendre des produits particuliers, comme les cartes de crédit. Les arrangements avec des tiers sont courants, car ils permettent aux banques de joindre les consommateurs dans des endroits où ils n’effectuent pas normalement leurs opérations bancaires, notamment au moyen de stands installés dans les aéroports ou lors de manifestations sportives.

La raréfaction progressive des opérations et des services en personne a transformé la culture des services bancaires de détail. L’ACFC a constaté que les banques attendaient des employés de première ligne des succursales, des centres d’appels et des circuits spécialisés qu’ils vendent des produits et des services aux consommateurs. Certains employés ont indiqué à l’ACFC qu’ils accordaient une grande importance au fait de « gagner », c’est-à-dire de conclure une vente importante ou de l’emporter sur la concurrence.

Les employés qui n’atteignent pas leurs objectifs de vente reçoivent du mentorat, de la formation additionnelle et d’autres types de soutien. En général, les banques ne renvoient pas les employés qui n’atteignent pas leurs objectifs de vente. Cependant, les employés de première ligne qui gardent leur poste et qui sont promus sont souvent ceux qui réussissent bien dans un milieu de travail axé sur la vente.

De plus, le manque de transparence relativement aux objectifs de vente et aux commissions fait en sorte qu’il est difficile pour les consommateurs de déterminer quels sont les intérêts que les employés de banque défendent lorsqu’ils recommandent un produit plutôt qu’un autre.

Dernièrement, la priorité des banques a commencé à passer des résultats de vente à la satisfaction et la fidélisation de la clientèle. Par exemple, certaines banques ont assorti leurs objectifs axés sur le volume de ventes d’objectifs axés sur les activités. Ainsi, les employés sont récompensés lorsqu’ils posent certains gestes qui favorisent la relation à long terme avec le consommateur, par exemple lorsqu’ils proposent un plan financier. Les banques ont aussi accru leur utilisation des sondages sur la satisfaction de la clientèle pour inciter leurs employés à offrir un service de qualité. Ces nouvelles mesures sont positives et pourraient motiver les employés à mieux comprendre les besoins et les objectifs des consommateurs en matière de finances.

Néanmoins, l’évolution vers des pratiques de vente davantage axées sur les consommateurs vise encore essentiellement à aider les employés à cerner les occasions de vente et à favoriser des relations à long terme avec les consommateurs, qui sont propres à générer des ventes supplémentaires ultérieurement. Il est trop tôt pour dire si l’importance accrue accordée à la satisfaction et à la fidélisation des consommateurs permettra d’atténuer suffisamment les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.

En résumé, les cultures d’entreprise axées sur les ventes peuvent accroître le risque de vente abusive. L’importance qu’accordent les employés à l’atteinte des objectifs de vente et à l’obtention de primes de rendement peut les pousser à faire passer les ventes avant l’intérêt des consommateurs, ce qui peut compromettre le respect par les banques de leurs obligations en matière de pratiques commerciales.

2. Gestion du rendement

Les programmes de gestion du rendement (incitatifs pécuniaires et non pécuniaires, objectifs de vente et fiches de rendement) pourraient accroître les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.

Les programmes de gestion du rendement établis par les banques — qui prévoient des incitatifs pécuniaires et non pécuniaires, des objectifs de vente et des fiches de rendement — ont une incidence marquée sur le comportement des employés et la culture d’entreprise. L’examen a permis de constater que le comportement des employés de banque à l’égard des consommateurs était davantage influencé par les incitatifs pécuniaires et non pécuniaires que par les orientations communiquées par la haute direction, qui incitent à penser au client d’abord, à respecter les pratiques exemplaires en matière de vente et à agir dans l’intérêt du client.

Incitatifs pécuniaires

La rémunération de la plupart des employés de banque est constituée d’un salaire de base fixe auquel s’ajoute une prime de rendement variable. Pour la plupart des employés de première ligne, l’essentiel de la rémunération vient du salaire de base et la rémunération variable ne représente qu’une faible part de la rémunération totale. La rémunération variable tient compte du rendement de l’employé, de celui de son équipe et de celui de la banque dans son ensemble.

Lors des entrevues, les banques ont insisté sur le fait que les employés de première ligne avaient peu à gagner de la vente abusive, étant donné que la rémunération variable et les primes annuelles connexes qu’ils reçoivent sont relativement peu importantes. Cependant, l’ACFC a constaté que la plupart des employés de première ligne considéraient leur rémunération variable comme étant importante.

Les gestionnaires, par contre, ont droit à des salaires de base nettement supérieurs à ceux des employés de première ligne, et leur rémunération variable représente habituellement une plus grande part de leur rémunération totale. Par ailleurs, certains groupes d’employés de première ligne, comme les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants, ne reçoivent aucun salaire de base; leur rémunération est entièrement variable. Comme nous l’expliquons plus loin dans le rapport, les programmes de rémunération qui font une place importante à la rémunération variable peuvent inciter à la vente abusive parce que les employés ainsi rémunérés cherchent à augmenter leurs ventes pour maximiser les commissions et les récompenses obtenues.

Incitatifs non pécuniaires

Les incitatifs non pécuniaires visent à inciter les employés à atteindre les objectifs liés aux campagnes promotionnelles et les objectifs de vente annuels. Les banques ont recours à différents types d’incitatifs non pécuniaires, y compris des cartes-cadeaux de faible valeur, des tribunes de reconnaissance par les pairs, des vacances ou séjours en formule tout inclus, des occasions de perfectionnement professionnel et des promotions. L’examen a permis de constater que les employés étaient motivés à obtenir de bons résultats de vente en partie parce qu’ils considèrent que cela leur donne des possibilités accrues de recevoir des incitatifs non pécuniaires.

Les vice-présidents régionaux, les directeurs de succursale et les employés de première ligne ont indiqué à l’ACFC que l’excellence des chiffres de vente constitue un facteur clé dans la décision d’accorder les promotions. Par ailleurs, les directeurs de succursale ont indiqué que, comme les résultats de vente sont un élément fondamental des objectifs de rendement des postes supérieurs, il était peu probable qu’ils envisagent d’accorder une promotion à un employé dont les chiffres de vente ne sont pas satisfaisants. Selon les directeurs de succursale interrogés, de solides chiffres de vente constituent généralement un bon indicateur de la capacité d’un employé d’assumer les fonctions de postes supérieurs. Les employés de banque voient les promotions comme étant essentielles à une hausse sensible de leur rémunération annuelle et de leur rémunération variable.

Les programmes de récompenses non pécuniaires sont généralement soumis à une surveillance moindre que les programmes de rémunération variable. Notons que lorsqu’ils sont bien conçus, les incitatifs non pécuniaires peuvent encourager de bons comportements et pratiques de vente. L’examen a permis de cerner des possibilités pour les banques d’améliorer de façon substantielle la conception et la surveillance des programmes de récompenses non pécuniaires.

Objectifs de vente

Les banques ont recours à différents types d’objectifs de vente pour motiver leurs employés à vendre. Les objectifs ambitieux qui ciblent des produits en particulier peuvent accroître le risque de vente abusive de manière importante. Par exemple, le fait d’offrir une rémunération pécuniaire aux employés qui vendent un grand nombre de cartes de crédit assorties de primes voyages au cours d’une période donnée peut mener les employés à vendre ces produits sans faire d’effort suffisant pour déterminer s’ils cadrent avec les besoins et les objectifs financiers du client.

Les banques surveillent les proportions dans lesquelles le personnel atteint les objectifs fixés, dépasse ces objectifs ou ne parvient pas à les atteindre, et elles se servent de ces données pour établir les objectifs de l’année suivante. L’ACFC a constaté que la plupart des banques essayaient de calibrer leurs objectifs de vente de façon à ce qu’environ les deux tiers des employés de première ligne les atteignent. Il est arrivé à des banques de rajuster leurs objectifs au milieu de l’année, généralement pour tenir compte de facteurs externes, comme les circonstances économiques régionales ou une catastrophe naturelle.

Dans le cadre de l’adoption de stratégies davantage axées sur le client, un certain nombre de banques ont établi, ou mettent à l’essai, des objectifs fondés sur les activités, en complément des objectifs de vente. Cette mesure peut permettre d’atténuer le risque de vente abusive, car elles tiennent compte des efforts des employés en matière de vente même lorsque le consommateur décide de ne pas acheter de produit ni de service. Dans ces cas, les employés sont tout de même tenus d’accomplir un certain nombre de tâches liées aux ventes, par exemple effectuer un certain nombre d’appels téléphoniques ou rencontrer un certain nombre de clients.

Certaines banques ont pris des mesures pour accroître l’importance des objectifs de vente à l’échelle de l’équipe, ce qui peut atténuer le risque de vente abusive en réduisant la pression ressentie par chacun des employés quant à la vente de produits et de services. Par contre, les objectifs à l’échelle de l’équipe peuvent accroître la pression exercée sur les meilleurs éléments, en ce que ces derniers peuvent avoir l’impression de devoir en faire plus pour que la succursale atteigne ses objectifs. Les objectifs de vente à l’échelle de l’équipe peuvent aussi exercer une pression sur les employés responsables du service à la clientèle, afin qu’ils contribuent davantage à l’atteinte des objectifs de vente de la succursale.

À l’heure actuelle, les banques privilégient généralement les produits et services financiers les plus rentables ou les plus complexes, ce qui entraîne des risques de vente abusive et de résultats indésirables pour le consommateur. Par exemple, si la vente d’une carte de crédit privilège assortie de primes voyages compte plus pour l’atteinte des objectifs de vente que la vente d’une carte sans frais annuels ou à faible taux d’intérêt, les employés auront probablement tendance à mettre de l’avant la carte privilège, peut-être même à l’encontre de l’intérêt du consommateur. L’adoption d’objectifs de vente sans différenciation selon le produit pourrait atténuer sensiblement le risque de vente abusive de produits et de services financiers.

Fiches de rendement

Dans leur processus de gestion du rendement, les banques utilisent des fiches de rendement qui servent à calculer le montant de la rémunération variable. Les fiches de rendement comprennent des variables qui servent à évaluer le rendement de l’employé, déterminées selon les fonctions et les responsabilités du poste. Les variables sont pondérées; celles qui correspondent aux priorités stratégiques ont un poids supérieur.

Dans les dernières années, les banques ont accru l’importance accordée à la satisfaction de la clientèle dans leur évaluation du rendement des employés. Cette évolution au profit de la satisfaction de la clientèle dans le milieu des services bancaires de détail a entraîné la création de nouveaux indicateurs pour les employés de première ligne. Par exemple, la fiche de rendement d’un employé de première ligne pourrait être pondérée comme suit :

Les banques font valoir que les fiches de rendement équilibrées constituent un contrôle important pour atténuer les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de protection des consommateurs. Dans les faits, toutefois, les indicateurs utilisés pour évaluer les résultats de vente de l’employé sont souvent nettement plus solides que ceux qui servent à évaluer d’autres aspects du rendement.

L’ACFC a constaté que beaucoup d’employés avaient l’impression d’avoir plus d’emprise sur leurs chiffres de vente que sur leurs résultats en matière de satisfaction de la clientèle, même lorsque les deux mesures avaient un poids égal dans leur fiche de rendement. Par exemple, la satisfaction de la clientèle est mesurée au moyen d’un sondage sur le taux de recommandation net, dans lequel les clients doivent indiquer s’ils recommanderaient la banque à d’autres personnes à la lumière de leur expérience récente en succursale ou au téléphone. Les répondants au sondage sont choisis de façon aléatoire parmi les clients, mais un petit nombre d’entre eux seulement répondent au sondage pour un employé donné au cours d’un trimestre ou d’une année. De plus, les consommateurs peuvent utiliser les sondages pour faire part de leur insatisfaction à l’égard de pratiques appliquées par les banques qui sont indépendantes de la volonté des employés de première ligne.

3. Circuits de vente, pratiques et produits associés à des risques accrus

Certains produits, pratiques commerciales et circuits de vente sont associés à des risques accrus liés aux pratiques de vente.

L’ACFC a déterminé que les domaines faisant intervenir les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants, la vente croisée, l’assurance crédit et les vendeurs tiers posaient des risques accrus de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales. Les risques liés à ces produits, à ces pratiques et à ces circuits de vente sont attribuables à la culture d’entreprise axée sur la vente et aux programmes de gestion du rendement décrits précédemment dans le présent rapport. Dans l’ensemble, les contrôles en place ne permettent pas d’atténuer suffisamment les risques élevés liés aux pratiques de vente.

A) Spécialistes en prêts hypothécaires itinérants

Les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants (les spécialistes) vendent des prêts hypothécaires en dehors du cadre des succursales. Ils se déplacent sur le territoire pour rencontrer les clients et les partenaires d’affaires. Leur mobilité, conjuguée au caractère entièrement variable de leur rémunération, pose un risque accru pour les consommateurs, surtout étant donné l’insuffisance des contrôles et le faible niveau de supervision des banques. La proportion que représentent les prêts hypothécaires générés par les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants varie sensiblement parmi les six grandes banques. Dans certaines, plus de 90 % des prêts hypothécaires sont vendus par ces spécialistes.

Modèle de rémunération variable

Dans chacune des six grandes banques, la rémunération des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants est entièrement variable; ces spécialistes reçoivent donc seulement des commissions, et aucun salaire de base. Les commissions sont généralement calculées en faisant le produit de la valeur globale des prêts hypothécaires vendus — qu’on appelle volume de prêts hypothécaires — et d’un taux de commission exprimé en points de base. Par exemple, une rémunération fixée à 85 points de base donnerait droit à une commission de 4 250 $ sur un prêt hypothécaire de 500 000 $.

Outre le volume de prêts hypothécaires, le taux de rémunération des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants peut tenir compte de plusieurs facteurs, dont les suivants :

La plupart des banques fixent également des objectifs individuels en matière de volume et de vente croisée à leurs spécialistes, qui peuvent bénéficier de taux de commission supérieurs s’ils dépassent les objectifs. Par exemple, une banque pourrait décider de bonifier de 10 points de base le taux de commission des spécialistes à partir du moment où ils atteignent 105 % de leur objectif de volume trimestriel de 10 millions de dollars.

Risques pour le consommateur liés au modèle de rémunération des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants

Les modèles de rémunération variable pourraient dissuader les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants de faire des efforts suffisants pour évaluer les besoins et les objectifs financiers du consommateur et en tenir compte. Le principal risque que présente ce modèle de rémunération pour le consommateur est le risque de vente abusive. Par exemple, le modèle de rémunération pourrait encourager les spécialistes à recommander des produits hypothécaires assortis d’une commission supérieure même s’ils ne constituent pas la solution la plus avantageuse pour le consommateur. Lorsque le taux de commission varie en fonction de la durée, du taux d’intérêt ou du type de prêt, les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants peuvent être tentés de vendre les prêts hypothécaires qui offrent la meilleure commission, sans tenir adéquatement compte des besoins du consommateur.

L’éventualité d’un taux de commission supérieur une fois atteint un certain volume de prêts hypothécaires peut aussi conduire les spécialistes à recommander aux consommateurs des prêts hypothécaires d’une valeur supérieure à ce qu’ils recommanderaient par ailleurs. Les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants pourraient aussi encourager les consommateurs à contracter un prêt hypothécaire plus tôt que ces derniers ne l’avaient prévu, au lieu de les encourager à épargner pour leur mise de fonds.

Les spécialistes peuvent également profiter d’un taux de commission supérieur lorsqu’ils atteignent des objectifs de vente croisée. Dans la plupart des cas, les banques demandent aux spécialistes en prêts hypothécaires itinérants de vendre des produits d’assurance crédit comme une assurance vie, une assurance contre les maladies graves ou une assurance invalidité à une proportion des emprunteurs hypothécaire qui peut aller jusqu’au tiers. Les risques liés à la vente croisée et à l’assurance crédit sont abordés en détail plus loin dans le rapport.

Contrôle et surveillance des pratiques de vente des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants

Les banques appliquent généralement moins de contrôles aux pratiques de vente des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants, et elles assurent une surveillance moins intensive de ces pratiques, qu’elles ne le font dans le cas des autres employés devant réaliser des ventes. Il peut s’ensuivre une augmentation des risques liés aux pratiques de vente. Par exemple, les succursales et les centres d’appels utilisent des fiches de rendement équilibrées pour évaluer le rendement des employés afin de tenir compte non seulement des chiffres de vente, mais aussi d’autres critères comme les résultats des sondages sur la satisfaction de la clientèle. Cependant, les fiches de rendement équilibrées ne sont pas couramment utilisées pour déterminer la rémunération variable des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants. Lorsque des fiches de rendement sont utilisées pour ces spécialistes, elles sont nettement moins équilibrées et tendent à privilégier fortement les chiffres de vente.

La plupart des banques ont aussi recours, quoique de façon limitée, à la pratique qui consiste à récupérer la commission versée à un spécialiste en prêts hypothécaires itinérant dans certaines circonstances. Par exemple, les commissions peuvent être récupérées si les documents d’approbation des prêts hypothécaires sont incomplets ou si les défauts de paiement sur prêts hypothécaires sont trop nombreux. À l’heure actuelle, cette pratique de récupération sert principalement de contrôle permettant d’atténuer le risque de crédit. Cependant, dans le cadre de son examen, l’ACFC n’a trouvé que peu d’éléments probants indiquant que la pratique de récupération de la commission était utilisée pour atténuer les risques liés aux pratiques de vente qui se posent dans le cas des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants.

La surveillance directe des pratiques de vente des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants est insuffisante. Comme nous l’avons mentionné, étant donné le caractère mobile de leurs activités, ces employés travaillent souvent indépendamment des succursales. Ils sont censés passer leur temps à nouer des relations dans la communauté, avec des agents immobiliers, des promoteurs et d’autres personnes susceptibles de les recommander aux demandeurs de prêts hypothécaires. Les occasions pour les gestionnaires d’assurer une supervision directe, d’observer les pratiques de vente et d’offrir du mentorat sont donc limitées.

Par ailleurs, les gestionnaires responsables de la surveillance des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants ont souvent intérêt à favoriser l’augmentation du volume des ventes hypothécaires. Une part non négligeable de la rémunération des gestionnaires peut être directement liée au volume de prêts hypothécaires vendus par les spécialistes qui sont sous leur supervision. Les fiches de rendement des gestionnaires des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants sont largement axées sur les ventes.

La concurrence pour attirer les services des meilleurs spécialistes en prêts hypothécaires itinérants peut dissuader les banques de faire respecter les codes de conduites et de prendre des mesures disciplinaires. Au cours de l’examen, l’ACFC a appris qu’il y avait eu des cas où des spécialistes en prêts hypothécaires itinérants avaient quitté leur employeur avant que la banque n’ait pu terminer l’enquête qu’elle voulait mener ou prendre des mesures disciplinaires.

B) Vente croisée

La vente croisée est la pratique qui consiste à vendre des produits ou des services additionnels à des clients existants en tirant parti de la relation établie. Les banques utilisent cette méthode pour augmenter leurs ventes et accroître leur part de marché. Habituellement, elles ciblent les consommateurs qui ont déjà obtenu un ou deux produits et leur offrent une gamme de produits. Le rendement sur le plan de la vente croisée est suivi au moyen de mesures statistiques comme la « part de portefeuille », qui permettent aux banques d’évaluer la mesure dans laquelle elles réussissent à transformer des consommateurs utilisant un produit unique en consommateurs qui utilisent de multiples produits.

La pratique comporte des avantages. Elle permet de porter des produits et des services utiles à l’attention des consommateurs. Cependant, la vente croisée peut aussi entraîner la vente de produits ou de services dont les clients ne veulent pas ou qui ne répondent pas à leurs besoins, surtout lorsque les employés de banque sont motivés par des objectifs de vente et ne font pas un effort suffisant pour évaluer les besoins du consommateur.

Vente croisée fondée sur les pistes

Un type de vente croisée courant se fonde sur les pistes ou les suggestions. Lorsqu’un consommateur se rend en succursale ou communique avec un centre d’appels, l’écran de l’employé de banque peut afficher jusqu’à une dizaine de suggestions pour ce client. Les suggestions sont généralement produites par des algorithmes, et elles incitent les employés à offrir divers produits et services que le consommateur n’a pas déjà obtenus auprès de la banque, par exemple :

Risques pour le consommateur liés à la vente croisée

L’accent accru mis par les banques sur la vente croisée pourrait accroître le risque qu’elles négligent d’obtenir le consentement exprès des consommateurs. Par exemple, le fait de présenter aux consommateurs un grand nombre de produits différents tout en gérant le délai de service augmente le risque que les employés de banque se sentent bousculés et qu’ils ne communiquent pas de façon claire, simple et n’induisant pas en erreur lorsqu’ils cherchent à obtenir le consentement d’un client. Autrement dit, la vente croisée augmente le risque que les employés ne prennent pas le temps d’expliquer des modalités, des conditions et des frais importants associés aux produits offerts. Il est donc possible que le consommateur ne soit pas adéquatement informé relativement au produit ou au service qu’il achète.

La vente croisée peut aussi accroître le risque de vente abusive, étant donné que le modèle de vente peut inciter les employés de banque à offrir des produits aux consommateurs sans tenir compte de leurs objectifs financiers, de leurs besoins ni de leur situation. Les représentants du service à la clientèle et le personnel responsable des ventes sont généralement tenus de proposer aux consommateurs des produits qu’ils voient dans les pistes générées par ordinateur, tout en gérant le délai de service. Par exemple, un consommateur peut se rendre dans une succursale pour encaisser un chèque et se voir proposer une carte de crédit assortie de primes voyages et une assurance solde de carte de crédit. Étant donné que les employés de banque doivent souvent atteindre des cibles relativement aux pistes générées par ordinateur, les stratégies de vente croisée peuvent dissuader les employés de cerner les besoins et les objectifs du consommateur en vue de lui proposer des produits qui lui conviennent.

Contrôles visant les risques liés à la vente croisée

À l’heure actuelle, les banques atténuent le risque de vente abusive lié à la vente croisée au moyen des mesures suivantes :

Contrôles visant l’obtention du consentement exprès

L’ACFC a constaté que les banques ont généralement des contrôles en place pour veiller à l’obtention du consentement des consommateurs au moment de la vente d’un nouveau produit ou d’un nouveau service. Cependant, l’ACFC a aussi constaté que les contrôles en place n’étaient pas adéquats pour garantir que l’information fournie par écrit ou de vive voix au consommateur pour obtenir son consentement est claire, simple et n’induit pas en erreur.

Il convient de souligner que la plupart des banques vendent certains produits et services (p. ex. augmentation de limite de la marge de crédit personnelle, modification du forfait bancaire) en obtenant le consentement verbal du consommateur. Le recours au consentement verbal peut accroître le risque que des produits soient vendus aux consommateurs sans que ces derniers aient donné leur consentement exprès.

Les contrôles mis en place pour veiller à ce que les banques obtiennent le consentement des consommateurs au moyen d’une communication claire, simple et n’induisant pas en erreur sont habituellement moins rigoureux dans les succursales que dans les centres d’appel. Dans l’un et l’autre cas, les employés utilisent des messages types qui visent à garantir que les consommateurs sont informés des modalités, des frais et des conditions les plus importants avant de donner leur consentement. En succursale, les directeurs et les superviseurs du service à la clientèle doivent s’assurer que les employés utilisent les messages types. Cependant, l’ACFC a constaté que les directeurs de succursale et les superviseurs n’étaient pas bien placés pour vérifier que le consentement exprès des consommateurs était toujours obtenu de la manière prescrite. Pour plus de détails à ce sujet, voir la section intitulée « Contrôles ».

Les banques enregistrent la plupart des conversations entre les employés des centres d’appels et les consommateurs, ce qui leur permet d’examiner ces interactions et de s’assurer que les employés respectent les messages types et obtiennent dûment le consentement des consommateurs. Cependant, l’examen de l’ACFC a révélé que la proportion des appels qui sont examinés par les banques est faible ― trop faible, en fait, pour donner des indications fiables quant au respect des politiques et des procédures en matière de consentement par un employé donné.

Dans la plupart des cas, alors que les employés des centres d’appels prennent de 60 à 80 appels par jour, seul un petit nombre d’appels est évalué chaque mois pour les besoins de l’assurance de la qualité, par exemple pour vérifier le respect des messages types ainsi que des obligations en matière de pratiques commerciales. De plus, en général, les appels examinés sont choisis de façon aléatoire, et non en fonction des facteurs de risque. Par exemple, les banques n’examinent pas une proportion plus importante d’appels au cours desquels une assurance solde de carte de crédit a été vendue, même si ces appels peuvent poser un risque accru sur le plan des pratiques de vente.

Gestion du rendement

La rémunération, les fiches de rendement des employés et les autres outils de gestion du rendement ne permettent habituellement pas d’atténuer efficacement les risques liés à la vente croisée. Dans certains cas, les banques évaluent le rendement des employés en fonction d’objectifs de vente croisée ambitieux qui ciblent des produits donnés et qui sont personnalisés. Cette façon de faire peut accroître les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, l’adoption d’objectifs axés sur les activités, d’objectifs d’équipe et de récompenses pécuniaires sans différenciation selon le produit pourrait contribuer à atténuer le risque de vente abusive. Certaines banques ont adopté des objectifs axés sur les activités, c’est-à-dire qu’ils récompensent les employés qui proposent des produits aux consommateurs ou qui discutent avec les consommateurs, même lorsqu’aucune vente n’est conclue. L’ACFC a constaté que la majorité des banques ne fixent pas d’objectifs de vente à l’échelle de l’équipe et que le recours à la rémunération sans différenciation selon le produit est limité.

Analyse des données

La plupart des banques travaillent à mettre en place de nouvelles technologies pour améliorer les contrôles liés à la vente croisée et réduire le risque de vente abusive. Par exemple, l’analyse des données peut servir à détecter des taux anormalement élevés de cartes de crédit inutilisées ou d’annulation de produits, lesquels peuvent révéler des pratiques de vente abusives.

L’analyse des données pourrait être mise à profit pour dissuader la vente abusive, en ce qu’elles pourraient permettre aux banques de récupérer la rémunération versée aux employés dans les cas où les consommateurs n’utilisent pas les produits qui leur ont été vendus. Il serait également possible de produire des rapports destinés aux superviseurs et aux directeurs de succursale pour les aider à surveiller les pratiques de vente des employés. D’ailleurs, les banques prévoient d’investir davantage dans l’analyse des données. Cependant, cette technologie n’est pas encore suffisamment développée pour le contrôle des risques liés aux pratiques de vente, tout particulièrement si l'on considère la maturité de la technologie à l’appui des stratégies commerciales.

C) Assurance crédit

L’assurance crédit permet d’acquitter les soldes impayés des produits de crédit ou de faire des paiements mensuels pour rembourser une dette dans certaines circonstances prédéterminées, comme une perte d’emploi, une maladie grave ou un décès. Dans la vaste majorité des cas, le consommateur peut uniquement se procurer une assurance crédit auprès de la banque qui lui a vendu le produit de crédit. Le consommateur qui souhaite obtenir une assurance solde de crédit pour sa carte de crédit peut seulement en faire la demande auprès de l’institution bancaire qui a émis la carte de crédit.

Comme c’est le cas pour la plupart des assurances, l’assurance crédit prévoit certaines exclusions liées, par exemple, à la situation d’emploi et à l’état de santé. Au moment de l’achat, le processus de détermination des risques repose sur l’évaluation des réponses du consommateur (données par oui ou par non) à quelques questions générales. Selon ces réponses, l’assurance crédit peut être accordée en quelques minutes seulement.

Les produits d’assurance crédit sont généralement assortis d’une période d’essai de 30 jours pendant laquelle le consommateur a droit au remboursement complet de la prime payée s’il décide de résilier l’assurance. Cette période est désignée par divers termes, par exemple « période d’essai » ou « période d’examen gratuit ». Il est toutefois important de mentionner que les banques ne sont pas tenues de demander aux consommateurs de confirmer à nouveau qu’ils souhaitent acheter le produit après la période d’essai initiale.

Risques pour le consommateur liés à l’assurance crédit

Il existe un risque que les consommateurs et le personnel de première ligne ne comprennent pas bien l’assurance crédit, les exclusions en matière de protection ou le processus de règlement des demandes. Les employés de banque peuvent ne pas communiquer aux consommateurs certains détails en raison d'une mauvaise compréhension du produit, dans le but de réaliser une vente ou en raison de contraintes de temps. Par exemple, l’employé d’une banque peut vendre une assurance crédit à un étudiant de niveau postsecondaire en complément d’une marge de crédit personnelle, mais négliger de l’informer qu’il doit travailler au moins un certain nombre d’heures pour que la protection soit en vigueur.

Les employés de banque sont souvent encouragés à recourir aux techniques de vente croisée et d’offre groupée et à exercer plus de pression sur le consommateur lorsqu’ils tentent de vendre une assurance crédit, par rapport aux autres produits et services bancaires. Les employés peuvent, volontairement ou non, laisser entendre que l’assurance crédit fait partie du produit de crédit vendu ou que l’approbation de crédit est conditionnelle à l’achat d’une assurance crédit. Par exemple, les employés de première ligne peuvent affirmer que « la carte de crédit vient avec une assurance solde de crédit », ce qui peut donner l’impression aux consommateurs que l’assurance est un élément rattaché à la carte de crédit, alors qu’il s’agit en fait d’un produit bien distinct dont l’achat est optionnel.

Les banques établissent des objectifs de vente pour l’assurance crédit qui diffèrent selon les produits. Par exemple, on peut demander aux employés que 30 % des ventes de produits de crédit s’accompagnent d’une vente d’assurance crédit. Le recours à des objectifs visant certains produits en particulier augmente le risque que les vendeurs proposent un produit avec insistance dans le but d’atteindre leur objectif, même si le produit ne répond pas aux besoins du consommateur. Le fait pour un employé de ne pas atteindre un objectif de vente peut entraîner une diminution de la rémunération variable de l’employé ou compromettre la possibilité pour ce dernier de bénéficier des récompenses non pécuniaires.

Les employés de banque peuvent tenter de convaincre les consommateurs de souscrire une assurance crédit en omettant de leur fournir des renseignements clairs au sujet de la période d’essai de 30 jours. Par exemple, lorsque les consommateurs posent des questions sur ce qui est exclu de la protection, les employés de banque peuvent les encourager à acheter le produit pour profiter de la période d’essai et avoir accès à une trousse d’information, même si l’achat n’est pas requis pour obtenir l’information en question. Au cours de l’examen, l’ACFC a constaté que certains consommateurs oublient d’annuler leur adhésion et doivent acquitter des paiements de prime.

L’industrie décrit l’assurance crédit comme un produit « vendu » plutôt que comme un produit « acheté », ce qui signifie que les consommateurs vont rarement poser des questions au sujet de l’assurance crédit, en demander une avant qu’on ne la leur offre ou s’informer sur les caractéristiques du produit. Les banques comptent plutôt sur leurs employés pour offrir le produit aux consommateurs. Ces derniers se fient souvent à l’information fournie par les employés de banque pour décider s’ils veulent acheter une assurance crédit.

Contrôles visant les pratiques de vente d’assurance crédit

Les banques recourent à des messages types, à de la formation et à des dispositions de récupération pour atténuer le risque de vente abusive d’assurance crédit et pour favoriser le respect des obligations en matière de pratiques commerciales. De façon générale, l’ACFC a constaté que les mesures de contrôle sont insuffisantes, compte tenu des caractéristiques de l’assurance crédit et des risques associés aux pratiques de vente courantes.

Messages types

Les banques ont recours à des messages types pour s’assurer que leurs employés transmettent les renseignements importants aux consommateurs, entre autres en ce qui concerne les modalités des produits d’assurance crédit. En outre, les messages types sont utilisés pour atténuer le risque que les employés exercent une pression excessive sur les consommateurs lors de la vente d’une assurance crédit et pour faire en sorte que les employés communiquent d’une façon claire, simple et qui n’induit pas en erreur lorsqu’ils cherchent à obtenir le consentement d’un client. Les banques s’attendent à ce que les employés utilisent ces messages types, qui sont conçus de manière à présenter l’information logiquement.

Toutefois, les banques ne disposent pas de contrôles adéquats pour s’assurer que les employés utilisent les messages types, qu’ils expliquent les modalités en termes clairs et qu’ils s’abstiennent d’exercer une pression de vente excessive. La surveillance est plus étroite dans les centres d’appels puisque les appels sont enregistrés, mais seulement un très petit nombre de ces appels sont examinés pour déterminer le respect du code de conduite de la banque et des obligations en matière de pratiques commerciales. Dans les succursales, les banques vont principalement s’en remettre aux directeurs, aux adjoints et aux superviseurs pour prévenir la vente abusive.

Formation

Les banques recourent à la formation pour diminuer le risque que les employés fassent usage de pratiques abusives afin de vendre de l’assurance crédit et pour prévenir les manquements aux obligations en matière de pratiques commerciales. La formation se veut un complément aux messages types et permet de faire en sorte que les employés soient outillés pour répondre convenablement aux questions des consommateurs sur l’assurance crédit.

La question de la formation en matière d’assurance crédit est abordée dans un code de conduite volontaire adopté par les banques. Les signataires du code s’engagent à former leurs employés et à prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les produits sont vendus par des représentants compétents.

Dans le cadre de son examen, l’ACFC a constaté que les employés de banque ne sont pas toujours bien informés relativement aux produits d’assurance crédit ou ne connaissent pas bien ces produits. Par exemple, lors des visites de succursales effectuées par l’ACFC, des employés ont donné de l’information incorrecte et incomplète sur les avantages, la protection et les exclusions liés à l’assurance crédit lorsqu’ils ont répondu à des questions concernant leur façon de vendre le produit. L’ACFC est d’avis que la formation des employés de première ligne pourrait être améliorée.

Dispositions de récupération

Certaines banques récupèrent la commission versée pour la vente lorsque le consommateur résilie son assurance crédit dans les 90 jours suivant la vente. Cette mesure réduit le risque de vente abusive en encourageant les employés à faire un effort suffisant pour évaluer les besoins des consommateurs dans le contexte de la vente d’une assurance crédit. D’après les constatations de l’ACFC, ces dispositions de récupération visant à gérer le risque de vente abusive sont plus souvent utilisées pour l’assurance crédit que pour les autres produits et services bancaires.

Les banques recueillent certaines données sur les taux de résiliation, mais ces données ne correspondent pas toujours à des situations de vente abusive puisque le consommateur peut annuler son assurance pour d’autres raisons. Une analyse plus approfondie des annulations par les banques permettrait à ces dernières d’utiliser les données pour surveiller, déterminer et atténuer les risques liés aux pratiques de vente.

D) Vendeurs tiers

Dans le but de joindre les consommateurs dans un environnement autre que celui des succursales, la plupart des banques confient à des tiers la vente de certains produits, comme les cartes de crédit. Ces vendeurs tiers sont tenus de respecter les lois et règlements fédéraux visant la protection des consommateurs de produits et services financiers lorsqu’ils vendent des produits et services bancaires. Les banques ont la responsabilité de veiller à ce que les vendeurs tiers se conforment à ces exigences. Dans la pratique, le modèle de vente par des tiers, combiné à la surveillance limitée qu’exercent les banques, entraîne un risque accru de vente abusive.

Modèles de vente par des tiers

Les vendeurs tiers et leurs employés ne vendent souvent qu’un seul produit ou type de produit, par exemple des cartes de crédit offrant des primes voyages dans des stands installés dans les aéroports ou des produits d’assurance crédit dans des centres d’appels sortants. Par conséquent, leurs objectifs de vente concernent généralement un produit en particulier. Les contrats établis entre les banques et les vendeurs tiers peuvent également établir des objectifs précis et ambitieux, par exemple la vente de milliers de cartes de crédit chaque mois par le vendeur tiers.

Les vendeurs tiers répartissent généralement les objectifs de vente entre les employés et les points de service. Les employés chargés des ventes sont souvent tenus de vendre un nombre minimal de produits par quart de travail ou par nombre d’heures travaillées. En plus de leur rémunération de base ou de leur salaire horaire, les employés des vendeurs tiers peuvent toucher une commission en fonction du nombre d’unités vendues. Même dans les cas où la rémunération de leurs employés n’est pas établie selon le volume de ventes ou le nombre d’unités vendues, les vendeurs tiers peuvent être rémunérés de cette façon par les banques, ce qui pourrait les inciter à accroître la pression de vente sur leurs employés.

Risques pour le consommateur liés à la vente par des tiers

Les modèles de vente par des tiers présentent plusieurs risques pour le consommateur. Dans un premier temps, des objectifs de vente ambitieux avec différenciation selon le produit peuvent pousser les employés du vendeur tiers à recourir à des techniques agressives pour vendre des produits de crédit aux consommateurs. Par exemple, l’ACFC a examiné des plaintes provenant de consommateurs selon lesquelles des employés de vendeurs tiers avaient fait fi de leurs objections ou avaient négligé d’obtenir un « oui » sans équivoque de leur part.

Dans un deuxième temps, il est possible que les vendeurs tiers ne fassent pas les efforts suffisants pour évaluer si un produit ou un service financier répond aux besoins du consommateur. Puisque ces vendeurs sont généralement chargés de vendre un ou deux produits ou services bancaires, ils pourraient être moins motivés à déterminer les besoins et les objectifs financiers des consommateurs. De plus, en raison du nombre restreint de produits qu’ils vendent, les vendeurs tiers n’ont pas facilement la possibilité d’offrir des produits ou types de produits de rechange aux clients.

Dans un troisième temps, les circonstances dans lesquelles se déroule l’interaction entre le vendeur tiers et le consommateur peuvent avoir une incidence sur la façon dont le consentement du consommateur est obtenu. Le plus souvent, ces rencontres ont lieu dans des endroits tels que des épiceries, des aéroports, des stations-service ou des cafés. Dans de tels environnements, le consommateur n’est pas activement à la recherche de produits bancaires et n’est donc pas nécessairement préparé à prendre d’importantes décisions d’ordre financier. Ces environnements peuvent favoriser la vente abusive, vu que les consommateurs sont souvent occupés et distraits.

Enfin, la perplexité des consommateurs peut être accrue par le fait que des vendeurs tiers offrent aux consommateurs des primes, des cadeaux et des prix s’ils acceptent de signer un formulaire de demande. Il est possible que les vendeurs tiers n’expliquent pas toujours clairement aux consommateurs qu’ils sont en train de remplir une demande de crédit ou de conclure une entente en échange d’un cadeau ou d’un prix. Il arrive que certains vendeurs présentent même ces ententes comme étant des sondages.

Contrôles visant les vendeurs tiers

Les banques exercent une surveillance beaucoup moins étroite à l’égard des pratiques des vendeurs tiers qu’à l’égard des activités qui se déroulent dans les succursales et les centres d’appels. Les banques misent fortement sur leurs valeurs culturelles et sur les mesures de surveillance de la direction pour prévenir la vente abusive et veiller au respect des obligations en matière de pratiques commerciales dans les succursales et les centres d’appels. Ces outils sont moins efficaces pour la surveillance des pratiques de vente des vendeurs tiers.

Lorsque les banques confient la vente de certains produits à des tiers, elles s’en remettent à ces tiers pour la plupart des activités de contrôle et de surveillance. Par exemple, les vendeurs tiers ont généralement la responsabilité de gérer au quotidien les points de vente, d’établir le ton et la culture du milieu de travail, d’embaucher et de former le personnel, et de s’assurer que les employés ne pratiquent pas de vente abusive et ne manquent pas aux obligations en matière de pratiques commerciales. Dans certains cas, les vendeurs tiers se chargent eux-mêmes de l’assurance de la qualité, de la vérification des appels ainsi que des enquêtes concernant de possibles manquements aux obligations en matière de pratiques commerciales lorsqu’un consommateur soumet une plainte; ils présentent leurs conclusions aux banques. En règle générale, les banques se fient aux vendeurs tiers pour gérer les risques liés aux pratiques de vente.

Certaines banques travaillent actuellement à repenser leur modèle de vente par des tiers et ont pris des mesures pour resserrer la surveillance qu’elles exercent. Elles utilisent l’analyse des données pour surveiller les activités des vendeurs tiers et comparent l’information obtenue sur ces activités aux données sur leurs propres ventes. Par exemple, les banques se servent des taux de résiliation précoce comme d’un indicateur de ventes de piètre qualité. Les banques ont également commencé à exiger des vendeurs tiers qu’ils utilisent des sondages sur la satisfaction de la clientèle. Il est important de souligner que les banques peuvent généralement mettre fin à leurs contrats avec les vendeurs tiers lorsque ceux-ci ne s’acquittent pas de leurs obligations contractuelles.

Pour conclure, malgré les efforts déployés récemment, la surveillance exercée par les banques à l’endroit des vendeurs tiers demeure insuffisante et moins rigoureuse que celle exercée à l’égard de leurs propres activités de vente au détail. Étant donné le risque élevé que posent les vendeurs tiers, les banques auraient tout avantage à renforcer la surveillance qu’elles exercent à leur égard.

4. Gouvernance des pratiques de vente

Les cadres de gouvernance ne permettent pas de gérer efficacement les risques liés aux pratiques de vente.

La qualité des pratiques de gouvernance des banques constitue un facteur important du maintien de la confiance des consommateurs et du marché. Les reportages des médias alléguant le recours à des pratiques de vente agressives au Canada ont incité l’ACFC à examiner les structures de gouvernance des banques en ce qui a trait aux pratiques de vente et à la protection des consommateurs.

Le document Principes de gouvernance d’entreprise du G20 et de l’OCDE propose la définition suivante :

« La gouvernance d’entreprise fait référence aux relations entre la direction d’une entreprise, son conseil d’administration, ses actionnaires et d’autres parties prenantes. [Elle] détermine également la structure par laquelle sont définis les objectifs d’une entreprise, ainsi que les moyens de les atteindre et d’assurer une surveillance des résultats obtenusNote de bas de page 4 . »

Les cadres de gouvernance d’entreprise définissent également la structure par laquelle sont attribués les rôles, les responsabilités et les obligations de rendre des comptes en ce qui a trait à la poursuite des objectifs et à la surveillance du rendement de l’entreprise.

L’examen de l’ACFC a permis de cerner des possibilités de renforcer la gouvernance par les banques des pratiques de vente :

Cadres de gouvernance

L’ACFC a constaté que les cadres de gouvernance des banques ne tenaient pas compte comme il se doit de la gestion des risques liés aux pratiques de vente, comparativement à la gestion d’autres types de risques. Par conséquent, les banques n’ont pas de vue d’ensemble des risques associés aux pratiques de vente. Les conseils d’administration, les membres de la haute direction et les responsables des fonctions de contrôle ont une capacité limitée pour ce qui est de cerner, d’évaluer, de surveiller et de gérer les risques relatifs à la vente abusive, à l’obtention de piètres résultats pour les consommateurs et au manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales. Certaines banques ont toutefois commencé à élaborer et à mettre en place des cadres pour gérer les risques liés aux pratiques de vente, mais le travail en est encore à ses débuts.

Mandats

Aucun comité du conseil d’administration n’est expressément chargé de surveiller les pratiques de vente. La surveillance par le conseil d’administration de la protection des consommateurs de produits et services financiers est une responsabilité répartie entre divers comités du conseil. L’absence de rôles et de responsabilités clairs quant à la surveillance des pratiques de vente et à la protection des consommateurs a restreint la capacité des conseils d’administration de superviser adéquatement les décisions de la haute direction à cet égard et de les remettre en question, s’il y a lieu.

Rapports

L’ACFC a déterminé que les rapports concernant les pratiques de vente qui sont présentés aux conseils d’administration sont largement insuffisants. En général, les conseils d’administration ne reçoivent pas de données exhaustives ni d’analyse de fond concernant les risques liés aux pratiques de vente (p. ex. information sur les plaintes, les sanctions disciplinaires, les cessations d’emploi et les entrevues de départ). À titre d’exemple, les rapports annuels sur les plaintes des consommateurs que rédigent les ombudsmans des banques à l’intention des conseils d’administration n’offrent qu’un résumé général du petit nombre de plaintes qui sont portées à l’attention des ombudsmans. Puisque les rapports ne comportent que peu d’explications ou d’analyses de fond des problèmes potentiels, il peut être difficile pour les conseils d’administration de surveiller et de remettre en question les plans d’action proposés pour répondre aux plaintes des consommateurs.

Étant donné le peu d’information fournie, il est peu probable que les conseils d’administration soient au courant des préoccupations des employés en ce qui a trait aux pratiques de vente. Durant les entretiens réalisés pour la préparation du présent rapport, les membres des conseils d’administration se sont dits étonnés des allégations faites dans les médias par des employés, anciens et actuels, à propos des pratiques de vente agressives et abusives. Pareille réaction porte à croire que les moyens mis à la disposition des employés pour transmettre au niveau supérieur leurs préoccupations au sujet des pratiques de vente ou d’autres questions ne fonctionnent peut-être pas aussi bien que prévu. Si l’employé a l’impression que ses problèmes ne seront pas pris en compte ou réglés, il pourrait décider de s’adresser aux médias.

Surveillance des contrôles

Les conseils d’administration encadrent et surveillent l’efficacité des systèmes de contrôle interne des banques. Pour accomplir cette fonction, ils posent un regard critique sur la validité de ces systèmes et donnent des conseils à cet égard. Les systèmes de contrôle interne fournissent les règles, les politiques, les procédures et les structures organisationnelles qui favorisent l’atteinte des objectifs des banques.

Dans le cadre du présent examen, les conseils d’administration se sont dits très confiants par rapport à la gestion par leurs banques des risques liés aux pratiques de vente. Cependant, il a été constaté que les contrôles visant à atténuer les risques associés aux pratiques de vente étaient insuffisants comparativement à ceux visant d’autres catégories, comme le risque de crédit.

5. Contrôles visant les pratiques de vente

Les contrôles visant à atténuer les risques liés aux pratiques de vente sont insuffisants.

En général, les banques s’appuient sur leur culture organisationnelle, sur les ressources humaines et sur le modèle des trois lignes de défense pour atténuer les risques liés aux pratiques de vente. Le modèle des trois lignes de défense comprend la gestion opérationnelle; la vérification de la conformité et la gestion des risques; et la vérification interne.

Lorsque les banques se sont réorientées pour mettre davantage l’accent sur la vente et les services de consultation dans les succursales et les centres d’appels, elles n’ont pas actualisé leurs contrôles visant à atténuer les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales. Les contrôles en place qui servent à gérer les risques liés aux pratiques de vente sont moins développés que ceux utilisés pour gérer d’autres types de risques. Des contrôles insuffisants pourraient empêcher la détection et la prévention des cas de non conformité et des pratiques de vente abusives.

La culture organisationnelle comme mesure de contrôle

Les banques invoquent la culture organisationnelle comme un contrôle crucial permettant d’atténuer les risques associés aux pratiques de vente. Elles sont convaincues que leur personnel a été dûment informé de l’importance d’adopter un comportement intègre et approprié. Pour étayer le bien-fondé de leur culture de vente, elles s’appuient sur de solides résultats en matière de satisfaction des employés et de la clientèle et sur le nombre relativement faible d’infractions à leur code de conduite.

Les banques font aussi valoir que les programmes d’intégration et de formation ainsi que les codes de conduite contribuent à façonner des cultures qui atténuent les risques associés aux pratiques de vente. Toutefois, l’examen de l’ACFC révèle que les cultures organisationnelles que favorisent les banques ne présentent pas le degré de développement nécessaire pour contribuer efficacement à la détection et à l'atténuation des risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.

Les mesures qu’appliquent les banques pour évaluer leur culture ne sont pas conçues pour évaluer les risques liés aux pratiques de vente. Par exemple, les sondages réalisés auprès des employés omettent souvent des questions importantes, comme celle de savoir si les employés ressentent de la pression quant à l’atteinte des objectifs de vente. De même, les sondages sur la satisfaction de la clientèle ne sont pas conçus pour déterminer si les consommateurs trouvent que les produits et les services qu’ils ont achetés sont adaptés à leurs besoins.

L’ACFC a constaté que les communications transmises par la haute direction au sujet de l’intégrité et des bonnes pratiques de vente ne se rendaient pas systématiquement aux employés de première ligne. L’équipe de la haute direction essaie d’ancrer des messages, par exemple sur l’importance d’accorder la priorité au client et d’axer les ventes sur les besoins du client. Cependant, si les employés qui traitent avec la clientèle sont généralement au fait des messages concernant l’importance de la satisfaction de la clientèle et de l’adoption de bonnes pratiques, ils ne savent pas toujours comment appliquer ces concepts aux pratiques de vente.

La haute direction articule toujours ses messages autour du consommateur. Cependant, l’examen a permis de constater que ce sont les cadres intermédiaires qui sont les mieux placés pour orienter la culture de vente dans les succursales et les centres d’appels, notamment à l’occasion des réunions quotidiennes du personnel des ventes, des réunions matinales en petit groupe et des activités d’encadrement, et au moyen des tableaux d’affichage soulignant les excellents résultats de vente des employés, leurs promotions et leurs récompenses, ainsi que des programmes d’incitatifs non pécuniaires. À l’issue de ses entretiens avec le personnel de première ligne, l’ACFC a en outre conclu que les messages des cadres intermédiaires au personnel ne concordent pas toujours avec ceux transmis par la haute direction. Certains employés ont expliqué avoir travaillé sous l’autorité de cadres intermédiaires ambitieux qui étaient récompensés pour avoir encouragé des pratiques de ventes agressives axées sur les résultats et sur le volume plutôt que sur le service à la clientèle ou la satisfaction de la clientèle.

Première ligne de défense : la gestion opérationnelle

Succursales

Dans les succursales, les principaux responsables des pratiques de vente sont les directeurs de succursale, alors que dans les centres d’appels, ce sont les chefs d’équipe, qui s’appuient sur un processus d’assurance de la qualité. Ces directeurs et chefs d’équipe surveillent les pratiques de vente des employés de première ligne. La participation de la haute direction et des responsables des fonctions de contrôle au siège social (comme la vérification de la conformité) est généralement limitée dans ce circuit.

Les directeurs de succursale ont des responsabilités vastes et complexes. Ils gèrent les activités quotidiennes, notamment les questions de sécurité, la dotation et l’encadrement. Ils doivent assurer l’atteinte des objectifs de vente, ceux des employés comme de la succursale dans son ensemble, tout en maintenant un niveau élevé de service à la clientèle.

Qui plus est, les directeurs de succursale jouent un rôle déterminant dans les communications internes au sein des succursales, exerçant ainsi une grande influence sur les employés de première ligne. Selon la nature de leurs communications, les directeurs peuvent exercer une pression indue sur les employés de première ligne pour les inciter à atteindre des objectifs précis en matière de recettes de ventes ou à surpasser les attentes pour ce qui est de la croissance. Lors des entretiens, certains employés ont dit avoir ressenti de la pression pour vendre ou encore avoir été témoins de vente abusive alors qu’ils travaillaient pour une autre banque ou dans d’autres succursales de leur employeur actuel.

Une question qui préoccupe l’ACFC est celle des outils et des ressources dont disposent les directeurs de succursale pour gérer les risques liés aux pratiques de vente au sein de leur établissement. Les directeurs de succursale ont indiqué à l’ACFC qu’ils peuvent détecter les pratiques de vente abusives et les manquements aux obligations en matière de pratiques commerciales, mais l’Agence a constaté qu’ils peuvent rarement observer directement les interactions entre les clients et les employés, alors que les interactions qui se déroulent au téléphone sont toutes enregistrées.

Les directeurs de succursale reçoivent peu de rapports sur des questions autres que les résultats des ventes et les sondages sur la satisfaction de la clientèle. En général, ils n’obtiennent pas assez d’information sur des domaines qui pourraient les aider à détecter les pratiques de vente abusives et les manquements aux obligations en matière de pratiques commerciales, comme les plaintes des consommateurs. Par exemple, les banques n’ont pas suffisamment investi dans les outils d’analyse des données qui pourraient aider les secteurs d’activité à déceler les faibles taux d’utilisation ou les taux élevés d’annulation de produits qui pourraient révéler des pratiques de vente abusives.

De plus, les directeurs de succursale disposent d’une grande latitude quant à la façon de traiter les cas de vente abusive. Comme ce sont eux qui décèlent et qui prennent en main la plupart de ces problèmes, le traitement réservé à un employé ayant commis une inconduite peut varier en fonction du directeur. Par ailleurs, bien que le directeur de succursale puisse être tenu de consulter le service des ressources humaines dans les cas de vente abusive, c’est le plus souvent le superviseur direct de l’employé qui se charge de résoudre la situation au moyen d’un encadrement informel.

Centres d’appels

Les chefs d’équipe et la fonction de l’assurance de la qualité sont des éléments clés du contrôle visant les risques liés aux pratiques de vente dans les centres d’appels. Les chefs d’équipe écoutent les appels en temps réel et examinent tous les mois un échantillon d’appels pris par chaque employé pour orienter l’encadrement et la gestion du rendement.

Les banques enregistrent la plupart des appels entrants et sortants dans leurs centres d’appels, mais seulement un petit nombre de ces appels sont examinés pour les besoins de l’assurance de la qualité, notamment pour vérifier si les employés utilisent les messages clés pour la vente et se conforment aux obligations en matière de pratiques commerciales. Par exemple, l’ACFC a constaté que dans les centres d’appels où les employés traitent 1 400 appels par mois chacun, en général 4 de ces appels au maximum sont examinés pour les besoins de l’assurance de la qualité. Les enregistrements sont archivés, ce qui signifie qu’une banque peut décider d’examiner un plus grand nombre d’appels s’il s’avère nécessaire d’enquêter sur les pratiques d’un employé.

L’ACFC a cerné des possibilités d’améliorer l’assurance de la qualité dans les centres d’appels afin de mieux déceler et prévenir les cas de vente abusive et les manquements aux obligations en matière de pratiques commerciales. Les banques devraient examiner un plus grand nombre d’appels et une proportion accrue des appels pour l’assurance de la qualité. La mise en œuvre de la technologie d’analyse vocale pourrait permettre de réduire les coûts liés à l’examen d’un plus grand nombre d’appels. En outre, la sélection des appels aux fins d’examen devrait être fondée sur les risques plutôt que de se faire de façon aléatoire. Dans les cas où l’examen des appels révèle le recours à des pratiques de vente douteuses, les banques devraient réaliser beaucoup plus d’analyses des causes fondamentales. Ces analyses ne devraient pas être limitées aux seuls employés en cause, mais englober le milieu de travail et la culture de vente.

Plaintes des consommateurs

Les plaintes des consommateurs peuvent constituer une bonne source d’information sur l’expérience client. Les banques sont tenues de disposer d’un processus de transmission des plaintes aux échelons supérieurs. Une gestion et une surveillance efficaces des plaintes des consommateurs sont des éléments importants de la première ligne de défense. Les lacunes des politiques, des procédures et des systèmes de traitement des plaintes limitent la capacité des banques de surveiller et de répertorier adéquatement les plaintes, et d’en faire rapport à la direction, au conseil d’administration et à l’ACFC.

Vue d'ensemble

À l’heure actuelle, les banques règlent de 90 à 95 % des plaintes des consommateurs au premier point de contact, dans le souci d’assurer un bon service à la clientèle. Or, les plaintes résolues à ce stade ne sont généralement pas consignées dans une base de données centrale, en raison de contraintes technologiques ou de politiques et procédures inadéquates. C’est ce qui explique que les banques n’ont qu’un portrait partiel de la situation à l’égard des plaintes et des problèmes des consommateurs et sont moins à même de déceler les tendances.

La plupart des banques reconnaissent la nécessité d’accroître leur connaissance de ces plaintes. Elles explorent des pistes de solution qui leur permettraient d’obtenir de meilleures données de la part des employés qui traitent et règlent couramment ces plaintes.

Transmission des plaintes aux échelons supérieurs et rapports sur les plaintes

Étant donné que de 90 à 95 % des plaintes de consommateurs sont résolues au premier point de contact, les consommateurs ne transmettent qu’un faible pourcentage des plaintes aux échelons supérieurs, en partie parce que le processus de transmission à un échelon supérieur est souvent lourd et complexe. Par ailleurs, même lorsqu’une plainte est transmise à un niveau hiérarchique supérieur, il est possible qu’elle soit renvoyée au premier point de contact pour y être réglée et qu’elle ne soit pas consignée de façon à permettre une analyse des tendances.

De plus, les ressources en place sont limitées pour faire le suivi des plaintes transmises aux échelons supérieurs et assurer leur classement adéquat. Par conséquent, il est difficile de tirer des conclusions du faible nombre de plaintes transmises aux échelons supérieurs et de déterminer si elles sont représentatives de l’expérience des consommateurs en général. Seules les plaintes transmises aux échelons supérieurs sont portées à l’attention des conseils d’administration et des cadres supérieurs, et le faible nombre de ces plaintes pourrait créer un faux sentiment de confiance quant à la satisfaction de la clientèle à l’égard des pratiques de vente.

Les banques sont tenues de faire rapport à l’ACFC des plaintes transmises à un échelon supérieur. La lacune susmentionnée quant à ce type de plaintes fait aussi en sorte que l’ACFC ne dispose pas de toute l’information nécessaire pour surveiller les risques liés aux pratiques de vente.

Enquêtes

L’Agence a relevé de nombreux cas où les banques avaient enquêté sur des plaintes de consommateurs de façon inadéquate, particulièrement lorsque ces plaintes avaient été résolues au premier point de contact. Il est mis fin au processus d’enquête dès qu’une plainte est résolue, et les banques s’efforcent rarement d’en cerner les causes fondamentales. Par exemple, si un consommateur se plaint de frais de service dont il n’a pas été avisé, l’employé chargé de régler la plainte peut annuler les frais pour le satisfaire, sans chercher pour autant à savoir s’il y a eu manquement aux obligations en matière de divulgation.

Lorsque les banques n’enquêtent pas sur les causes fondamentales des plaintes, elles compromettent leur capacité de déterminer et d’atténuer les risques liés aux pratiques de vente.

Deuxième ligne de défense : la vérification de la conformité et la gestion des risques

Les banques disposent de fonctions de gestion des risques et de vérification de la conformité qui visent à assurer que la première ligne de défense en place est adéquatement conçue et fonctionne comme prévu. La deuxième ligne de défense comprend une fonction de gestion des risques permettant de surveiller la mise en œuvre de pratiques efficaces de gestion des risques par les responsables de la gestion opérationnelle, ainsi qu’une fonction de vérification de la conformité permettant de s’assurer que la banque se conforme aux lois et aux règlements applicables.

Dans les services bancaires de détail, la surveillance exercée à l’égard de la protection des consommateurs par les fonctions de vérification de la conformité et de gestion des risques n’est pas suffisante par rapport au niveau de surveillance qui est assuré à l’égard d’autres secteurs d’activité bancaire, comme la vente de produits de placement. Le personnel affecté à la gestion des risques et à la vérification de la conformité vérifie si la banque respecte ses obligations en matière de pratiques commerciales. Cependant, il ne surveille pas adéquatement les situations de vente abusive ni les risques de mauvais résultats pour les consommateurs associés aux pratiques de vente utilisées dans les services bancaires de détail.

Le personnel affecté à la gestion des risques et à la vérification de la conformité surveille l’imposition des amendes et les autres activités d’application de la loi qui peuvent donner une indication du niveau de risque associé à la violation des obligations en matière de pratiques commerciales. Dans le passé, ce risque a été jugé faible; par conséquent, il a fait l’objet d’une surveillance moins rigoureuse. À la suite des reportages concernant Wells Fargo et des allégations parues dans les médias canadiens, les banques ont élevé la cote de risque associée aux obligations liées à l’obtention du consentement exprès des consommateurs.

Les banques ont connu une croissance rapide, mais leurs investissements dans les fonctions de contrôle ne semblent pas avoir suivi le rythme. Le manque de personnel et le sous investissement dans le domaine de la technologie et des systèmes nuisent à la capacité des fonctions de vérification de la conformité et de gestion des risques d’assurer une surveillance efficace des risques liés aux pratiques de vente. Par exemple, dans ce contexte où les ressources manquent, il peut être difficile de se tenir au fait des nouvelles exigences réglementaires et de s’y conformer, d’examiner les nouveaux produits et stratégies d’affaires, et de superviser les mesures prises dans les secteurs d’activité pour respecter les obligations en matière de pratiques commerciales.

De façon générale, les rapports sur la conformité présentés aux conseils d’administration ne contiennent pas assez d’information détaillée sur les risques liés aux pratiques de vente. Plus particulièrement, ces rapports ne comprennent généralement pas d’analyse des causes fondamentales des tendances et des problèmes. Ils ne contiennent généralement pas non plus d’information sur la mise en œuvre des plans d’action visant les pratiques de vente. Les rapports sur la gestion des risques ne mettent pas adéquatement en évidence les principaux risques liés aux pratiques de vente, tels que la vente abusive et les manquements aux obligations en matière de pratiques commerciales.

Troisième ligne de défense : la vérification interne

Le service de vérification interne fournit au comité de vérification du conseil d’administration et à la haute direction, en toute indépendance, une assurance concernant la qualité et l’efficacité de l’ensemble des contrôles internes, de la gestion des risques et du cadre de gouvernance de la banque. Les conclusions du service de vérification interne doivent reposer sur l’évaluation des principaux contrôles et processus appliqués par les secteurs d’activité et les fonctions de soutien relativement aux pratiques de vente.

Les banques invoquent la culture organisationnelle comme un contrôle crucial permettant d’atténuer les risques associés aux pratiques de vente. Cependant, l’ACFC n’a pas trouvé d’éléments probants indiquant que les services de vérification interne avaient évalué la mesure dans laquelle la culture atténue les risques liés aux pratiques de vente. Étant donné le rôle de la vérification interne, certaines banques ont convenu de la possibilité de demander au service de vérification interne d’examiner la culture organisationnelle.

La portée de la vérification interne des services bancaires de détail s’étend à certaines obligations en matière de pratiques commerciales, mais les risques inhérents sont jugés faibles et les vérifications sont peu fréquentes et peu rigoureuses. Comme dans le cas de la deuxième ligne de défense, les responsables de la vérification interne ont relevé la cote attribuée aux risques liés aux pratiques de vente dans la foulée de l’affaire Wells Fargo et des allégations parues dans les médias canadiens. Cela dit, la vérification portant sur le respect des obligations en matière de pratiques commerciales des banques demeure lacunaire. Par exemple, l’ACFC a constaté que les services de vérification interne ne menaient pas d’examen des contrôles en place pour veiller à ce que la communication visant l’obtention du consentement soit claire, simple et n’induise pas en erreur.

En règle générale, les pratiques de vente n’ont pas été définies comme une unité de vérification distincte par les services de vérification interne. À la suite de reportages dans les médias qui soulevaient des préoccupations relativement aux pratiques de vente, les services de vérification interne des banques canadiennes ont passé en revue les vérifications réalisées antérieurement pour faire ressortir les éléments qui touchaient aux pratiques de vente. Il est à noter toutefois que ces vérifications n’étaient pas centrées sur les pratiques de vente et que leur examen des risques liés aux pratiques de vente n’était pas suffisamment détaillé.

Les ressources humaines en tant que fonction de contrôle

Les services des ressources humaines des banques ne tirent pas adéquatement parti des données disponibles et des outils existants qui pourraient les éclairer sur les pratiques de vente, comme les sondages sur la mobilisation des employés, les entrevues de fin d’emploi, les données sur l’attrition, les taux de roulement du personnel et les activités de surveillance de la conduite des employés.

L’ACFC a constaté que les programmes d’intégration et de formation du personnel ne traitaient pas adéquatement des risques associés aux obligations en matière de pratiques commerciales ni à la vente abusive. Certaines banques reconnaissent qu’il existe des possibilités d’améliorer l’uniformité du processus disciplinaire suivi lorsque des problèmes liés aux pratiques de vente sont repérés. Les rapports présentés à la haute direction et aux conseils d’administration par les services des ressources humaines ne contiennent pas les détails et les éléments contextuels nécessaires pour appuyer la surveillance des pratiques de vente.

L’ACFC a aussi conclu que les banques ne disposent pas du personnel, de la technologie ni du soutien opérationnel requis pour permettre aux services des ressources humaines de surveiller et d’atténuer les risques liés aux pratiques de vente.

Conclusions et perspectives d’avenir

Les constatations du présent examen sont bien résumées par l’énoncé suivant tiré des principes de haut niveau de l’OCDE et du G20 sur la protection des consommateurs de produits et de services financiers :

[TRADUCTION]
L’évolution rapide des marchés financiers et l’innovation, l’absence de réglementation ou le caractère inadéquat de la réglementation ou de la supervision des fournisseurs de services financiers et le piètre alignement des mesures incitatives en vigueur peuvent accroître le risque que les consommateurs soient victimes de fraude, d’abus ou d’inconduiteNote de bas de page 5 .

L’ACFC a constaté que la culture des services bancaires de détail est axée sur les ventes. Les programmes de gestion du rendement des banques, plus particulièrement la rémunération pécuniaire et les incitatifs non pécuniaires offerts aux employés, comptent pour beaucoup dans le maintien de cette culture. Un tel environnement a pour effet d’accroître le risque de vente abusive de produits et de services qui sont incompatibles avec les besoins et la situation financière des consommateurs, ainsi que le risque de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales. Ces risques sont particulièrement importants dans les situations qui font intervenir les spécialistes en prêts hypothécaires itinérants et les vendeurs tiers ainsi que pour les pratiques et produits comme la vente croisée et les produits d’assurance crédit.

L’ACFC a constaté que les cadres de gouvernance et les mécanismes de contrôle des banques ne permettent pas de gérer ni d’atténuer efficacement les risques inhérents à des cultures aussi fortement axées sur les ventes. Les responsables de la gestion opérationnelle, de la vérification de la conformité et de la gestion des risques ainsi que les services de vérification interne et des ressources humaines ne disposent pas des cadres nécessaires pour gérer adéquatement les risques liés aux pratiques de vente. L’adoption de cadres de gouvernance rigoureux prévoyant une surveillance accrue de la part des conseils d’administration et de la haute direction renforcerait la capacité des banques de gérer les risques liés aux pratiques de vente.

Au cours de l’examen, l’ACFC a cerné un certain nombre de mesures qui permettraient de renforcer la protection des consommateurs de produits et de services financiers et entraîneraient une meilleure harmonisation avec les principes de l’OCDE et du G20.

Améliorations visant la gestion par les banques des risques liés aux pratiques de vente

Pour améliorer la gestion par les banques des risques liés aux pratiques de vente, l’ACFC recommande que les banques prennent les mesures suivantes :

Améliorations visant l’ACFC

L’ACFC adoptera un cadre de surveillance modernisé qui lui permettra de s'assurer de manière proactive que les banques ont mis en place les cadres, les politiques, les procédures et les processus qui s’imposent pour atténuer efficacement les risques de vente abusive et de manquement aux obligations en matière de pratiques commerciales.

L’ACFC augmentera les ressources affectées à ses fonctions de surveillance et d’application de la loi.

L’ACFC améliorera son matériel éducatif pour mieux renseigner les consommateurs sur les produits et services financiers ainsi que sur leurs droits et responsabilités, de même que sur l’importance de poser les bonnes questions au personnel des banques, particulièrement au moment d’acheter des produits financiers. Ces efforts aideront les consommateurs à prendre des décisions financières éclairées et leur permettront peut-être d’éviter certains préjudices.

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